dimanche 9 septembre 2018

Mémoires de José Bartel (Partie 6)

Musicien, chef d'orchestre, directeur artistique, comédien, chanteur, etc. José Bartel (voix de Guy dans Les Parapluies de Cherbourg et du Roi Louie dans Le Livre de la Jungle) était un artiste à multiples facettes. 
Quelques mois avant sa disparition en 2010, il avait fini d'écrire ses souvenirs (intitulés: Faire comme si... Ou l'enrichissante mais peu lucrative balade d'un mec qui avait les dents trop courtes), que je vous propose de découvrir ici en exclusivité sous la forme d'un "feuilleton", publié avec l'aimable autorisation de sa veuve, Norma, et de son fils, David.

Dans le précédent épisode (Partie 5), José raconte l'enregistrement des Parapluies de Cherbourg, ses débuts de chanteur soliste et la création du groupe Jupiter Sunset...


DAVID…

Lola et moi sommes installés à La Celle St Cloud depuis peu lorsque le 31 décembre 1965 naîtra notre fils, David. Comment rêver mieux pour débuter l’année, que d’aborder l’avenir béatement installés sur notre petit nuage bleu ? Particulièrement bouleversé par cette naissance, je ne puis malgré tout m’empêcher d’espérer que jamais mon fils n’aura à ressentir lui aussi, le sentiment de frustration qui me suivra durant tant d’années après la séparation de mes propres parents. Une certitude cependant: quoiqu’il advienne, si plus tard, au cours de sa vie d’homme, d’éventuelles épreuves s’avèrent pénibles à surmonter ou plus simplement, s’il ressent le besoin de donner ou recevoir de la tendresse, comme ça, sans arrières pensées, il est important que David sache que toujours, il trouvera auprès de l’un ou l’autre d’entre nous, la compréhension, l’amour et le réconfort …

Aujourd’hui, bien que depuis longtemps déjà Lola et moi ayons choisi d’autres chemins, l’affection comme le respect n’ont en rien changé et grâce à Dieu, nous sommes toujours là. Alors si c’est O.K. avec « Lui », le Grand, là Haut,  nous tâcherons de rester disponibles le plus longtemps possible !



LA COMPAGNIE

Trop de responsabilités. Trop de problèmes pour renouveler le répertoire et faire accepter par l’équipe la nécessité de répéter de temps à autres. Trop d’argent à sortir pour renouveler (à mon compte, bien sûr) la sono ou les costumes et surtout, exaspéré d’être constamment forcé d’évoquer le respect des engagements pris par contrat. Quant ce n’est pas la nécessité d’également rappeler de temps à autres, la considération due au public. Un public qui progressivement, semble préférer les discothèques à la musique « live ». D’autant plus que mis à part l’effet de mode, cette désaffection pourrait aussi partiellement s’expliquer par l’attitude sur scène de certains des éléments de l’équipe musicale.
Comment ne pas comprendre par exemple, qu’il soit assez déplaisant pour les clients d’un night-club en principe destiné au divertissement et à la danse, d’être regardés de travers par un ou deux d’entre nous qui ostensiblement,  souhaiteraient voir se terminer la soirée au plus vite. Impatients qu’ils sont d’aller "faire le bœuf" avec les copains puis  se taper des spaghettis et boire un dernier pot en parlant de « vraie musique » avant d’aller se coucher.  
Est-ce la déception ?  Une certaine lassitude de la routine ?  Qu’importe, ma décision  est prise : La saison d’été 1967 au Casino du Palm Beach de Cannes sera ma dernière en tant que chef d’orchestre. D’autant plus que depuis quelques temps déjà, j’ai le désagréable sentiment de faire du sur place. Alors, il va falloir que ça bouge. 
Peu après la rentrée, c’était effectivement chose faite et sans que j’en aie vraiment conscience, une direction inattendue s’imposait dans mon choix de vie. 

Du statut de chanteur, musicien, compositeur, arrangeur, orchestrateur je passais en un temps record, à celui de responsable tout court en acceptant le poste de directeur artistique qui m’était offert par « La Compagnie », une nouvelle société d’édition et de production dirigée par un sympathique, ambitieux et compétent entrepreneur : Norbert Saada. Un ancien collaborateur et à présent, concurrent de l’homme au cigare et au costume blanc agrémenté de l’immuable bleuet à la boutonnière : L’importantissime industriel du disque Eddie Barclay ! 

Quant à mes nouvelles fonctions, mis à part la supervision des enregistrements et le suivi d’un certain nombre de  productions, mon nouveau job consistera également à collaborer avec la branche « édition » de la société. L’objectif étant d’augmenter l’importance et la valeur commerciale de notre catalogue. C’est en particulier par le biais de contacts avec les artistes, les compositeurs et les auteurs en vue du moment  que pour ma part,  j’étais censé acquérir le plus d’exclusivités possibles en droits d’édition et d’enregistrement. Une tâche  grandement facilitée sur le plan « relations publiques »  par le fait que des artistes comme Hugues Aufray, France Gall, Gilles Dreu ou Nicole Croisille,  étaient déjà pour la plupart, associés à « La Compagnie ». D’autre part,  s’agissant de relations publiques (donc de la promotion de nos disques auprès des programmateurs- radios et télévisions.) cette expérience a indiscutablement constitué pour moi une étape importante. Une expérience durant laquelle je me familiariserai aussi bien avec l’édition musicale qu’avec les plus récentes techniques d’enregistrement. Ce qui sera plus qu’utile pour la suite de ma carrière, à savoir : la communication , le marketing et la gestion de société.

Egalement c’est grâce à ce bout de chemin parcouru avec La Compagnie qu’il me sera donné l’occasion de croiser des personnages hors du commun et aussi divers que Lucien Morisse, Jacques Paoli, Hubert Wayaffe, Philippe Bouvard, Jean Bernard Hebey, Pierre Bouteiller, José Arthur, Jacques Martin, Jean Claude Laval, Jean Pierre Foucault, Michel Denisot, Pierre Lescure… L’incontournable et flamboyant Eddie Baclay étant bien sûr, à inclure lui aussi dans cette liste ! Enfin, un autre privilège particulièrement appréciable me sera accordé : Pouvoir apprécier dans les conditions les plus propices, le talent de grands artistes et créateurs. Comme par exemple Gilbert Bécaud, Jacques Brel, Raymond Devos, Eddy Mitchell, Claude Nougaro, Dalida, Serge Gainsbourg, Joe Dassin, Henri Salvador, Claude François, Mort Schuman, Eddy Marnay, Jean-Pierre Bourtayre, Michel Magne, Daniel Balavoine, Nino Ferrer et bien d’autres encore ..  Rapidement, il m’a fallu admettre qu’à présent, je me trouvai  dans une galaxie radicalement  différente de celle qui fut la mienne depuis tant d’années. Un système totalement commercialisé et déjà formaté ! Ou les radios F.M. et la télévision menaient un jeu à l’intérieur duquel, la musique et la création artistique demeuraient tout de même indispensables. Mais uniquement en tant qu’éléments fonctionnels nécessaires à la compréhension supposée des goûts du public. Ou si possible, la manipulation de celui-ci. Compte tenu du nombre d’options offertes  par l’évolution du métier, il m’apparut évident qu’à présent,  la voie à suivre était toute tracée.  Je continuerai dans le show-biz « nouvelle version » jusqu’à ce qu’arrive le moment de créer (pourquoi pas) mon propre label.



BIENVENUE A CUBA... COMPANERO ! 

1968 - Cette année là, j’ai l’honneur de recevoir de l’Ambassade cubaine à Paris, l’invitation à participer en tant que chanteur et artiste français, au Festival mondial de la Jeunesse de Varadero. Une occasion formidable d’enfin connaître - au terme toutefois, d’un voyage pour le moins louvoyant - le pays de mes ancêtres paternels. S’agissant de « voyage louvoyant », il faut en effet savoir que fin 68, pour se rendre à Cuba , on devait tout d’abord embarquer sur un vol Air France de Paris à Prague. Ensuite, après une escale d’un jour dans la capitale tchèque,- mais en vérité après deux jours de retard pour cause de réparations d’un turbo-propulseur défectueux – prendre le vol hebdomadaire de la Cubana de Aviacion pour rejoindre La Havane via  Shannon (Irlande) Gander (une partie du Canada), et de nouveau, un petit bout d’Atlantique car il était évidemment hors de question pour un avion cubain, de survoler le territoire américain. 
Comment ne pas être soulagés de pouvoir s’envoler hors de ce qui était alors le Rideau de fer ?  Même si paradoxalement, quitter Prague, ait pu au moment du départ, susciter une certaine frustration. Celle de n’avoir pu mieux connaître une si belle, mais en ces temps de guerre froide, si triste ville …
Dès notre arrivée à Cuba - la révolution et l’avènement du socialisme n’étant pas des événements si lointains- le contraste est cependant total. L’atmosphère change du tout au tout et la passerelle à peine descendue, l’ambiance générale se met instantanément au beau fixe. 
Le soleil bien sûr, mais aussi, la convivialité générée en permanence par la traditionnelle hospitalité cubaine. D’autant plus qu’en dépit des rumeurs de l’époque parlant de chape de plomb sur le pays, d’Etat policier et de « barbudos à la mine patibulaire »,  je dois reconnaître que rien de tout cela m’est apparu évident.  A moins que durant les périodes où seul et sans « guide-interprète- ange- gardien » je quittais l’hôtel Nacional où logeait la délégation française pour déambuler librement dans la ville,  quelque chose m’ait échappé. Mais non. Vraiment.  En toute honnêteté, le seul détail qui m’ait alors particulièrement frappé, c’est  que tout au long de mes balades dans les rues de la capitale cubaine, un nombre impressionnant de fenêtres et de balcons - y compris ceux en fer forgé du vieux Havane - diffusaient plein pot les principaux programmes F.M.de Floride ! Toutes portes -fenêtres grandes ouvertes et semble-t-il,  sans aucunes craintes de représailles.…
                                                                 
Mais je m’aperçois qu’il serait peut-être temps d’évoquer les circonstances ayant favorisé cette invitation officielle. Alors voilà : mon copain Ben (qui dirigeait alors l’orchestre de danse du Lido) était  littéralement fasciné par la « Musica Cubana ». Cette passion, lui ayant progressivement attiré - en tant qu’authentique spécialiste de cette musique - l’amitié et la considération de la communauté « habanera » de Paris, Ben finira par devenir l’un des familiers de la Résidence de l’Ambassadeur de Cuba en France. Une rare faveur qui pour Ben, à l’occasion d’un de ses fréquents entretiens à bâtons rompus avec le diplomate, eût pour conséquence de favoriser le déclenchement (involontaire ?) d’un processus exceptionnel me permettant d’enfin connaître mon lointain pays d’origine !
Effectivement, c’est au cours d’un dîner à la Résidence (le sujet de conversation portant sur les cubains de Paris) que Ben, probablement pour l’anecdote, évoque une amusante co-incidence : « Saviez-vous que dans le film « Les Parapluies de Cherbourg,  l’interprétation chantée du partenaire à l’écran de la jeune Catherine Deneuve a été assurée par un certain José Bartel ? Un français qui  se trouve être aussi … le petit fils du Général Quintin Bandéras ! »  
C’est ainsi que grâce à Ben, je me suis retrouvé quelques semaines plus tard, , intégré dans la délégation d’artistes chargés de représenter la France au Festival Mondial de la Jeunesse de Varadero à Cuba !
                                                              
Il est près de 22 heures, le Festival est déjà bien engagé. Et je me trouve dans les coulisses, prêt à passer. En dépit de mon air faussement calme,  je suis en vérité vert d’appréhension. Avec en plus le cœur qui bat la chamade et les mains moites du type dont ça va bientôt être le tour d’apporter à une manifestation de cette envergure, sa modeste participation. 
Puis c’est l‘annonce :  "De Francia …el nieto de Quintin Bandéras … José Bartel !"  
Une précision toutefois car il s’agit là d’un point de détail important. Un détail qui je pense, est susceptible de mieux expliquer l’incident qui va suivre : 
Par la presse, les officiels ou les organisateurs du Festival, le grand public est déjà informé des origines cubaines de l’artiste venu de France pour le Festival. En raison de quoi,  le soir de mon passage sur la scène du festival, un bouleversement émotionnel rare dans la vie d’un homme allait se manifester :
Je n’ai pas même le temps d’atteindre le micro, que le stade entier est debout et que s’élève une impressionnante et interminable ovation. Un accueil extraordinairement émouvant qui en fait, ne m’est pas véritablement destiné. En toute vraisemblance et ce n’est que Justice, cet hommage s’adresse bien sûr et surtout, au héros national qu’était mon grand-père : Le Général Quintin Bandéras. 
Les minutes passent et bien que le tonnerre continue,  es quatre-vingt musiciens du grand orchestre de la radio nationale attaquent enfin l’introduction de ma chanson. Mais je reste muet, foudroyé, incapable de sortir un son. Tant j’ai la gorge serrée et les yeux embrouillés de larmes. 
Un siècle passe, durant lequel, après avoir arrêté l’orchestre et m’être dominé le mieux possible, je suis finalement en mesure de reprendre et terminer ma prestation. Une prestation qui malgré  mon hébétude, semble avoir finalement été entendue et appréciée par le public. Il ne fait aucun doute que mon émotion la plus forte restera à jamais, le bonheur qui m’a été accordé cette nuit-là : Vivre un moment d’une incomparable intensité. Peut-on rêver meilleur retour aux sources ? Il serait superflu je pense - pour ne pas dire ingrat - d’espérer moissonner à nouveau de si émouvants souvenirs.  Mais tout a une fin. Le congé pris à la Compagnie arrive à son terme. Il va me falloir rentrer à Paris…. 

Dès mon retour à La Compagnie, le travail reprend donc de façon positive et sans a-coups. Sur le plan matériel également je n’ai pas à me plaindre car  l’écriture  de « jingles » publicitaires ou la post-synchronisation de films me fournissent à l’occasion, des compléments de salaire appréciables. Puis petit à petit, ça déraille.  Comme dit encore l’autre : « Tout a une fin, même les bonnes choses » ou encore, «  Après le soleil vient la pluie, etc» … Des poncifs usuels bien sûr mais le problème, c’est que ces citations ringardes vont bientôt devenir d’une cuisante actualité. Motif ? La Compagnie ayant sans crier gare fini par déposer son bilan, je me réveille une nouvelle fois sans job, sans salaire, et «cadre » de rien du tout. Conclusions ?  
Je vais devoir à nouveau décrocher le téléphone et pousser les feux sur l’écriture d’arrangements et d’orchestrations. Décrocher des séances d’enregistrement comme choriste, ou le doublage de films musicaux américains dont la version française du Livre de la Jungle vu par Disney. Quitte à me transformer en Roi des singes pour l’occasion. ( ! )  
C’est dire qu’à part une reprise accélérée d’activités occasionnelles, il m’était alors impossible de sérieusement imaginer jusqu’où ces pérégrinations me conduiraient. Et pourtant, succédant à une série de boulots intermittents entrecoupés d’expériences musicales peu rémunératrices - malgré Jupiter Sunset - le miracle s’est produit .  
En effet, grâce à l’aide inespérée et le support d’un ami conseiller juridique, j’ai finalement réussi, par une belle journée du printemps 1971, a réunir les conditions qui permettront la constitution de ma propre société d’édition : « Grenadine Music ». Ouf !


José Bartel chante "Etre un homme comme vous" dans Le Livre de la Jungle (1968)


GRENADINE MUSIC

Dans la mesure du possible, la collaboration d’une « locomotive » - accompagnée de l’exclusivité éditoriale de tout ou partie de son catalogue -  peut s’avérer très utile au démarrage d’une édition embryonnaire telle que Grenadine Music. Le terme de « locomotive »  étant bien entendu utilisé ici, comme synonyme de vedette reconnue susceptible (en fonction de sa popularité et de la régularité de ses ventes) de « tirer » vers le succès une nouvelle société de production. Par conséquent, pour nous, la chasse était ouverte. A savoir : la course intensive au placement des titres composant notre catalogue avec pour finalité, leur enregistrement par des artistes déjà célèbres. Ces chansons étant comme il se doit, généralement concoctées sur mesures par les auteurs et compositeurs adéquats. Mais il faut malgré tout reconnaître que le choix des  Stars se portait plutôt sur les « tubes »  confirmés  (ou « covers »)  acquis par la branche internationale de Grenadine Music pour traduction et promotion en France. S’agissant de la rentabilité de la version française de ces titres (presque toujours américains ou anglais à quelques exceptions près) force est d’admettre que le fait de s’être déjà confirmés comme de gros succès commerciaux dans leur pays respectifs, rendait ces tires indéniablement  plus attractifs aux producteurs français. Comme par exemple le tube espagnol : Borriquito. Le pari que nous avions pris en sortant la version originale de ce titre se confirmera en opération réussie car « Borriquito » connut en 1971 un appréciable succès en France. Compte tenu de ces positifs mais modestes débuts dans la jungle de l’édition et du show-biz, pouvions-nous interpréter notre premier « succès » comme un signe d’encouragement ?  Certainement. Mais ce ne pouvait être que temporaire puisque très vite, afin de vraiment stabiliser financièrement notre société d’édition et faire progresser notre chiffre d’affaires, il est apparu incontournable de tout d’abord  affirmer en premier, notre image de producteurs discographiques. Faute de quoi,  comment rentabiliser le catalogue et garantir la viabilité de Grenadine Music sans promouvoir de nouveaux artistes ? Et pour cela, assumer leurs frais de production et de démarrage ?  Pour faire tourner la boîte, nous ne pouvions plus ne compter que sur l’hypothétique enregistrement d’un de nos titres par une vedette établie. Mais plutôt, investir d’avantage dans la production de disques portant notre propre label.       

Une évidence qui petit à petit fera son chemin et nous mènera finalement à la création des disques Agave destinés à la diffusion et la commercialisation de nos propres productions. Suite à ces ajustements, les affaires commenceront à évoluer favorablement pour Grenadine Music. Quoiqu’en ce qui concerne les disques Agave et l’accueil positif de la profession et du public, la réussite commerciale permanente ne sera, elle, jamais au rendez-vous. Malgré tout, il m’arrive aujourd’hui encore, de me remémorer sans aigreur aucune mais plutôt avec fierté, quelques unes de nos productions d’alors. Entre autres, Magic Garden, un 33 tours instrumental  magnifique enregistré par l’exceptionnel harmoniciste Claude Garden, soutenu pour les arrangements, par Michel Colombier et Vladimir Cosma. Je pense aussi à la bande originale du film de Charles Matton L’Italien des Roses lauréat du Prix de la Critique 72 à Venise. Et tout spécialement, l’excellente qualité musicale des deux albums conçus et réalisés par le groupe Nemo…


Nemo : Doin' nuthin' (1974)

A la différence d’autres formations françaises de tendances diverses - comme Magnum ou Gold par exemple - Nemo se singularisait par l’option que le groupe avait choisi pour s’exprimer. C’est-à-dire baser son répertoire sur des créations originales comportant des textes anglais et interprétées dans cette langue pratiquement sans accent, ce qui rendait Nemo beaucoup plus à même d’accrocher un public international et pour Grenadine Music, présentait l’avantage d’exporter leur album dans les conditions les plus favorables à une  possible distribution à l’étranger. 
Quelle ne fut donc pas ma joie après le superbe travail effectué par le groupe, d’apprendre qu‘Herb Alpert à Los Angeles et Nesuhi Ertegün (Atlantic Records) à New York, très favorablement impressionnés par la musique des « frenchies », étaient plus que partants pour sortir le disque! A la condition toutefois – probablement pour la touche « exotique » ? - que  Nemo consente à  inclure dans l’album au moins un titre en français. 
Sachant d’autant plus qu’à la même époque,  « Kraftwerk » (un groupe européen venu d’Allemagne) faisait un carton aux  U.S.A. avec son single : « Autobahn »,  tous les espoir étaient permis pour Nemo.  Or il se trouve qu’à mon retour des Etats Unis, ce que je pensais être « la » bonne nouvelle du siècle, s’est transformé en douche froide... En effet, la majorité de l’équipe fut intraitable :  Afin de maintenir la continuité dans le style et la couleur sonore du groupe, il était hors de question d’insérer dans l’album un titre chanté dans une langue autre que l’anglais. Alors … ce serait :  Non ! 
                                              
Même si cela devait compromettre la signature d’un contrat U.S. Je comprends et respecte  évidemment leur décision tout en déplorant malgré tout, une intransigeance qui à mon sens n’avait pas lieu d’être… D’évidence, il devint alors inévitable qu’en raison de positions et d’exigences de ce type, nos projets et nos rêves de carrière internationale commencent par s’estomper pour ensuite - mis à part notre amitié- disparaître complètement. C’est bien dommage…
Enfin, la vie continue et sur le plan boulot, je n’ai pas à me plaindre . Quoique pour ce qui concerne ma vie privée, le ciel se soit passablement assombri car depuis des mois ce ne sont qu’inquiétude et morosité qui m’attendent chaque matin... Entre Lola et moi tout va mal et nos relations se sont détériorées au point qu’à présent, c’est l’orage permanent. Va-t-il nous falloir bientôt envisager séparation ? J’ai bien peur que oui… 

David, lui, a bien sûr tout compris. Il est bouleversé de nous voir constamment nous déchirer.  Il sait aussi, heureusement, combien nous l’aimons et qu’il ne se retrouvera  jamais seul, quoiqu’il arrive. Malgré tout, avec une maturité inattendue chez un enfant de son âge, il essaie à sa façon de nous aider à surmonter l’épreuve et renoncer à une séparation qui hélas, ne saurait tarder…Mais en vain..

Partie 1 (enfance, Marseille), Partie 2 (débuts avec Aimé Barelli, caves de jazz à Saint-Germain-des-Prés), Partie 3 (Monte-Carlo), Partie 4 (Algérie, retour à Paris, Istamboul), Partie 5 (Parapluies de Cherbourg, Jupiter Sunset), Partie 6 (La Compagnie, voyage à Cuba, Grenadine Music), Partie 7 (La Comédie-Française, Monte-Carlo / S.B.M.)... (A suivre)

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mercredi 5 septembre 2018

Jacques Brel enregistrant "Fils de" en 1967



"Je suis partisan du direct, il y a plus d'ambiance quand ça se fait tous ensemble: les musiciens et le monsieur qui chante".






Jacques Brel enregistrant "Fils de" le 2 janvier 1967 au studio Hoche (Barclay). François Rauber dirige l'orchestre, Lionel Gali est le premier violon. On peut reconnaître parmi les saxophonistes les frères Joseph et Marcel Hrasko, et aux ondes Martenot Sylvette Allart (sur laquelle nous n'avons aucune information, aucune photo, etc. Si sa famille ou ses amis me lisent, qu'ils n'hésitent pas à me contacter à danslombredesstudios@gmail.com), qui avec Janine de Waleyne faisait partie des ondistes les plus demandées à l'époque.
En cabine, l'ingénieur du son Gérard Lehner (décédé en 2010) qui travaille sur magnétophones Ampex 2 pistes et 3 pistes et Studer 4 pistes, le chef d'orchestre Pierre Chaillé (directeur du studio Hoche), Jean Fernandez (directeur artistique pour Brel et Ferré) et Georges Pasquier dit "Jojo" (secrétaire de Jacques Brel).




Pendant l'interview de Jacques Brel par Michel Drucker, l'orchestre répète "Mon enfance".

(Remerciements à Gérard Delassus, Jean-Claude Briodin, Sébastien Merlin et Alaric Perrolier)

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