vendredi 20 novembre 2015

Adieu André Valmy...

C’est avec une certaine tristesse que j’ai appris hier par sa famille le décès d’André Valmy mercredi 18 novembre à l’âge de 96 ans. André était une grande « gueule » du cinéma et de la télévision et une inoubliable voix du doublage français (Walter Matthau, Rod Steiger, George C. Scott, etc.). Accompagné par mon amie Christine Maline (fille du regretté Georges Aminel) j’avais eu le bonheur de déjeuner chez lui à Nice l’année dernière et de l’interroger sur sa carrière.

5 août 2014. Accueillis par la famille d’André Valmy dans le salon de son appartement niçois, nous attendons l’un des grands doyens du cinéma. Il arrive en chantant du Maurice Chevalier, œil et sourire espiègles. Une fois les présentations faites (présentations qui étaient pour Christine de lointaines retrouvailles, car elle l’avait connu étant enfant, son père et lui étant très amis), André nous ouvre en continu pendant presque trois heures le livre de ses souvenirs, parfois digressifs mais toujours vifs et précis.

« Je suis né à Paris en 1919. J’étais un vrai Montmartrois.  Montmartre à l’époque  c’était la capitale du monde, dès que vous vous trouviez dans le IXème arrondissement c’était déjà la province. »
Adolescent passionné d'ébénisterie et de peinture, André étudie aux Arts Déco. C’est un copain de collège qui le traîne un jour au Cours Mihalesco, rue de Douai. André ne veut absolument pas devenir comédien, mais Mihalesco insiste et lui propose même de venir gratuitement. Il intègre ce cours et y reste deux ou trois ans, aux côtés notamment de René Arrieu.
« Je suis donc devenu comédien absolument par hasard. Mon père était concierge au Théâtre Antoine –d’où mon deuxième prénom- mais ne voulait pas de comédiens dans la famille. Gaby Morlay qui passait en vedette au théâtre lui avait proposé de m’aider mais il avait refusé ».
Lors de l’une de ses premières participations artistiques, André Dugenet change de nom. « On m’a demandé comment je m’appelais. Je trouvais que Dugenet était un nom de vieux con, alors j’ai dit au hasard « Valmy » car j’étais passionné par l’Histoire. ».  « J’ai même mon quai » ajoute-t-il avec malice.

A. Valmy, jeune élève au Cours Mihalesco
Repéré lors d’une audition du Cours Mihalesco devant des professionnels, il tourne à la piscine de la Jonquière (Paris) le rôle d’un juif assassinant un officier allemand dans le film Mein Kampf, mes crimes (1940), pamphlet anti-Hitler qui sort peu de temps avant l’invasion allemande.
Au début de la guerre, André se marie avec Lorette Gallant, jeune comédienne qui est peut-être l’une des toutes premières « speakerines » de l’histoire de la télévision française car elle présentait cette invention lors de l’Exposition universelle de 1937. « Nous nous sommes mariés sous Pétain, donc sous l’Etat Français. Cinq ou six ans plus tard, après-guerre, je suis allé voir l’adjointe au maire et lui ai dit « Je veux être marié sous la République » ».

En 1944, il va voir René Simon et lui demande de l’aider à passer le concours d’entrée du Conservatoire qui a lieu quelques semaines plus tard, travaille L’école des femmes et Tartuffe. Il est admis comme auditeur et y reste trois mois. « On m’a proposé d’entrer au Théâtre de l’Odéon et au TNP mais j’ai refusé, pas pour rester « indépendant » mais parce que j’étais dépendant à une autre vie. »
Il fréquente le groupe Octobre : Yves Montand, Simone Signoret, et Gérard Philipe, avec qui il tourne dans la baie de Somme dans Une si jolie petite plage (1949) et qui devient l’un de ses meilleurs amis.
« Je suis venu à son chevet alors qu’il était mourant après avoir chopé sa maladie au Mexique. Quand il est mort nous nous sommes recueillis auprès de lui. Sa femme ne voulait pas qu’on sache qu’il était enterré dans le costume du Cid. Dans la chambre on avait piqué un mec qui essayait de prendre une photo, et on l’avait foutu dehors. En bas de chez lui il y avait un bar. Je vois Maurice Herzog qui me demande « Alors, il était dans le costume du Cid ?  Tu sais que si tu arrives à prendre une photo comme ça, ça vaut un million ! » Je lui ai répondu « Ne compte pas sur moi ». »

André Valmy, joue beaucoup au théâtre, pour les plus grands metteurs en scène (Raymond Rouleau, Jean-Louis Barrault, Jean Vilar).  Son meilleur souvenir : Antigone d’Anouilh au Théâtre de l’Atelier. « C’était intéressant, et puis c’est là que j’ai appris que je venais d’avoir une petite fille. »

Il se considère plutôt comme un acteur instinctif : « J’avais eu un prix, la Sirène d’or (Prix international d'interprétation), au festival de Monte-Carlo des mains de Grace Kelly et du Prince Rainier pour La Belle Nivernaise que j'avais tournée avec Rosy Varte. Le soir au théâtre, mon copain William Sabatier avait noté sur le tableau de service : « Valmy, le con d’or déplumé ». J’ai toujours eu l’air d’un con, je ne raisonnais jamais comme un acteur intelligent, une fois j’en ai parlé à Simone Signoret, elle m’a dit « Du moment que tu t’en aperçois ». »
A propos de notre ami William, André raconte : « Il avait créé Rhinocéros de Ionesco. Un jour, son imprésario l’appelle : « Dites-moi, Sabatier, vous êtes spécialiste des rôles d’animaux ? » ».

Au cinéma, il joue le patron de pêche Le Guellec dans Si tous les gars du monde (1956), tourné en studio mais aussi en bateau, au large pour ne pas qu’on voie la côte. Outre sa première réplique de tournage (« Occupe-toi de ton treuil ! ») les anecdotes ne manquent pas.
« Lorsque nous sommes partis pour la première fois en mer, un comédien qui jouait un matelot a dit « Le premier qui dégueule paye son verre »… et c’est lui qui a payé ! ». André tient bon, et c’est en rentrant qu’il a le mal de terre. « On puait tout le temps le poisson. Un jour on tournait en studio. Les marins triaient le poisson sauf qu’avec la chaleur les ventres étaient gonflés et éclataient, ils ont dû prendre du poisson  plus frais. »
Sur le bateau, les conditions sont difficiles, mais heureusement l’humour est au rendez-vous. « Un jour, l’ingénieur du son demande qu’on coupe le moteur pour capter le son des mouettes. Evidemment quand le moteur s’éteint, les mouettes se barrent. Et là on l'entend crier : « Revenez, connasses ! » »
André garde aussi un souvenir ému de la fois où ils ont hissé pour le tournage des signaux de détresse et qu’un bateau s’est détourné pour leur porter secours.

En dehors de ce rôle marquant (mais son meilleur souvenir de tournage est Les démons de l’aube avec Georges Marchal et Jacques Dynam), André enchaîne les rôles de flics et de gangsters pour la télévision et le cinéma (Mauricet dans Le Gorille vous salue bien avec Lino Ventura, Lucas dans Maigret tend un piège avec Jean Gabin). A propos de Gabin: « On attendait en studio dans une espèce de hangar et Gabin me dit « -Mais tu es marié toi ? » «- Oui » « -T’as des gosses ?» « -Deux » « -Moi aussi. Ca coûte cher » ».
André Valmy côtoie tous les grands personnages de cette époque comme Julien Carette. « Dans Une si jolie petite plage, on avait laissé Carette faire un tour lors d’une pause, et il s’était mis à faire tous les bistrots à trente kilomètres à la ronde. Il mettait un temps fou à revenir. On l’avait retrouvé en train d’embêter des religieuses « Vous allez vous faire enculer, ma sœur ! ». Il aimait faire des « tartines » aux prêtres. »

Chez André Valmy, cinéma et vie, fiction et réalité, se mélangent toujours dans ses anecdotes… Dans La Belle Nivernaise, il incarne le patron de la péniche éponyme. Habillé de façon miteuse pour le rôle, lors d'une pause pendant le tournage un autre pénichier s'approche de lui et lui dit "Toi t’es vraiment un gros dégueulasse, tu pourrais l’entretenir un peu… ta péniche crasseuse !"
Pour ce même tournage: « A la pause déjeuner, en costume, je trouve enfin un resto. Il n’y avait pas un chat. Je dis « Y a quelqu’un ? ». Le restaurateur arrive stupéfait « -C’est pourquoi ? » « -Déjeuner » «-Vous avez de l’argent ?» ».
Une autre fois, habillé en douanier belge avec son copain Yves Deniaud pour un tournage, il passe la frontière dans une 2 CV immatriculée à Paris, à la stupéfaction des vrais douaniers.
Autre souvenir : celui de ce tournage dans une authentique prison espagnole. « Je jouais le directeur de la prison, au Carcel modelo. Je me trouvais avec des lunettes noires au milieu de vrais prisonniers. A un moment on nous a dit « Ne venez pas demain matin ». Un condamné à mort allait être exécuté et pour l'accompagner tous les prisonniers faisaient du bruit avec des casseroles»

A la télévision, outre les éternels rôles de policiers (L'inspecteur Leclerc enquête), il narre Les Enigmes de l'Histoire et joue dans de nombreux téléfilms et séries historiques (La caméra explore le temps), fier d'incarner -entre autres- Georges Clémenceau. 
L'un de ses rôles préférés: Gibassier, le méchant des Mohicans de Paris (et sa suite Salvator et les Mohicans de Paris). Les enfants dans la rue jouaient à l'époque à Salvator contre Gibassier.

Montage des voix d'André Valmy (réalisé par Le Monde du Doublage Français)


C’est par son ami comédien Jean Brochard qu’André Valmy se lance dans le doublage au début des années 50. « A l’époque, on faisait du doublage avec du gasoil » blague-t-il.
Walter Matthau
On lui confie des premiers rôles ou des grands seconds rôles, pour des personnages souvent durs et autoritaires, mais non dénués de fantaisie. Il prête sa voix grave et rocailleuse  à Walter Matthau (qu'il a adoré doubler dans une quinzaine de films dont Drôle de couple, et L’amour en équation où il emploie un accent juif plein de subtilité pour doubler Albert Einstein), George C. Scott (qu’il a un jour retrouvé sur un tournage), Rod Steiger (Il était une fois la révolution), Karl Malden (La Conquête de l’Ouest), Robert Shaw (Les dents de la mer), Alberto Sordi (« acteur difficile à doubler »), et ponctuellement à Laurence Olivier (Marathon Man), Robert Mitchum, Burt Lancaster, Dean Martin, Lee Van Cleef, etc.

Il garde un souvenir particulier de cette scène du Bon, la brute et le truand (1966) dans lequel il double le Capitaine (Aldo Giuffrè) qui veut voir sauter le pont avant de mourir. « C’est énorme que vous soyez assis à ma table alors que je fais sauter des ponts ! »
André double également Anthony Quinn dans plusieurs films. « Pour La Bataille de San Sebastian, Jacques Willemetz qui dirigeait le doublage me dit « Je ne veux absolument pas de Djanik ». Je téléphone à Djanik, qui me dit « Fais ce que tu veux ». J’accepte après avoir négocié mon cachet et re-demandé l'avis de Djanik. Et pendant tout le doublage le metteur en scène du film, Henri Verneuil, faisait la gueule car il voulait Henry Djanik qui était arménien comme lui. »

André Valmy se souvient des directeurs artistiques de doublage de sa génération: Richard Heinz (qu'il aimait beaucoup), Maurice Dorléac (« Le père de Catherine Deneuve et Françoise Dorléac. Chiant comme la pluie, il disait tout le temps « ferme le sens ». ») ou encore Gérald Castrix qui le dirigeait dans Bons baisers de Russie (1963): « Il s’absentait souvent en urgence pour envoyer des courriers, tout le monde le soupçonnait de travailler pour les renseignements Russes. ». Preuve une fois de plus que dans la vie d’André Valmy, la réalité et la fiction n’ont jamais cessé de se croiser.

Même s’il prête sa voix à plusieurs personnages de dessins animés (le Chasseur dans Blanche Neige et les sept nains (doublage de 1962), le Morse dans Alice au pays des merveilles (doublage de 1974), McLeach dans Bernard et Bianca au pays des kangourous (1990), etc.), ce type de doublage l’intéresse moins, et il préfère rendre hommage au maître en la matière, à savoir Roger Carel. « Un jour j’ai fait un doublage au milieu de Roger et d’un autre comédien qui prenaient l’accent chinois, je n’ai pas pu m’empêcher d’éclater de rire. »

Quand on lui demande ce qui lui a apporté le doublage : « Je ne m’embêtais pas au doublage, j’avais des rôles intéressants. J’obéissais complètement au jeu de l’acteur que je doublais, en essayant techniquement de lire à chaque fois à l’avance les répliques pour que ça s’enchaîne. Ma carrière c’est à peu près 70% de doublage, 20% de théâtre et 10% de cinéma/télévision ».
A propos des acteurs et du doublage: « Un jour, je parle de doublage à Michel Bouquet, comédien extraordinaire, que j’ai vu applaudi par toute une salle  alors qu’il apparaissait en officier SS. Il est entré avec moi dans un studio de doublage, a regardé comment ça se passait, et m’a dit « non je ne ferai jamais ça » ».

En cinquante ans d’activité (« A mes début au Syndicat des acteurs, on n’était que dix »), il a vu le métier évoluer, les conditions d’enregistrement se détériorer « Avant on mettait au moins une semaine pour doubler un film, maintenant c’est de plus en plus court ». Quand j’évoque avec lui l’existence d’ « écoles du doublage » (et notamment celle de Jenny Gerard), il se souvient que l’exploitation de jeunes comédiens a toujours existé. « Un jour en arrivant au studio d’Epinay je vois au moins trente inconnus dans la salle d’attente, des jeunes des vieux. Je vois sortir Jean Droze de l’auditorium « Vous ! vous ! vous !-ah non, pas toi, Valmy- Vous ! » et désigner au hasard des acteurs pour faire des ambiances. Ils étaient traités comme des chiens, venus dès 9h du matin tout en n’étant même pas sûr de toucher le moindre cacheton dans la journée »

Fin des années 90, André Valmy arrête progressivement le doublage, de moins en moins sollicité et souffrant de problèmes de vue de plus en plus importants. Il se retire à Nice auprès de sa fille Jane.

C’est à elle, ainsi qu’à Pierre, Marie-Frédérique, Sébastien et toute la famille que je pense en ces moments difficiles.


Votre serviteur avec André Valmy
(Nice, août 2014)
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lundi 16 novembre 2015

12ème Salon des Séries et du Doublage (samedi 21 novembre 2015)

Faute de temps, je ne co-organise pas cet événement cette année, en revanche j'ai arrangé la venue de mon amie Béatrice Delfe et serai présent sur place comme bénévole. Voici le programme:


Le Salon des Séries et du Doublage  fait cette année sa 12ème édition ! Samedi 21 novembre 2015 à la Maison des Mines (Paris Vème), les fans clubs (Friends, Les Mystères de l’Ouest, Star Trek, etc.) se réuniront en nombre pour présenter sur leurs stands ou lors de rencontres conviviales leurs séries préférées au grand public.


INFOS PRATIQUES :

Lieu : Maison des mines, 270 rue Saint-Jacques, 75005 Paris
Accès : RER Luxembourg ou Port-Royal, lignes de bus 21, 27 (arrêt Feuillantines) et 38 (arrêt Val de Grâce)
Horaires d’ouverture : Samedi 21 novembre 2015, de 10h à 18h
Prix : 3,50€ par débat
Renseignements : 06 33 69 35 45 ou www.serialement-votre.fr


PROGRAMME DES DEBATS :

-La Demoiselle d’Avignon (11h-12h30) avec le comédien Louis Velle (François Fonsalette), Frédérique Hébrard (scénariste de la série) et Michel Wyn (réalisateur de la série)

-Histoire du doublage : Apollo 13 (11h-12h30) avec le comédien Jean-Philippe Puymartin (voix de Tom Hanks), Claudio Ventura (directeur artistique) et Pierre Davanture (ingénieur du son)

- Actualités James Bond (14h-15h30) avec Philippe Lombard (Le Petit Livre de James Bond, éd. First)

-Doublage : les voix de vos séries « cultes » (14h-15h30) avec les comédiens Laëtitia Lefebvre (voix de Diane Neal dans New York, unité spéciale), Nicolas Marié (voix de Michael T. Weiss dans Le Caméléon), Patrick Messe (voix de John Noble dans Fringe) et Patrick Noérie (voix de George Clooney dans Urgences)

-Séries d’aventures françaises (16h-17h30) avec les comédiens Edward Meeks (Bob dans Les Globe-Trotters), Alain Mottet (Toussaint dans Les Compagnons de Jéhu) et Bernard Tiphaine (Adler dans Les Compagnons de Jéhu)

-Légendes du doublage (16h-17h30) avec les comédiens Michèle Bardollet (voix de Barbra Streisand, Claudia Cardinale, Bette Midler), Béatrice Delfe (voix de Susan Sarandon, Diane Keaton, Farah Fawcett) et Dominique Paturel (voix de Michael Caine, Larry Hagman, Robert Wagner)


-Invités présents sous réserve. Accès aux rencontres dans la limite des places disponibles.
-Les rencontres sont animées par Vincent Chenille (Sérialement Vôtre) et François Justamand (La Gazette du Doublage)
-Chaque rencontre sera suivie d’une séance de dédicaces d’une vingtaine de minutes.

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samedi 7 novembre 2015

Les "voix de l'ombre" des films de Jacques Demy


Le 7 novembre 2015, je publiais ici un article qui contenait déjà de nombreuses révélations sur les voix chantées dans les films de Jacques Demy. 
En ce 24 novembre 2022, j'ai le plaisir de vous offrir, sur ce même lien, une "version 2" de cet article, comprenant bon nombre de nouveaux témoignages et informations sur les chanteurs, musiciens, techniciens, comédiens, versions étrangères, mais également des analyses musicologiques et des documents inédits et exceptionnels, qui vont de photos issues de séances d'enregistrement, aux paroles originales de la chanson de la Fée des Lilas, etc. Bonne lecture!

Ils s’appellent Anne Germain, Danielle Licari, Georges Blanès, José Bartel ou bien encore Claudine Meunier. Leur discrétion n’a d’égal que leur talent et l’importance qu’ils ont eue dans l’œuvre commune de Jacques Demy et Michel Legrand. Choristes anonymes rompus à un déchiffrage rapide et efficace de tous les styles de musiques au moment de l’âge d’or des studios d’enregistrement, ils ont prêté leur voix à Catherine Deneuve, Michel Piccoli, etc. dans des films entièrement (Les Parapluies de Cherbourg) ou partiellement (Les Demoiselles de Rochefort, Peau d’âne) chantés, créant une illusion souvent parfaite.
Oubliés pour certains dans les génériques des films et les crédits des pochettes des disques, souvent exclus des événements médiatiques liés aux films, ils méritent bien un éclairage particulier.
J’ai le plaisir, après de nombreuses interviews, séances d’écoutes collectives, etc. de vous offrir ce dossier qui leur est spécialement consacré, et de corriger quelques erreurs ou oublis de génériques, parfois vieux de cinquante ans. Pour chacun de ces chanteurs, j’accompagnerai sa biographie d’un montage vidéo contenant un extrait d’un solo à l’image, des extraits de sa voix dans des films de Jacques Demy et le cas échéant dans des doublages de films.

Mes plus vifs remerciements à toutes celles et ceux qui ont contribué de près ou de loin à ce dossier:
- musiciens et proches (Slim Batteux, Alain Bernaud, Philippe Bourdin, Jean-Claude Casadesus, Maurice Cevrero, Francis Darizcuren, Jean-Michel Defaye, Jean-Pierre Drouet, Léa Drouet, Raymond Gimenes, Sylvio Gualda, Carla Guiot-Pedersen, Michel Lorin),
- chanteurs et proches (Danielle Licari, Norma Bartel, Olivier Bonnet, Claudine Meunier, Georges Blanès, Jean Cussac, Laurent Cussac, Raoul Curet, Jeanette Baucomont, José Germain, Jean-Claude Briodin, Christian Leyge, Anne Germain, Isabelle et Victoria Germain, Jacques Revaux, Don Burke, Romuald Figuier, Jean Stout, Alice Herald, Michel Cassez, Hélène Pedersen-Devos, Géraldine Gogly, Nicolas et Vanessa Cour, Jackye Castan, Claudie Chauvet, Nicole Darde, Claudine Pavaux, Jo Novès, Eric Novès, Bruno Conti, Michel Barouille, Liliane Davis, Florence Davis, Olivier Constantin, Régis Leroy, Patrice Schreider, Laurence Saltiel, Mathieu Becquerelle, Louise Leterme),
- chanteurs de la version anglaise des Demoiselles de Rochefort et proches (Jackie Ward, Kevin Ward, Gene Merlino, John Merlino, Sally Stevens, Ron Hicklin, Bob Tebow, Roger Tallman),
- comédiens et proches (Danielle Ajoret, Rosalie Corraface, Fabienne Guyon, Sylviane Mathieu-Mahias, Michel Mella, Yves Pignot, Jimmy Shuman, Patricia Ward Kelly (veuve de Gene Kelly)),
- techniciens ou gérants de studios et proches (Yves Chamberland, Claude Ermelin, Jocelyne Janssen, Jacques Levy, Diane Riethof),
- passionnés (ou professionnels consultés à titre de spécialistes) dans différents domaines (Norbert Aping, Anne-Sophie Bonnal, Michel Bosc, Jean-Pierre Bouderlique, Lincoln Briney, Serge Elhaïk, Scott Emerson, Gilles Ermia, Liam Forde, David Gential, Gilles Hané, François Justamand, Nathalie Kotka, Michel Laplace, Jean Letellier, Serge Llado, Grégoire Philibert, Olivier Podesta, Iñaki Torre)
- et enfin Ciné-Tamaris (Rosalie Varda, Shérine El Sayed Taih) pour la numérisation et l'autorisation de partager avec vous des photos prises par Agnès Varda au moment des séances d'enregistrement des Parapluies de Cherbourg.

Je dédie cet article à la mémoire d'Anne Germain.

Plan d'accès direct aux chapitres :
HAUT DE L'ARTICLE (LIEN À PARTAGER)
1. INTRODUCTION : LES CHORISTES ET MUSICIENS DE STUDIO
2. LOLA (1961)
3. LES SEPT PÉCHÉS CAPITAUX (1962)
4. LA BAIE DES ANGES (1963)
5. LES PARAPLUIES DE CHERBOURG (1964) : VERSION ORIGINALE
6. LES PARAPLUIES DE CHERBOURG (1964) : DOUBLAGE ANGLAIS
7. LES DEMOISELLES DE ROCHEFORT (1967) : VERSION ORIGINALE
8. LES DEMOISELLES DE ROCHEFORT (1967) : VERSION ANGLAISE
9. LES DEMOISELLES DE ROCHEFORT (1967) : DOUBLAGE ESPAGNOL
10. LES DEMOISELLES DE ROCHEFORT (1967) : DOUBLAGE OUEST-ALLEMAND
11. LES DEMOISELLES DE ROCHEFORT (1967) : DOUBLAGE EST-ALLEMAND
12. LES DEMOISELLES DE ROCHEFORT (1967) : DISQUE INSTRUMENTAL
13. MODEL SHOP (1969)
14. PEAU D'ÂNE (1970) : VERSION ORIGINALE
15. PEAU D'ÂNE (1970) : PREMIER DOUBLAGE ESPAGNOL
16. PEAU D'ÂNE (1970) : DEUXIEME DOUBLAGE ESPAGNOL
17. PEAU D'ÂNE (1970) : DOUBLAGE ITALIEN
18. PEAU D'ÂNE (1970) : DOUBLAGE ALLEMAND
19. THE PIED PIPER / LE JOUEUR DE FLÛTE (1972) : VERSION ORIGINALE
20. THE PIED PIPER / LE JOUEUR DE FLÛTE (1972) : DOUBLAGE FRANCAIS
21. L'ÉVÉNEMENT LE PLUS IMPORTANT DEPUIS QUE L'HOMME A MARCHÉ SUR LA LUNE (1973) : VERSION ORIGINALE
22. L'ÉVÉNEMENT LE PLUS IMPORTANT DEPUIS QUE L'HOMME A MARCHÉ SUR LA LUNE (1973) : DOUBLAGE ANGLAIS
23. LADY OSCAR (1979)
24. UNE CHAMBRE EN VILLE (1982)
25. PARKING (1985)
26. TROIS PLACES POUR LE 26 (1988)
27. RECONNAISSANCE ET DROITS
28. HOMMAGES ET PARODIES
29. LIRE, ÉCOUTER ET REGARDER
BAS DE L'ARTICLE



1. INTRODUCTION : LES CHORISTES ET MUSICIENS DE STUDIO

Le premier film long-métrage de Jacques Demy, Lola, est tourné en 1960, mais pour comprendre le contexte musical de l'époque, il faut commencer notre histoire quelques années plus tôt, en 1954.

Francis Lemarque et Les Blue Stars
Alors que la variété de l'époque comprend relativement peu de choeurs (pour les quelques chansons comprenant des choeurs, on fait généralement appel à de grandes chorales lyriques, comme le choeur Marguerite Murcier), le passage à Paris de la pianiste, compositrice et chanteuse de jazz américaine Blossom Dearie, va apporter une petite révolution. Encouragée par la productrice Nicole Barclay (dont il faudra peut-être un jour réhabiliter l'importance qu'elle a eu dans le monde du disque), épouse d'Eddie Barclay, Blossom Dearie crée en novembre 1954 un groupe de jazz vocal français, Les Blue Stars (appelés à l'international The Blue Stars of France). L'octuor est constitué de quatre chanteuses (musiciennes et chanteuses d'orchestre) et de quatre musiciens de jazz "sachant chanter" (dont Christian Chevallier). La soprano lead et soliste principale du groupe est une certaine... Christiane Legrand, et son jeune frère, Michel Legrand, participe à quelques orchestrations du groupe, notamment pour l'adaptation du standard "Lullaby of Birdland", qui devient un tube outre-Atlantique.
Le groupe a son répertoire propre, mais la nouveauté de son "son" fait que les maisons de disques (Ducretet-Thomson, Barclay, Fontana, etc.) demandent rapidement aux Blue Stars d'accompagner des chanteurs de variétés connus (Francis Lemarque, Henri Salvador, Jacqueline François, etc.) dans leurs enregistrements.


Les Blue Stars (soliste: Claudine Meunier) chantent en 1956 "Lullaby of Birdland"


Michel Legrand et les Fontana
De là, naît la mode des groupes vocaux en France (avec des sonorités jazz, tranchant avec leurs aînés issus du folklore ou de la chanson à texte comme les Frères Jacques, Compagnons de la Chanson, etc.). Remplaçant Christiane Legrand au sein des Blue Stars comme soprano lead à partir du printemps 1956, Claudine Meunier se souvient: "A l'époque, Janine de Waleyne, membre des Blue Stars, nous a dit: "il faut en profiter, car la mode ne va durer que deux ou trois ans." Et finalement, ça a duré bien plus longtemps."
Les membres co-fondateurs ou remplaçants des Blue Stars créent leurs propres groupes (Christian Chevallier "Les Angels", Mimi Perrin "Les Double Six", Christiane Legrand "Les Barclay", Ward Swingle "Les Swingle Singers", Jean Mercadier "Les Melodians") et tous les arrangeurs du moment veulent également avoir leur propre groupe vocal: Michel Legrand "Les Fontana", Hubert Rostaing "Les Riff", Caravelli "Les Scarlet" et les "Ray Ventura Singers", Jo Moutet "Les JMS", Jean Leccia "Les Ambassadors", etc.
Les groupes de variétés puisant évidemment leur répertoire dans les succès du moment, on a donc, fait amusant, de nombreuses versions de "La guitare et la mer", "Le temps du muguet", etc. avec à chaque fois un nom de groupe différent, mais un son similaire, puisqu'au sein de ces différents groupes... se retrouve à peu près la même équipe de choristes (Christiane Legrand, Claudine Meunier, Janine de Waleyne, Jeanette Baucomont, Mimi Perrin, Monique Aldebert, Rita Castel, Claire Leclerc, Margaret Hélian, Claude Germain, Henri Tallourd, Ward Swingle, Louis Aldebert, Vincent Munro, Jean-Claude Briodin, Jean Cussac, Jacques Hendrix, etc. rejoints vers 1960 par Danielle Licari, Anne Germain, Alice Herald, José Germain, etc.). 

Jean-Claude Briodin
se souvient de la genèse de ces groupes vocaux, et de la manière par laquelle il est devenu choriste, après des débuts de saxophoniste: "Le groupe vocal Les Blue Stars existait depuis un an ou deux, ils avaient trouvé un très beau son, Michel Legrand les employait souvent dans ses séances. Tout le monde travaillait ensemble dans les studios d’enregistrement à l’époque (chanteur, orchestre, chœurs), on n’enregistrait pas les uns après les autres comme cela a été le cas plus tard et encore aujourd’hui. Les chanteurs avaient la réputation de ne pas très bien lire la musique donc Michel voulait des musiciens qui chantent. Michel a demandé à sa sœur Christiane de constituer Les Fontana avec des anciens Blue Stars et des nouveaux. Grâce à Jacques Hendrix qui jouait du saxophone avec moi chez Hélian, j’ai passé une audition devant Christiane et j’ai eu la chance d’être pris. Dans le groupe il y avait notamment, outre Christiane Legrand, Janine de Waleyne, Henri Tallourd, Jacky Cnudde et Jacques Hendrix. En septembre 1956, pour la réouverture de l’Alhambra, rebaptisé Alhambra Maurice Chevalier, Michel Legrand avait constitué un grand orchestre et des choeurs, il dirigeait en première partie cinq de ses compositions, puis accompagnait Maurice Chevalier dans la deuxième partie. On a fait trois mois là-bas avec cet orchestre somptueux : quatre cors, six sax, cinq trompettes, quatre trombones, etc. Les morceaux que Michel avait composés et arrangés étaient formidables, c’était tellement beau… Tout le métier venait l’écouter. Ces amis choristes, Christiane, Janine, Jacques, m’ont appris à chanter en groupe. Au début, au lieu de faire « ouh » je faisais des « uh », et ils me corrigeaient. Mais je n’avais pas de problèmes de lecture. Ensuite, le groupe a évolué ainsi que la qualité du son, avec l’habitude de chanter ensemble et de s’écouter chanter de la même façon. On a enchaîné comme ça avec les Double Six."
Jean-Claude fait partie en effet des Double Six et des Swingle Singers, deux groupes à la renommée internationale (lauréats de plusieurs Grammy Awards), et participe à des milliers de séances de choeurs, dont la quasi-totalité des musiques de film de Michel Legrand jusqu'en 2009 (quatuor vocal pour Oscar et la Dame rose). 53 ans de collaboration avec le compositeur.

Le premier line-up des Swingle Singers chantant (en playback, fin 1963-début 1964) "Badinerie"
De gauche à droite: Jean-Claude Briodin, Ward Swingle, Claudine Meunier, Jean Cussac, Christiane Legrand (soprano lead), Anne Germain, Jeanette Baucomont et Claude Germain 

Du milieu des années 50 à la fin des années 70, la plupart des oeuvres musicales sont écrites avec choeurs, et la même équipe de choristes est présente partout, en solistes ou choristes: chansons (il n'y a qu'à entendre les arrangements de Jacques Denjean ou Christian Chevallier pour Christophe, Richard Anthony, François Deguelt, etc.), musiques de films (Michel Legrand, Claude Bolling, François de Roubaix, etc.), doublages français de films étrangers (Le Livre de la JungleLes AristochatsMary Poppins, etc.), publicités, etc. 

La même profusion de travail existe pour les musiciens de studio (c'est à cette époque que naît le terme de "requin de studio"), qui enchaînent séances de variétés, publicités et musiques de film en journée, et orchestres de l'Opéra de Paris, de l'Opéra-Comique, de l'Olympia (un orchestre "fixe" accompagne alors tous les chanteurs qui s'y produisent), de cabarets (Lido, Moulin-Rouge), de la RTF ou des grands shows télé (Le Palmarès des chansons, etc.) le soir. Comme pour les choristes, la condition à l'époque est de pouvoir jouer à vue une partition en studio, afin de ne pas faire perdre de temps aux autres musiciens, et de s'adapter à tous les styles.




2. LOLA (1961)


Suite au désistement de Quincy Jones, rentrant aux États-Unis après quelques années de travail en France, Jacques Demy propose à Michel Legrand de composer la musique du film Lola (1961). Le début de presque trente ans de collaboration et d'amitié entre les deux hommes.


L'enregistrement des musiciens et des chanteurs

Jacqueline Danno
Lola
ayant été tourné entièrement en muet pour des raisons de budget, la "chanson de Lola" a été tournée avec un disque préenregistré d'Anouk Aimée lisant les paroles de la chanson. Michel Legrand compose donc une chanson à partir du texte et du rythme préalablement joués à l'image par Anouk Aimée (Lola). Pour faire chanter celle-ci, il engage Jacqueline Danno, jeune comédienne-chanteuse. L'enregistrement de cette chanson très courte dure une journée entière, vu les nombreux ajustements nécessaires pour être parfaitement synchrone avec l'image.

Il est très intéressant de comparer les deux versions (disque et film (inédite en disque)) de la "Chanson de Lola" par Jacqueline Danno. Dans la version film, elle prend une voix éthérée, assez moderne, très proche de celle d'Anouk Aimée, alors que dans la version disque, elle timbre sa voix comme une chanteuse des années 50. On dirait presque deux chanteuses différentes, à tel point qu'il m'a fallu faire quelques écoutes de disques avant de m'assurer que Jacqueline Danno avait bien enregistré les deux. Notons que dans le disque sorti à l'époque, elle n'est pas créditée (seul le nom d'Anouk Aimée apparaît sur la pochette).

En dehors de la participation de Jacqueline Danno, nous n'avons pas d'informations sur le studio, l'orchestre, etc. Le son des choeurs est commun aux équipes habituelles de Michel Legrand de l'époque, avec Christiane Legrand en soprano lead, Louis Aldebert parmi les ténors, etc.
  

Le doublage des dialogues

Louis Arbessier
Jacques Demy n'ayant enregistré aucun son lors du tournage de Lola, les dialogues du film sont entièrement post-synchronisés. Certains comédiens français sont post-synchronisés... par d'autres comédiens français, habitués des studios de doublage. Ce choix étonne: Jacques Demy s'est-il rendu compte du manque de "charisme vocal" ou de faiblesses de jeu de certains comédiens au moment du tournage, ou ces comédiens étaient-ils peu à l'aise avec la post-synchro ou indisponibles? Je m'en suis rendu compte en revisionnant le film en 2022 et j'ai fait un relevé de voix (avec l'aide de mon confrère Jean-Pierre Bouderlique) car évidemment, aucune de ces "voix de l'ombre" ne figure au générique. Le patron de Roland (joué par Raphaël Hery) parle avec la voix de Louis Arbessier, grand comédien de théâtre, mais plutôt habitué aux seconds rôles en doublage, comme Q (Desmond Llewelyn) dans plusieurs James Bond. Duncan Elliott (voix française occasionnelle de Trevor Howard, Gert Fröbe, Laurence Olivier, etc. mais aussi actif dans les versions anglaises réalisées à Paris) prête sa voix à Monsieur Valentin (Jacques Lebreton), le coiffeur et trafiquant. Dans les scènes du passage, le professeur de danse (Carlo Nell) et le badaud informant Roland de l'arrestation de Valentin ont respectivement les voix de Jacques Marin et Gérard Darrieu. Corinne Marchand (Daisy) ne semble pas parler avec sa vraie voix. 

Cette équipe de comédiens peut faire penser, sans certitude, à un doublage réalisé à la S.P.S. (Société Parisienne de Sonorisation), ou en tout cas à un directeur artistique y officiant.


Le nouvel enregistrement de musiciens et de chanteurs

Une partie des chanteurs de "Lola rêve"
Certaines bandes ayant apparemment été perdues ou étant inexploitables, Universal Music France fait réenregistrer pendant l'automne 2012 au studio Guillaume Tell (pour le coffret CD L'Intégrale Jacques Demy - Michel Legrand) trois instrumentaux (par l'orchestre symphonique de la Radio Slovaque) et un superbe choeur a cappella. Pour ce dernier (intitulé "Lola rêve"), Benoît Urbain (pianiste et accordéoniste proche de Christiane Legrand, et collaborateur de Michel) réunit une équipe de chanteurs lyriques et d'habitués de la musique de Michel Legrand, les deux solistes y compris: Mathieu Becquerelle (chanteur de comédies musicales et de groupes vocaux) a interprété tout un tour de chant de musiques de Michel Legrand (accompagné justement par Benoît Urbain) et Louise Leterme, deux ans après, jouera Madeleine dans Les Parapluies de Cherbourg au Théâtre du Châtelet. Aucun des chanteurs n'est crédité sur le disque. Après avoir identifié la voix de Mathieu, j'ai réussi à avoir les noms de l'équipe grâce à Louise et lui.


Récapitulatif par personnages

LOLA (1961) de Jacques Demy
Musique et direction : Michel Legrand
Paroles de la chanson : Agnès Varda
Enregistrement des dialogues : fin 1960 ou début 1961 (peut-être S.P.S.)
Enregistrement des musiques et chansons : fin 1960 ou début 1961
Anouk Aimée... Lola... ELLE-MEME (Dialogues)
Anouk Aimée... Lola... Jacqueline DANNO (Chant)
Alan Scott... Frankie... LUI-MEME * (Dialogues)
Corinne Marchand... Daisy... ??? * (Dialogues)
Jacques Lebreton... Le coiffeur... Duncan ELLIOTT * (Dialogues)
Raphaël Héry... Le patron de Roland... Louis ARBESSIER * (Dialogues)
Carlo Nell... Le professeur de danse... Jacques MARIN * (Dialogues)
???... Un badaud... Gérard DARRIEU * (Dialogues)
Choristes : Christiane LEGRAND *, Louis ALDEBERT *, etc.
Musiciens : Guy PEDERSEN (contrebasse) *, etc.


Morceaux supplémentaires enregistrés pour le coffret CD L'Intégrale Jacques Demy - Michel Legrand
Musique et direction : Michel Legrand
Direction artistique : David Hernando Rico 
Enregistrement des musiques et chansons : Roland Guillotel (Studio Guillaume Tell (Suresnes), octobre-novembre 2012)
Contracteur des chanteurs : Benoît Urbain
Musiciens : ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE LA RADIO SLOVAQUE
Chanteurs solistes: Louise LETERME * et Mathieu BECQUERELLE *
Choristes: Louise LETERME *, Donatienne MICHEL-LANSAC * (soprano 1), Edwige BOURDY * (soprano 2), Suzy FIRTH * et Véronique LEBERRE * (alto), Jérôme LIFSZYC *, Mathieu BECQUERELLE * et Christophe GIRE * (ténors), Guillaume ÉDÉ * et Benoît URBAIN * (barytons) 

Sources: 
Crédits CD L'Intégrale Jacques Demy-Michel Legrand 
* : Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios (remerciements à Jean-Pierre Bouderlique, Hélène Devos (récapitulatif de carrière de Guy Pedersen), Mathieu Becquerelle et Louise Leterme)


Récapitulatif par ordre d'apparition des morceaux dans le film

Inédit en disque n°1 : Pré-générique – Orchestre (cordes)
20. Allegretto de la symphonie n°7 en la majeur – Orchestre
Inédit en disque n°2 : Les marins – Orchestre (percus, cymbale)
19. Roland rêve (version 1960) – Orchestre (cordes, harpe, celesta), Chœur mixte (dont Christiane Legrand, Louis Aldebert, etc.)
Seule la première partie est utilisée
Inédit en disque n°3 : L’Eldorado (I) – Orchestre (cb/batterie, piano, trombones/piano, sax)
Inédit en disque n°4 : L’Eldorado (II) : Moi j’étais pour elle – Orchestre (piano, banjo, sax, trombone, trompette)
Inédit en disque n°5 : Lola (version film) – Orchestre (cordes, flûtes, harpe)
Inédit en disque n°6 : Chez le libraire – Orchestre (écriture très classique : flûte, cordes)
Inédit en disque n°7 : Lola et Frankie – Orchestre (guitare)
Inédit en disque n°8 : Lola et Frankie (suite) – Orchestre (cordes, vents, harpe, etc.)
Inédit en disque n°9 : Roland rêve (II) – (flûte, cordes, clarinette, hautbois)
Inédit en disque n°10 : Radio
Inédit en disque n°11 : Le coiffeur – Orchestre (cb/batterie, sax, trombones, percus)
Inédit en disque n°12 : valse très classique
19. Roland rêve (version 1960) – Orchestre (cordes, harpe, celesta), Chœur mixte (dont Christiane Legrand, Louis Aldebert, etc.)
Seule la deuxième partie est utilisée
Inédit en disque n°13 : Cécile et Frankie – Orchestre (guitare) et ??? (chanteur soliste)
18. L’Eldorado – Orchestre (piano, percus ?, trombone)
Inédit en disque n°14 : C’est moi, c’est Lola (version film) – Orchestre (piano, percus, cb, trompette, vibraphone), Jacqueline Danno (Lola)
Titre inédit en disque. L’accompagnement orchestral du morceau sort à l’époque sous le nom de « Michel aux îles ».
Inédit en disque n°15 : C’est moi, c’est Lola (version film piano) – Orchestre (piano)
Inédit en disque n°16 : Le disque de chevet – Orchestre (cb/batterie, cuivres, trompette solo)
Inédit en disque n°17 : Passage Pommeraye (version film) – Orchestre (cordes, percus), Chœur mixte ou duo de choristes (Christiane Legrand, etc.)
20. Allegretto de la symphonie n°7 en la majeur – Orchestre
Inédit en disque n°18 : Roland rêve (IV) – Orchestre (cordes, celesta)
Inédit en disque n°19 : L’Eldorado (IV) – Orchestre (piano, cb, washboard)
Inédit en disque n°20 : Roland rêve (V) – Orchestre (cordes, harpe, flûtes)
Inédit en disque n°21 : Dans le passage – Orchestre (cordes, cors, vents)
Inédit en disque n°22 : La course – Orchestre (percus, melodica)
Inédit en disque n°23 : La sortie – Orchestre (percus, melodica)
Inédit en disque n°24 : Le café – Orchestre (cordes)
Inédit en disque n°25 : Lola rêve (version film) – Orchestre (cordes) et chœur mixte (dont Christiane Legrand (lead), Louis Aldebert)
16. Prélude en ré mineur
17. Prélude en ut majeur
Inédit en disque n°26 : Le dîner d’anniversaire – Orchestre (très classique : flûte, cordes)
Inédit en disque n°27 : Roland rêve (VI) – Orchestre
Inédit en disque n°28 : L’arrestation du coiffeur – Orchestre (sax, cb/batterie)
Inédit en disque n°29 : Roland rêve (VII) – Orchestre (cordes, flûte)
20. Allegretto de la symphonie n°7 en la majeur – Orchestre
Inédit en disque n°30 : L’Eldorado (V) – Orchestre (piano, batterie, banjo)
20. Allegretto de la symphonie n°7 en la majeur – Orchestre

Enregistrements alternatifs divers
14. C’est moi, c’est Lola (texte parlé) – Anouk Aimée (Lola)
15. Chanson de Lola (version disque) – Orchestre (cuivres (dont trompette soliste), piano bastringue, percus), Jacqueline Danno (Lola)

Enregistrements alternatifs 2012
10. Roland rêve – Orchestre (cordes, glockenspiel, vents (dont cors/trombones, flûtes, hautbois, basson), percus, harpe, piano)
11. Pour Anouk – Orchestre (cordes, vents (dont trombone basse, trombone ou cor solo), harpe)
12. Passage Pommeraye – Orchestre (en partie synthé ???)
13. Lola rêve – Louise Leterme (soprano soliste), Mathieu Becquerelle (ténor soliste) et Chœur mixte (Donatienne Michel-Dansac et Louise Leterme (soprano 1), Edwige Bourdy (soprano 2), Suzy Firth et Véronique Leberre (alto), Jérôme Lifszyc, Mathieu Becquerelle et Christophe Gire (ténors), Guillaume Édé et Benoit Ubrain (barytons)).

Source : Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios


Récapitulatif par séances d'enregistrement

Séances aux dates inconnues (fin 1961-début 1962)
Basse : Guy PEDERSEN
Chant solo : Jacqueline DANNO
Choeurs : Christiane LEGRAND, Louis ALDEBERT, etc.

Séance du 27 octobre 2012, Studio Guillaume Tell (Suresnes)
Direction : Michel LEGRAND
Contracteur des chanteurs : Benoît URBAIN
Chanteurs solistes: Louise LETERME et Mathieu BECQUERELLE
Choristes : Louise LETERME, Donatienne MICHEL-LANSAC (soprano 1), Edwige BOURDY (soprano 2), Suzy FIRTH et Véronique LEBERRE (alto), Jérôme LIFSZYC, Mathieu BECQUERELLE et Christophe GIRE (ténors), Guillaume ÉDÉ et Benoît URBAIN (barytons) 
(Enregistrement du chant a cappella "Lola rêve" pour le coffret CD L'Intégrale Jacques Demy - Michel Legrand)

Source : Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios (remerciements à Hélène Devos (récapitulatif de carrière de Guy Pedersen), Mathieu Becquerelle et Louise Leterme)




3. LES SEPT PÉCHÉS CAPITAUX (1962)


Dans ce film à sketchs (chacun étant réalisé par un réalisateur différent), Michel Legrand compose la musique de la plupart des segments du film, dont La Luxure (réalisé par Jacques Demy). Dans celui-ci, le compositeur alterne avec une partie très jazz (avec solistes vocaux, dont Christiane Legrand, Claudine Meunier et Michel Legrand lui-même), des parties de piano très sentimentales (apparemment jouées par Alain Bernaud et Michel Mention) et un choral sacré assez contemporain.


Récapitulatif par personnages

LES SEPT PÉCHÉS CAPITAUX (1962) de Philippe de Broca, Claude Chabrol, Jacques Demy, Sylvain Dhomme, Jean-Luc Godard, Edouard Molinaro, Roger Vadim et Max Douy
Musique : Michel Legrand, Pierre Jansen et Sacha Distel
Direction : Michel Legrand
Enregistrement des musiciens et chanteurs : ? (Studios de Boulogne, 2 au 4 janvier 1962)
Employeur des musiciens et chanteurs : Éditions musicales Imperia
Chanteurs solistes : Christiane LEGRAND, Ward SWINGLE, Geneviève ROBLOT, Claude GERMAIN, Claudine MEUNIER
Choristes : Michèle BERTIN, Claudine MEUNIER, Michèle DORNEY, Alice HERALD, Jeanette BAUCOMONT, Colette "Sybil" BARTROP, Nicole BINANT, Geneviève ROBLOT, Jean-Claude BRIODIN, Claude GERMAIN, Henri TALLOURD, Jean CUSSAC, José GERMAIN, Eddy LOUISS, Ward SWINGLE, Jacques HENDRIX
Musiciens : Roger BOURDIN, Raymond GUIOT, Michel PLOCKYN (flûte, piccolo),  Michel PORTAL, Roger SIMON, André ROLLAND (clarinette), Pierre GOSSEZ, René NICOLAS (cl, sax), Georges GRENU, Jo HRASKO, Marcel HRASKO (sax), William BOUCAYA (sax baryton), Georges GAY, Vincent CASINO, Maurice ANDRÉ, Marcel LAGORCE, Jean BAISSAT, Roger GUERIN, Gilbert DIAZ (tp), Vincent GLOBOKAR, Guy DESTANQUE, Nat PECK, Raymond KATARZYNSKI, Bill TEMPER (tb), Camille VERDIER (tb basse), Georges BARBOTEU, Michel FAUCON, Louis BERNARD, Georges DURAND (cor), Paul HONGNE (basson), Gilbert RYS, Elie RAYNAUD (tuba), Lily LASKINE (harpe), Lionel GALI, Gérard JARRY, Jean GITTON, André BARTHELEMY, Didier SAINT-AULAIRE, Léon BRONSCHWAK, Pierre VARRON, Jean-Claude BERNEDE, René MASCORT, André KARREN, Pierre-Yves DEFAY, Cécile CASTEREDE, Pierre TRUYS, René HERMANGE, Basile STAVRIANO, Michel CRON (violon), Colette LEQUIEN, André SAULNIER (vla), Hubert VARRON, Jacques CHOQUET (vlc), Guy PEDERSEN, Jacques CAZAURAN, Jean-Marc ROLLEZ, Yves CHABERT, Pierre MICHELOT (b), Barthelemy ROSSO, Victor APICELLA (g), Angelo PETISI (g hawaïenne), Pierre LEMARCHAND, Gus WALLEZ (dms), Jeanne LORIOD, Monique MATAGNE (ondes Martenot), Gilbert LEROY (harmonium), Raoul GOLA (p, célesta, clavecin), Alain BERNAUD, Georges ARVANITAS (p, célesta), Michel MENTION (p), Jean-Pierre DROUET (percussions, célesta), Jean-Pierre JACQUILLAT (dms, percussions, célesta), Michel HAUSSER, Jean-Claude CASADESUS, Emile SERRE (percussions), Freddy BALTA (accordéon), Paulette PINCHINAT (violon, régie)

Source : Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios (remerciements à Philippe Bourdin)


Récapitulatif par ordre d'apparition des morceaux dans le film

Concerne uniquement le générique de début de film et le segment La Luxure:

Générique – Orchestre (cordes, timbales, cuivres, guitare, xylophone, harpe, bongos, etc.), Chœur mixte
Première partie du titre Générique / Comédie musicale
La Luxure : Générique – Orchestre (trompette solo, trombone solo, cb/batterie, etc.)
La Luxure : Dans la rue 1 – Orchestre (cuivres, cb/batterie, bongos), Geneviève Roblot ? (chant solo féminin 1), Claudine Meunier (chant solo féminin 2), Christiane Legrand (chant solo féminin 3), Michel Legrand (chant solo masculin), groupe vocal féminin
Deuxième partie du titre Générique / Comédie musicale
La Luxure : Dans la rue 2 – Orchestre (bongos, etc.)
La Luxure : Dans la rue 3 – Orchestre (cuivres, cb/batterie), Christiane Legrand (chant solo féminin 1), Geneviève Roblot ? (chant solo féminin 2)
Troisième partie du titre Générique / Comédie musicale
La Luxure : Au café I – Orchestre (cuivres, cb/batterie, vibra), Christiane Legrand (chant solo féminin), Ward Swingle ? (chant solo masculin)
La Luxure : La cigarette – Orchestre (pianos)
La Luxure : L’Enfer I – Chœur mixte (dont Christiane Legrand), Orchestre (pianos)
Première partie du titre Vision d’enfer
La Luxure : L’Enfer II – Chœur mixte (dont Christiane Legrand), Orchestre (pianos)
Troisième partie du titre Vision d'enfer
La Luxure : Rêverie – Orchestre (violon solo, cordes, etc.)
La Luxure : L’Encyclopédie – Orchestre (pianos)
Deuxième partie du titre Vision d'enfer
La Luxure : Au café II – Orchestre (cuivres, cb/batterie, vibra), Christiane Legrand (chant solo féminin), Ward Swingle ? (chant solo masculin)
La Luxure : Au café III – Orchestre (cuivres, cb/batterie, vibra, bongos), Christiane Legrand (chant solo féminin), Ward Swingle ? (chant solo masculin), Chœur mixte
La Luxure : Dans la rue 4 – Orchestre (cuivres, cb/batterie, vibra), Christiane Legrand (chant solo féminin), Chœur mixte

Source : Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios


Récapitulatif par séances d'enregistrement

Concerne tous les segments du film (La Luxure y compris), sans distinction:

Séance du 2 janvier 1962, 9h30-12h30, Studios de Boulogne
Trompette: Georges GAY, Vincent CASINO
Trombone: Vincent GLOBOKAR, Guy DESTANQUE
Flûte, piccolo: Raymond GUIOT, Michel PLOCKYN
Clarinette: Pierre GOSSEZ, René NICOLAS, Roger SIMON, André ROLLAND
Tuba: Gilbert RYS
Batterie: Pierre LEMARCHAND
Percussions, célesta: Jean-Pierre DROUET
Régie: Paulette PINCHINAT
Chef: Michel LEGRAND

Séance du 2 janvier 1962, 13h05-16h45, Studios de Boulogne
Harpe: Lily LASKINE
Guitare: Barthelemy ROSSO
Guitare hawaïenne: Angelo PETISI (supp. soliste)
Basse: Guy PEDERSEN
Batterie: Gus WALLEZ
Percussions: Jean-Pierre DROUET
Ondes Martenot: Jeanne LORIOD, Monique MATAGNE
Célesta: Alain BERNAUD
Régie: Paulette PINCHINAT
Chef: Michel LEGRAND

Séance du 2 janvier 1962, 17h-20h, Studios de Boulogne
Piano: Raoul GOLA
Piano, celesta: Alain BERNAUD
Harmonium: Gilbert LEROY (supp. soliste)
Batterie: Gus WALLEZ 
Choeur: Michèle BERTIN, Claudine MEUNIER, Michèle DORNEY, Alice HERALD, Jeanette BAUCOMONT, Colette "Sybil" BARTROP, Nicole BINANT, Geneviève ROBLOT, Jean-Claude BRIODIN, Claude GERMAIN, Henri TALLOURD, Jean CUSSAC, José GERMAIN, Eddy LOUISS, Ward SWINGLE, Jacques HENDRIX
Chef: Michel LEGRAND

Séance du 3 janvier 1962, 9h-12h, Studios de Boulogne
Flûte, piccolo: Roger BOURDIN, Michel PLOCKYN
Clarinette: Pierre GOSSEZ, Michel PORTAL
Basson: Paul HONGNE
Trompette: Maurice ANDRÉ, Marcel LAGORCE
Trombone: Nat PECK
Trombone basse: Camille VERDIER
Basse: Jacques CAZAURAN, Jean-Marc ROLLEZ
Clavecin, celesta: Raoul GOLA (supp. soliste)
Harmonium: Gilbert LEROY (supp. soliste)
Batterie, vibraphone: Jean-Pierre JACQUILLAT
Régie: Paulette PINCHINAT
Chef: Michel LEGRAND

Séance du 3 janvier 1962, 13h45-16h45, Studios de Boulogne
Violon: Lionel GALI, Gérard JARRY, Jean GITTON, André BARTHELEMY, Didier SAINT-AULAIRE, Léon BRONSCHWAK, Pierre VARRON, Jean-Claude BERNEDE, René MASCORT, André KARREN, Paulette PINCHINAT (et régie), Pierre-Yves DEFAY, Cécile CASTEREDE, Pierre TRUYS, René HERMANGE, Basile STAVRIANO
Basse: Jean-Marc ROLLEZ, Yves CHABERT
Harpe: Lily LASKINE
Cor: Georges BARBOTEU, Michel FAUCON, Louis BERNARD, Georges DURAND
Flûte: Roger BOURDIN, Raymond GUIOT
Tuba: Elie RAYNAUD
Trombone: Nat PECK, Vincent GLOBOKAR
Trompette: Georges GAY, Jean BAISSAT
Piano: Alain BERNAUD
Vibraphone, timbale: Jean-Pierre DROUET
Xylophone: Jean-Pierre JACQUILLAT
Batterie: Gus WALLEZ
Basse: Pierre MICHELOT
Guitare: Victor APICELLA
Chef: Michel LEGRAND

Séance du 3 janvier 1962, 17h-20h, Studios de Boulogne
Violon: Lionel GALI (supp. soliste), Gérard JARRY, Michel CRON, Jean GITTON, Paulette PINCHINAT
Alto: Colette LEQUIEN, André SAULNIER
Violoncelle: Hubert VARRON, Jacques CHOQUET
Basse: Jacques CAZAURAN
Piano: Alain BERNAUD, Michel MENTION
Guitare: Victor APICELLA
Batterie, celesta: Jean-Pierre JACQUILLAT

Séance du 4 janvier 1962, 9h-12h, Studios de Boulogne
Saxophone: Pierre GOSSEZ, Georges GRENU
Saxophone baryton: William BOUCAYA
Trompette: Roger GUERIN
Trombone: Raymond KATARZYNSKI
Vibraphone: Michel HAUSSER
Piano, celesta: Georges ARVANITAS
Basse: Guy PEDERSEN
Batterie: Gus WALLEZ
Accordéon: Freddy BALTA
Régie: Paulette PINCHINAT
Chant: Christiane LEGRAND, Ward SWINGLE
Chef: Michel LEGRAND

Séance du 4 janvier 1962, 14h-17h, Studios de Boulogne
Saxophone: Jo HRASKO, René NICOLAS, Georges GRENU, Marcel HRASKO, William BOUCAYA
Trompette: Georges GAY, Roger GUERIN, Jean BAISSAT, Gilbert DIAZ
Trombone: Nat PECK, Vincent GLOBOKAR, Raymond KATARZYNSKI, Bill TEMPER
Basse: Guy PEDERSEN
Batterie: Gus WALLEZ
Bongos: Jean-Pierre DROUET
Washboard: Jean-Claude CASADESUS
Tumba, timbales: Emile SERRE
Chant: Christiane LEGRAND, Geneviève ROBLOT, Claude GERMAIN, Claudine MEUNIER

Source : Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios (remerciements à Philippe Bourdin (copie des feuilles de présence d'époque))




4. LA BAIE DES ANGES (1963)


Très belle musique de Michel Legrand, une fois de plus. Ce film ne comportant pas de chansons, et n'ayant presque aucune information sur les musiciens, je ne développerai pas pour le moment.


Récapitulatif par séances d'enregistrement

Séance du 7 janvier 1963 (date(s) incertaine(s))
Basse: Guy PERDERSEN
etc.

Source: Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios (remerciements à Hélène Devos (récapitulatif de carrière de Guy Pedersen))





5. LES PARAPLUIES DE CHERBOURG (1964) : VERSION ORIGINALE



La composition et les premières maquettes

Lorsque Jacques Demy et Michel Legrand se mettent d'accord sur l'idée d'un film entièrement chanté (après d'infructueuses séances de travail alternant dialogues parlés et chant), le processus de création commence. Été 1961, la compositeur compose des premiers airs, jugés trop savants. Puis, le week-end du 11 novembre 1961, Jacques Demy et Michel Legrand travaillent à Noirmoutier, et arrivent à accoucher de l'une des parties de Chez Dubourg. Les deux hommes enchaîneront les séances de travail "à quatre mains", Jacques Demy trouvant le texte et imposant le rythme qu'il souhaite donner aux scènes. Une fois l'oeuvre écrite, des maquettes piano/voix sont enregistrées par Michel Legrand et sa soeur Christiane. Trois d'entre elles ont été éditées dans le coffret CD L'Intégrale Jacques Demy - Michel Legrand : scène 4 "Sur le quai", scène 7 bis "Chez Dubourg" et scène 14 "La Gare". 

L'analyse de notre ami musicologue Michel Bosc : « Les Parapluies sont un opéra, ni plus ni moins. Legrand navigue continuellement entre les exigences de la prosodie, de la mélodie, du style, et ne cesse de déroger aux règles qu’il propose, ce qui perturbe d’ailleurs une partie du public. Il parvient, surtout, à trouver une formule absolument nouvelle et personnelle qui fait qu’il n’y aura jamais de deuxièmes Parapluies, ce qui séduit précisément une autre partie du public ! L’œuvre oscille continuellement entre parole et chant, sans pour autant céder aux alternances d’airs et de récitatifs courants dans l’opéra. En conjuguant rythme, rêve, réalité et lyrisme, les Parapluies s’affirment comme un prototype unique, voué à rester sans descendance mais aussi rester isolés, par opposition, par exemple, au West Side Story de Bernstein qui avait été élu dans le « top 10 » des œuvres géniales du XXe siècle, par le magazine Diapason. »


Les arrangements

Jean-Michel Defaye
Une fois le projet sur de bons rails, place aux arrangements. Les Parapluies de Cherbourg est connu pour son orchestration extraordinaire, mais Michel Legrand l'a-t-il faite entièrement? A l'époque, il est très commun pour les compositeurs de musiques de film de prendre des nègres (qui par définition ne sont pas crédités, et ne touchent souvent pas de droits) au moins pour l'orchestration, voire pour toute ou partie de la composition. 
Michel Legrand a beau se vanter dans ses mémoires d'être arrivé à Hollywood comme compositeur faisant lui-même chacune de ses orchestrations, on sait dans les faits (et cela n'enlève rien à son immense talent d'arrangeur) que pour tenir certains délais il a été aidé plusieurs fois dans sa carrière, que ce soit pour des chansons ou des musiques de film. Parmi ses collaborateurs à travers le temps: Jean-Michel Defaye, Alain Bernaud, Christian Chevallier, Armand Migiani, Vladimir Cosma, Georges Cour, Anders Soldh, etc.
Pour Les Parapluies de Cherbourg, je me suis orienté vers la piste Jean-Michel Defaye. Le grand arrangeur (notamment des chansons de Léo Ferré) se souvient: « J'ai du faire certaines orchestrations par-ci par-là pour Les Parapluies de Cherbourg. Michel était un bon copain, et on a souvent travaillé ensemble, en passant des nuits entières à faire des arrangements pour des disques ou des films. C'est plus souvent moi qui l'ai aidé que l'inverse, comme il était tout le temps débordé. Il me téléphonait « Mon biquet, tu peux me donner un coup de main ? » (rires).» 

Le copiste Maurice Cevrero se souvient à propos des collaborations Defaye-Legrand : « Jean-Michel avait écrit deux arrangements sur Un Américain à Paris et Rhapsody in Blue qu’il avait offert gratuitement à la harpiste Catherine Michel, compagne de Michel Legrand. Le disque, produit par Michel, était sorti avec écrit « all arrangements : Michel Legrand ». Ce n’était pas honnête, Jean-Michel était furieux. Conscient d'avoir commis une faute, Michel appelle Jean-Michel. Sa femme décroche lui explique qu’il est sur une échelle, en train de repeindre un mur. Elle l’appelle, « Jean-Michel, c’est ton ami Michel Legrand au téléphone ! ». Et au loin on entend « Ce n’est pas mon ami ! », « Il veut te parler… » « Moi je ne veux pas lui parler ! ». Finalement, la femme de Jean-Michel dit à Michel « Désolé, il est au sommet d’une échelle et n’a pas l’intention de descendre » (rires) »

A propos de l'orchestration des Parapluies de Cherbourg, un petit mot de Michel Bosc : "Là encore, l’œuvre est hybride et se plaît à l’être. L’effectif n’est pas tout à fait symphonique mais ses couleurs, elles, le sont parfois franchement ; d’autres fois, le jazz l’emporte haut la main et les idées relèvent davantage d’une formation réduite. De façon stupéfiante, les transitions sont insensibles tant Legrand est à l’aise dans son univers. Avec une maîtrise parfaite des moyens mis à sa disposition, il déploie une palette extraordinairement variée au sein d’une même œuvre : seules, les situations guident ses choix. Les représentations sur scène, en mobilisant des effectifs restreints, amputent l’œuvre d’une grande partie de sa dimension réelle. La suite symphonique, elle, donne une idée de la puissance musicale des Parapluies."


L'enregistrement des musiciens

Francis Lemarque
L'enregistrement de musiques de film coûtant très cher (et à plus forte raison quatre-vingt-six minutes non-stop), Michel Legrand part à la recherche d'un éditeur musical courageux pour co-éditer avec lui (via la maison de production qu'il a créée en 1960 avec sa mère Marcelle Legrand) la musique, et donc payer les séances. C'est finalement l'auteur-compositeur-interprète Francis Lemarque (pour qui Michel Legrand a écrit beaucoup d'arrangements dans les années 50) qui accepte d'endosser 50% des frais. (Pour le remercier de sa générosité et de sa prise de risque, Michel Legrand lui proposera trois ans plus tard de co-éditer Les Demoiselles de Rochefort, dont le succès était plus prévisible).

Marcelle Legrand et Maurice Chevalier
Pilier dans la famille, la mère de Michel Legrand, Marcelle Legrand, surveille de près les séances. Olivier Bonnet (fils de Christiane Legrand, et donc neveu de Michel et petit-fils de Marcelle) se souvient: "Ma grand-mère, Marcelle, était quelqu'un d'exceptionnel. Elle a eu une vie exemplaire, s'est retrouvée à 21 ans avec deux enfants à élever, juste avant la guerre. Elle a dédié sa vie à ses enfants, ne s'est jamais remariée, et a continué à aider son ex-mari, Raymond Legrand, malgré tout ce qu'il lui avait fait. Elle gérait le Comptoir Musical Français (Comufra), la maison d'édition musicale familiale, et était très appréciée par ses employés. Je me souviens que pendant les séances des Parapluies de Cherbourg et des Demoiselles de Rochefort, elle rapportait les masters tous les soirs dans le coffre de sa voiture, et laissait la voiture dans le garage de notre maison de Bécon-les-Bruyères. Elle avait une petite vue du garage par la fenêtre de sa chambre, et ne dormait presque pas de la nuit tellement elle était inquiète qu'il arrive quelque chose."

Pour Les Parapluies de Cherbourg, l’orchestre est enregistré au studio Charcot Europasonor (15 rue Charcot), et les voix au Poste Parisien (Champs-Elysées), même si une série de photos prises par Agnès Varda (et mises à disposition amicalement pour cet article par Rosalie Varda) montre Danielle Licari, Claudine Meunier et Christiane Legrand au milieu de l’orchestre. « Je ne m’en souviens plus, mais ça m'étonne qu'elles ne soient pas isolées sur les photos. Elles étaient probablement venues à Charcot faire un filage avec les musiciens » témoigne le percussionniste Michel Lorin.

Le studio Charcot Europasonor a été créé par Jean-Michel Pou-Dubois et Yves Chamberland, Pou-Dubois étant responsable de la prise de son et Chamberland de la technique. Y ont notamment été enregistrés Henri Salvador, les Double Six, et beaucoup d’artistes Vogue (Françoise Hardy, etc.) avant que Vogue n’ait ses propres studios rue d’Hauteville et à Villetaneuse (aujourd’hui Midilive Studios).

A la console de ces séances d’orchestre des Parapluies, Jean-Michel Pou-Dubois lui-même, et le jeune Claude Ermelin, fils du contrebassiste Fred Ermelin (« requin de studio » et accompagnateur de Django Reinhardt, Gilbert Bécaud, etc.). Claude Ermelin se souvient : « Je sortais de mes vingt-huit mois de service militaire, je ne savais pas quoi faire, alors mon père m’a dit « Pourquoi tu ne serais pas ingénieur du son ? » Je suis allé à Philips, ils voulaient bien me prendre, mais quand j’ai vu tout le personnel en blouse blanche je me suis dit « Ce n’est pas pour moi » (rires). Finalement, mon copain Chamberland avec qui je jouais du jazz -lui de la batterie, moi de la contrebasse- m’a proposé de le rejoindre à Charcot. Comme j’étais fils d’un musicien connu, c’était un plus pour eux. J’ai commencé comme assistant et au bout d’un an on m’a proposé d’enregistrer. Pour Les Parapluies de Cherbourg, il y avait énormément de travail donc Pou-Dubois ne pouvait pas faire tous les enregistrements. J’ai fait quelques séances de cordes, pas le gros œuvre. Avec Legrand, tout le monde serrait les fesses, mais l'oeuvre était magnifique.»
Claude Ermelin

Claude Ermelin se souvient des particularités du studio Charcot : « Charcot était un studio haut de plafond, dans une salle de patronage, donc les mercredis on ne pouvait pas enregistrer car il y avait patronage. Le studio était chauffé par deux gros poêles à charbon, qu’il fallait remplir, et de temps en temps on entendait le craquement du charbon et il fallait refaire la prise. La partie technique était de l'autre côté de la rue, donc un assistant démarrait les magnétos, c'était vraiment folklorique. »
Lorsque je lui fais remarquer qu’on entend des grandes orgues dans la musique des Parapluies, les souvenirs reviennent: « C’est la première fois qu’on me pose la question, et que j’y repense: on est allé à l’Église Saint Germain l'Auxerrois, avec des micros et un magnéto.»

Roger Bourdin
J’ai réussi, grâce à Philippe Bourdin (fils du légendaire flûtiste Roger Bourdin), à obtenir la liste complète des musiciens et choristes (hors chanteurs solistes) ayant participé à l’enregistrement des Parapluies de Cherbourg. Cette liste (listing de musiciens déclarés à la Spedidam pour le film) ne précise pas les dates d’enregistrement, ni les instruments. Les séances ayant eu lieu sur plusieurs jours, il est évident qu’il n’y a, par exemple, pas eu quatre batteurs dans la même séance mais que ceux-ci ont été « répartis » selon leurs disponibilités ou le style voulu pour le morceau : le violon solo ne sera pas forcément le même au sein d’un morceau symphonique ou d’un petit ensemble de tango.
Tous les musiciens des Parapluies de Cherbourg sont exceptionnels, habitués des séances d’enregistrement où il faut savoir déchiffrer vite et jouer bien la musique que l’on vous confie, et certains comme le flûtiste Roger Bourdin (que le grand public connaît pour son accompagnement soliste de Jacques Dutronc dans "Il est cinq heures Paris s’éveille") ou la harpiste Lily Laskine, sont carrément des virtuoses et des références internationales dans leur instrument.

Raymond Gimenes
Chez les guitaristes, on retrouve Pierre Cullaz, René Duchaussoir, Léo Petit, Dominique Gesina, et un petit nouveau : Raymond Gimenes: « Les Parapluies de Cherbourg est l’une des premières séances auxquelles j’ai participé. Je pense que c’est Francis Le Maguer (guitariste, ndlr) qui m’a envoyé en remplacement car à l’époque je n’avais pas de place fixe. Il devait y avoir Gus Wallez (batterie) et Guy Pedersen (contrebasse) dans la rythmique. J’ai commencé à avoir une place fixe chez Jacques Denjean entre 1963 et 1966 : on faisait énormément de variétés pour Richard Anthony, etc. Il y avait Jean-Claude Casadesus aux percussions, très beau garçon; Delon à côté c’était de la rigolade. Il n’y avait pas grand chose à jouer dans la variété, donc ça ne requérait pas un talent exceptionnel. Jean-Claude s’est tourné vers la direction d’orchestre »
Raymond rejoint rapidement d’autres équipes : « J’ai eu aussi une place fixe chez Michel Colombier, Jean Bouchéty, Gabriel Yared, et Michel Legrand qui avait un caractère très spécial -mais ça nous faisait rigoler avec Arpino, etc. – et dont j’ai été le guitariste n°1 à chaque fois qu’il avait une séance. J’ai fait énormément de choses avec lui : je me souviens qu’il nous avait demandés pour des maquettes de Michel Mallory, le parrain de mon fils aîné. Il y avait André Arpino, Francis Darizcuren, Maurice Vander, Eddy Louiss, Bernard Lubat, etc. Un orchestre qui pétait la flamme ! Ce n’est jamais sorti en disque en raison d’un désaccord artistique, Michel Mallory voulait quelque chose de country et Michel Legrand avait orchestré quelque chose de très jazzy. Pour Michel Legrand, j’ai également accompagné Gene Kelly. Il était de passage à Paris et devait chanter et danser en anglais lors d’un gala au Théâtre du Rond-Point. Michel Legrand nous avait convoqués à la répétition, Francis Darizcuren (basse), Roger Fugen (batterie), Georges Rabol (piano) et moi. Sur scène, Michel nous distribue les partitions. Il est pète-sec ce jour-là, de très mauvaise humeur, et nous traite comme des chiens pendant toute la répétition. Il se barre sans nous remercier, en disant juste « à ce soir 20h pour le spectacle ». Et Gene Kelly, qui ne comprenait pas l’attitude de Michel nous crie « Messieurs les musiciens, merci beaucoup, je vous aime ». »
Raymond accompagne d’autres stars : « Dean Martin un soir au Moulin-Rouge, très grand moment. Ce n'était pas l’orchestre du Moulin-Rouge mais un orchestre monté spécialement par Roger Berthier qui avait mis les troupes d'assaut dans les cordes, la rythmique, et les cuivres. Le dessus du panier, et à l'époque il paraît que j'en faisais partie. J’ai aussi accompagné Sammy Davis Jr, une semaine se shows à l’Olympia, je me souviens qu’il avait un numéro extraordinaire à la batterie. »
Raymond est très présent dans des musiques de film : « Parmi les nègres de Michel Legrand, il y avait Vladimir Cosma, qui m’a demandé de participer à ses propres séances quand il s’est mis à voler de ses propres ailes, j’ai notamment joué dans Le grand blond avec une chaussure noire. Plus tard, j’ai fait beaucoup d’arrangements de musiques de film, comme Les Bronzés font du ski pour Pierre Bachelet, qui était un excellent illustrateur sonore, il savait très bien où mettre de la musique et dans quel style, quand on arrivait sur un briefing avec un réalisateur, il avait une vision très claire, et ne se plantait pas. C’est moi qui ai eu l’idée d’engager Dan Perlman (dont j’étais l’arrangeur) pour chanter le générique, il y avait besoin d’une voix très aigue. J’ai aussi travaillé pour Claude Bolling, il était très occupé par son orchestre, m’a donné un brouillon du générique d’On ne meurt que deux fois, et j’ai composé et orchestré toute la musique du film. »
Parmi les meilleurs souvenirs de Raymond : « J'ai travaillé pendant un moment avec Henri Salvador. Lors d’une carte blanche à Montreux, Quincy Jones était venu avec l’orchestre de Count Basie. Salvador devait chanter avec lui mais il n’avait plus les partitions du « blues du dentiste » orchestrées par Quincy quand il vivait à Paris dans les années 50. Quincy a dit à Henri « Tu as un arrangeur personnel, demande-lui de le faire ». Et j’ai orchestré « Le blues du dentiste » et « Count Basie » qui ont été joués par Quincy Jones au firmament de sa gloire, avec l’orchestre de Count Basie.»

Les parties de piano des Parapluies de Cherbourg sont assurées principalement par le grand Maurice Vander (pianiste entre autres de Claude Nougaro) et par Alain Bernaud (cf. chapitre Les Demoiselles de Rochefort), Vander étant plutôt sur les parties jazz et Bernaud sur les parties "classiques". Pour ce qui est du célesta, très présent dans les œuvres de Michel Legrand de l’époque, il a pu être joué par l’un des deux, ou par un percussionniste habitué des claviers : « Pour les séances de Michel Legrand je donnais parfois un coup de main au célesta quand il manquait un pianiste. Les parties de célesta dans les séances n’étaient en général pas compliquées, un percussionniste non pianiste pouvait les faire. Mais dès que ça se compliquait un peu on demandait à un pianiste » témoigne le percussionniste Jean-Pierre Drouet.
Michel Lorin confirme: « Dans les séances, c’était souvent Georges Pludermacher qui jouait du célesta. Aujourd’hui, c’est un grand pianiste concertiste, mais il a commencé à l’Opéra comme percussionniste-pianiste. Quand j’ai passé le concours de la Garde Républicaine, je lui avais demandé de m’accompagner, je n’avais pas pris un rigolo (rires). Dans Les Parapluies, Pludermacher n’y était pas d'après votre liste. Jean-Pierre Drouet aurait pu faire un clavier sur des parties pas difficiles. »

Justement, dans le pupitre des percussions, on retrouve, outre Jean-Pierre Jacquillat (1935-1986) et Alain Jacquet (dont je n’ai pas réussi à retrouver les coordonnées), quatre musiciens que j’ai pu contacter pour cet article : Jean-Claude Casadesus, Michel Lorin, Sylvio Gualda et Jean-Pierre Drouet. Tous, à peu près de la même génération, se sont retrouvés à faire des séances en même temps dans les années 60, puis ont pris des trajectoires très différentes : la direction d’orchestre pour Jean-Claude Casedesus (devenu un chef internationalement reconnu), l’enseignement pour Michel Lorin (sans délaisser son premier amour pour l’accordéon et des séances occasionnelles), le contemporain et le classique pour Sylvio Gualda, et le contemporain et le jazz pour Jean-Pierre Drouet. Pour ces quatre grands musiciens, Les Parapluies de Cherbourg représente une série de séances exceptionnelles au tout début de leur carrière.

Michel Lorin
Michel Lorin
se souvient : « C’était toujours très intéressant de travailler avec Michel Legrand, les harmonies étaient terribles, ce n’était jamais du tout-venant. Il pouvait être adorable en petit comité, nous appelant « mes petits choux », mais épouvantable en orchestre. Sa souffre-douleur était sa régisseuse et violoniste Paulette Pinchinat. Parfois, Paulette avait du mal à trouver des musiciens, ou mettait des copains dans le besoin en 3ème ou 4ème violon et ça craignait un peu, donc ça le rendait fou. J’ai un souvenir avec Les Parapluies de Cherbourg. C’était à mes débuts dans les studios. Les séances se terminaient à 20h, et les musiciens de l’Opéra ne voulaient pas dépasser car ils étaient pressés d'aller jouer à l'Opéra. Et Michel Legrand ne voulait pas dépasser non plus, car si on dépasse d’une minute, on doit nous payer un quart d’heure supplémentaire. On finissait, j’avais une partie de glockenspiel et manque de pot j’avais des boutons de manchette parce que j’allais ensuite à une cérémonie. Et à 19h59, au moment où j’étouffe le glockenspiel, mon bouton de manchette tape sur une lame du glock et j’entends « ting ». Michel Legrand : « Quel est ce con qui fait « ting », derrière ! ». J’étais rouge de honte et j’ai passé un mauvais moment (rires). »
Dans Les Parapluies de Cherbourg, Michel Lorin se souvient avoir notamment joué du vibraphone et du glockenspiel. « En général, même si on savait jouer de tout, Jean-Claude Casadesus prenait principalement les peaux, et moi plutôt les claviers (xylo, vibra, marimba), comme j’avais fait du piano. »
Entre Michel Lorin et les claviers, une histoire de famille, puisque le père de Michel, Etienne Lorin, était l’accordéoniste et compositeur attitré de Bourvil : « Mon père avait commencé comme typographe, il avait une petite imprimerie à Nemours, et jouait du piano et de la clarinette, puis il est monté à Paris en 1939 pour devenir musicien professionnel. L’accordéon à l’époque était joué par des musiciens qui ne savaient pas lire la musique dans les bals musette, donc mon père qui lui, savait lire la musique, a été incité par des copains à apprendre l’instrument. En 1940, en attendant d’être démobilisé dans les Pyrénées, il s’est retrouvé dans un camp militaire avec André Raimbourg (Bourvil) et c’est là qu’est née leur amitié formidable. » Etienne Lorin compose « Les Crayons », « La tactique du gendarme », etc. pour Bourvil, avant de composer plus tardivement « Aragon et Castille » pour Boby Lapointe ou « A Joinville-le-Pont » pour Roger-Pierre et Jean-Marc Thibault. Quant à Michel Lorin, né le 22/10/37 à Nemours, il naît quasiment avec un accordéon dans les mains, avant d’apprendre les percussions, de mener une brillante carrière dans les séances (on peut entendre son vibraphone dans Les Choses de la Vie, son xylophone dans Borsalino, etc.) et à la Garde Républicaine, et de se consacrer, suite au décès de son père en 1975, à la direction de l’école Beuscher. (Interview complet de Michel Lorin à venir sur Dans l’ombre des studios)

Jean-Claude Casadesus
Photo : Ugo Ponte
Autre percussionniste des Parapluies de Cherbourg : un musicien qui va devenir l’un de nos plus grands chefs d’orchestre, Jean-Claude Casadesus. « Les Parapluies de Cherbourg, c’était une très jolie musique. En plus, on sortait juste de la Guerre d’Algérie, donc il y avait quelque chose d’émouvant. Je m’en souviens comme si c’était hier. Les chanteurs étaient présents, mais je confonds peut-être avec Les Demoiselles de Rochefort, qu’il me semble avoir faites aussi. José Bartel, je l’avais connu en l’accompagnant à la batterie dans une boîte tenue par Alain Bernardin (patron du Crazy Horse) qui s’appelait le Soho, José chantait et jouait la tumba. Quant à Michel Legrand, j’ai beaucoup travaillé avec lui, c’était l’un des compositeurs et arrangeurs les plus doués de sa génération, un merveilleux musicien, mais pas forcément un très bon chef. Et il était très narcissique et assez arrogant, l’inverse de Quincy Jones au moment où je les ai tous deux invités au Festival de Montreux. Ce besoin de capter tout le temps l’attention était sa faiblesse, qui devait procéder d’un complexe, presque touchant d’ailleurs, car avec un talent aussi formidable il aurait pu se permettre d’être plus décontracté avec tout le monde. Il fallait qu’il soit le premier, le seul, le meilleur, l’unique en tout, ce qui faisait beaucoup rire les vrais jazzmen. Je me souviens en séances, quand on discutait de la partition et qu’il demandait le silence, on lui répondait « Mais Michel, on parle de musique » et il nous disait « Ah non, MOI, j’aime la musique » et on avait envie de lui dire « Mais tu n’es pas le seul » (rires). »
Jean-Claude Casadesus est très actif dans les séances de variété, principalement de 1959 à 1968. « Je n’aime pas le mot « requin de studio » mais mon très bon ami Jean-Pierre Drouet et moi avions deux ou trois séances d’enregistrement par jour, plus l’Alhambra le soir, et j’allais ensuite au Soho. C’était tout un club, les musiciens de studio. A l’époque, j’étais timbalier solo des Concerts Colonne, donc un poste très classique, et en même temps je côtoyais dans les séances d’enregistrement Christian Garros et Gus Wallez, Pierre Michelot et Guy Pedersen, Roger Guérin, Raymond Guiot, Mimi Rosso, Armand Migiani, Pierre Gossez et les frères Hrasko, etc. Des musiciens absolument merveilleux. »
A propos des « contractors » (mot qui n’a jamais semble-t-il été vraiment traduit en français, qu’on appelle tantôt contracteur, commandeur ou « régie ») : « On était patronné par les cordes de l’Opéra, et par les sax et batteurs dans les variétés. Le problème des contracteurs c’est qu’ils étaient mandatés par les arrangeurs, il fallait qu’ils leur donnent les meilleurs musiciens pour ne pas perdre de temps dans les séances, et enregistrer trois ou quatre titres en trois heures. En fonction de la sympathie et du talent qu’on vous reconnaissait, on vous faisait travailler. Dans la percussion, on n’était pas beaucoup, on a dépassé toute une vieille école, et nous-mêmes avons été remplacés plus tard par Marc Chantereau et Guy-Joel Cipriani. Pour en revenir aux contracteurs, avant Roger Berthier et Lionel Gali, il y a eu d’abord Georges Guérin de l’Opéra qui engageait les cordes et les musiciens qu’il jugeait apte à faire des séances. Un vieux musicien de l’opéra, qui avait une tête à la Arthur Miller, il avait une personnalité formidable. Violoniste de seconde zone, mais malin, intelligent, avec un caractère. J’adorais ce type-là mais il me faisait une peur bleue à mes tous débuts parce qu’il était très syndicaliste et je n’étais pas syndiqué, alors je craignais qu’il me demande ma carte pour travailler. Il avait tout : la Comédie-Française, les spectacles et opérettes, etc. »
Parmi les séances mémorables de Jean-Claude Casadesus : « J’ai fait l’enregistrement de « L’école est finie » de Sheila -ce qui fait beaucoup rire mon ami Wiaz du Nouvel Obs-, la plupart des séances de Léo Ferré pour Jean-Michel Defaye dont « Avec le temps », la première télé de Johnny Hallyday avec Aimée Mortimer, les musiques composées par Jean-Michel Defaye pour les shows des Carpentier au Moulin-Rouge, la plupart des séances de Jacques Brel pour François Rauber dont « Ne me quitte pas » et « Les flamands » (j’adorais Brel qui préférait un bon verre avec les copains plutôt que d’aller voir des journalistes), des séances pour Edith Piaf avec Chauvigny, une séance pour Frank Sinatra avec Kenny Clark chez Barclay vers 1963, Le Lido, « Mon truc en plumes » de Zizi Jeanmaire en studio et tous les soirs à l’Alhambra, l'opérette Patron avec Zizi. Tous les arrangeurs que je viens de citer et les Alain Goraguer, Jean Leccia, etc. étaient formidables. Cependant, tous n’étaient pas à l’aise avec la direction, donc j’ai commencé ma carrière de chef comme ça, on me confiait la direction de partitions arrangées par d’autres »
A ses débuts, il participe aussi ponctuellement à des séances de choeurs ("C'était souvent des tenues de notes dans la variété") comme ténor, et fait notamment partie des Barclay de Christiane Legrand.
A partir de 1965, il commence à diriger, notamment en étant directeur musical du Théâtre du Châtelet : « J’ai dirigé l’opérette Monsieur Carnaval, composée par Charles Aznavour. Il y avait une très forte rivalité entre Jean Richard et Georges Guétary. A chaque fois que Guétary entrait en scène en chantant « C’est moi, Monsieur Carnaval, un nom qui ne me va pas si mal » il crachait sur les pieds de Jean Richard qui était absolument fou de rage et me regardait avec des signes de la main qui voulaient dire « Regarde, ce salaud m’a encore craché sur les pieds » (rires). »
Puis à partir de 1975, il décroche définitivement des séances en prenant la tête de l’Orchestre national de Lille et en devenant un chef à la renommée internationale. Est-ce que son passé de musicien de studio l’a aidé ? « Ça ouvre des fenêtres, d’abord dans la rapidité d’adaptation au style. Le style qu’est-ce que c’est ? L’identification, savoir de quelle manière on peut jouer tel ou tel morceau. Une chanson, quand c’est très bien fait, c’est un petit morceau classique en réduction. Il y a l’unité qu’il faut trouver, la rythmique, l’équilibre des dynamiques. L’oreille est très entraînée, grâce à ça. Et l’opérette fait un bien énorme, pour un jeune chef c’est du pain béni, on doit rattraper des comédiens chanteurs qui ne savent pas chanter, il faut maintenir les nuances et un équilibre pendant un an, à huit représentations par semaine. En outre, la mise en place en séance d’enregistrement est un atout quand on doit diriger une grande formation. Ça forme l’oreille, les réflexes et la conception. »

Jean-Pierre Drouet (1969)
Photo: Marie Jesus Diaz
Autres souvenirs, ceux de Jean-Pierre Drouet : « J’étais à l’époque l’un des musiciens attitrés de Michel Legrand, donc j’ai travaillé sur Les Parapluies de Cherbourg et Les Demoiselles de Rochefort. Je me revois derrière un marimba, et jouant de plusieurs accessoires dans la rythmique, mais je ne me souviens plus pour lequel de ces deux films. Michel Legrand était un très bon musicien, donc c’était agréable de travailler avec lui. Il écrivait tellement facilement : je me rappelle une fois où il a fabriqué un petit arrangement comme ça sur le tas en cours de séance, il manquait un bout, il a fait un truc en dictant à chaque instrumentiste les voix séparées « Là tu fais ça, à telle mesure, etc. ». Quand on a joué ça sonnait quand même un peu moins bien que ce qu'il écrivait d'habitude, mais ça fonctionnait. Michel Legrand était parfois difficile. Il pouvait avoir énormément de talent et de charme quand il voulait, mais quelques fois il n’essayait pas de faire du charme, même si personnellement je n’ai jamais eu de frictions avec lui. »
Jean-Pierre Drouet est né en 1935, comme Jean-Claude Casadesus. « J’ai fait le conservatoire à Bordeaux puis à Paris, et avant même d’avoir mon prix j’ai commencé à faire des séances. C’est mon frère, violoniste, qui m’a branché une fois sur une séance, et à la fin de l’enregistrement trois ou quatre violonistes m’ont demandé mon numéro de téléphone, car c’était souvent eux qui convoquaient les musiciens. Ça s’est enchaîné et j’ai travaillé avec tellement de gens différents, je ne regrette pas, c’était un plaisir. »
Jean-Pierre Drouet accompagne les plus grands : « J’ai accompagné Edith Piaf à l’Olympia. L’orchestre était derrière un rideau transparent. Quand le moment de commencer le spectacle arrivait, Theo Sarapo allait la chercher en coulisses et la plantait au milieu de la scène. Le grand rideau de scène s’ouvrait et on attaquait, et là elle avait la même voix qu’elle a toujours eu, en pleine possession de ses moyens vocaux, malgré sa santé. Je l’ai accompagnée aussi en studio, c’est moi qui joue de la grosse caisse dans « Milord ». Elle enregistrait tout en direct avec les musiciens. Dans les derniers enregistrements que j’ai faits pour elle avec Robert Chauvigny, il y avait un orchestre assez conséquent : des cordes, un big band, etc. et moi j’étais au fond derrière tout le monde car on mettait les percussionnistes au fond pour ne pas faire trop de bruit. Sa voix n’était pas amplifiée car on était en studio, donc avec sa voix naturelle, et je l’entendais comme si elle était à côté de moi, elle passait par-dessus les cordes, les trompettes et les trombones sans aucun problème. Quel organe incroyable ! »
Il accompagne également en studio ou sur scène Gilbert Bécaud, Charles Aznavour (« La Bohème »), Johny Hallyday (Olympia), Jeanne Moreau, Tino Rossi (spectacle Le temps des guitares), Serge Gainsbourg (« Il enregistrait séparément des musiciens, car il était tout le temps ivre »), Claude Nougaro (« Bidonville »), enregistre des musiques de film d’Alain Goraguer, Michel Magne, Claude Bolling, etc. et fait partie des orchestres du Lido (avec Ben et sa tumba) et du Moulin-Rouge (dans l’orchestre de Vincent Casino). On entend ses bongos dans « A night in Tunisia » des Double Six : « Mimi Perrin était une grande amie. J’ai également remplacé ponctuellement des chanteurs dans le groupe. »
Toutes ces séances ont lieu principalement entre 1958 et 1962 car ensuite Jean-Pierre Drouet s’oriente vers la musique contemporaine et ne fait des séances de variétés que ponctuellement pour des artistes qu’il aime bien et qui insistent (comme Michel Legrand), ou pour des raisons financières. « Diego Masson avait insisté pour que je le remplace pour jouer une pièce contemporaine très difficile de Gilbert Amy dirigée par Boulez au Domaine Musical. Au restaurant, après le spectacle, quelqu’un vient s’asseoir à côté de moi, c’était Luciano Berio, qui était inconnu à l’époque. Il me demande de partir en tournée avec lui pendant cinq ou six semaines aux États-Unis. Je ne pensais qu’au jazz, et comme il y avait deux semaines à New York, que je pouvais aller dans les boîtes de nuit, etc. j’ai accepté. Un soir, il y avait un quintet qui jouait au Birdland. Un grand black arrive et demande s'il peut jouer de la batterie. Il participe au boeuf, et les yeux me sortent de la tête. Ce mec-là joue plusieurs tempi différents avec un swing monstrueux. Le quintet devient dix fois meilleur grâce à lui. Je vais le trouver, je lui dis « c'est magnifique ce que vous faites », il est à moitié bourré, je lui demande son nom : Elvin Jones ! Le lendemain, je voyageais en camion avec Berio, et il me demande ce que j’ai vu la veille. Je lui raconte, et très malin, Berio me sort cette phrase assassine : « Jean-Pierre, tu es sûr qu'ici, dans cette musique là, ils ont besoin de toi ? Car nous en Europe on est en train d'inventer une nouvelle musique et là on a beaucoup besoin de gens comme toi. » Il m'avait touché droit là où il fallait. Je me suis dit qu'il avait raison. »
Jean-Pierre Drouet devient un percussionniste de premier plan dans la musique contemporaine, qui s’intéresse beaucoup à la percussion pour le nombre de couleurs proposées. « La musique contemporaine m'a embarqué complètement. J'ai rencontré Boulez, Stockhausen, Kagel, Ligeti, des gens fabuleux, où j'avais beaucoup plus de choses à dire dans leur musique que dans le jazz, où je pouvais faire une imitation pâlotte d'un batteur de jazz. Luciano Berio m’est resté très fidèle, et m’appelait souvent au secours, comme une fois à la Scala de Milan où les percussionnistes ne pouvaient pas jouer ce qu’il voulait et il m'avait fait venir. »

Sylvio Gualda
Il a enregistré plusieurs disques de percussions en duo avec Jean-Pierre Drouet, et figure lui aussi au listing des musiciens des Parapluies de Cherbourg : le timbalier Sylvio Gualda. « En 1963, je n'étais pas encore en titre à l'Opéra, je sortais du conservatoire et travaillais pour l’Orchestre Lamoureux, etc. Le studio Charcot était rempli, ça ronflait. J’étais très content, à mon jeune âge, de travailler pour un tel compositeur que Michel Legrand, qui amène quelque chose de nouveau. J’ai eu l’impression de travailler pour quelque chose d’exceptionnel. Il y avait le tout Paris de l’enregistrement, les stars de chaque instrument, avec tout l’Opéra dans les cordes, etc. Les trois quarts étaient à la société des concerts. Les meilleurs dans tous les domaines. Et dans les percussions, des gens qui apportaient quelque chose de différent, qui ont dû lui plaire. Je me souviens de Lorin, Casadesus et peut-être Jacquet, mais je ne visualise pas Drouet en même temps que moi sur les séances que j’ai faites pour Les Parapluies. En ce qui concerne Alain Jacquet, que j’ai perdu de vue depuis qu’il est entré à l’Orchestre de Paris car il a arrêté les séances, j’ai rarement vu quelqu’un avec cette finesse au xylo, j’ai essayé de m’en inspirer mais n’ai pas atteint sa perfection. A la batterie, Gus Wallez que j’aimais beaucoup, il avait de la bouteille et je trouvais qu’il jouait terrible, avec un sacré sang froid. Michel Legrand était plutôt content de nous, nous disait « Oh, mes chéris ». Il ne semblait pas commode quand il fallait reprendre quelque chose, mais c’était de l’exigence et on ne peut pas reprocher à un artiste d’être exigent. »
A ses débuts, Sylvio Gualda fait beaucoup de séances de variétés (« un mot utilisé péjorativement par certains, mais j’étais très content de faire ça »), avant de s’orienter vers la carrière de soliste dans la musique contemporaine. « Je ne crois pas avoir été un « requin », et je n’aime pas ce mot. Tous ces musiciens étaient des gens qui jouaient magnifiquement et avaient l’habitude de jouer ensemble pour obtenir un certain son. Ce n’est pas ça, être requin. On disait du violoniste Lionel Gali qu’il était le « requin des requins », mais s’il fait trois séances par jour et qu’on le demande partout, c’est qu’il y a une raison. »
Parmi ses meilleurs souvenirs de séances : « J’ai beaucoup travaillé avec Jean Claudric avec qui je suis toujours en contact et je suis la carrière de son fils, Nicolas Bacri, qui est un grand compositeur. Avec Jean, j’ai fait plusieurs séances avec Pierre Perret, qui était très sympa, son affaire ne lui avait pas tourné la tête, et il avait beaucoup de bonhommie et de simplicité, nous tutoyait tous. Je me souviens aussi de séances pour Yves Montand avec Hubert Rostaing à Davout, et de l'enregistrement studio de l'Opéra d'Aran de Gilbert Bécaud. Dans l’émission Palmarès des chansons de Guy Lux avec l’orchestre de Raymond Lefèvre, c’est moi qui faisais souvent les premières notes du générique au glockenspiel « do si la sol ». Une fois, dans l’émission, nous avons reçu Jacques Brel pour ses adieux. On était une vingtaine de musiciens, je me revois à côté du corniste Georges Barboteu, au moment de « Ne me quitte pas », Georges avait les larmes aux yeux, lui qui devait souffler dans son cor, il fallait qu’il se ressaisisse. Je n’ai accompagné Brel qu’à cette occasion, mais son batteur Robert Solat me disait que c’était une crème, assez complice avec ses musiciens, jouant aux cartes avec eux dans l’avion. J’ai aussi accompagné en tournée Philippe Clay, qui était très sympa. En musique de film, je me souviens d’avoir enregistré pour Maurice Jarre, Salle Pleyel, une musique avec six tambours, c’était avec Jacques Rémy, Jacques Delécluse et Jean-Pierre Jacquillat, qui m’avait mis sur le coup, j’étais le petit jeune de la bande. C’était peut-être pour Paris brûle-t-il ? Maurice Jarre avait été à la classe de percussions au Conservatoire, et écrivait des cadences formidables, je me souviens du ballet Notre-Dame-de-Paris pour Roland Petit. »
En février 1968, Sylvio Gualda entre dans l’orchestre de l’Opéra de Paris, puis le timbalier qu’il admirait venant de mourir, il passe le concours et devient timbalier soliste de cette institution. Les concerts s’enchaînent, avec une collaboration très étroite avec Xenakis, et après son premier récital soliste en 1973, Sylvio Gualda abandonne les séances de variétés, faute de temps, ne s’accordant que de travailler ponctuellement pour Claude Bolling, qu’il apprécie humainement et artistiquement.


L'enregistrement des chanteurs (crédités)

Jacques Demy et Michel Legrand admettent rapidement que trouver des acteurs à la fois excellents à l'image et pouvant parfaitement chanter la musique de Legrand est impossible. Il leur faut des chanteurs de l'ombre capables de « tenir » le film du début à la fin. Une fois la musique enregistrée par ces chanteurs, les acteurs n’auront plus qu’à faire du « playback » au moment du tournage (les voix étant enregistrées avant le tournage, il est donc inapproprié de parler de "doublage"). Jacques Demy et Michel Legrand font passer des auditions (souvent sur plusieurs rôles) parmi le groupe de choristes très actif à l'époque. Une fois les chanteurs choisis et l’orchestre enregistré, les chanteurs enregistrent leurs parties au Poste Parisien (avenue des Champs Elysées). Comme je l'ai expliqué précédemment, des photos prises par Agnès Varda à l’époque montrent trois des chanteuses du film (Danielle Licari, Christiane Legrand et Claudine Meunier) à Charcot au milieu de l’orchestre mais il s'agirait vraisemblablement d'une sorte de répétition générale.

Danielle Licari
Pour le rôle principal de Geneviève (Catherine Deneuve), Michel Legrand choisit Danielle Licari (née en 1936), au départ auditionnée pour le rôle de Madeleine. Issue de la Maîtrise de la RTF (qui forme depuis 1947 des enfants au métier de chanteur), Danielle a monté plusieurs petits groupes vocaux (Les Quatre de Cœur, Les Baladins de Paris) et débuté comme choriste, notamment pour Sacha Distel. Tous les acteurs du film sont invités à assister à l’enregistrement des voix des Parapluies, mais concernant Catherine Deneuve, les souvenirs divergent, Danielle Licari étant persuadée de ne pas l'avoir rencontrée pendant les séances d'enregistrement, alors que Michel Legrand évoque une rencontre dans ses mémoires (Rien n'est grave dans les aigus, éd. Cherche-Midi) : « Je ressens un certain trouble à avoir devant moi les deux Geneviève. Ses deux composantes chimiques. Cinquante pour cent de Danielle et cinquante pour cent de Catherine vont fusionner pour former cent pour cent d’une nouvelle entité, un personnage de synthèse qui échappe complètement à l’une comme à l’autre. »
Danielle est de son côté invitée à assister au tournage, dont elle garde encore un souvenir extraordinaire, notamment pour les décors.
Bien qu’un peu « occultée » au moment de la sortie du film, elle gagnera une première reconnaissance du métier grâce aux Parapluies de Cherbourg, avant de connaître quelques années plus tard une célébrité mondiale et une carrière de soliste grâce au Concerto pour une voix de Saint-Preux, tout en continuant « dans l’ombre des studios » d’être, avec sa magnifique voix de soprano, soliste d’accompagnement (« Le ciel, le soleil et la mer » de François Deguelt, « Chez Laurette » de Michel Delpech, etc.) ou simple choriste (dans des milliers de chansons), chanteuse de doublage (Vanessa Redgrave dans Camelot, Aurore dans le redoublage de La Belle au Bois dormant) et de génériques de dessins animés (Heidi). (Vous pouvez lire mon interview de Danielle Licari et vous procurer sa compilation réalisée par Marianne Mélodie en partenariat avec Dans l'ombre des studios).


Danielle Licari : Montage

Pour lui donner la réplique (Guy, joué par Nino Castelnuovo), Michel Legrand et Jacques Demy se tournent vers José Bartel (1932-2010). José côtoie le monde des choristes de studio sans vraiment en être un : chanteur soliste pour des orchestres (Aimé Barelli), des groupes vocaux (Les Masques) ou des doublages (Le Roi Louie dans Le Livre de la Jungle), chef d’orchestre de musique « typique », compositeur (pour Serge Reggiani), arrangeur, percussionniste, comédien, directeur artistique de labels, José Bartel est un touche-à-tout surdoué. Son interprétation de Guy (rôle qu’il enregistre la jambe plâtrée suite à un accident de voiture) est bouleversante. (Lire sur Dans l'ombre des studios mon hommage à José Bartel et les mémoires de José).


José Bartel : Montage

Marc Michel
Georges Blanès
(1928-2021) prête sa belle et chaude voix de baryton à Marc Michel (Roland Cassard) pendant tout le film. Après des débuts dans son Algérie natale, il travaille à Paris comme chanteur d’orchestre et meneur de revues. Il enregistre plusieurs disques en soliste, démarre une carrière d’acteur au cinéma (notamment pour Philippe Clair), au théâtre et dans des opérettes. En complément, il travaille beaucoup pour la publicité, le doublage et les musiques de films. Michel Fugain lui propose de devenir directeur artistique de son « Big Bazar » et Georges Blanès compose avec le chanteur plusieurs de ses tubes (« Le Printemps », ou « Comme un soleil » repris aux Etats-Unis par Dean Martin, sa fierté). Pour plus d'informations, lire mon hommage à Georges Blanès

Georges Blanès : Montage

Claudine Meunier
Dernier élément de ce quatuor amoureux, Madeleine (Ellen Farner) à qui Claudine Meunier (née en 1926) prête sa voix douce et élégante, certainement l’une des plus belles de ce métier. Elle enregistre son rôle en présence de la comédienne qui devait à l'origine interpréter le rôle de Madeleine à l'image, avant que pour des raisons de co-production Ellen Farner ne la remplace. Cette comédienne n'est autre que Danielle Ajoret (alors pensionnaire de la Comédie-Française), qui a pu nous confirmer l'information. Passionnée de jazz, Claudine a fait partie de trois groupes majeurs du jazz vocal français et international : The Blue Stars of France, Les Double Six (sous son nom de jeune fille, Claudine Barge) et The Swingle Singers. Dans ces trois groupes on peut l’entendre chanter plusieurs soli. Claudine a également prêté sa voix chantée à Mme Jumbo dans le redoublage de Dumbo (1979) et été choriste d’Andy Williams, Dionne Warwick, Claude François, Gilbert Bécaud (elle est la voix accusatrice de "L’orange"), Henri Salvador (chant solo sur "Cherche la rose"), etc. (Lire mon portrait de Claudine Meunier). 

Claudine Meunier : Montage

Christiane Legrand devant un disquaire
aux couleurs des Swingle Singers
Hors de ce quatuor amoureux, mais colonne vertébrale du film, Madame Emery (Anne Vernon) a la voix de Christiane Legrand (1930-2011). C’est certainement le rôle qui a été le plus difficile à distribuer, à la fois autoritaire, raffiné et protecteur. Sur une suggestion d’Agnès Varda, Demy et Legrand choisissent la sœur du compositeur, bien qu’elle soit plus jeune que le rôle. Christiane est un personnage incontournable dans l’œuvre de son frère, avec qui elle a de nombreuses fois chanté en duo. "Il y avait un lien très fort et très affectueux entre eux" se souvient Olivier Bonnet, fils de Christiane Legrand, "et Michel a été très généreux avec elle, la soutenant financièrement pour qu'elle puisse garder à la maison Pierre Fatome (mari de Christiane, ndlr), lorsque la santé de ce dernier a décliné." 
Christiane Legrand est élément central dans le monde des studios des années 50-60, comme chanteuse soliste, choriste et "vocal contractor". Son swing parfait et sa voix douce en font à la fois une figure du jazz vocal (soprano lead de la plupart des groupes vocaux de l'époque (Blue Stars, Double Six, Swingle Singers), fondatrice de groupes (Les Barclay, Quire, etc.) et formatrice respectée) et des chansons pour enfants. Elle est entendue dans des milliers de chansons et de musiques de film. "Ma mère était tellement belle et exceptionnelle sur scène" nous rappelle Olivier Bonnet. "Quand elle répétait avec les Swingle Singers, on passait des week-ends chez Ward Swingle, à jouer avec ses filles et leurs deux dalmatiens. Ma soeur et moi connaissions le répertoire des Swingle par coeur, et je me rappelle la moindre note. Quand on allait les voir en concert, on était très tendu car on entendait la moindre imperfection." Par l'aura et le talent de Christiane, et le métier de son deuxième mari Pierre Fatome (ingénieur-du-son et impresario), le couple reçoit chez lui les plus grands. "Maman m'avait présenté à Duke Ellington lorsque les Swingle l'ont accompagné en 1969, mais je me souviens aussi de passages à la maison de Dizzy Gillespie, Mercedes Sosa, Astor Piazzolla, et de jeunes artistes produits par mon beau-père comme Catherine Lara et Catherine Ribeiro. Claude Nougaro aussi, avec sa fille Cécile que je trouvais super charmante, malheureusement je lui avais montré mes sculptures et elle ne les aimait pas du tout (rires)."


Christiane Legrand : Montage


Claire Leclerc
Elise
(Mireille Perrey), la tante de Guy dans le film, a la voix de Claire Leclerc (1915-2009), qui "vieillit" sa voix pour l'occasion. On dit d’Eliane Thibault (Mary Poppins) qu’elle a « un sourire dans la voix », Claire Leclerc en a quant à elle des « sanglots ». Son timbre n’est pas sans rappeler celui de l’américaine Dinah Shore. La chanteuse a un parcours en dents de scie qui représente bien les difficultés de ce métier. Débuts dans des cabarets rive gauche où elle est la première à chanter du Léo Ferré, puis un grave accident la laisse éloignée de la scène. Elle devient alors une artiste de studio, participant à des doublages (voix chantée de Marylin Monroe dans Les hommes préfèrent les blondes (1954), de Lady dans La Belle et le Clochard (1er doublage, 1955)) ou à des musiques de film (voix chantée de Caterina Valente dans Casino de Paris). C’est son amie Vline Buggy (grande parolière des années yéyé) qui demande à son mari chef d’orchestre Christian Chevallier de l’engager comme choriste dans son groupe « Les Angels » (pour Richard Anthony, Annie Cordy, Henri Salvador, etc.). Fin des années 60, elle quitte le métier et enchaîne les petits boulots jusqu’à sa retraite. (Hommage à Claire Leclerc par François Justamand sur La Gazette du Doublage)

Claire Leclerc : Montage



L'enregistrement des chanteurs (non-crédités)

Jean Cussac
Son nom n’a jamais été mentionné dans le générique ni dans les pochettes de disques successives de la musique du film, et pourtant il a une jolie partie soliste dans le film et sa voix de baryton est reconnaissable entre mille : Jean Cussac (né en 1922) prête sa voix à Monsieur Dubourg, le joaillier. C’est lui-même qui m’en avait parlé lorsque je l’avais interviewé pour la première fois en 2006 (lire mon article pour La Gazette du Doublage, reproduit ici). Jean participe comme tous ses camarades à de nombreux chœurs (pour Edith Piaf, Luis Mariano, Guy Béart), mais aussi à des doublages (voix chantée de Roger dans Les 101 Dalmatiens (1961), du Prince dans Blanche-Neige et les sept nains (redoublage de 1962), du narrateur-chanteur dans Merlin l’Enchanteur (1963)). De formation classique, il donne bon nombre de concerts lyriques, d'opérettes, et devient même « maître de chapelle » de l’Église Saint-Louis des Invalides (Paris). Dans les années 80, dernière décennie d’activité avant sa retraite, il devient directeur musical de doublages, principalement pour Disney (Basil détective privé, Rox et Rouky, redoublages de Dumbo, La Belle au Bois dormant, etc.).

Jean Cussac : Montage

Raoul Curet
L’identité du chanteur prêtant sa voix à Aubin (Jean Champion) le patron du garage est restée inconnue pendant cinquante ans. Elle paraissait être celle d’un comédien plutôt que d’un choriste « traditionnel ». C’est en découvrant par hasard que le comédien Raoul Curet (1920-2016, voix française de Glenn Ford) avait été chanteur et avait même fait partie du quatuor vocal Les Quat’ Jeudis (« cousins » des Frères Jacques, qui ont fait carrière aux Etats-Unis en accompagnant Carol Channing dans Show Girl), que j’ai fait le rapprochement entre sa voix et celle d’Aubin. L’interviewant en août 2015 dans le sud de la France où il est retiré, je lui demande « Avez-vous participé aux Parapluies de Cherbourg ? ». A cette question, le regard de l’acteur de 95 ans s’illumine et il me dit mot pour mot cette réplique d’Aubin qu’il n’avait certainement pas prononcée depuis 1963 « Ah le petit con depuis qu’il a quitté l’armée il se conduit comme le dernier des voyous ». Il fait également la voix d’un déménageur joué par Paul Pavel (« Alors pousse ta viande, tu vois bien qu’tu gênes ! »).
Fidèle de l'univers de Jacques Demy, le réalisateur le filme dans Trois places pour le vingt-six (1988) et dans une publicité pour Dop.

Raoul Curet : Montage

Michel Legrand
(1932-2019), à la manière d’Hitchcock, s’attribue toujours quelques répliques dans ses musiques de films. Dans Les Parapluies de Cherbourg, il prête sa voix au facteur qui apporte le courrier à Madame Emery (acteur non-identifié) ainsi qu’à l’un des mécaniciens, Bernard (Pierre Caden), et non Jean comme indiqué par erreur dans la pochette CD du coffret L'Intégrale Jacques Demy - Michel Legrand.

Michel Legrand : Montage

La voix de Jean (joué par Jean-Pierre Dorat, comédien qui deviendra par la suite un grand directeur artistique de doublage), mécanicien qui préfère le cinéma à l’opéra, est celle du choriste Jean-Claude Briodin (né en 1932), que l’on peut entendre avec ce timbre à la fois chaud et doux en soliste dans plusieurs titres des « Double Six » et des « Troubadours » (les « Peter, Paul and Mary » français), mais aussi dans quelques musiques de film comme Un homme est une femme (duo "L'amour est bien plus fort que nous" avec Nicole Croisille, dans la version film).

Jean-Claude Briodin : Montage

Né en 1930, José Germain (voix de basse des Swingle Singers, choriste et saxophoniste) prête sa voix très reconnaissable (Scat Cat dans Les Aristochats) au patron du café (joué par Roger Perrinoz), avec cette réplique chantée assez surréaliste « Vous n’avez pas d’monnaie, vous êtes tous les mêmes avec vos gros billets ». José, qui avait conservé la fiche de paie de l’enregistrement, pensait n’avoir fait que de chœurs pour ce film, et ne se souvenait plus du tout de ce rôle.

José Germain : Montage

Peu de temps après dans le film apparaît le personnage de Ginny (Jane Carat), la prostituée qui passe la nuit avec Guy. C’est grâce à Anne Germain que j’ai pu identifier la voix de la soprano Jeanette Baucomont (1926-2019), qui me l’a par la suite confirmé. Choriste elle aussi, elle était avec Jean Cussac l'un des deux piliers « lyriques » des Swingle Singers. Les enregistrements solistes de Jeanette sont rares, mais on peut l'entendre dans quelques chansons de Jacques Hélian.

Jeanette Baucomont : Montage

Dans la pochette du coffret CD Demy-Legrand, le nom de Jacques Demy est attribué aux voix du « client égaré » et du serveur. Je ne peux le confirmer d’oreille. Il est possible qu’il ait également fait la voix d’autres rôles (comme le pompiste aux répliques improbables).


Quelques photos des séances

Plusieurs séances d'enregistrement des Parapluies de Cherbourg sont immortalisées par l'appareil photo d'Agnès Varda. En voici quelques photos. Mes remerciements à Rosalie Varda et Shérine El Sayed Taih (Ciné-Tamaris) pour les scans et l'autorisation de les reproduire ici.
Toutes ces photos sont (c) succession Agnès Varda - fonds déposé à l'Institut pour la photographie.


Filage des Parapluies de Cherbourg avec orchestre et chanteuses
De gauche à droite, devant Michel Legrand (et un percussionniste de dos) : les cornistes André Carradot, Georges Durand et Michel Bergès, la harpiste Lily Laskine (cachée), le réalisateur Jacques Demy, les chanteuses Danielle Licari (Geneviève), Christiane Legrand (Mme Emery) et Claudine Meunier (Madeleine)



Filage des Parapluies de Cherbourg avec Danielle Licari (Geneviève) et le corniste Georges Durand



Filage des Parapluies de Cherbourg : Michel Legrand et Jacques Demy face à face



Filage des Parapluies de Cherbourg : Danielle Licari, Christiane Legrand et Claudine Meunier découvrent les partitions



Enregistrement de la chanson du Carnaval dans Les Parapluies de Cherbourg :
les percussionnistes en action



Répétition au piano du Poste Parisien avec Jacques Demy, Michel Legrand et Claire Leclerc (Tante Elise) pendant l'enregistrement des Parapluies de Cherbourg



Claudine Meunier (Madeleine) en enregistrement pour Les Parapluies de Cherbourg



Nino Castelnuovo (Guy) assistant à l'enregistrement de la voix de son personnage par José Bartel (jambe plâtrée), avec Jacques Demy



Le mixage

Pierre Davanture
Responsable technique de la Fox (dont la direction était basée à l'époque aux Studios Fox-Europa, à Saint-Ouen), l'ingénieur-du-son Pierre Davanture se souvenait au micro de François Justamand (au Salon des Séries et du Doublage): "En tant que responsable des doublages de la Fox, je faisais des enregistrements et mixages, mais la Fox me demandait également de vérifier les installations techniques dans les cinémas avant chaque sortie de film, je me déplaçais avec les bobines et on faisait des répétitions. Parfois, si l'installation sonore n'était pas suffisante, la Fox refusait à un cinéma de projeter un film. Pour la sortie des Parapluies de Cherbourg (distribué par la Fox, ndlr), Jacques Demy m'a emmené avec lui dans les cinémas où le film sortait. Ca posait beaucoup de problèmes. Le son stéréo a été lancé par la Fox en même temps que le Cinémascope, avec écran large, et donc gauche, centre, droite, et piste arrière pour les ambiances. En France et ailleurs, beaucoup de réalisateurs ou de producteurs ont combattu le Cinémascope, parfois en proposant des solutions alternatives qui ne tenaient pas la route. La MGM par exemple faisait de la stéréo avec du son optique. 
Les Parapluies de Cherbourg avait été tourné en 1:85 et mixé au Poste Parisien par Claude Panier, qui avait conseillé à Jacques Demy de mettre de la stéréo sur cette image 1:85. On m'avait demandé d'être présent au Poste Parisien à la double-bande (projection de travail, ndlr) du film. Je me suis aperçu qu'il y avait un problème: on a la stéréo à gauche et à droite pour une image qui n'a pas la largeur de recevoir ces trois pistes sonores. Quand la projection s'est terminée, Agnès Varda a dit à Jacques Demy : "Jacques, tu t'es planté". Je repars à Saint-Ouen, et dans l'après-midi je reçois un appel: "Jacques Demy vient avec ses bobines, il va faire une double-bande aux Studios de Saint-Ouen". On a fait une projection dans le grand auditorium. Jacques Demy a admis devant moi son erreur. Le film a été remixé complètement par un ingénieur-du-son à Boulogne qui s'appelait Jacques Maumont, qui était spécialiste de la stéréo, il a pu corriger le mixage mais n'a évidemment pas pu élargir l'image. Du coup, quand on allait dans les cinémas avec Demy, on se disputait un peu car ce n'était pas l'époque des écrans larges donc Demy me disait "je ne comprends pas, on n'entend pas bien à gauche et à droite" car les haut-parleurs de gauche et de droite de la stéréo se trouvaient derrière les rideaux, sur les côtés. Je lui disais qu'il fallait ouvrir les rideaux. Il me répondait "si on lève les rideaux, on verra du noir". "Oui, mais le son sortira mieux"..."


La bande-annonce

Roger Rudel
La bande-annonce d'époque du film est assez amusante, puisqu'elle présente des extraits du film vus à travers l'évolution des progrès techniques: photographie, cinéma muet, etc. L'avant-dernière étape montre l'invention du cinéma parlant avec en noir et blanc, une scène du film jouée par Anne Vernon, avec semble-t-il sa vraie voix parlée (troublante, car assez proche de la voix parlée de Christiane Legrand). Suivie de la dernière étape, "1964, invention du cinéma chantant en couleur" où la même scène est chantée par Christiane Legrand.
Le "speaker" de cette bande-annonce n'est autre que le grand Roger Rudel, voix française de Kirk Douglas, Ross Martin (Artemus Gordon dans Les Mystères de l'Ouest, etc.) et habitué aux commentaires des actualités françaises.


La bande-annonce
(c) Ciné-Tamaris


Récapitulatif par personnages

LES PARAPLUIES DE CHERBOURG (1964) de Jacques Demy
Musique et direction : Michel Legrand
Paroles des chansons : Jacques Demy
Arrangements : Michel Legrand, et peut-être Jean-Michel Defaye*
Enregistrement des musiciens : Jean-Michel Pou-Dubois et Claude Ermelin (studio Charcot / Europasonor pour l'orchestre, Église Saint-Germain-L'Auxerrois* pour les grandes orgues)
Enregistrement des chanteurs : Louis Perrin (Poste Parisien, juillet 1963*)
Mixage : Claude Panier**, puis Jacques Maumont** sous la supervision de Pierre Davanture**
Employeur des musiciens et des chanteurs : Les Productions Michel Legrand
Catherine Deneuve... Geneviève Emery… Danielle LICARI
Nino Castelnuovo... Guy Foucher… José BARTEL
Anne Vernon... Madame Emery… Christiane LEGRAND
Marc Michel... Roland Cassard… Georges BLANES
Ellen Farner... Madeleine… Claudine MEUNIER
Mireille Perrey... Tante Élise… Claire LECLERC
Jean Champion... Aubin… Raoul CURET*
Pierre Caden... Bernard… Michel LEGRAND*
Jean-Pierre Dorat... Jean… Jean-Claude BRIODIN*
Harald Wolff... Monsieur Dubourg… Jean CUSSAC*
Jane Carat... Ginny… Jeanette BAUCOMONT*
Patrick Bricard... Serveur… Jacques DEMY***
Roger Perrinoz... Patron du café… José GERMAIN*
Paul Pavel... Deuxième déménageur (« Alors pousse ta viande, etc. »)… Raoul CURET*
Le facteur… Michel LEGRAND***
Le client égaré… Jacques DEMY***
Bernard Garnier… Mécanicien en 1959 (« Ben qu’est-ce qu’y t’prend ? »)… Michel LEGRAND ?*
Gisèle Grandpré… Madame Germaine (tenancière de la boîte à matelots)… ?
Philippe Dumat... Client du garage en 1957… ?
Jean-Pierre Chizat... Pierre le mécanicien 1957… ?
Michel Benoist... Acheteur de parapluies… ?
François Charet… Mécanicien en 1959 (« Le patron te d’mande ! »)… ?
Jacques Camelinat... Client du garage en 1959… ?
Premier déménageur (« Qu’est-ce que tu cherches ? »)… ?
Dorothée Blanck... Entraîneuse au café (« Tu viens danser ?»)… ?
Bernard Fradet... Pompiste… ?
Choeurs : Jeanette BAUCOMONT*, Christiane LEGRAND*, Monique ALDEBERT*, Berthe KAL*, Jacqueline « Catherine » SARASSAT*, Geneviève ROBLOT-MIROGLIO*, Michèle DORNEY*, Ward SWINGLE*, Bob SMART*, Vincent MUNRO*, Raoul CURET*, Georges COUR*, Jean HOFFMANN*, Jacques HENDRIX*, Jean AlLDEGON*, Jean CUSSAC*, Jean-Claude BRIODIN*, Ivan JULLIEN* et Fernand PASTERIS*.
Musiciens : Georges GAY* (1er tp de section), Roger GUÉRIN*, Ivan JULLIEN* (chorusmen tp), Pierre SELLIN*, Gilbert DIAZ*, Alex CATUREGLI*, Christian BELLEST* (tp), André PAQUINET*, Raymond KATARZYNSKI* (tb lead), Raymond FONSEQUE* (tb lead et tb basse), Benny VASSEUR* (chorusman tb), Bill TAMPER*, Serge TEVET*, Maurice GLADIEU*, Christian GUIZIEN*, Camille VERDIER*, Francis LUSSIEZ*, Jacques TOULON*, Pierre VANDOMBER* (tb), Charles VERSTRAETE* (tb et/ou acc), Elie RAYNAUD*, Gérard PERESSE* (tuba), Roger BOURDIN* (fl solo), Lou GAMME*, Jacques ROYER*, Robert HÉRICHÉ*, Marcel VIGNERON*, Maurice PRUVOT*, Rémy COTTON*, Marcel DUBOIS* (fl), Paul HONGNE* (bsn), Robert JEANNOUTOT*, André CAURETTE* (hb, cor anglais), Pierre DUMONT*, Xavier DELWARDE*, Michel BERGES*, Gérard COUTELET*, Georges DURAND*, André CARRADOT* (cor), Jo HRASKO*, Jean ALDEGON*, René NICOLAS* (sax alto), Marcel HRASKO*, Georges BESSIERE* (sax ténor), Pierre GOSSEZ* (sax ténor, sax baryton, cl, bcl), Georges GRENU* (sax ténor, cl), Armand MIGIANI* (sax baryton), Roger LEMAITRE* (sax, cl), Lily LASKINE*, Jean-Claude DUBOIS* (hp), André DAUCHY*, Jean CARDON* (acc), René DUCHAUSSOIR*, Raymond GIMENES*, Pierre CULLAZ*, Léo PETIT*, Dominique GESINA* (g), Maurice VANDER*, Alain BERNAUD* (p, célesta), Eddy LOUISS* (orgue), Léo SLAB* (vln solo), Lionel GALI*, Jean GAUNET*, José “Pepito” SANCHEZ*, Léon LOCATELLI*, Pierre COUZINIER*, Jean GITTON*, Michel GANOT*, Roger BERTHIER*, Georges GUÉRIN*, André KARREN*, Pierre DEFAY*, Michel BAILLE*, Charles VANDEVOIR*, Roger SAVARD*, Gilbert BREL*, Lucien PEROTIN*, Pierre SIMON*, Léon BRONSCHWAK*, Jacques CHARRIER*, Frank MANIGLER*, Marie-Antoinette MASSON*, Raymond GOUTARD*, Michel CRON*, Antoine CORNU*, Frédéric GEYRE*, Pierre DARRIEUX*, Jacques-Francis MANZONE*, Henro ROSES*, Basile STAVRIANO* (vln), Paulette PINCHINAT* (vln, régie), Roger LEPAUW*, Colette LEQUIEN-POTET*, Jean MAYOR*, Serge COLLOT*, Stéphane WIENER*, Richard POSTEL*, Guy BRUERE*, Bruno RATAZZI* (vla), Jacques WIEDERKER*, Pierre LABADIE*, Jean HUCHOT*, Micheline BURTIN*, Jean LAMY*, Robert DUPUIS*, Jacques SUDRAT*, Louis INGIGLIARDI* (vlc), Guy PEDERSEN*, François RABBATH*, Alphonse MASSELIER*, Jacques CAZAURAN*, Serge CAENS*, Willy LOCKWOOD*, Charlie BLAREAU*, Robert PRUDHON*, Jacques BEAUFOUR*, Lucien SIMOENS*, Jean-Marc ROLLEZ* (b), Gus WALLEZ*, André ARPINO*, Roger PARABOSCHI*, Pierre LEMARCHAND* (dms), Jean-Pierre JACQUILLAT*, Sylvio GUALDA*, Jean-Pierre DROUET*, Jean-Claude CASADESUS*, Michel LORIN*, Alain JACQUET* (perc). Et Claude DENJEAN* ( vln ? p ?), Maurice CARON* (cordes ?), Pierre FRANCOIS* (cordes ?), René CHAYNES* (cordes ?), Roger CACHA* (cordes ?), Pierre MONNOT* (régie ?), Francis CAUMEL* (harpe ?), Daniel CONCHE* ( ???), Robert TABARY* ( ???), Jean ou Jean-Pierre CLERVOIX* ( ???), Claude MAHIEUX* ( ???), Germaine BREL* ( ???), Jacques BORDERIEUX* ( ???), Raymond JOIN* ( ???), André DENIS* ( ???)

Sources : Générique et pochettes de disques
* : Compléments Rémi Carémel / Dans l’ombre des studios (identification des voix: Rémi Carémel avec l'aide d'Anne Germain et les confirmations de Jean Cussac, Raoul Curet, Jean-Claude Briodin, José Germain et Jeanette Baucomont, listing des musiciens: Philippe Bourdin (instruments: Michel Laplace et Rémi Carémel), informations techniques: Claude Ermelin)
** : Complément François Justamand / La Gazette du Doublage (interview de Pierre Davanture)
*** : Complément Stéphane Lerouge (coffret CD Demy-Legrand)


Récapitulatif par ordre d'apparition des morceaux dans le film

1.1. Générique – Orchestre (flûte solo (certainement Roger Bourdin), cor solo, cor anglais solo, basson solo, clarinette, cb/batterie (brushes), célesta, cordes, piano et vibraphone à résonateurs ouverts)
Le début du générique, pour exposer le grand thème de l’amour (Thème A), est écrit à 4 voix qui rentrent l’une après l’autre. À la deuxième exposition, une série d’arpèges se déploie ; on notera la même formule d’écriture lors de plusieurs monologues de Madame Emery (souvent dans une connotation sociale, comme lors de la scène de la bijouterie ou lorsqu’il est question de mariage ; dans la suite symphonique, c’est un mélange de harpe et de clavecin qui les interprète). À la troisième exposition, un contrechant apparaît dans l’aigu ; il sera utilisé indépendamment, comme thème à part entière (Thème B) et le plus souvent comme récitatif, entre Guy et Geneviève, dans les scènes où, justement, le grand thème se déploie. À ce moment du générique, une formule d’accompagnement rythmique et harmonique est introduite, qui va souvent être utilisée lors des apparitions de Roland Cassard. En d’autres termes, le générique/ouverture expose déjà toutes les composantes du drame et tous les personnages centraux.
1.2. Scène du garage – Orchestre (cb/batterie/guitare électrique, cordes, cuivres (dont très bonne section de trompette menée par Georges Gay ; un trombone au moment du dialogue, pour faire la basse ; et bon lead alto (Jo Hrasko)), percus, castagnettes, accordéon cow bells, temple blocks, à la fin solo de trompette bouchée), ??? (Client du garage 1957 : « C’est terminé », « merci »), José Bartel (Guy), Raoul Curet (Aubin : « Foucher, tu peux faire une heure de plus ce soir ? », « Tu vérifieras l’allumage de la Mercédès, etc. »), ??? (Pierre : « oui ! »), Michel Legrand (Bernard : « Est-ce que tu viens avec moi ce soir au volley ? ») et Jean-Claude Briodin (Jean : « Qu’est-ce que tu vas voir ? », « j’aime pas l’opéra… », « tous ces gens qui chantent », etc.)
Il est évident que Legrand et Demy introduisent ici à la fois les règles du jeu : l’opéra et le cinéma, le chant au lieu de la parole, les situations de la vie quotidienne. Legrand force l’attention par un style très libre puisqu’on fait à la fois référence à Carmen et au bal populaire, au sein d’un morceau très jazzy.
1.3. Devant le magasin – Orchestre (sax et clarinettes doublées par la guitare, cb/batterie (brushes)/guitare sèche, bois (dont flûtes), cordes dont premiers violons divisés, célesta et glockenspiel, cor, clarinette basse), Danielle Licari (Geneviève), José Bartel (Guy), Christiane Legrand (Mme Emery), ??? (Client du magasin de parapluies 1957 : « Un parapluie », « Un parapluie, un parapluie noir »)
L’usage des « brushes » permet de maintenir un climat jazzistique au sein d’une écriture finalement très classique. Ici, même si l’on est censé parler, les marches harmoniques chromatiques et les intervalles de neuvième supposent de vrais chanteurs.
1.4. Chez Tante Elise – Orchestre (cb/batterie toujours brushes/guitare, vibraphone, guitare solo (Léo Petit ?), cordes (dont un ensemble plus chambriste que dans les autres scènes, jusqu’à l’arrivée de Madeleine), sax solo, bois, hautbois, harpe, cuivres dont cors et trombones), Claire Leclerc (Elise), José Bartel (Guy) et Claudine Meunier (Madeleine)
Réduire le quintette à cordes est un procédé bien rôdé pour introduire un climat de tendre intimité (songeons à l’introduction de la scène d’amour de Faust de Gounod). Legrand, pour l’arrivée de Madeleine, ralentit le tempo et déploie les cordes pour évoquer son caractère sage, calme, sa maturité, et signaler l’importance que son personnage est voué à revêtir pour la suite de l’action. On note aussi que l’amorce du thème est toujours descendante.
1.5. Dans la rue – Orchestre (cb/batterie, harpe, cordes dont pizzicati, cors, guitare sèche), Danielle Licari (Geneviève) et José Bartel (Guy)
L’orchestration est plus rutilante : cette-vie là est plus séduisante que l’univers posé incarné par Madeleine. L’amorce du thème de Madeleine était descendante, celle des répliques de Geneviève et de Guy commence au contraire par un intervalle ascendant.
Inédit en disque 1 : à l’Opéra – Orchestre (cordes, vents, glockenspiel, xylophone, cymbale suspendue, tambour de basque, fouet)
1.6. Au dancing – Orchestre (cb/piano, accordéon, cordes en formation réduite, percus cow bells), Danielle Licari (Geneviève), José Bartel (Guy) et Jacques Demy (Garçon de café 1957 : « Un machin ? »)
Ici, amusante superposition (pratiquée déjà Mozart dans Don Giovanni) entre la musique qu’entendent les personnages et celle des dialogues du film. Quel que soit le style musical, Legrand est parfaitement à l’aise. C’est l’un des moments de l’œuvre où il emploie une prosodie réaliste (changer d’chaussur’), procédé auquel il renonce ailleurs, lorsque la mélodie prend le pas sur le texte et rend l’auditeur plus tolérant aux « e » muets plus insistants (notamment, dans le grand air : « mais je ne pourrais jamais vivre sans toi »)
1.7. Sur le quai – Orchestre (cb/batterie, cordes, vibraphone, hautbois (Robert Jeannoutot), célesta, harpe), José Bartel (Guy) et Danielle Licari (Geneviève). Dans cet air, Legrand utilise le médium et le grave de Danielle Licari, qui descend au sol2.
1.8. Dans le magasin des parapluies – Orchestre (harpe, cordes, cor solo (sans vibrato), piano, cuivres, vibraphone, cb/batterie, sax solo, flûtes, trompette solo à 4’26 (Ivan Jullien), flûte solo, trombone solo (Raymond Katarzynski)), Christiane Legrand (Mme Emery), Danielle Licari (Geneviève), Jacques Demy (Client égaré : « Le marchand de couleurs s’il vous plaît ? ») et Michel Legrand (Le facteur : « Bonjour mademoiselle, bonjour Madame ! »)
xylophone, vibraphone, piccolo dans le grave (dialogue Geneviève/Me Emery).
Ici, les arpèges, fidèles au rôle qui leur a été assigné dans le générique, interviennent autour de la question, très sociale, du mariage. Dès la réception de la lettre, l’univers feutré et convenu de la famille Emery explose avec l’irruption du jazz et de brefs solos des pupitres : la réalité rattrape le foyer. L’intervention des répliques est étroitement calée sur le rythme, il ne s’agit plus d’un récitatif mais la transition est insensible.
Inédit en disque 2 : Intro à Dubourg – Orchestre (cuivres, xylophone)
1.9. Chez Dubourg, le joaillier – Orchestre (cuivres, marimba, saxophones, cors, trombones, cb/batterie, cordes, piano notamment pour renforcer la basse des cordes, à la façon d’un clavecin, qu’il utilise d’ailleurs dans la suite symphonique, pour ce même passage), guitare (au moment du solo de Dubourg), harpe en brèves interventions), Jean Cussac (Dubourg), Georges Blanès (Roland Cassard), Christiane Legrand (Mme Emery) et Danielle Licari (Geneviève).
Michel Legrand a déclaré avoir commencé la composition de l’œuvre avec le monologue de la mère. C’est un mélange habile d’air et de récitatif, plus classique que le reste de la composition mais qui convient parfaitement à l’esprit conservateur de Madame Emery. Dans sa suite symphonique, le thème est l’objet d’un traitement raffiné de « mélodie de timbres » avec l’alternance de plusieurs bois.
1.10. Dans le magasin – Orchestre (cb/batterie, cuivres (dont contrechant et même solo de trombone écrit, cor, pêches orhestrales (bois et cuivres avec batterie et cb), trombone basse (Raymond Fonsèque ?), vibraphone, flûtes, wood block), Christiane Legrand (Mme Emery), Danielle Licari (Geneviève) et Georges Blanès (Roland Cassard)
La marche harmonique du thème central a maintes fois été utilisée par Michel Legrand (il la reprend telle quelle dans le générique d’Oum le Dauphin. On notera l’écriture des dialogues en récitatifs extrêmement vivants, qui font oublier le chant (pourtant d’une écriture exigeante), au profit de l’action. La progression du traitement du thème central, par couches successives d’instruments, correspond à l’évolution de Madame Emery, peu à peu conquise par Cassard. Dans la gravité du climat, une échappée stylistique (« il faudrait par exemple, je ne sais pas, l’emmener au spectacle ») donne une idée de la vie facile permise par Cassard.
1.11. Devant le garage – Orchestre (cordes, cuivres (trombones : belle texture, avec trombone basse), glockenspiel, harpe, batterie, timbales), Danielle Licari (Geneviève) et José Bartel (Guy)
La scène commence avec le thème B. Les arpèges qui l’accompagnent sont le rappel angoissant du destin étouffant qui guette Geneviève. Ils cessent quand Guy s’exprime mais réapparaissent lorsqu’il mentionne le mariage. Le grand thème A peut alors se déployer (avec ses écarts prosodiques), dans une orchestration d’un esprit tout à fait symphonique, avec le contrechant en guise de couplet. A et B se superposent, portant le lyrisme à son comble. La scène se termine sur un unisson glaçant de mi.
1.12. Chez Elise – Orchestre (harpe, cordes, cuivres (corniste sans vibrato), piano), Claire Leclerc (Elise), José Bartel (Guy), Danielle Licari (Geneviève) et Christiane Legrand (Mme Emery)
Cette scène musicalement suspensive constitue une respiration, avec les cordes munies de sourdines et des accords de harpe et de guitare. On retrouve le thème du contrechant puis le grand thème chargé des fameux arpèges.
1.13. A l’appartement – Orchestre (célesta, cymbale crotale, cb/batterie, cordes, harpe, flûtes, clarinette solo (contrechant, possible Pierre Gossez)), Danielle Licari (Geneviève) et Christiane Legrand (Mme Emery)
Toute la scène, presque une berceuse (la mère essaye de consoler la fille), est fleurie d’arpèges de célesta, d’arpèges de harpe, de traits de cordes et de bois. Une modulation saisissante traduit l’opposition des vues de Geneviève et Madame Emery (« Non, jamais je ne l’oublierai »). Ce thème est malheureusement absent de la suite symphonique.
1.14. Adieux à Elise – Orchestre (cb/batterie, harpe, cordes, bois (contrechant de cor anglais), cor anglais solo, vibraphone, célesta, guitare), Claire Leclerc (Elise), José Bartel (Guy) et Claudine Meunier (Madeleine)
Le thème d’Élise, avec son triolet de noires, tourne sur lui-même : elle n’a pas d’avenir et vit confinée dans l’étroitesse de son appartement. La dernière réplique de Madeleine, sur une même note, indique à la fois sa constance et la tendresse qu’elle ressent pour Guy.
1.15. La gare (Guy s’en va) – Orchestre (vents dont cors, cordes, hautbois solo, harpe (Lily Laskine), timbales, cymbales), Danielle Licari (Geneviève) et José Bartel (Guy)
Michel Legrand ménage ses effets, avec des solos successifs d’une grande expressivité avant grand l’arrivée des cordes puis du tutti, qui conduisent les chanteurs au maximum de leur expansion vocale dans le film, avec le beau ré4 de Danielle Licari. La cymbale suspendue, frappée avec une baguette douce, ajoute à la dimension symphonique. Là encore, la conclusion est un unisson : Legrand attend la fin du film pour harmoniser la dernière note du Thème A.
1.16. Dans le magasin – Orchestre (clarinette, vibraphone, cb/batterie, cordes, xylophone, sax, cuivres (section trombones), harpe, glockenspiel), Christiane Legrand (Mme Emery), Danielle Licari (Geneviève) et Michel Legrand (Le facteur)
Ce long tunnel en duo est l’occasion d’une grande variété de climats ; après le facteur, l’élément rythmique régresse. Le marimba en tremolos évoque les craintes de Geneviève à propos de Guy. Après l’évanouissement, l’harmonie prend franchement le pas sur le rythme, décuplant l’impact des dialogues. Lorsque Madame Emery évoque Roland Cassard, aussitôt, les arpèges se font entendre… Une grande descente de cordes souligne la détresse de la mère qui ne peut pas « y penser sans frémir ».
1.17. Le dîner - Orchestre (piano, hautbois (certainement Robert Jeannoutot), cb, cordes, harpe, cor), Georges Blanès (Roland Cassard), Christiane Legrand (Mme Emery) et Danielle Licari (Geneviève)
La scène est portée par le thème de Madame Emery et ses arpèges caractéristiques. Michel Legrand se permet quelques entorses prosodiques (la situation), du fait de l’omniprésence mélodique. Après avoir mis la couronne, Geneviève regarde la caméra tandis que le thème B du générique se fait entendre, avec harpe et piano : Cassard la voit avec les yeux de l’amour, comme Guy. Les arpèges font aussitôt après leur retour. On notera l’omniprésence du hautbois solo, qui rend la scène encore plus expressive. Le motif court, ascendant, de la déclaration de Cassard, est répétitif et insistant. Pour Madame Emery, c’est la tessiture la plus élevée du film, atteignant le mi4, hauteur à laquelle il est plus difficile de chanter avec une voix naturelle et où le soutien est nécessaire. L’émotion doit étrangler la voix du personnage...
1.18. Récit de Cassard – Orchestre (cordes, harpe, cors, clarinette, hautbois (certainement Robert Jeannoutot), glockenspiel, timbales, célesta, sax), Georges Blanès (Roland Cassard), Christiane Legrand (Mme Emery) et Danielle Licari (Geneviève)
Le calme balancement du thème évoque la sécurité que peut procurer Cassard, ses chromatismes évoquent plutôt sa sensibilité, déjà dépeinte dans Lola. Un joli solo de violoncelle, correspondant parfaitement au timbre de Georges Blanès, ajoute à sa chaleur. Dans la suite symphonique, Legrand traite ce thème de façon beaucoup rythmique ; le balancement de son accompagnement figure dès le générique. Le dialogue de la mère et de la fille, pour en augmenter l’intimité, est traité dans l’aigu (ré4 pour la mère, mi4 pour la fille, toutes les deux dans la nuance piano)
1.19. La lettre de Guy – Orchestre (cordes, guitare, cors, harpe, clarinette, cb/batterie, flûtes, glockenspiel), José Bartel (Guy), Christiane Legrand (Madame Emery)Quelques problèmes de son. Et avant que Christiane Legrand ne chante, léger « à table » audible au casque.Des accords des cordes dans l’aigu, divisées, et avec sourdine, rendent la scène flottante et rendent plus intérieure encore la lecture de la lettre. Un solo de guitare, comme improvisé, en accentue l’intimité. Cordes et bois, puis tutti reprennent le thème A pailleté de célesta et achevé en unisson.
Inédit en disque 3 : Fanfare du carnaval – Orchestre
Inédit en disque 4 : Intro du carnaval – Orchestre (cordes, cors, percus, tambour de basque, glockenspiel)
1.20. Le carnaval – Orchestre (cordes, harpe, vents (dont flûtes (Roger Bourdin, etc.), clarinette basse, section trombone, etc.), célesta, claves, tambourin, flûtes, clarinette basse, percus, cb/batterie, cuivres, glockenspiel, guitare, piano), Danielle Licari (Geneviève), Christiane Legrand (Mme Emery) et Georges Blanès (Roland Cassard)
Un thème ternaire (le film en comporte peu) ascendant se fait entendre. Le carnaval scintille des sonnailles du tambour de basque et du glockenspiel. Lorsque Geneviève avoue l’éloignement du souvenir de Guy, le thème B se fait entendre. Les violoncelles reprennent le thème du carnaval. Très rythmique et pailletée de claves et de maracas, le vivo qui suit, marque une rupture qui peut surprendre. Legrand « met la pression » musicale, tout comme Madame Emery devient insistance vis-à-vis de Geneviève, au sujet de Cassard. L’accompagnement rythmique rappelle d’ailleurs celui du thème de ce dernier. Les trombones sont très en avant, quelques arpèges ponctuent le discours de Madame Emery. Les violons tracent une ligne mélodique dans l’aigu (une marotte du compositeur, qu’il développe dans son album Archi-cordes). De belles et audacieuses modulations jalonnent le dialogue. Après l’emportement de Geneviève qui évoque sa grossesse, le calme revient avec le thème du carnaval. L’émotion submerge cependant l’héroïne, qui commence le thème A mais poursuit par un contrechant : c’est la flûte qui s’empare du thème abandonné, puis les cordes. En quelque sorte, Geneviève n’est plus dépositaire du thème de l’amour. Les cordes divisées, sur arpèges, reprennent A tandis que l’on évoque Cassard. Le voici, d’ailleurs, sur son thème, caressé par la guitare. Les arpèges de piano accompagnent le dernier monologue de la mère ; ils se haussent jusqu’aux cordes pour mieux préparer l’éclat de la scène suivante.
1.21. Le mariage – Orchestre (grandes orgues)
Pas de doute, c’est bien un orgue de tribune qui est utilisé, avec son plein jeu pour mieux rendre solennelle, et écrasante pour Geneviève, la réalité du mariage.

2.1. Retour de Guy – Orchestre (vents dont sax, xylo/marimba, peut-être flexatone (je ne pense pas), cb, cordes)
Dernières notes coupées dans la version disque. Dans le film, on entend une voix (ambiances)Le thème A devient traînant, débraillé : l’amour a été piétiné. Berlioz, dans sa Symphonie fantastique, travestit lui aussi, parfois en le défigurant, le thème de L’idée fixe lié à son amour.
2.2. Chez Elise – Orchestre (cb/batterie, guitare, vents (cors principalement), cordes, harpe (Lily Laskine), violon solo (possible : Léo Slab), flûte solo, hautbois solo), Claire Leclerc (Elise), José Bartel (Guy) et Claudine Meunier (Madeleine)
Retour du thème déjà entendu chez Élise. Les cors sont omniprésents. Le Meno mosso (« tout est prêt à la cuisine ») est singulièrement plus tonique et jazzy. Une courte cadence de harpe accompagne le rangement (« là-bas, sur la table »). A l’évocation de Madame Emery, des cordes solos ajoutent à l’émotion, mais ils se prolongent à l’arrivée de Madeleine, évoquant un glissement de l’attention de Guy. Flûte puis cor anglais introduisent un nouveau solo de violon.
2.3. Le garage (la dispute) – Orchestre (cb/batterie, cuivres dont sax, trompettes, percus, bois/vibra/cordes), Raoul Curet (Aubin), ??? (Garagiste 1959 N°1 : « Le patron te d’mande »), ??? (Client du garage 1959 : « Je n’accuse personne, etc. ») et ??? (Garagiste 1959 N°2 : « Ben qu’est-ce qui t’prend ? »)
Retour du thème de la première scène du film. Les chanteurs sont sollicités par la difficile escalade chromatique lors de la dispute (9 modulations successives en 18 mesures ! et un Lab aigu pour Aubin lorsqu’il hurle « Foucher ! ». Il faudra 11 mesures de ralentissement pour apaiser le spectateur.
2.4. Guy au café – Orchestre (xylophone, marimba, percus, cb, cuivres, cordes, violon solo (sonne comme Léo Slab, qui sait se rapprocher de Grappelli), cymbale), José Bartel (Guy), José Germain (Patron du café : « Vous n’avez pas d’monnaie ? »), ??? (Déménageur n°1 : « Qu’est-ce que tu cherches ?) et Raoul Curet (Déménageur n°2 : « Alors pousse ta viande, tu vois bien qu’tu gènes ! »)
Le thème A, puis le B (avec un solo de violon), disloqués et hagards, errent comme Guy.
2.5. La boîte à matelots – Orchestre (piano, percus, cb, orgue électrique, banjo, batterie, cordes, grandes orgues), José Bartel (Guy), ??? (Prostituée : « Tu viens danser ! »), Jeanette Baucomont (Ginny : « Ca va pas mon p’tit chou ? », etc.), Claire Leclerc ? (Mme Germaine : « B’soir Ginny ! ») et Claudine Meunier (Madeleine)
RC: On entend une toux à 1’58
MB: Une musique de bar ponctuée de cuillers rythmiques et de wood block. Le thème en devient presque sardonique, avec cet instrumentarium si différent (banjo et orgue électrique). Le départ de Guy se fait sur une subtile descente harmonique sur six mesures, pour faire plonger le personnage dans sa tristesse. Le do mineur qui surgit avec l’émotion de Madeleine sur le mot « morte » est saisissant, et sublimé par le retour d’une écriture symphonique conclue par l’apothéose de l’orgue : un grand moment d’opéra.

2.6. Duo Guy/Madeleine – Orchestre (cordes, harpe, vents, batterie, percus, glockenspiel), Claudine Meunier (Madeleine) et José Bartel (Guy)
Le thème de Madeleine flotte sur des nappes de cordes, avec un rappel discret… des fameux arpèges. Les couleurs presque liturgiques de l’harmonie des premiers échanges préfigure le mariage des deux personnages. Pour montrer l’émotion de Madeleine, peut-être aussi pour nous attendrir sur ce personnage auquel Guy se raccroche, Legrand utilise les aigus de sa voix (ré4) « Tu n’as besoin de personne » puis mi4 « Je ne vois pas en quoi je peux t’être utile ». Elle se reprend en exposant, dans sa tessiture, qu’elle n’aime pas ce que Guy est « devenu ».
2.7. La terrasse du café – Orchestre (flûte (Roger Bourdin), cb/batterie, guitare, vibraphone, cuivres (pêches de trombones, etc.), cordes, flûte, clarinette basse, hautbois solo, cor, trombone basse, harpe), José Bartel (Guy) et Claudine Meunier (Madeleine)
Ce motif qui se répète est une cellule ascendante, mais plus elle se répète, plus elle descend, et une deuxième phrase lui répond, péniblement ascendante. Malgré l’enjouement apparemment, les choses ne sont pas si simples. Le récitatif de Guy qui fait sa demande est d’une grande beauté, pudiquement soutenu par des cordes divisées. Plusieurs répliques de Madeleine sont portées par des arpèges… Guy ne « veut plus » penser à Geneviève, cela suffira-t-il ?
2.8. La station-service – Orchestre (trompettes et flûtes, cb/batterie, sax dont sax baryton, trombones, xylophone, vibraphone, piano, trompette solo (Roger Guérin)), Claudine Meunier (Madeleine), José Bartel (Guy)
Ambiance jazzy pour la nouvelle vie de Guy. Finalement, une écriture fidèle au personnage. Pas d’une joie éclatante, le thème à la trompette, dans la nuance « piano », est doublé au vibraphone, dans des couleurs assez froides.
2.9. Final – Orchestre (cors, cordes, hautbois, flûtes, harpe, xylophone, violon solo, celesta, percus, timbales), Danielle Licari (Geneviève), José Bartel (Guy), chœur mixte (Jeanette Baucomont, Christiane Legrand, Monique Aldebert, Berthe Kal, Jacqueline « Catherine » Sarassat, Geneviève Roblot-Miroglio, Michèle Dorney, Ward Swingle, Bob Smart, Vincent Munro, Raoul Curet, Georges Cour, Jean Hoffmann, Jacques Hendrix, Jean Aldegon, Jean Cussac, Jean-Claude Briodin, Ivan Jullien, Fernand Pasteris) et ??? (Le pompiste)
L’arrivée de Geneviève, avec un récitatif posé sur les cors lointains du thème A, annonce le « mouchoir » final évoqué par Demy et Legrand lors de leur écriture ! Quel désespoir dans la réexposition de ce thème ! B résonne, d’abord aux violons avec sourdine, puis dans les échanges de personnages. L’orchestre exprime le lyrisme que les dialogues chantés contiennent, avec l’irruption juvénile de l’apprenti et son glockenspiel pétillant. Le violon solo est le moyen idéal de Legrand pour nous faire craquer, et l’arrivée des chœurs (voyelle « ou » puis « a ») est l’une des trouvailles de génie de Legrand. L’orchestre explose, face au mur d’incompréhension qui semble séparer les personnages. Cette fois, le thème A se termine dans l’apothéose d’un implacable accord de lab mineur, avec un éclat purement symphonique.

Commentaires musicologiques : Michel Bosc
Relevé des chanteurs : Rémi Carémel
Relevé des musiciens : Michel Laplace
Relevé des instruments : Rémi Carémel, Michel Bosc et Michel Laplace


Récapitulatif par séances d'enregistrement

Séances du 3 au 13/07/63, et du 25 au 26/11/63, Studio Charcot Europasonor
Choeurs : Jeanette BAUCOMONT, Christiane LEGRAND, Monique ALDEBERT, Berthe KAL, Jacqueline « Catherine » SARASSAT, Geneviève ROBLOT-MIROGLIO, Michèle DORNEY, Ward SWINGLE, Bob SMART, Vincent MUNRO, Raoul CURET, Georges COUR, Jean HOFFMANN, Jacques HENDRIX, Jean AlLDEGON, Jean CUSSAC, Jean-Claude BRIODIN, Ivan JULLIEN et Fernand PASTERIS.
Musiciens : Georges GAY (1er tp de section), Roger GUÉRIN, Ivan JULLIEN (chorusmen tp), Pierre SELLIN, Gilbert DIAZ, Alex CATUREGLI, Christian BELLEST (tp), André PAQUINET, Raymond KATARZYNSKI (tb lead), Raymond FONSEQUE (tb lead et tb basse), Benny VASSEUR (chorusman tb), Bill TAMPER, Serge TEVET, Maurice GLADIEU, Christian GUIZIEN, Camille VERDIER, Francis LUSSIEZ, Jacques TOULON, Pierre VANDOMBER (tb), Charles VERSTRAETE (tb et/ou acc), Elie RAYNAUD, Gérard PERESSE (tuba), Roger BOURDIN (fl solo), Lou GAMME, Jacques ROYER, Robert HÉRICHÉ, Marcel VIGNERON, Maurice PRUVOT, Rémy COTTON, Marcel DUBOIS (fl), Paul HONGNE (bsn), Robert JEANNOUTOT, André CAURETTE (hb, cor anglais), Pierre DUMONT, Xavier DELWARDE, Michel BERGES, Gérard COUTELET, Georges DURAND, André CARRADOT (cor), Jo HRASKO, Jean ALDEGON, René NICOLAS (sax alto), Marcel HRASKO, Georges BESSIERE (sax ténor), Pierre GOSSEZ (sax ténor, sax baryton, cl, bcl), Georges GRENU (sax ténor, cl), Armand MIGIANI (sax baryton), Roger LEMAITRE (sax, cl), Lily LASKINE, Jean-Claude DUBOIS (hp), André DAUCHY, Jean CARDON (acc), René DUCHAUSSOIR, Raymond GIMENES, Pierre CULLAZ, Léo PETIT, Dominique GESINA (g), Maurice VANDER, Alain BERNAUD (p, celesta), Eddy LOUISS (orgue), Léo SLAB (vln solo), Lionel GALI, Jean GAUNET, José “Pepito” SANCHEZ, Léon LOCATELLI, Pierre COUZINIER, Jean GITTON, Michel GANOT, Roger BERTHIER, Georges GUÉRIN, André KARREN, Pierre DEFAY, Michel BAILLE, Charles VANDEVOIR, Roger SAVARD, Gilbert BREL, Lucien PEROTIN, Pierre SIMON, Léon BRONSCHWAK, Jacques CHARRIER, Frank MANIGLER, Marie-Antoinette MASSON, Raymond GOUTARD, Michel CRON, Antoine CORNU, Frédéric GEYRE, Pierre DARRIEUX, Jacques-Francis MANZONE, Henri ROSES, Basile STAVRIANO (vln), Paulette PINCHINAT (vln, régie), Roger LEPAUW, Colette LEQUIEN-POTET, Jean MAYOR, Serge COLLOT, Stéphane WIENER, Richard POSTEL, Guy BRUERE, Bruno RATAZZI (vla), Jacques WIEDERKER, Pierre LABADIE, Jean HUCHOT, Micheline BURTIN, Jean LAMY, Robert DUPUIS, Jacques SUDRAT, Louis INGIGLIARDI (vlc), Guy PEDERSEN, François RABBATH, Alphonse MASSELIER, Jacques CAZAURAN, Serge CAENS, Willy LOCKWOOD, Charlie BLAREAU, Robert PRUDHON, Jacques BEAUFOUR, Lucien SIMOENS, Jean-Marc ROLLEZ (b), Gus WALLEZ, André ARPINO, Roger PARABOSCHI, Pierre LEMARCHAND (dms), Jean-Pierre JACQUILLAT, Sylvio GUALDA, Jean-Pierre DROUET, Jean-Claude CASADESUS, Michel LORIN, Alain JACQUET (perc). Et Claude DENJEAN (vln ? p ?), Maurice CARON (cordes ?), Pierre FRANCOIS (cordes ?), René CHAYNES (cordes ?), Roger CACHA (cordes ?), Pierre MONNOT (régie ?), Francis CAUMEL (harpe ?), Daniel CONCHE ( ???), Robert TABARY ( ???), Jean ou Jean-Pierre CLERVOIX ( ???), Claude MAHIEUX ( ???), Germaine BREL ( ???), Jacques BORDERIEUX ( ???), Raymond JOIN ( ???), André DENIS ( ???)

Séance du 8 juillet 1963
Chanteurs: Danielle LICARI, Claire LECLERC, Jean CUSSAC, etc.

Séance du 9 juillet 1963
Chanteurs: Danielle LICARI, Claire LECLERC, Jean CUSSAC, José GERMAIN etc.

Séance du 10 juillet 1963
Chanteurs: Danielle LICARI, Claire LECLERC, Jean CUSSAC, Jean-Claude BRIODIN etc.

Séance du 11 juillet 1963
Chanteurs: Danielle LICARI, Claire LECLERC, Jean CUSSAC, etc.

Séance du 12 juillet 1963
Chanteurs: Danielle LICARI, Claire LECLERC, Jean CUSSAC, Jean-Claude BRIODIN etc.

Séance du 13 juillet 1963
Chanteurs: Jean-Claude BRIODIN etc.

Source : Rémi Carémel (archives personnelles : bulletins de salaire de Danielle Licari, Jean-Claude Briodin et José Germain, récapitulatifs de carrière de Claire Leclerc (remerciements à François Justamand) et Jean Cussac (remerciements à Laurent Cussac), listing des musiciens obtenu par Philippe Bourdin)




6. LES PARAPLUIES DE CHERBOURG (1964) : DOUBLAGE ANGLAIS


Dans un portrait de Paris Match du 10 octobre 1964 consacré à Michel Legrand, le journaliste Pierre Grobel évoque le travail en cours du compositeur sur Les Demoiselles de Rochefort, mais également sur le doublage américain des Parapluies de Cherbourg. Plus de deux mois plus tard, fin décembre 1964, à l'occasion de la première new-yorkaise sous-titrée des Parapluies de Cherbourg, Catherine Deneuve et le journaliste l'interviewant parlent tous deux d'une version anglaise "à venir".

Première des Parapluies de Cherbourg à New York
Images muettes puis interview de Jacques Demy, Catherine Deneuve et Michel Legrand 
(JT de 13h, 21/12/64)

La chanteuse Claire Leclerc (voix de Tante Elise), bilingue (elle enseigne de juin 1937 à juin 1939 la musique et le français au London Theatre Studio créé à Londres par Michel Saint-Denis, futur animateur, sous le nom de Jacques Duchesne, de "Les Français parlent aux Français" sur la BBC), avait quant à elle confié à mon confrère François Justamand (La Gazette du Doublage) avoir enregistré le rôle de Tante Elise pour une version anglaise du film, après avoir participé à la version originale (française). 
Son relevé de carrière, qu'elle avait rédigé pour sa retraite, indique "Version en anglais des Parapluies de Cherbourg : 6 cachets, les 8, 9 et 10/03/66, employeur OSCAR FILMS (116 bis Champs-Elysées, Paris 8ème)".

Claudine Meunier (voix française de Madeleine) se souvient également avoir participé à cette version anglaise: "J'ai fait les enregistrements de Madeleine, mais mon anglais n'était pas assez bon, donc je pense que ça a été refait plus tard par une autre chanteuse. Je me souviens que c'est Monique Aldebert qui prêtait sa voix à Geneviève dans la version anglaise."
Qu'est-il advenu de cette version anglaise? A-t-elle été exploitée? Des souvenirs de quelques internautes nous le font penser. En reste-t-il une trace? Pourquoi a-t-elle été réalisée si tardivement alors que le film était déjà exploité dans des pays anglophones? Mystère... Le disque américain est quant à lui sorti avec les enregistrements français.

Peter Riethof
Alors que Rosalie Varda me confiait douter de l'existence de cette introuvable version anglaise dont Claire Leclerc et Claudine Meunier étaient les seuls témoins, la base de données collaborative IMDB créditait Peter Riethof comme responsable de la version anglaise du film. J'ai pu joindre son ancienne épouse, la comédienne et directrice Jocelyne Janssen, ainsi que leur fille, Diane Riethof. C'est cette dernière qui a pu me confirmer l'information: "Oscar Films était la société de mon père, et c'est lui qui s'est chargé de la version anglaise des Parapluies de Cherbourg. C'était très compliqué car il fallait trouver des bons chanteurs anglophones à Paris. Il est possible qu'il ait aussi fait des castings à Londres. J'avais huit ans au moment des enregistrements donc je ne m'en souviens plus, mais mon père m'a raconté plus tard que ça avait été une superbe expérience."
Peter Riethof est né le 11 août 1905 en Bohème (maintenant République Tchèque). Son père et les douze frères et soeurs de celui-ci font partie d'une grande famille, où chacun détient une industrie en Tchécoslovaquie. Celle du père de Peter Riethof est spécialisée dans la chimie, mais le "virus" ne se transmet pas à Peter, qui rêve de spectacles et de cinéma. Il dirige un grand théâtre à Vienne, et devient assistant de Max Ophüls dans les premiers films du réalisateur. Avec l'Anschluss, la famille de Peter Riethof, juive, s'exile. "Mon père a eu un parcours difficile: il a été interné en camp de réfugiés en France, il s'en échappé, a voulu rejoindre son frère qui était aux États-Unis. Les bateaux faisaient escale à Cuba, il est arrivé lors de l'entrée en guerre des États-Unis et est resté bloqué à Cuba pendant trois ans. Il travaillait pour un photographe la nuit, et la journée il avait constitué un guide de tourisme sur Cuba." A la fin de la guerre, Peter Riethof rejoint son frère à Pittsburgh, puis s'installe à New York pendant dix ou douze ans, où il commence à travailler dans le doublage, en inventant de nouvelles techniques de synchronisation. Il revient en Europe, d'abord à Vienne puis à Paris vers 1959 où il monte Oscar Films pour doubler des films européens en anglais. Le siège est au-dessus du Cinéma Normandie (sur les Champs-Elysées) puis au-dessus du cinéma L'Ermitage, mais il loue différents studios pour ses doublages. Parmi les auteurs maison, Jimmy Shuman (qui collabore avec lui pendant une quinzaine d'années, également comme directeur artistique), et parmi les comédiens habituels, Steve Gadler, Peter Hudson et Allan Wenger. Il double notamment en anglais La Strada (1954) et Le Train (1973), tous les films produits par Raymond Danon (comédies de Pierre Richard, etc.) et reçoit des prix de l'American Guild pour ses doublages de Plein soleil (1960) et Boccace 70 (1962). "A l'époque, il était seul sur le marché et il faisait du très bon boulot, on avait l'impression que ça avait été tourné en anglais, donc il en a fait énormément. Après, il y a eu de la concurrence."
En dehors de doublage, il fait de la coproduction et vend des films aux États-Unis. "Il a vendu Cousin, Cousine (1975) de Jean-Charles Tacchella, qui a eu un immense succès aux États-Unis."
Dans sa nouvelle société, Péri Productions, un département, géré par son épouse Jocelyne Janssen, fait également des versions françaises. "Ils se sont rencontrés à Cannes, comme dans un film: le producteur et la starlette. Il a appris le métier à ma mère et elle a travaillé avec lui pendant des années, même quand ils étaient séparés. Elle faisait ses propres adaptations, castings et directions."
Peter Riethof arrête de travailler vers 1986 et meurt à Paris le 22 août 1994.

Vous possédez une copie (même de mauvaise qualité) de cette version anglaise des Parapluies de Cherbourg? Merci de me contacter à danslombredesstudios@gmail.com





7. LES DEMOISELLES DE ROCHEFORT (1967) : VERSION ORIGINALE



Jacques Demy et Michel Legrand imaginent un film se rapprochant des comédies musicales à l'américaine.

Plusieurs changements majeurs ont eu lieu entre l'idée originale et la sortie du film: dans la première mouture du scénario, Guy (Nino Castelnuovo) des Parapluies de Cherbourg fait son retour dans Les Demoiselles de Rochefort comme forain et, accompagné par son ami Etienne, fait allusion à son amour pour Geneviève, l'enfant qu'elle a eu avec lui, etc. On en trouve trace dans le script original, que m'a confié Claude Ermelin. Quel acteur avait été pressenti pour jouer Etienne initialement? Le chanteur, comédien et homme de cirque Romuald Figuier (dit Romuald) me fait une révélation: "On m'avait demandé de jouer le rôle. Finalement, Michel Legrand m'a appelé pour me dire que l'arrivée de Gene Kelly avait fait prendre au film une autre dimension, on avait engagé George Chakiris pour interpréter Etienne. Michel m'a demandé si j'acceptais quand même d'être la voix chantée, et j'ai répondu oui." Quant à Guy, exit Nino Castelnuovo, Guy devient Bill et prend les traits du danseur Grover Dale.
Quant au personnage d'Andy, il s'appelle Vincent dans le script et on peut donc penser qu'il avait été écrit pour un acteur français.

Ces changements de distribution et d'écriture des rôles n'ont été faits que quelques semaines avant le tournage, car lors de l'enregistrement des chansons françaises (cf. script de Claude Ermelin) et américaines (cf. partitions), le matériel à disposition parle encore de "Guy" et de "Vincent". Un reportage de l'époque nous montre par ailleurs que Jacques Demy était parti convaincre Gene Kelly de tourner dans le film quelques semaines à peine avant le début du tournage.


La composition et l'écriture des chansons


Michel Legrand et Jacques Demy travaillent sur le final du film (reprise de "Nous voyageons de ville en ville")

Michel Legrand et Jacques Demy opèrent en "ping-pong" comme dans Les Parapluies de Cherbourg. Les mélodies de l'un donnent des idées de textes à l'autre, et inversement. Des extraits des séances de travail ont été diffusées en CD dans L'Intégrale Jacques Demy - Michel Legrand. Il est intéressant de constater, que bien que Michel Legrand prétend ne jamais réécrire la même chose et ne jamais faire de récupération, certains airs conçus initialement pour Les Demoiselles de Rochefort seront utilisés dans d'autres films (peut-être sous l'impulsion de Jacques Demy) : par exemple, l'un des airs initialement composés pour "La femme en morceaux" et "La chanson de Solange" deviendra "Les Insultes" dans Peau d'âne. 
Par ailleurs, les premières mesures de "De Hambourg à Rochefort" se font sur un air d'abord conçu pour "La chanson de Solange". Idem pour "Nous voyageons de ville en ville" composé sur l'un des premiers airs de "Marins, amis, amants ou maris". 

Le 12 mai 1965, des maquettes sont enregistrées à la Comédie des Champs-Elysées : Anne Germain chante Solange (et non Delphine) et Nicole Darde, Delphine. Ces maquettes sont perdues, à moins qu'un producteur distrait ne les retrouve par miracle dans un tiroir peu de temps avant les 60 ans du films et ne décide de les sortir dans l'intégrale de l'intégrale de l'intégrale. 
Deux maquettes (enregistrées par Michel Legrand lui-même) ayant visiblement servi au tournage des chansons de Gene Kelly ont été sorties en CD, mais je ne sais si elles ont été enregistrées en mai 1965 avec les autres ou plus tard.

Les orchestrations

V. Cosma et M. Legrand
Séance de travail en Corse (c. 1966-1969)
Tout ou partie des orchestrations du film sont confiées à un jeune compositeur roumain cherchant à vivre de son art à Paris, un certain... Vladimir Cosma. Il avait rencontré Michel Legrand lorsque celui-ci dirigeait un concert Salle Gaveau, en 1965, mais à l'époque, le compositeur ne cherchait pas d'assistant. "Je savais qu'il collaborait fréquemment avec son ami et collègue du Conservatoire Jean-Michel Defaye, il n'avait donc pas besoin de moi" témoignage Vladimir Cosma dans Comme au cinéma (entretiens avec Vincent Perrot). Finalement, Michel Legrand propose à Vladimir Cosma d'être son collaborateur (orchestrateur anonyme) sur un Musicorama consacré à Stéphane Grappelli, puis sur un spectacle de Danny Kaye. Vladimir Cosma travaille ensuite régulièrement "dans l'ombre de Michel Legrand" sur Tendre voyou (1966), L'homme à la Buick (1968), L'affaire Thomas Crown (1968), Oum, le dauphin blanc (1969)... et Les Demoiselles de Rochefort (1966). "Je ne participais pas aux séances de travail de Jacques Demy et Michel Legrand. Les seuls souvenirs qui me restent sont liés à ce que Michel Legrand me racontait et aux musiques magnifiques que j'entendais esquisser et jouer. Je les voyais aussi travailler ensemble, des journées entières, autour d'un piano, au rez-de-chaussée de l'hôtel particulier de Legrand, rue Chardon-Lagache, pendant que je poursuivais mon propre travail au premier étage. Évidemment, je sentais qu'il régnait entre eux une connivence et une complicité exceptionnelles, et j'avais conscience d'assister à la naissance d'oeuvres importantes."
A propos de sa collaboration avec Michel Legrand: "Mon but n'était pas d'apporter une touche personnelle, puisqu'au contraire j'essayais d'assimiler son style et sa vision des choses pour me fondre complètement dans son oeuvre. J'ai ainsi beaucoup appris, et cela m'a préparé à voler de mes propres ailes. Ce fut une nouvelle période d'apprentissage, pratique, de l'écriture musicale qui s'ajoutait à mes expériences passées en Roumanie. De plus, pouvoir écouter ce que j'avais écrit la veille, joué le lendemain par de merveilleux musiciens, était pour moi une chance inouïe."
Et la reconnaissance du maître ? "Legrand est un surdoué de la musique, il a une facilité, une rapidité et une technique exceptionnelles. Lorsque les choses se passaient bien, ou même très bien, cela lui semblait normal et il ne pensait même pas à me faire des compliments. Comme il aurait sans doute fait mieux que moi s'il en avait eu le temps, il était quasiment impossible de l'épater. Cependant, lors d'une séance d'enregistrement pour son deuxième disque en tant que chanteur, n'ayant eu aucune réaction de sa part concernant les arrangements, je lui ai demandé s'il était satisfait. Je l'entends encore me répondre : "Vladimir, je peux simplement vous dire que je ne fais presque plus la différence entre ce que vous écrivez et ce que j'écris moi-même." Venant de lui, c'était un magnifique compliment!"
Vladimir Cosma profite du refus de Michel Legrand de faire certaines musiques de film pour le remplacer. Il prend son envol assez rapidement et devient l'un de nos plus grands compositeurs de musiques de film.


L'enregistrement des musiciens


Contrairement aux Parapluies de Cherbourg où orchestre et voix avaient fait « studio à part », pour Les Demoiselles de Rochefort, tout est enregistré à Davout. Claude Ermelin que nous avons quitté trois ans plus tôt comme jeune assistant son sur Les Parapluies de Cherbourg, a fait du chemin : « Chez Charcot, j'ai démarré très vite. J’ai enregistré les voix de « Ma vie » (printemps 1964) d’Alain Barrière, qui a fait un carton incroyable, un coup de chance. C'est ça dans ce métier : si vous faites un tube, vous êtes un bon donc tout le monde voulait enregistrer avec moi à un moment. Chamberland et Pou-Dubois se sont séparés pour des histoires d’argent, comme cela arrive bien souvent entre associés. Chamberland a monté Davout en 1965, je l’ai rejoint et j’ai quitté Charcot. Davout n'était pas tout à fait terminé, ils m'ont envoyé un mois aux États-Unis où j'ai fait le tour des studios à New York, et quand je suis rentré les gens disaient, admiratifs: "il revient des Etats-Unis" (rires). A Davout, j’ai travaillé pendant plus de trente ans. »
Parmi les premières musiques de film à essuyer les plâtres du Studio Davout (Porte de Montreuil), d’après mes archives de choristes, Les Grands Moments (film de Claude Lelouch, musique d’Ivan Jullien, juillet 1965) et Sous le signe de Monte-Cristo (film d’André Hunebelle , musique de Michel Magne, octobre 65).

Séance d'enregistrement des Demoiselles de Rochefort (1966)
Derrière la console, de gauche à droite: Romuald, Marcelle Legrand, Michel Legrand, Claude Ermelin et Jacques Demy
Au fond, à côté des bandes: René Ameline (assistant son)
Sur la banquette, de gauche à droite: inconnu, Claudine Meunier, Anne et Liliane De Kermadec, Agnès Varda, Catherine Deneuve, inconnu et inconnu

En mars 1966, Claude Ermelin enregistre Les Demoiselles de Rochefort : « Le travail était énorme, il y a presque deux heures de musique dans le film, donc nous nous étions répartis les séances avec Yves Chamberland et François Dentan. J’ai commencé les séances d’orchestre, et me souviens aussi du passage de comédiens venus assister aux enregistrements de leurs chansons par les choristes : Catherine Deneuve, Gene Kelly, et peut-être George Chakiris car je revois quelqu’un faire des exercices de danse avec la rampe du studio. On a travaillé tellement dur que je suis tombé malade, ça n’a peut-être aucun rapport mais j’ai eu le syndrome de Guillain-Barré, avec des problèmes musculaires (mais ça me faisait marrer, comme j’ai un bon fond, je rigole beaucoup), et je n’ai pas pu aller jusqu’au bout. »

Claude Ermelin et Lily Laskine
Séance du boléro de
Les Uns et les Autres (1981)
A propos de Michel Legrand : « Je lui reconnais énormément du talent. Je l’ai vu, lorsqu’il manquait un arrangement en studio, écrire quelque chose en cinq minutes : il écrivait la musique de haut en bas, ça m’avait impressionné. Mais il était tellement chiant qu’il ne voulait enregistrer qu’avec moi. Ca m’emmerdait car il n’était vraiment pas sympa, il était toujours énervé, il y avait constamment des tensions avec les musiciens, des problèmes d’argent, et il fallait toujours aller très vite. Je me souviens du boléro du film Les Uns et les Autres (1981) de Claude Lelouch, que les gens appelaient « Le boléro de Ravel de Michel Legrand » (rires). A 9h la séance commençait, donc moi j'étais là une heure et demie plus tôt à préparer les micros et la mise en place - la mise en place est très importante dans la prise de son, les jeunes l’oublient un peu. J'ai tout préparé, j’ai d’ailleurs retrouvé une photo où on me voit installer un micro pour la harpe de Lily Laskine, grande dame petite par la taille mais immense par le talent, absolument adorable et d’une grande simplicité. Legrand a joué un petit peu le début, j'ai fait ma balance à toute vitesse, et à 9h30 on avait fini le Boléro, et avec lui il ne fallait pas discuter. Qu'est-ce qu'il m'a fait chier. Il m'a cassé le caractère (rires). »
Outre de nombreux disques de chanteurs (Pierre Perret, Alain Souchon, etc.), de jazz et de musiques contemporaines (Luciano Berio), la plupart des musiques de film de Michel Legrand, Vladimir Cosma, Francis Lai, Georges Delerue, Claude Bolling et Gérard Calvi sont enregistrées à Davout à partir de 1965. Les séances sont réparties principalement entre Claude Ermelin, Roger Roche, Yves Chamberland et François Dentan. 
(Portrait de Claude Ermelin à venir prochainement sur Dans l'ombre des studios)


Michel Legrand dirige Placido Domingo et Mireille Mathieu au Studio Davout en 1981 ou 1982.
Claude Ermelin (moustachu) est à la console avec un assistant.
Le "Benny" auquel Claude s'adresse pendant la balance des trombones est Benny Vasseur.

Qu'en est-il des musiciens de l'orchestre, et des soli instrumentaux de Solange et Delphine? Car je ne pense pas dévoiler un secret d'état en vous révélant que Françoise Dorléac et Catherine Deneuve ne jouent pas elles-mêmes cette multitude d'instruments qu'on voit à l'image.
Contrairement aux Parapluies de Cherbourg, où des feuilles de présence ont été déposées, celles des Demoiselles de Rochefort ont été "égarées". Une photo, qui m'a été confiée par le pianiste Alain Bernaud, nous permet d'en voir une petite poignée.


Séance d'enregistrement des Demoiselles de Rochefort (1966)
De gauche à droite: saxophoniste non identifié, Alain Bernaud (piano), Michel Legrand (assis), Gus Wallez (batteur), Pierre Gossez (sax), Paulette Pinchinat (violon et régie), Armand Migiani (sax baryton), Roger Bourdin (flûte), Raymond Katarzynski (trombone), inconnu (cravate), Jacques Demy (assis) et inconnu (assis).

Alain Bernaud
Alain Bernaud
(1932-2020) assure les parties de piano (à part les parties jazz, jouées par Michel Legrand lui-même, et certainement Maurice Vander) du film, notamment le Concerto : « Michel Legrand est né le 24/02/32 et moi le 8/03/32, il est plus vieux que moi » plaisante-t-il au téléphone. « C’est un vieux copain, on a toujours du plaisir à se retrouver. Je l’ai connu au Conservatoire national supérieur de musique de Paris, nous étions en classe de solfège spécialisé, on devait avoir 12 ou 13 ans tous les deux. Pour le reste, nous n’avions pas les mêmes professeurs : j’ai fait la classe préparatoire de piano, et celles d’harmonie, contrepoint, fugue et composition avec Tony Aubin. »
En 1957, Alain Bernaud obtient le Grand Prix de Rome. « Je suis resté quelques temps à la Villa-Médicis, et à mon retour à Paris, je n’avais pas de boulot, donc je me suis retrouvé à faire pianiste dans des séances d’enregistrement, notamment pour mes amis de conservatoire Michel Legrand et Jean-Michel Defaye. On ne faisait pas que des films, on accompagnait aussi en studio les chanteurs à la mode : j’ai par exemple travaillé pour Serge Reggiani que j’aimais beaucoup, et Juliette Greco qui me passait la main dans le cou quand elle passait derrière moi (rires). Dans Les Demoiselles de Rochefort, le violon solo était je crois Lionel Gali, qui avait une sonorité merveilleuse. Il est possible qu’Armand Migiani ait fait certains arrangements. Moi ça m’est arrivé ponctuellement dans des séances où Michel était à la bourre, il me donnait une page d'orchestre qui était commencée et il fallait terminer le minutage avec le thème proposé. » 

Outre les musiciens de la photo, Jean-Pierre Drouet et (sous réserves) Jean-Claude Casedesus se souviennent avoir été présents aux percussions. 


L'enregistrement des chanteurs

Anne Germain
Contrairement aux Parapluies de Cherbourg, film entièrement chanté, Les Demoiselles de Rochefort alterne scènes de chant (avec les voix des choristes de studio habituels enregistrées avant le tournage) et scènes de comédie (avec les vraies voix des acteurs à l’écran, sauf certains étrangers). Voyant que la voix de soprano de Danielle Licari ne raccorderait pas idéalement avec la voix parlée de Catherine Deneuve (Delphine), Jacques Demy et Michel Legrand auditionnent plusieurs choristes et c’est finalement Anne Germain (qui avait quelques mois plus tôt (le 12 mai 1965) enregistré avec Nicole Darde les « maquettes » de la musique, mais cette fois-là sur Solange) qui est choisie, créant l’illusion.
Anne  Germain (1935-2016) est l’une des choristes les plus talentueuses et prolifiques de sa génération. Elle a enregistré en soliste plusieurs génériques (dont le mythique L’île aux enfants) et doublages chantés (Duchesse dans Les Aristochats, Rita Hayworth dans La Blonde ou la Rousse, Ann Reinking dans Annie, etc.). Dans Les Demoiselles de Rochefort, on peut également l'entendre faire un scat avec Louis Aldebert dans la séquence d'ouverture (scat un peu "noyé" dans le mixage du film, mais parfaitement audible dans la B.O.). Pour en savoir plus sur la carrière d'Anne Germain, vous pouvez lire le long et passionnant entretien qu’elle m’a consacré et lire mon hommage.

Anne Germain : Montage

La « sœur jumelle » de Delphine, Solange (Françoise Dorléac), a quant à elle la voix chantée de Claude Parent, sur laquelle nous n’avons que peu d’informations. Elle a enregistré plusieurs disques en soliste et ne faisait pas partie du circuit des choristes habituels. C'est Marcelle Legrand, qui la produisait, qui a donné l'idée à son fils de l'engager, alors que le premier tour d'auditions était déjà passé. Là encore on peut affirmer que son timbre et sa voix grave s’accordent parfaitement avec la voix parlée de Françoise Dorléac. D’après le défunt site « Que sont-ils devenus ? », Claude Parent serait décédée en 2007 à l’âge de 75 ans, mais nous n'avons aucune confirmation. Nulle trace dans les archives de l'état-civil d'une Claude Parent décédée en 2007 (Parent n'était certainement pas son nom de jeune fille).

Claude Parent : Montage

Jacques Revaux
Maxence
(Jacques Perrin), jeune marin qui cherche son « idéal féminin » a la voix de Jacques Revaux (né en 1940), qui a fait ses débuts comme chanteur avant de devenir un très grand compositeur, à qui l’on doit des dizaines de « tubes » pour Claude François (« Comme d’habitude », devenu plus tard en franchissant l’Atlantique « My way » avec la voix de Frank Sinatra), Michel Sardou (« Les Lacs du Connemara », « La maladie d’amour », « Le France ») ou Johnny Hallyday (« J’ai oublié de vivre »). A l’époque, tout comme Georges Blanès et Anne Germain, Jacques Revaux enregistre des disques de « covers », publicités, etc. Il me raconte à propos des Demoiselles de Rochefort : « Michel Legrand, que je connaissais de réputation, et Jacques Demy m'ont donné rendez-vous pour me proposer d'être la voix chantée de Jacques Perrin. J'ai été à la fois charmé et étonné par cette proposition, que j'ai acceptée. Quelques semaines après, je me retrouve à Davout, avec Jean-Claude Briodin, Georges Blanès, etc. tous ces choristes qui déchiffraient la musique comme ils lisaient un bouquin. A l'époque, je n'étais pas du tout lecteur comme eux. On commence par "De Rochefort à Hambourg", en direct, et ma première intervention "Je l'ai cherchée partout, etc." n'arrive qu'au bout de quelques minutes. Je n'arrivais pas à accrocher la note de départ, j'allais à un piano à trois ou quatre mètres pour jouer la note et essayer de la mémoriser, et je la perdais rapidement. Au bout de trois fois, Michel m'a dit gentiment "Jacques, ne vous inquiétez pas, on le refera tous les deux tout à l'heure", et les autres ont continué à enregistrer sans moi. Je me suis ensuite retrouvé seul avec Michel Legrand en cabine qui me dirigeait en me chantant mes parties dans le casque, et on a enregistré comme ça.»

Jacques Revaux : Montage


Don Burke
Gene Kelly (Andy) a déjà chanté en français, notamment dans Un Américain à Paris, mais c'est pourtant Don Burke (1939-2019) qui lui prête sa voix pour les chansons dans Les Demoiselles de Rochefort. L'ambitus du chant d'Andy, conjugué à la complexité et l'exigence de la musique de Michel Legrand, et au problème de la langue, ont certainement eu raison de la bonne volonté de Gene Kelly, même si celui-ci a visiblement essayé de s'enregistrer à Davout après le tournage, et a en tout cas enregistré une partie de la version anglaise (révélation de cet article, cf. chapitre sur la version anglaise). Son ami Michel Legrand (avec des amis pareils, pas besoin d'ennemis) aimait même répandre la rumeur (à ma connaissance infondée) que Gene Kelly avait des doublures aux États-Unis pour les octaves aigues et graves, et qu'il était hors de question de payer les déplacements de ces doublures à Paris.
Chanteur et guitariste canadien anglophone, passionné de musique folk, Donald (dit "Don") Burke vit à ce moment-là à Paris, il est membre du groupe Les Troubadours aux côtés de Pierre Urban, Franca di Rienzo et Jean-Claude Briodin. Michel Legrand, ami de Jean-Claude Briodin et de Christian Chevallier (mari de Franca, et arrangeur du groupe), engage Les Troubadours pour chanter la version disque de la chanson-titre du film Qui êtes-vous, Polly Maggoo? en été ou automne 1966. Don est le soliste. Comme il me l'a raconté, c'est en l'entendant lors de cette séance que Michel Legrand a l'idée de le choisir pour être la voix chantée de Gene Kelly.
Contrairement aux autres rôles solistes qui ont été enregistrés au printemps 66 (avant le tournage de l'été), celui-ci est donc enregistré par Don après (automne 66). Pour le tournage, Gene Kelly a tourné avec un playback enregistré par Michel Legrand lui-même, au moins pour "La Chanson d'Andy" (Michel Legrand chante la partie de Gene, le petit choeur de filles, et dicte les comptes pour les pas de danse), maquette qu'on retrouve dans les documentaires faits au moment du tournage, et qui a été restaurée par Stéphane Lerouge pour le coffret CD Les Demoiselles de Rochefort. Don Burke a ensuite enregistré sa voix avec pour bande orchestre la rythmique de la maquette, la voix de Michel Legrand a été enlevée... sauf pour une partie des scats. Et pour les autres chansons? Pas de traces de maquettes avec la voix de Michel Legrand à la place de celle de Don Burke, mais la différence de son pour les répliques de Don dans "Les rencontres" et "De Rochefort à Hambourg" peut nous laisser penser qu'il y a eu un travail de montage, et que Michel Legrand avait donc peut-être enregistré une voix témoin pour ces chansons-là également.

Le compositeur ne s’est pas attribué de rôle chanté dans le film mais on peut l’entendre « scatter » dans la chanson "Andy Amoureux" et à deux autres moments (« Marins, amis, amants ou maris », « Kermesse »).

Don Burke : Montage


Danielle Darrieux
(1917-2017), interprète d'Yvonne, est la seule comédienne du film à chanter son rôle. Elle fera de même dans Une chambre en ville (film de Jacques Demy, musique de Michel Colombier). Sa partenaire Alice Herald (Josette) se souvient des séances d’enregistrement de Danielle Darrieux : « Danielle Darrieux était une chanteuse professionnelle, donc on ne pouvait pas l’empêcher de chanter son propre rôle, mais elle avait une voix qui faisait très opérette, et Michel Legrand détestait les voix lyriques. Elle a fait sa première prise en chantant comme d’habitude, à savoir très opérette et Michel lui a dit « Danielle, c’est très bien, mais je voudrais essayer quelque chose comme ça, uniquement par curiosité, pour mon plaisir personnel : est-ce que vous pouvez chanter la même chose mais en détimbrant votre voix et en chantant le plus droit possible, sans les vibratos. C'est un caprice personnel, juste pour essayer. » Les acteurs écoutent toujours très bien ce qu'on leur dit, donc elle a repris en détimbrant, et Michel lui a dit « C'est parfait, Danielle, c'est merveilleux, on va la garder comme ça, car c'est ça qui me plaît, et toutes vos autres scènes il faudrait les chanter comme ça. » Il a gagné (rires), elle a chanté comme il voulait. Et elle était très bien. »

L'album Swinging Mozart des Swingle Singers sur un présentoir de la boutique de Simon Dame, clin d'oeil aux chanteurs de l'ombre des Demoiselles de Rochefort

Georges Blanès
Son ancien amant, Simon Dame (Michel Piccoli), a la voix de Georges Blanès (Cassard dans Les Parapluies de Cherbourg), qui le suivra également dans Une chambre en ville. On notera que dans la boutique de Simon figure sur un présentoir le disque « Mozart » des Swingle Singers (dont plusieurs des membres ont participé aux voix des Demoiselles de Rochefort), qui apparaît et disparaît selon les plans (simple clin d’œil ? Problèmes de raccords ?).

Jean Stout
(1933-2012) prête sa voix à Guillaume Lancien (Jacques Riberolles). Au début, d’après les souvenirs de Michel Legrand, le chanteur avait été contacté pour faire la voix de Simon Dame mais cela ne collait pas. Jean Stout m’avait raconté de son côté avoir été contacté à la base pour faire seulement partie des chœurs (on entend d’ailleurs sa voix de basse profonde dans les chœurs de « La Chanson de Maxence », les scats de « Marins, amis, amants ou maris »). Jean Stout c’est la voix chantée de Baloo dans Le Livre de la Jungle (1967), de Petit Jean dans Robin des Bois (1973), de Tony dans La Belle et le Clochard (redoublage de 1989), le personnage de Henri Golo dans les spectacles et disques de Dorothée. Une voix de basse omniprésente dans le paysage musical des années 60/70/80 (lire mon interview de Jean Stout).

Jean Stout : Montage


Jacques Riberolles
Curieusement, j’ai remarqué en analysant les voix du film que dans la chanson "De Hambourg à Rochefort" Jean Stout est remplacé par José Bartel sur le petite réplique de Lancien. C'est également José Bartel qu'on entend dans la bande-annonce du film, sur une réplique de "De Delphine à Lancien". Il est possible que Michel Legrand ait hésité entre un ténor (José Bartel) et une basse pour le personnage (Jean Stout) pour finalement garder les deux. Dans la version espagnole, le passage de Lancien dans "De Hambourg à Rochefort" est chanté une octave en-dessous.

George Chakiris (Etienne) chante avec la voix de Romuald Figuier, dit Romuald, pressenti initialement pour jouer le rôle à l'image (cf. introduction). Romuald se souvient comme si c'était hier des séances d'enregistrement: « C’est un grand souvenir. José Bartel (Bill) était très bon et nous nous entendions bien, même si nous ne nous sommes peu revus par la suite. Lors des séances, j’ai rencontré Gene Kelly que j’appréciais beaucoup, il était passé à Davout le jour où j’enregistrais. J’allais le voir dans des comédies musicales au cinéma quand j’étais jeune, et comme il parlait français on a discuté, et il m’a dit « Venez on va déjeuner pour continuer notre conversation », et on s’est retrouvé en tête-à-tête dans un bistrot de la Porte de Montreuil. J’ai également déjeuné un autre jour avec Catherine Deneuve. Je n’ai pas croisé George Chakiris lors des séances, mais je l’ai rencontré par hasard deux ou trois ans après la sortie du film, à une première de Mireille Mathieu au Palais des Congrès. Je suis allé le voir pour lui dire que j’étais sa voix chantée dans Les Demoiselles de Rochefort, il m’a de suite fait d’adorables compliments et on a discuté cinq minutes. J’ai revu le film avec plaisir il y a quelques jours. Je trouve juste dommage que toutes les chansons ont un tempo un petit peu trop rapide par rapport au disque, mais ça vient de l’accélération de la télévision (le ratio images/seconde n’est pas le même qu’au cinéma, donc le son est plus rapide et plus aigu, ndlr), alors que pour La La Land on retrouve le même tempo. »
Issu d'une famille du cirque, neveu d'Achille Zavatta, Romuald fait ses débuts comme saxophoniste et choriste, avant de se lancer dans une carrière de chanteur soliste. Il représente trois fois Monaco à l'Eurovision (il bat le record du nombre de passages) et participe à de nombreux concours de chant internationaux ("J'étais ce qu'on appelait "une bête à concours"" constate-t-il en riant). Il est également compositeur de musiques de film et de chanson. Consécration, sa chanson "Laisse-moi le temps" (co-composée avec Caravelli, paroles de Michel Jourdan) a été adaptée en anglais par Paul Anka et reprise par Frank Sinatra sous le nom de "Let me try again". (Interview complet de Romuald à paraître bientôt sur Dans l'ombre des studios).

Romuald Figuier : Montage

Le personnage de Bill a quant à lui la voix chantée de José Bartel (voix de Guy dans Les Parapluies de Cherbourg). 

Judith (Pamela Hart) et Esther (Leslie North) ont les voix chantées de Christiane Legrand et Claudine Meunier (respectivement voix de Mme Emery et de Madeleine dans Les Parapluies de Cherbourg). Olivier Bonnet, fils de Christiane, se souvient : "On était presque triste qu'elle ait un aussi petit rôle dans le film".

Alice Herald
Josette
(Geneviève Thénier), la serveuse du café tenu par Yvonne, chante avec la voix de la choriste Alice Herald. Née Alice Vassails en 1937, Alice, en parallèle de débuts dans la comédie (elle est, pour la télé, la "bobby" du sketch de Fernand Reynaud "Fernand à Londres"), fait ses débuts avec les « Hélianes » (trio vocal de l’orchestre Jacques Hélian), puis commence les séances de choeurs grâce à Jean-Claude Dubois et Claudine Meunier, puis Christiane Legrand. Elle fait partie des Swingle Singers, accompagne de nombreux chanteurs en studio et en tournée (Maxime Le Forestier, Graeme Allwright, Dave, Claude François, Joe Dassin, etc.), participe à bon nombre de musiques de film (chant solo "My sky is blue" pour Le Ciel est Bleu, etc.). Elle co-crée le groupe vocal bossa-nova Les Masques avec Claude Germain et écrit des chansons (pour la chanteuse anglaise Victoria, Les Masques, etc.).
« Au début de ma carrière, avant que je n’aie l’occasion de partager un moment un peu particulier avec lui, je faisais partie des 9 personnes sur 10 qui trouvaient Michel Legrand insupportable, même du temps où il n’était que chef d’orchestre pour des chanteurs de variétés, quand j’étais convoquée par Christiane. Je voyais comment il dirigeait, il voulait qu'on fasse toujours tout très vite et très bien -et c'était très difficile ce qu'il écrivait- sinon il engueulait les musiciens. Il les incommodait. Je revois les violonistes en train de taper de leur archet sur le pupitre, ils faisaient ça quand ils étaient mécontents. »
Pour Les Demoiselles de Rochefort, Michel Legrand appelle directement Alice : « On se connaissait déjà bien, il faisait un casting et avait pensé à moi pour la voix de Delphine, donc il m’a fait déchiffrer la chanson « De Delphine à Lancien » à vue. Plus tard il m’a dit que c’était bien, mais qu’à la différence des Parapluies de Cherbourg on entendait la voix de Catherine Deneuve dans les dialogues des Demoiselles, et il fallait raccorder avec Catherine Deneuve. J’étais soprano, trop légère, donc il a proposé le rôle à Anne Germain qui a une voix de mezzo-soprano avec un timbre plus foncé que le mien. J’étais déçue, mais il m’a dit « Il y a un autre petit rôle très joli, Josette la serveuse du café, qui a une belle scène » . J'ai enregistré le rôle de Josette en même temps que Danielle Darrieux, qui était très gentille »
(Portrait complet d'Alice bientôt sur Dans l'ombre des studios).

Alice Herald : montage

Olivier Bonnet et Christiane Legrand
(vers 1967)
Le petit Boubou (Patrick Jeantet) a la voix chantée d’Olivier Bonnet (né en 1955), fils de Christiane Legrand et du comédien, chanteur et chansonnier Pierre Laurent (Pierre Célestin Laurent Bonnet dit Pierre Laurent (1925-1979), voix chantée de Donald O’Connor dans la VF de Chantons sous la pluie).
Olivier se replonge dans son enfance : « Pour Les Demoiselles de Rochefort, j’ai enregistré la voix chantée de Boubou (séparément des rôles adultes), puis le chœur de la kermesse. Pour ce chœur, nous étions trois enfants en multiples re-recordings : ma sœur Sophie Bonnet, mon grand-cousin Philippe Der Mikaelian (fils de Georges Der Mikaelian, lui-même frère de Marcelle Legrand, du chef d’orchestre Jacques Hélian et du copiste (Boris Vian, Michel Legrand, etc.) Pierre Dermika) et moi. C’était à Davout, avant le tournage, j’étais très impressionné par la grandeur du studio, et nous étions en plus tous les trois séparés par des cloisons pour capter le son. Ce n’est pas Michel Legrand qui nous dirigeait mais notre mère. Travailler avec elle n’était pas facile, car elle était déjà très exigeante naturellement, et encore plus quand il s’agissait d’une œuvre de son frère. Il ne fallait pas être distrait, ça ne rigolait pas, on en avait déjà eu l’expérience ma sœur et moi l’année d’avant en enregistrant les enfants Banks (crédités « Olivier et Sophie » sans leur nom) dans le disque Adès de Mary Poppins. Je me souviens que Catherine Deneuve et Françoise Dorléac sont passées en studio pendant notre séance. Catherine était un peu froide, mais je trouvais Françoise extraordinaire et belle comme un cœur. Quelle nana ! L’un de mes premiers émois (rires) ».
Les expériences de chanteur d’Olivier s’arrêtent aux Demoiselles de Rochefort et au disque de Mary Poppins, même si sa mère le met également au piano. « J’ai eu le même professeur de piano que Michel quand il était jeune, Raoul Gola. C’était un enfer, il me jetait dans les escaliers, me refermait le couvercle du piano sur les doigts. Je n’osais pas en parler mes parents. » Michel Lorin confirme : « Raoul Gola a été le professeur de Michel Legrand, et aussi de mon fils. Il fallait être patient avec lui. Il ne supportait pas les vacances scolaires, vous prenait les mains et il vous forçait sur les positions de main. Quand j’ai dirigé l’école Beuscher, je l’ai eu sous mes ordres, et j’ai passé de sacrés moments. »
Olivier arrête l’école à quinze ans et travaille dans le cinéma d’animation, d’abord comme assistant puis animateur chez Jean Image (notamment Les fabuleuses aventures du légendaire baron de Munchausen (1979), musique de … Michel Legrand) puis comme réalisateur, où il lui arrive de diriger des comédiens et de faire ponctuellement des voix. « J’ai réalisé un film, Pilotes, sous le pseudonyme d’Olivier Zagar, qui a reçu onze prix. C’est moi qui fais la voix de la mouette folle ».


L'enregistrement des chanteurs (non-crédités)

Ils sont peu nombreux. Dans la scène des « Rencontres » on peut reconnaître la voix de Jean-Claude Briodin (un policier et un badaud) et –grâce aux souvenirs d’Anne Germain- celle de Louis Aldebert (un policier, et scat dans le générique de début) et Monique Aldebert (une badaud).
Les Aldebert ont fait partie des Double Six et de multiples séances de choeurs, avant de partir s'installer aux États-Unis. Ils chantent tous les deux des covers Disney dans plusieurs disques Adès / Le Petit Menestrel (Disneyland Records), et on peut entendre Louis doubler Yogi l'Ours dans une chanson ("Ve-ne, ve-no, ve-na") du film d'animation Les Aventures de Yogi le Nounours (1964).

Louis et Monique Aldebert : Montage

La passante (jouée par Dorothée Blanck, qui fait des apparitions dans plusieurs films de Demy) chante qu'Andy "a de la chance" avec la voix de Géraldine Gogly. Elle ne pensait avoir fait que des choeurs pour le film, mais m'a confirmé que c'était bien son timbre de voix sur cette petite phrase. Ancienne élève de la Maîtrise de la RTF (en même temps que toute une génération de futures choristes de studio: Nicole Darde, Pierrette Bargouin, Catherine Garret, Annick Rippe, Claudine Pavaux, etc.), Géraldine Gogly se lance dans une carrière de soliste sous le pseudonyme de Géraldine avec un répertoire de chansons très intéressant, un passage à l'Eurovision (où elle représente la Suisse avec "Quel coeur vas-tu briser?"), etc. On l'entend dans de multiples doublages et musiques de film (La Scoumoune pour François de Roubaix, Les Fous du stade, etc.). Pour Michel Legrand, elle chante en soliste le générique de Qui êtes-vous, Polly Maggoo? (1966) dans la version film, repris par Franca di Rienzo et les Troubadours dans la version disque. "Michel adorait ma façon de chanter "mon Dieu que c'est moche"" se souvient-elle en riant.
(N.B. : à la suite d'une erreur d'un Youtubeur (se fiant à la prononciation du speaker de l'Eurovision), Géraldine est créditée "Géraldine Gaulier" partout sur le net, et il est quasiment impossible de faire rectifier cette erreur. De la même manière, elle est parfois présentée comme suisse alors qu'elle est française).

Géraldine Gogly : Montage



Le doublage des acteurs américains

Les cinq acteurs anglophones (Gene Kelly, George Chakiris, Grover Dale, Pamela Hart et Leslie North) tournent leurs scènes chantées en playback (chanteurs mentionnés précédemment) et leurs scènes parlées en son direct. Ces scènes sont ensuite post-synchronisées par des comédiens français.

Jacques Thébault
Les dialogues de George Chakiris (Etienne) sont doublés par Jacques Thébault (1924-2015), voix incontournable du doublage français (Patrick McGoohan dans Le Prisonnier, Robert Conrad dans Les Mystères de l'Ouest, Steve McQueen, etc.). Hommage à Jacques Thébault sur Dans l'ombre des studios.
Son complice Grover Dale (Bill) est quant à lui doublé par José Bartel (déjà voix chantée du personnage), à qui il est arrivé plusieurs fois de faire du doublage parlé (Le shérif est en prison, Le Livre de la Jungle, etc.) sur les films pour lesquels il assurait un rôle chanté. Ce n'est absolument pas Dominique Tirmont (dont la voix est très identifiable), comme on peut le lire depuis des années sur le net à la suite d'une erreur publiée sur un site (le nom de Tirmont n'apparaît pas au générique).

Danielle Ajoret
Pour Esther, il s'agit de la voix de la comédienne Danielle Ajoret (qui a fait ponctuellement du doublage dans les années 60-70 (Olivier Hussey (Juliette) dans Roméo et Juliette (1968), Dany Saval dans Boeing boeing (1965), etc.). Détail amusant: Danielle Ajoret devait à l'origine jouer Madeleine dans Les Parapluies de Cherbourg, rôle chanté en studio par... Claudine Meunier (voix chantée d'Esther dans Les Demoiselles de Rochefort).
Pour Judith j'avais écrit dans la précédente version de cet article que c'était une voix proche de Michèle André, quelqu'un s'est empressé de le publier sur Wikipedia alors que ce n'est vraisemblablement pas elle.

Pour Andy, Gene Kelly se post-synchronise lui même sur une partie des répliques parlées, et Don Burke (comme il me l'avait lui-même indiqué), sa voix chantée, fait les autres. Les voix de Gene et Don sont facilement identifiables et différenciables:
-Répliques avant la chanson "Andy amoureux": Don Burke
-Répliques avant la "Chanson d'Andy": Gene Kelly (sauf "C'est vrai!" par Don Burke)
-Répliques après la "Chanson d'Andy": Gene Kelly (sauf "C'est joli, hein?" par Don Burke)
-Répliques dans la scène du concerto: Gene Kelly 


Récapitulatif par personnages

LES DEMOISELLES DE ROCHEFORT (1967) de Jacques Demy
Musique et direction : Michel Legrand
Paroles des chansons : Jacques Demy
Arrangements : Vladimir Cosma et Michel Legrand
Enregistrement des maquettes : ? (Comédie des Champs-Elysées, le 12/05/1965*)
Enregistrement des musiciens et chanteurs : Claude Ermelin, Yves Chamberland et François Dentan assistés de René Ameline* (Studio Davout du 28/03 au 3/04/1966*, puis enregistrement de Don Burke/Andy en octobre-novembre 1966* et renforts de choeurs en novembre 66)
Contracteur des musiciens : Paulette Pinchinat*
Employeur des musiciens et chanteurs : Les Productions Michel Legrand
Catherine Deneuve... Delphine Garnier… Anne GERMAIN (Chant)
Françoise Dorléac... Solange Garnier… Claude PARENT (Chant)
Jacques Perrin... Maxence… Jacques REVAUX (Chant)
Gene Kelly... Andy Miller… LUI-MEME (Dialogues sur certaines répliques*)
Gene Kelly... Andy Miller… Don BURKE (Chant sur toutes les chansons et dialogues sur certaines répliques*)
Gene Kelly... Andy Miller… Michel LEGRAND (Chant d'un scat dans la « Chanson d’Andy »)*
Danielle Darrieux... Yvonne Garnier… ELLE-MEME
Michel Piccoli... Simon Dame… Georges BLANES (Chant)
Jacques Riberolles... Guillaume Lancien… Jean STOUT (Chant « De Delphine à Lancien »)
Jacques Riberolles... Guillaume Lancien… José BARTEL (Chant « De Hambourg à Rochefort » et extrait de "De Delphine à Lancien" dans la bande-annonce)*
George Chakiris... Etienne… Jacques THEBAULT (Dialogues)
George Chakiris... Etienne… Romuald FIGUIER (Chant)
Grover Dale... Bill… José BARTEL (Dialogues* et Chant)
Pamela Hart... Judith… ??? (Dialogues)
Pamela Hart... Judith… Christiane LEGRAND (Chant)
Leslie North... Esther… Danielle AJORET* (Dialogues)
Leslie North... Esther… Claudine MEUNIER (Chant)
Geneviève Thénier... Josette… Alice HERALD (Chant)
Patrick Jeantet... Boubou Garnier… Olivier BONNET (Chant)
Dorothée Blanck… Passante (« Vous avez de la chance »)… Géraldine GOGLY* (Chant)
Alain Franchet... 1er policier (« Ne restez pas là, circulez soyez chic »)...
Jean-Claude BRIODIN* (Chant)
Bernard Fradet ... 2ème policier (« Nous ne voulons pas vous être antipathiques »)… ???
Remy Brozek... 3ème policier (« Ne nous forcez pas à vous cogner dessus à bras raccourcis »)… Louis ALDEBERT* (Chant)
Pierre Caden... 1er passant (« Y avait du sang jusqu’ici »)… ???
Véronique Duval... Passante (« C’était une petite vieille aux blancs cheveux »)… Monique ALDEBERT* (Chant)
Jacques Henri Barratier... 2ème passant (« C’est proprement immonde »)… Jean-Claude BRIODIN* (Chant)
Scat solo « Arrivée des camionneurs »… Anne GERMAIN* et Louis ALDEBERT*
Scat « Marins, amis, amants ou maris »… Michel LEGRAND*, Jean STOUT*, José BARTEL*, Romuald FIGUIER*, etc.
Scat solo « Kermesse »… Michel LEGRAND*
Chœur : La plupart des solistes, José GERMAIN*, Claude GERMAIN*, Jean CUSSAC*, Jackye CASTAN*, Michèle DORNEY*, etc.
Choeur d'enfants : Olivier BONNET*, Sophie BONNET* et Philippe DER MIKAÉLIAN*
Musiciens : Roger BOURDIN (fl), Roger GUERIN* (tp), Raymond KATARZYNSKI (tb), Pierre GOSSEZ (sax, cl), Armand MIGIANI (sax baryton), Alain BERNAUD* (p), Gus WALLEZ (dms), Jean-Pierre DROUET* et Jean-Claude CASADESUS* ? (percus), Lionel GALI* (vln), Paulette PINCHINAT (vln), etc.

Notes : Françoise Dorléac (Solange) se trompe en tournant avec les playbacks de la "Chanson d'un jour d'été", et chante sur certains mots avec la voix d'Anne Germain (Delphine).
Il semble, selon moi, que Claudine Meunier remplace Anne Germain sur le mot "d'accord" dans la chanson "Toujours, jamais".

Sources :
_ : Générique et pochettes de disques
* : Compléments Rémi Carémel / Dans l’ombre des studios (archives personnelles: identification de voix avec l'aide d'Anne Germain, Jean-Pierre Bouderlique et Géraldine Gogly, entretiens de Rémi Carémel avec Olivier Bonnet, Christian Leyge, Claude Ermelin, Alain Bernaud, Jean-Claude Casadesus et Jean-Pierre Drouet, bulletins de paie de José Germain, Claude Germain et Jackye Castan, récapitulatif de carrière de Jean Cussac)


Récapitulatif par ordre d'apparition des morceaux dans le film

1.1. Le pont transbordeur – Orchestre (piano/cb/batterie, cordes)
1.2. Arrivée des camionneurs – Orchestre (cb, batterie, percus dont xylophone, triangle, cymbale crotale, cymbale suspendue, clarinette basse solo à 0’14 (Pierre Gossez), cuivres (dont section tp (lead : pas Fred Gérard), section tb (lead : André Paquinet possible), tp solo (aigus d’Ivan Jullien), break tb (Raymond Katarzynski)), cordes, piccolo solo, piano solo (pas Michel Legrand)), Chœur mixte (dont Claudine Meunier), Louis Aldebert et Anne Germain (duo scat) et Claude Parent (Solange)
Dans le disque original, la fin est coupée.
1.3. Chanson des jumelles – Orchestre (trompette solo (Roger Guérin), cb/guitare/batterie, flûtes, cordes, cuivres (dont cors), piano, percus), Anne Germain (Delphine) et Claude Parent (Solange)
Dans le disque original, l’intro est coupée, mais l’instru avant la coda n’est pas recouverte par des dialogues.
Inédit en disque 1 : Le café – Orchestre (piano/cb/batterie, flûtes, cordes) et Danielle Darrieux (Yvonne)
1.4. Chanson de Maxence – Orchestre (cordes, harpe, cuivres, piano/cb/batterie), Jacques Revaux (Maxence) et Chœur mixte (dont Jean Stout en basse profonde)
Bande son abîmée au moment des choeurs. Dans le disque original, l’intro est coupée mais pas couverte par les dialogues.
Inédit en disque 2 : Yvonne - Orchestre (cordes) et Danielle Darrieux (Yvonne)
1.5. De Delphine à Lancien 1ère partie– Chœur mixte, Orchestre (sax soprano solo (Georges Grenu), cuivres, piano/cb/batterie, flûtes, cordes, trompettes, guitare)
Inédit en disque 3 : Dialogue de Delphine à Lancien (du coup de feu à « c’est moi ») – Orchestre (cb/batterie, cordes, cuivres, vibraphone (Bernard Lubat ? Michel Hausser ?), celesta, percus) et Chœur mixte
1.5. De Delphine à Lancien 2ème partie –Orchestre (cuivres, piano/cb/batterie/guitare, flûtes, cordes, trompettes, saxophones à 3’58, sax solo à 4’28), Anne Germain (Delphine), Chœur mixte et Jean Stout (Lancien)
Dans le disque original, l’intro est raccourcie mais pas couverte par les dialogues.
1.6. Nous voyageons de ville en ville – Orchestre (guitare, cb/batterie, percus, cordes, cuivres, flûtes, break tb basse (Raymond Fonsèque ? Gaby Vilain ? Camille Verdier ?)), Romuald (Etienne), José Bartel (Bill) et Chœur mixte
Inédit en disque 4 : Solange joue de la flûte – Orchestre (flûte piccolo (Raymond Guiot ?), cordes)
1.7. Chanson de Delphine – Orchestre (cordes, harpe (Lily Laskine ?), flûte (solo ?) à 0’42, cuivres, sax solo à 1’04, trombone solo à 1’40, piano), Anne Germain (Delphine)
Dans le disque original, l’intro n’est pas couverte par des dialogues.
Inédit en disque 5 : Solange vient de trouver son concerto – Orchestre (piano) et Claude Parent (Solange)
Inédit en disque 6 : Solange joue son concerto à Simon – Orchestre (piano, cordes)
1.8. Chanson de Simon – Orchestre (cordes, piano/cb/batterie, violon solo à 0’54 et 2’13, vibraphone, flûte, unisson de 3 flûtes que l’on retrouve dans le morceau, vents (flûtes, basson, etc.), celesta, harpe), Georges Blanès (Simon Dame)
Dans le disque original, l’intro est coupée mais pas couverte par les dialogues.
Inédit en disque 7 : Simon se retrouve seul – Orchestre (célesta ou xylophone ?)
1.10. Andy amoureux – Orchestre (piano, cordes, tenues de cuivres, cb/batterie, trompette solo avec sourdine harmonique (Roger Guérin)), Don Burke (Andy), Géraldine Gogly (Passante 1 : « Vous avez de la chance »), Michel Legrand (Scat d’Andy à 3 mn) et Duo de femmes (Scat féminin)
1.9. Marins, amis, amants ou maris – Orchestre (flûte solo à 0’14 et 1’25, flûtes, percus, guitare, cb/batterie, cordes, cuivres, trompette solo à 1’30, sax solo (Georges Grenu ? Jo Hrasko ?) et trombone solo à 3’45), Claudine Meunier (Esther), José Bartel (Bill), Christiane Legrand (Judith), Romuald (Etienne) et Chœur mixte (Scats : Jean Stout, Michel Legrand, José Bartel, Romuald, etc.) trio de flûtes à 1’59’’, ça ne peut être qu’une idée de Legrand
1.11. Chanson d’Yvonne – Orchestre (cordes, harpe, célesta, cb/guitare/batterie, cuivres, violon solo à 0’46, flûtes) et Danielle Darrieux (Yvonne)
Dans le disque original, courte intro instrumentale alternative, absente dans le film, avec vents, glockenspiel, etc.
Inédit en disque 8 : Solange chantonne son concerto – a priori Françoise Dorléac (Solange)
1.12. Chanson de Maxence (reprise) – Orchestre (cordes, cors/trombones, clavecin, piano), Jacques Revaux (Maxence)
1.13. Chanson de Solange – Orchestre (cb/batterie/vibraphone, piano, cuivres, cordes, xylophone, flûtes), Claude Parent (Solange) et Anne Germain (Delphine)
1.14. De Hambourg à Rochefort- Orchestre (piano, cb/batterie, cordes, cuivres, hautbois solo à 2’00, flûtes, trompette solo à 2’22, guitare, xylophone, flûte solo à 5’05, trompette solo avec aigus (Ivan Jullien ?), trombone solo), Claude Parent (Solange), Anne Germain (Delphine), Romuald (Etienne) et José Bartel (Bill), Chœur masculin, José Bartel (Lancien, en remplacement de J. Stout « Pourquoi me contrarier et pourquoi perdre du temps », etc.), Danielle Darrieux (Yvonne Garnier), Alice Herald (Josette), Don Burke (Andy), Georges Blanès (Simon), Jacques Revaux (Maxence)
Bande son abîmée sur réplique de Delphine « trois marins ».
Inédit en disque 9 : De Hambourg à Rochefort version film
Différences dans la bande orchestre entre le film et le disque : dans le film, il y a des soli de piano et de trompette (Pierre Dutour ou Roger Guérin ?) supplémentaires, et le solo de trompette est différent
1.15. La femme coupée en morceaux – Orchestre (cb/piano/batterie, cuivres, cordes, trompette solo à 1’05, flûtes, célesta (trait final descendant), Danielle Darrieux (Yvonne), Chœur mixte et Alice Herald (Josette)
Les chœurs sont sous-mixés dans le disque, mais mis plus en valeur dans le mixage du film.
Dans le disque original, le pont instrumental entre les deux parties n’est pas couvert par les dialogues.


2.1. Les rencontres – Orchestre (cb/guitare/batterie, cordes, cuivres (dont section tp (lead : Maurice Thomas ?), tb à découvert à la coda (lecteur : Camille Verdier ? Christian Guizien ?)), flûtes, piano, hautbois solo à 1’38 et 4’48), Jean-Claude Briodin (Policier 1 : « Ne restez pas là, circulez soyez chic ! »), Louis Aldebert ? (Policier 2 : « Nous ne voulons pas vous être antipathiques »), Louis Aldebert (Policier 3 : « Ne nous forcez pas, à vous cogner dessus à bras raccourcis »), ??? (Passant 1 : « Y avait du sang jusqu’ici »), Monique Aldebert (Passante 2 : « C’était une petite vieille aux blancs cheveux »), Jean-Claude Briodin (Passant 2 : « C’est proprement immonde »), Jacques Revaux (Maxence : « Je n’aime que les blondes »), Claude Parent (Solange : « C’est très gentil pour moi, Monsieur »), Don Burke (Andy), Anne Germain (Delphine) et Olivier Bonnet (Boubou)
2.2. Chanson d’Andy – Orchestre (piano, cordes, cb/batterie, harpe), Don Burke (Andy)-Dans le disque original, l’intro n’est pas couverte par des dialogues-Inédit en disque 10 : Andy au piano – Orchestre (piano)
2.3. Kermesse (Ballet) – Orchestre (cb, batterie (break drums avec très bon jeu de balais rapide : Daniel Humair ?), cuivres (dont tp1 : Maurice Thomas ?), orgue Hammond (Eddy Louiss ?), cordes, flûtes, piano (Michel Legrand), percus, sax solo à 3’23 (Jean-Louis Chautemps ?)), Chœur d’enfants (Olivier Bonnet, Sophie Bonnet et Philippe der Mikaelian en rere-recording) et Michel Legrand (scat)
Inédit en disque 11 : Fin de la kermesse – Orchestre (cb/piano/batterie)
2.4. Chanson d’un jour d’été – Orchestre (piano, cuivres (big band, cors), cb/batterie, xylophone, cordes), Claude Parent (Solange) et Anne Germain (Delphine)
Dans le premier couplet, Catherine Deneuve et Françoise Dorléac se sont mélangé les pinceaux lors du tournage : Deneuve et Dorléac chantent tous deux « s’en est allé » sur la voix d’Anne Germain, puis Françoise Dorléac chante « saison » et « regretter l’été » sur la voix d’Anne Germain.
Dans le disque original, l’intro est coupée.
Inédit en disque 12 : Départ de Lancien – Orchestre (cordes, piano)
2.5. Toujours, jamais – Orchestre (cordes, harpe, cuivres, piano, cb/batterie, percus, sax alto solo à 1’47, trompette solo avec sourdine harmonique à 2’19, clarinette solo à 2’58 (Georges Grenu ?)), Anne Germain (Delphine), Claude Parent (Solange), Romuald (Etienne), José Bartel (Bill) et peut-être Claudine Meunier (Delphine, voix de remplacement sur le mot « d’accord »)
Inédit en disque 13 : Yvonne chantonne – Danielle Darrieux (Yvonne)
Inédit en disque 14 : Delphine rêve – Orchestre (cordes, flûte, harpe)
Inédit en disque 15 : Départ de Maxence – Orchestre (cordes, cuivres, trombone solo (Raymond Katarzynski ?), harpe, célesta, piano)
2.6. Concerto (Ballet) – Orchestre (piano (rhapsodisant), cordes, trombones)
Inédit en disque 16 : Retrouvailles et départs – Chœur mixte et Orchestre (cordes, bois, xylo ou glock, cb/batterie, cuivres)
2.7. Départ des forains (Ballet) – Orchestre (piano, cordes, cors, hautbois, cuivres, perçus, glockenspiel, trompette solo à 2’18 (lecture), sax solo à 2’26 (lecture), xylophone), José Bartel (Bill), Romuald (Etienne) et Alice Herald (Josette)
2.8. Final – Orchestre (cuivres (dont section trombones (son large, tb1 : Raymond Katarzynski ?), cors), cordes, clarinettes, trompettes, piano, clarinette solo à 1’05, saxophones, xylophone, perçus, cb/batterie) et Chœur mixte
Dans le disque original, la première partie est coupée, et le titre est nommé « Départ des camionneurs ».

Source : Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios (identification des chanteurs par Rémi Carémel, relevé des instruments par Michel Laplace, Michel Bosc et Rémi Carémel, identification des musiciens par Michel Laplace)


Récapitulatif par séances d'enregistrement

Séance du 12 mai 1965, Comédie des Champs-Elysées
Chanteuse : Anne GERMAIN, etc.
Maquettes des chansons, avec Nicole Darde (Delphine)

Séance du 28 mars 1966, Studio Davout
Chanteurs : Jackye CASTAN, Claude GERMAIN, Jean-Claude BRIODIN, etc.

Séance du 30 mars 1966, Studio Davout
Chanteurs : Géraldine GOGLY, Claude GERMAIN, Jean-Claude BRIODIN, etc.

Séance du 1er avril 1966, Studio Davout
Chanteurs : Anne GERMAIN, Jean-Claude BRIODIN, José GERMAIN, Jean CUSSAC, etc.

Séance du 2 avril 1966, Studio Davout
Chanteurs : Géraldine GOGLY, Anne GERMAIN, Jean-Claude BRIODIN, etc.

Séance du 3 avril 1966, Studio Davout
Chanteurs : Anne GERMAIN, etc.

Séance du 14 novembre 1966
Chanteurs : Anne GERMAIN, etc. et peut-être Géraldine GOGLY (Studios de Boulogne, 13h30)
Séance payée exceptionnellement par Parc Film et non par Les Productions Michel Legrand

Séance du 22 novembre 1966
Chanteurs : Jean-Claude BRIODIN, etc. 
Choeurs additionnels ou peut-être l'album instrumental

Source : Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios (archives personnelles : bulletins de salaire d'Anne Germain, Jackye Castan, Claude Germain, Jean-Claude Briodin, José Germain, récapitulatif de carrière de Jean Cussac, agendas de Géraldine Gogly)






8. LES DEMOISELLES DE ROCHEFORT (1967) : VERSION ANGLAISE


L'engagement de vedettes internationales (Gene Kelly, George Chakiris, Grover Dale) dans la distribution donne à Jacques Demy et à son entourage l'envie de proposer un peu plus qu'un doublage anglais : pourquoi ne pas revenir au temps des versions internationales et tourner deux fois chaque scène chantée, une fois en français et une fois en anglais, afin d'avoir un synchronisme parfait?
Pour ce qui est des dialogues parlés, un simple doublage suffira.

Les chansons sont enregistrées à Los Angeles (par la crème des choristes américains) avant le tournage, le tournage est fait en alternant les playbacks français et anglais (cf. vidéo), et le doublage anglais des dialogues effectué après coup par des acteurs anglophones vivant à Paris.

Tournage de la version anglaise des Demoiselles de Rochefort (été 1966)
Les playbacks ont été enregistrés à Los Angeles avant le tournage
(Extrait du doc Les Demoiselles ont 25 ans d'Agnès Varda)


L'adaptation des paroles

Julian More
Jacques Demy confie l'adaptation en anglais des chansons (et peut-être des dialogues parlés) à Julian More (1928-2010), parolier de plusieurs comédies musicales, qui avait déjà adapté pour Broadway Irma la douce de Marguerite Monnot et Alexandre Breffort. (L'hommage à Julian More dans The Guardianhttps://www.theguardian.com/stage/2010/mar/02/julian-more-obituary).

Earl Brown
(début années 60)
C'est en participant à un show TV de Danny Kaye quelques années plus tôt, que Michel Legrand rencontre Earl Brown, choriste (membre du mythique groupe vocal The Skylarks) et contracteur de choristes. La choriste Sally Stevens se souvient de cette rencontre: « Je faisais partie des choristes du Danny Kaye Show dirigés par Earl Brown, je devais avoir 23 ans, et je me souviens du passage de Michel Legrand dans l’émission. Il y avait un endroit devant CBS où on se retrouvait après les répétitions ou les enregistrements de playbacks, Michel était là, on l’emmenait faire des visites et je me souviens d’un soir où on est allé à un piano bar : Michel a joué une chanson ou deux mais personne dans la salle ne savait qui il était, alors qu’il était déjà une célèbre, brillante, et douce personne. Je le raconte dans mes mémoires (I sang that : a memoir from Hollywood, Atmosphere Press), un soir Danny Kaye nous a invités Michel Legrand, Earl Brown, les deux secrétaires de Danny et moi, à un dîner chez lui. Danny Kaye était au bar où il cuisinait chinois (c’était l’une de ses passions), puis on s’est installé dans la salle à manger. Quand Danny s’est levé et a commencé à éteindre toutes les lumières, j’ai préféré commander un taxi (rires). »
Avant de partir pour Los Angeles, Michel Legrand propose tout naturellement à Earl Brown de choisir et convoquer les chanteurs. Mais l'adaptation de Julian More ne lui convenant pas, Earl Brown réécrit une partie des paroles sous le contrôle de Jacques Demy et Michel Legrand. Il faut dire qu'Earl Brown est aussi auteur de chansons: on lui doit notamment "If I can dream" pour Elvis Presley (reprise dans le film Elvis (2022) de Baz Luhrmann), "In the shadow of the moon" pour Frank Sinatra, etc. 

Des photos retrouvées par mon correspondant Lincoln Briney dans les archives de Sue Allen, montrent que Julian More était bien présent au moment des enregistrements. Le prénom "Julian" est noté par Sue au verso d'une photo, et la partition de "De Hambourg à Rochefort"est dédicacée par lui.

Earl Brown, Julian More, Sue Allen et Jacques Demy pendant l'enregistrement des
Demoiselles de Rochefort
 

Les partitions américaines de la "Chanson des Jumelles" (merci à Lincoln Briney pour ce cadeau exclusif et exceptionnel qu'il tient de Sue Allen) montrent également les changements de texte, certainement effectués par Earl Brown.










Le travail de Jacques Demy, Julian More et Earl Brown est une vraie adaptation,  fidèle, mais avec des idées poétiques s'éloignant du sens premier des textes, afin de coller au mieux à l'ambiance du film. Ainsi Maxence qui part "en perm' à Nantes" est "born to lose in Toulouse". Quant au personnage de Simon Dame, dont le nom avait fait fuir Yvonne des années plus tôt, il répond en anglais au doux nom de Monsieur Guillotine, et les paroles vont assez loin pour appuyer sur le jeu de mots.
"How very sad it was
the night she fled the scene,
she didn't want the name
of Madame Guillotine.
She had this silly fear that
if she went to bed,
she'd suddenly wake up
one day without her head."

(Que ce fut triste, la nuit où elle s'est enfuie. Elle refusait le nom de Madame Guillotine. Elle avait une peur folle, en allant se coucher, de se réveiller un matin, la tête coupée). 

Dans l'adaptation anglaise, les noms de certains artistes cités en VO sont modifiés pour mieux coller au public américain ou peut-être à la prononciation ou aux rimes : dans la chanson "De Hambourg à Rochefort", Mozart devient Brahms et Bogoslovski devient Scarlatti (d'après la partition, ce devait même être Khatchatourian).

Autre curiosité, les notes de musique chantées dans la Chanson des Jumelles ne sont plus les mêmes, afin de respecter les rimes anglaises.

Marilyn et Alan Bergman
Notons qu'une fois la version anglaise sortie, Marilyn et Alan Bergman, couple d'auteurs américains de chansons étroitement associé à la carrière de Michel Legrand (L'Affaire Thomas Crown, etc.) écrira ses propres textes sur certaines mélodies du film, en s'éloignant complètement du sens original. Par leurs mots, la chanson de Maxence deviendra un standard sous le nom de "You must believe in spring" (et c'est ce titre qu'utiliseront les jazzmen comme Bill Evans, etc. pour leurs versions instrumentales de ce standard), tandis que les paroles de la version anglaise du film "The girl I've never met" seront vite oubliées.


L'enregistrement des chanteurs (crédités)


Photo de groupe pendant les séances des Demoiselles de Rochefort (1966)
2ème rang, de gauche à droite : Gene Merlino, Jacques Demy, Earl Brown, Michel Legrand, Frank Allen Howren et Julian More
1er rang, de gauche à droite : Tom Kenny, Bill Brown, Bill Reeve ? (caché derrière), George Becker, Judy Lawler, Joe Pryor, Jackie Ward, Sally Stevens, Sue Allen, Bill Lee, Bob Tebow, Ron Hicklin et Sara Jane Tallman.
(Identification: Sally Stevens et Gene Merlino pour Dans l'ombre des studios)


« Earl Brown a engagé la crème de la crème des choristes studio pour Les Demoiselles de Rochefort. Michel Legrand avait de la chance d’avoir tous ces choristes avec lui ! » m’écrit le compositeur Roger Tallman (détenteur de 7 Emmy Awards pour ses compositions de musiques pour les Jeux Olympiques, les matchs de la NBA et du Super Bowl) en découvrant la liste des chanteurs que je lui envoie. En effet, les solistes et choristes de la version anglaise des Demoiselles de Rochefort sont tous des légendes des studios américains, qui ont travaillé avec les plus grands. J’ai eu, avec un peu de culot, de chance et de débrouillardise, l’immense bonheur de pouvoir retrouver et interviewer par téléphone ou mail la plupart des survivants de cet enregistrement (Jackie Ward, Sally Stevens, Gene Merlino, Ron Hicklin, Bob Tebow, et Roger Tallman, frère de Sara Jane Tallman), et je dois dire qu’ils ont tous été absolument adorables, avec une mention spéciale pour Sally Stevens, qui s’est beaucoup démenée pour m’aider.

Les Anita Kerr Singers (c. 1970) donnant une leçon d'harmonisation pour une émission hollandaise
Trois d'entre eux (Jackie Ward, Gene Merlino et Bob Tebow) ont participé à la version anglaise des Demoiselles de Rochefort et ont apporté leur concours à cet article

L’histoire des choristes américains à Los Angeles n’est pas sans rappeler celle de leurs confrères français. « Un mélange de chanteurs de jazz, de chanteurs d’opéra, et de membres de grandes chorales » rappelle Sally Stevens. Tous font partie de groupes vocaux (très nombreux à l’époque), accompagnent des chanteurs dans des disques ou sur des plateaux de télévision, enregistrent des jingles radio, etc. et font des chœurs ou des voix solistes dans des musiques de film, y compris des « voix fantômes », à savoir l’illusion qu’une star hollywoodienne chante avec sa vraie voix dans ses films alors qu’elle est doublée. A propos de groupes vocaux, nos chers Swingle Singers sont (cocorico !) une référence pour les Américains. Bob Tebow, légendaire voix de basse des Anita Kerr Singers, nous le confirme : « Lors d’une tournée d’un mois en Europe, j’étais à Paris avec trois autres choristes studio de Hollywood : Jimmy Bryant, Loulie Jean Norman et Peggy Clark. Jimmy avait arrangé et enregistré la musique d’un club parisien, où on nous avait offert le dîner-spectacle et une visite des coulisses pour dire bonjour au directeur avec qui Jimmy avait travaillé. Deux Swingle Singers sont venus nous voir. Leurs albums étaient adulés par tous ceux qui connaissent la difficulté de leur travail. J’ai plusieurs de leurs vinyles. Ils étaient incroyables. »
Quand on parle de « voix fantômes » dans le cinéma américain, c’est souvent le nom de l’iconique Marni Nixon (voix chantée de Natalie Wood dans West Side Story, d’Audrey Hepburn dans My Fair Lady et de Deborah Kerr dans Le Roi et moi) qui revient. Jackie Ward se souvient : « Marni Nixon était incroyable, j’ai beaucoup travaillé avec elle, et participé à son dernier disque quand elle a décidé de faire une carrière solo et de ne plus chanter dans des choeurs. Elle était talentueuse et avait une voix merveilleuse, c’était une magnifique musicienne. Et Jimmy Bryant, la voix chantée de Tony dans West Side Story était un excellent chanteur, mais il avait débuté comme bassiste. Il m’a raconté que pendant l’enregistrement de la grande scène d’amour de West Side Story, le réalisateur lui avait dit que le personnage était en train de mourir, et qu’il fallait qu’il le chante comme ça. Alors quand Jimmy a vu le film, il a été surpris. Le réalisateur lui avait menti pour obtenir l’interprétation qu’il voulait. »

Choristes (dirigés par Johnny Mann) répétant l'enregistrement de jingles pour la radio KCRA (1964).
Sur les huit choristes, deux (Sue Allen et Bill Lee) ont participé à l'enregistrement américain des Demoiselles de Rochefort.

Studio d'enregistrement de la MGM
Si Michel Legrand, dans son interview pour le coffret CD L’Intégrale Jacques Demy - Michel Legrand (ressortant pour la première fois en disque l’intégralité des chansons en anglais) évoque « la cantine Warner » dans laquelle les choristes improvisaient autour de lui des harmonisations sur "Lullaby of Birdland" et "Somewhere over the rainbow" (aucun d'entre eux n'en a souvenir) et des enregistrements « en avril 1967 », les enregistrements ont en fait eu lieu fin avril/début mai 1966 (avant le tournage). Et bien que le film fût distribué par Warner, l’enregistrement a vraisemblablement eu lieu, d’après Sally Stevens et des notes sur ses photos, dans les studios de la MGM. Les crédits listent les chanteurs sans leurs rôles, à part pour Jackie Ward et Sue Allen à qui sont attribués les rôles de Delphine et Solange, alors que c’est en fait l’inverse. Apparemment, personne ne s’est jamais rendu compte avant moi de cette erreur.


Sue Allen (Delphine), Michel Legrand et Jackie Ward (Solange)
pendant les enregistrements de la version anglaise des
Demoiselles de Rochefort (1966)

Sue Allen (années 50?)
Sue Allen
(1922-2016) prête sa voix à Delphine (et non Solange). Jackie Ward se souvient : « Sue était un peu plus âgée que moi. Quand j’ai commencé ma carrière, j’étais tellement heureuse de la rencontrer car c’était une chanteuse lead incroyable, pouvant lire une partition et chanter immédiatement sans l’aide d’un piano. Elle était très prolifique, elle a travaillé énormément pendant les « radio days ». Allant de studio en studio, elle faisait partie de ce qu’on appelait les « first call singers »". « Une légende » confirme Sally Stevens. Sue enregistre notamment pour Henry Mancini, les chœurs de Diamants sur canapé (1961, dont le sublime "Moon River" choral), Hatari ! (1962) et Charade (1963). Elle fait partie des Ray Conniff Singers, du Norman Luboff Choir, des Randy Van Horne Singers (générique des Flinstones et des Jetsons), des Mel-Tones ou bien encore des Pied Pipers.

Sue Allen : Montage
(Note: l'extrait des Demoiselles de Rochefort est un remontage maison entre l'image française et le son anglais, d'où l'absence de synchronisme)

Partition de "De Rochefort à Hambourg" dédicacée à Sue Allen par Jacques Demy, Michel Legrand, Julian More, Earl Brown et Jackie Ward ("à ma jumelle")


Jackie Ward
Solange (Françoise Dorléac) a quant à elle la voix de Jackie Ward. « Michel Legrand était un homme merveilleux, je me suis effondrée lorsque j’ai appris son décès. Je ne l’avais jamais rencontré avant Les Demoiselles de Rochefort. J’ai été appelée par Earl Brown, qui n’a pas fait passer d’audition à Sue et moi. Earl était familier avec tous les chanteurs de Los Angeles, et savait vraiment ce qu’on pouvait faire. En revanche, il nous a envoyé les partitions avant les séances, ce qui était assez inhabituel. Il y avait pas mal de travail sur le film, Sue et moi avons enregistré pendant deux ou trois jours, mais Michel Legrand et Jacques Demy étaient contents, ils ne nous faisaient jamais refaire. Je n’ai pas eu de difficultés particulières avec les partitions, c’était très facile, à part sur un passage : au début du film, comme Solange est professeur de musique, elle solfie en s’accompagnant au piano « do ré mi fa sol », etc. Mais aux États-Unis, « do ré mi fa sol » ne sont pas des notes mais des accords. Chanter le mot « do » sur un accord différent est très difficile, donc j’ai dû mémoriser d’abord la musique et suivre les mots ensuite, je devais me concentrer sur autre chose que ce que voulait faire mon esprit (rires). »
L’interprétation de Jackie est exceptionnelle. Son complice Bob Tebow (membre avec elle des Anita Kerr Singers), dans les chœurs de la version anglaise des Demoiselles de Rochefort, s’en souvient : « De la même manière que Cary disait à Judy Garland « Judy, Judy, Judy », Michel Legrand disait à Jackie « Jackie, Jackie, Jackie » après chacune de ses prises, avec à chaque fois de plus en plus d’admiration. »
Jackie Ward travaille en d’autres occasions pour Michel Legrand, lors des séjours de celui-ci à Los Angeles : « Après Les Demoiselles de Rochefort, Michel a appelé Earl Brown et moi pour enregistrer quelques chansons qu'il avait écrites, et nous sommes allés à Hormel Meats, le studio d’enregistrement de Geordie Hormel. Michel nous accompagnait, Earl et moi, au piano en chantant avec nous. Ce n'était pas public, c'était juste pour lui. Une autre fois, avec Michael Dees nous avons chanté la chanson de générique du film 40 carats (1973) composée par Michel (ni Michael Dees ni Jackie Ward ne sont crédités au générique, donc info là encore « inédite », ndlr). En 1981, j’ai aussi chanté les rôles de la mère et de la fille (Geraldine Chaplin) dans Les Uns et les Autres (1981) de Claude Lelouch aux studios Warner. La musique avait déjà été enregistrée. J’ai aimé ces enregistrements mais j’ai eu un peu plus de mal. Une autre fois, au début des années 80, Michel m'a demandé de faire une tournée en France avec lui mais je n'étais pas disponible car j'avais promis d'aller au Japon pour faire une tournée de six semaines. Je crois qu'il a appelé Sue Rainey et que c'est elle qui y est allée, c’est une très bonne chanteuse. Si j'avais pu le faire, ça m'aurait bien plu. » Jackie participe également aux chœurs de l’album de Sarah Vaughan arrangé par Michel Legrand. Le compositeur est à chaque fois détendu, heureux et flatté de travailler avec des choristes américains, mais parfois son caractère… reprend le dessus. « Un jour j’étais en séance, et je reçois un appel me disant « Tu dois aller au studio de la MGM tout de suite, Michel a besoin de toi ». Michel n’était pas content des choristes qu’il avait, qui étaient plus lyriques, ce n’était pas le son qu’il voulait, donc il avait fait venir en catastrophe Sue et moi pour que nous nous mettions proches du micro, devant les autres choristes. J’étais un peu gênée vis-à-vis de mes collègues. »

The McDonnell Sisters
Enfant, la petite Jackie (Jacqueline McDonnell de son nom de jeune fille) et ses deux sœurs forment un trio vocal, The McDonnell Sisters, qui remporte un certain succès. Leurs parents les incitent à se rendre à Hollywood. « Étant adolescentes, on ne savait pas lire la musique mais on avait une bonne oreille, et on entendait les harmonies. Plus tard, ça m’a servi, car j’étais l’une des rares choristes blanches à être mélangée avec des choristes afro-américains -par exemple, je connais très bien Darlene Love-, et à savoir chanter dans un style proche d’eux, et sans partitions. J’ai notamment chanté le générique de la série TV Maude avec deux choristes afro-américaines, Sherlie Matthews et Marti McCall, et ça étonne beaucoup de gens que je sois là, car ça sonne comme un chœur 100% black. »
Arrivée à Hollywood, Jackie Ward rencontre des paroliers et compositeurs, et commence à faire des chœurs pour des artistes, en journée dans les studios, et le soir sur des plateaux télé comme le Danny Kaye Show. « C'était une grande période, les choristes lisaient la musique, il fallait le faire car dans une séance de 3 heures on devait faire 4 chansons, et on enregistrait tous ensemble, chanteurs et orchestre. Donc, j'ai étudié la musique au Los Angeles City College car je voulais apprendre à lire comme les chanteurs que je voyais déchiffrer. Et j’y suis arrivée. A l’époque, j’étais mariée à un copiste qui travaillait pour plusieurs orchestres et les musiques de Hoyt Curtin pour les Hanna-Barbera, donc comme il avait beaucoup de scores je m’entraînais à la lecture des notes et des rythmes, et à plein de détails auxquels les choristes ne pensent pas forcément »
En studio, Jackie Ward travaille pour Barbra Streisand (album Stoney End), Bing Crosby (sa dernière séance d’enregistrement), Nat King Cole, et d’autres très nombreuses stars. « Quand vous passez autant d'années dans le métier à travailler tous les jours, vous faites tellement de choses que vous oubliez ce que vous avez fait. Parmi les séances mémorables, la chanson « That’s life » pour Frank Sinatra, aux Western Recorders Studio, on était un trio de choristes, avec Gwenn Johnson qui chantait l’aigu, Betty Jean Baker la deuxième voix, et moi la troisième. Frank aimait être entouré de musiciens, donc il chantait toujours au milieu de l’orchestre. Nous les choristes, nous étions séparées dans une petite pièce avec vitre et casques. J’ai aussi beaucoup travaillé avec les Carpenters, Tom Bahler qui connaissait très bien le groupe et moi avons souvent renforcé leurs choeurs. Je me souviens d’une chanson (« I can dream, can’t I ? », ndlr) où sur huit mesures ils voulaient un son années 40 comme les Modernaires donc j’ai fait ce passage avec trois autres choristes (Gene Merlino, John Bahler et Mitch Gordon, ndlr). »
Elle travaille avec tous les groupes vocaux et orchestres du moment : Johnny Mann Singers (toutes les séances), Anita Kerr Singers, Ray Conniff Singers (dont de nombreux soli), Percy Faith, etc. « J’ai rejoint les Anita Kerr Singers dans la deuxième moitié des années 60. En 1971, on est allé aux Pays-Bas et on a reçu un Edison Award du meilleur album de l’année pour notre disque de reprises de Bacharach, dont « A house is not a home » a cappella. »
En 1963, Jackie enregistre un tube et passe pas loin d’une vraie carrière soliste. « Perry Botkin Jr et son ami Gil Garfield m’ont demandé si je pouvais enregistrer une maquette d’une chanson qu’ils venaient de composer, « Wonderful Summer ». Perry m’a joué la chanson en prenant une grosse voix, et ça ne fonctionnait pas. Je lui ai proposé de prendre une voix d’adolescente marchant dans le sable, chantant son premier amour d’été. J’ai fait cette maquette, et ils ont décidé de la sortir. Comme j’avais déjà 29 ans (Jackie est née en 1934 et non en 1941 ou 1946 comme on peut le lire sur le net, ndlr), j’avais trois enfants et j’en attendais un quatrième, j’étais très loin de la jeune adolescente de la chanson, donc j’ai pris le nom de ma fille, Robin Ward, et je ne pouvais pas la chanter en public, et donc faire une carrière soliste. Mais la chanson a été un tube, et j’ai reçu des tas de lettres d’adolescents (rires). »

Jackie Ward : Montage
(Note : l'extrait des Demoiselles de Rochefort est un remontage maison avec l'image française et le son anglais, d'où l'absence de synchronisme)

« Voix de l’ombre », Jackie l’est aussi pour la télévision et le cinéma, que ce soit en prêtant sa voix aux chanteurs de la Partridge Family (grand show télé américain de l’époque) ou à des actrices comme Linda Evans (Beach Blanket Bingo), Janet Leigh (An American Dream) et Natalie Wood (La Grande Course autour du Monde, Daisy Clover). « Pour Daisy Clover, Bill Lee m'a contactée pour passer l’audition et être la voix chantée de Natalie Wood. Le compositeur André Previn m'a demandé ce que je voulais chanter, j'ai dit « My funny valentine » et il m’a accompagnée au piano. J'ai tourné mon dos au producteur et réalisateur, et j'ai chanté pour André, qui m'a ensuite appelé pour me dire que j'étais prise. Quand j'ai fait la musique à Warner Bros, après la première chanson, l'orchestre a applaudi. Je me demandais ce qui se passait, et j'ai su plus tard par l'ingénieur du son, Dany, que Natalie avait enregistré avec l’orchestre quelques temps avant et que ça n’avait pas marché, donc l'orchestre était content que je sois là. En revanche, comme Natalie devait jouer une sorte de jeune Judy Garland, avec un talent naturel et une voix pas encore travaillée, on m’a demandé de chanter moins proprement, donc j’ai dû refaire une prise un peu plus « brut ». Je n’ai jamais rencontré Natalie Wood, elle ne voulait pas savoir que j’existais mais je peux le comprendre, elle avait envie de chanter elle-même. »

Le trio J. Ward, S. Stevens et S. Allen
(années 70/80)
Jackie participe également à de multiples films d’animation comme Les aventures de Yogi le nounours (Cindy), Le petit monde de Charlotte (voix soliste), Fievel et le Nouveau Monde (trio de tourterelles, avec Sally Stevens et Sue Allen), Banjo le chat malicieux (trio de chattes et solistes off, avec les mêmes), La Petite Sirène (avec Sally Stevens et Diana Lee), etc. « A la fin des années 70, j'ai réalisé que j'avais fait au moins 400 films. C'était une époque où il y avait énormément de travail pour les chanteurs. J’ai eu beaucoup de chance de faire tout ça. »


Michel Legrand, Julian More et Earl Brown (Maxence) pendant les séances d'enregistrement des Demoiselles de Rochefort

Contracteur des choristes et co-auteur de l’adaptation, Earl Brown prête sa voix à Maxence. « Je ne me souviens plus du nom du personnage, mais c’était le rôle principal masculin, qui chante cette si belle mélodie. Earl avait une voix à tomber par terre, magnifique. J’aurais tellement voulu qu’il enregistre plus en soliste, mais ce n’était pas ce qui l’intéressait. Il était un excellent lecteur, faisait partie des Skylarks, travaillait avec le Danny Kaye Show. C’était un homme adorable. Il aurait pu devenir une star. » se souvient Jackie Ward. « C'est la première fois que j'ai entendu chanter Earl comme soliste et j'étais très impressionnée, je ne l'avais jamais entendu chanter comme ça, je le voyais plus comme arrangeur. » confirme Sally Stevens.

Les forains Etienne et Bill ont a priori les voix chantées de Frank Allen Howren (membre des Hi-Lo's) et Joe Pryor (Ron Hicklin se souvenant qu’ils avaient tous deux un rôle important), mais sans échantillons de voix de ces deux chanteurs il est pour l’instant impossible de déterminer « qui fait quoi ».

Gene Merlino (années 50 ?)
« Dans
Les Demoiselles de Rochefort, j’étais la voix chantée de Guillaume Lancien » m'apprend Gene Merlino. « Et celles et ceux qui ne sont pas sur la photo de groupe ont enregistré leur rôle à part, sans participer aux chœurs. » Gene Merlino (crédité « Morlino » dans le livret de l’intégrale Jacques Demy – Michel Legrand) est, comme ses camarades de micro, une légende des studios. On l’entend dans des milliers d’enregistrement. Pour le cinéma, il est la voix chantée de John Kerr dans Thé et Sympathie (1956) et de Franco Nero dans Camelot (1967) et choriste dans des centaines de musiques de film pour Henry Mancini, Burt Bacharach, etc. Plus tardivement dans sa carrière, on l’entend dans plusieurs épisodes des Simpson. Il fait partie de nombreux groupes vocaux, dont le quatuor vocal The Anita Kerr Singers avec Anita Kerr, Jackie Ward et Bob Tebow. Sous pseudonyme (Gene Marshall, etc.), il enregistre pour différentes entreprises spécialisées plus de 10.000 « song poems », ces textes de chansons écrits et envoyés par des paroliers amateurs qui payaient une certaine somme pour qu’ils soient mis en musique et enregistrés, à la façon de maquettes. Cette histoire a donné lieu à un documentaire : Off the Charts : The Song Poems Story (2003).

Gene Merlino : Montage

Bill Lee
Monsieur Dame
devient en anglais Simon Guillotine, et prend, selon moi (avec la confirmation de Jackie Ward) la voix de Bill Lee, immense star des chanteurs de studio. Baryton avec une amplitude assez grande, pouvant aussi bien assurer des parties de ténor que de basse profonde, on l’entend en soliste dans des dizaines de films culte dont La Mélodie du Bonheur (voix chantée de Christopher Plummer / Le Capitaine Von Trapp), Les 101 Dalmatiens (voix chantée de Roger), Le Livre de la Jungle (voix chantée de Shere Kahn), South Pacific (voix chantée de John Kerr / Lt Cable), etc. ou en choriste avec les Mellomen (les chiens de fourrière de La Belle et le Clochard, etc.). Dans le documentaire Secret Voices of Hollywood, Gene Merlino témoigne : « Lorsqu’on passait une audition et qu’on se retrouvait avec Bill Lee dans la salle d’attente, on savait que le rôle serait pour lui (rires) ».

The Mellomen (dont Bill Lee) : reconstitution de la séance d'enregistrement de la fourrière
dans La Belle et le Clochard (1955)

Diana Lee
Sa fille, Diana Lee (que je n'ai malheureusement pas réussi à contacter) a elle aussi un sacré pedigree de chanteuse de l’ombre dans les films musicaux hollywoodiens : voix chantée de Samantha Eggar dans L’Extravagant Docteur Dolittle (1967), de Diana Sowle dans Charlie et la Chocolaterie (1971), de Liv Ullman dans Les Horizons Perdus (1973), etc. Et tous comme ses camarades, elle fait partie de multiples groupes vocaux (Ray Conniff Singers, etc.) et travaille avec les plus grands. Son timbre de voix, assez reconnaissable (mais j’ai quand même demandé la confirmation d’une oreille musicale et américaine, mon ami chanteur Liam Forde), peut être entendu dans Les Demoiselles de Rochefort sur le personnage de Judith.


Diana Lee : Montage
(Note : l'extrait des Demoiselles de Rochefort est un remontage maison avec l'image française et le son anglais, d'où l'absence de synchronisme)

Sally Stevens
Pour Esther (copine de Judith) et Josette, la voix est très proche de celle de Sally Stevens, qui s’identifie elle-même (sans certitude à 100%) sur des répliques de Josette. Sally retrouve Jackie Ward, avec qui elle a énormément travaillé. Jackie se souvient : « On a tellement chanté ensemble, que des gens m’appelaient Sally et elle, Jackie. J’adore chanter avec Sally, c’est une chanteuse soprano au top, merveilleuse, personne ne peut faire mieux. Beaucoup de soprano ont des voix puissantes mais ne savent pas se mettre en retrait pour avoir un bon son de chœur. Quand Sally chante, vous entendez toutes les voix, elle ne prédomine pas. J’ai cinq ans de plus qu’elle. Je l’ai rencontrée quand elle avait 18 ans, elle était encore à UCLA. Et maintenant, elle habite à trois blocs d’immeubles de moi. » 
Sally Stevens me confirme : « Jackie Ward est une très bonne amie, elle vient dîner chez moi dans quelques jours, je lui ferai écouter des extraits des Demoiselles de Rochefort, on essaiera de vous aider à identifier les voix. Nous n’avons jamais vu le film, et c’est un projet tellement particulier pour toutes les deux, spécialement pour elle, qui avait l’un des rôles principaux. C'était tellement excitant d'être là avec Michel et Jacques Demy. C'était au début de ma carrière, j'étais très jeune, donc être avec tous ces gens bien établis dans le métier, c’était formidable. »
Avant Les Demoiselles de Rochefort, Sally a déjà quelques musiques de film à son actif : « J’ai eu la chance de travailler dans les années 60-70 avec des compositeurs comme Alfred Newman dans La Conquête de l’Ouest (1962) ou Maurice Jarre dans Docteur Jivago (1965). Dans La Mélodie du bonheur je n’avais pas de solo mais je suis dans le chœur des nonnes qui chantent « How do you solve a problem like Maria ? ». C’était la fin d’un âge d’or. Un temps où la musique de film était tellement belle, alors que maintenant on est plutôt dans des effets sonores. »
A propos des Demoiselles de Rochefort et de Michel Legrand: « Je pense que j’ai dû travailler un ou deux jours sur Les Demoiselles, mais pas plus. Je ne me souviens plus trop des séances. Jacques Demy était adorable mais nous avons eu peu d’interactions avec lui. Ensuite, trois ans après, j’ai enregistré la chanson « Ask yourself why » du film La Piscine (1969) de Jacques Deray. C’était à Los Angeles, dans un petit studio de Columbia Records qui faisait uniquement les voix (l’orchestre avait déjà été enregistré). Michel Legrand avait composé la musique et m’a dirigée, il n’y avait que nous deux dans le studio et c’était très facile de travailler avec lui, il était encourageant, et dans mes souvenirs ne m’a pas donné beaucoup d’indications. Une autre chanteuse, Ruth Price, a fait les voix, je n’ai pas vu le film, d’après ce qu’on m’a dit c’est la version de Ruth qui est dans le film (coupée, ndlr), et la mienne dans le disque (en intégralité, ndlr). Comme c’était un film français, il a été fait hors syndicat, donc je ne touche pas de royalties dessus. Plus tard, j’ai fait avec Michel des chœurs sur un album, et là il était un peu plus tendu, il me semble. »

Sue Allen, Michel Legrand, Sally Stevens, Jackie Ward et Earl Brown sur l'enregistrement des Demoiselles de Rochefort

Fin des années 60, c’est la mode des voix très éthérées, avec pas mal d’air dans le timbre. Sally devient la soprano « star » des studios hollywoodiens : « J’avais une formation de chanteuse lyrique, mais je n’avais pas une voix opératique. Mon son avec pas mal d'air m'a fait travailler. » On la retrouve en soliste dans Le Renard (1967, elle est la première à chanter le thème du film composé par Lalo Schifrin, dont la reprise de l’orchestre Hugo Montenegro deviendra la musique « culte » des publicités Dim), Klute (1971, la voix inquiétante), L'Inspecteur Harry (1971, encore une voix inquiétante), On any Sunday (1971, chant et écriture de la chanson du générique de ce film documentaire consacré au sport moto), etc.
Avec sa sœur et Danny Elfman, bien plus tard, elle chante « The Simpsons » dans le générique de la série d’animation. « J’ai aussi beaucoup chanté de génériques de fin pour les Simpson. A l’époque, les studios étaient poursuivis en justice par les stars quand quelqu’un faisait une imitation, donc la Fox a été intelligente, elle a décidé de créditer les chanteurs de manière que ça ne semble pas être un plagiat. J’ai fait notamment « People » de Barbra Streisand, ou « Scorpio ». On entend toujours ma voix dans le générique, mais je ne travaille plus dans l’équipe et c’est assez triste. Le nouveau compositeur qui a remplacé Alf Clausen est très gentil et j’ai fait une saison avec lui, mais les contracteurs vocaux ont changé et apporté leurs propres équipes de chanteurs. »
Sally est aussi une habituée des films d’animation de Don Bluth : voix chantée de Brisby dans Brisby et le Secret de NIMH (1982), voix de l’une des chattes dans Banjo, le chat malicieux (1979, avec Jackie Ward et Sue Allen), chœurs de Fievel et le Nouveau Monde (1986). Elle a également participé à des Disney comme La Petite Sirène (1989) ou La Belle et la Bête (1991). Dans le milieu de la musique de film, elle est la principale contracteuse de choristes dans les années 90/2000, où elle collabore étroitement avec John Williams, Danny Elfman, Alan Silvestri, James Horner, etc. Elle vient tout juste de publier son autobiographie, I sang that : A memoir from Hollywood (Atmosphere Press, 2022), que je vous invite chaleureusement à commander.

Sally Stevens : Montage par la Society of Singers

La voix chantée d’Yvonne n’a pas été identifiée, mais il pourrait s’agit de Judy Lawler, dont Sally se souvient vaguement qu’elle faisait « la serveuse ». Hors il semble que la serveuse soit en fait chantée par Sally elle-même, donc il se peut que Sally l'ait confondue avec sa patronne Yvonne. Judy Lawler ne faisait pas partie des équipes habituelles. Dans les souvenirs de Jackie, elle a été recommandée pour le projet par Stan Farber, un choriste qui n’est pas présent dans Les Demoiselles de Rochefort.

Pour les petits rôles masculins de la scène des Rencontres, le chanteur et contracteur de choristes Ron Hicklin m’a identifié sa propre voix et celles de George Becker (ténor des Skylarks) et Tom Kenny (baryton-basse). Le premier policier est selon moi chanté par Bob Tebow. Quant à la badaud, elle a semble-t-il la voix de Gilda Maiken (chanteuse soliste des Skylarks, et voix chantée de Stella Stevens dans Des filles… encore des filles (1962)), dont le timbre n’est pas sans rappeler Rosemary Clooney.

Dans les chœurs, on retrouve Bill Brown (membre des Skylarks, mari de Sue Allen, aucun lien de parenté avec Earl Brown) et Sara Jane Tallman (1939-2018). Le frère de celle-ci, Roger Tallman, me raconte : « Elle avait une voix de soprano très aigue, comme Sally Stevens. On l’entend chanter dans le générique de la série Batman avec ces mots que nous connaissons tous : « Na na na na na na na na na BAT MAN ». Elle est aussi l’une des chanteuses principales de « It’s a small world after all » pour Disney. Elle a enregistré le générique de MASH et beaucoup travaillé à la télévision pour Perry Como, Andy Williams, Dean Martin, Julie Andrews, Carol Burnett, etc. » Côté vie privée, Sara Jane Tallman a été l’épouse de deux grands musiciens, les compositeurs et pianistes Dave Grusin et Artie Kane.


L'enregistrement des chanteurs (non-crédités)

Un chanteur a été oublié dans les crédits du disque. Un choriste méconnu? Non, l'une des plus grandes stars hollywoodiennes, à savoir Gene Kelly en personne. Gene Kelly (Andy) a enregistré sa voix chantée dans la version anglaise (Patricia Ward Kelly, sa veuve, a pu me le confirmer à l'écoute), vraisemblablement à l'époque du tournage, et certainement au Studio Davout, où deux témoins (Claude Ermelin et Romuald Figuier) m'ont signalé l'avoir croisé. Peut-être en a-t-il d'ailleurs profité pour tenter d'enregistrer le chant en français (non retenu)?
Le résultat de ce chant en anglais est plus qu'honorable mais sur certains mots aigus et deux longues tirades (une dans "The Meetings" et une dans "Andy's song"), c'est sa voix chantée française, Don Burke (lui non plus pas crédité), qui le remplace. Don me l'avait signalé: "Une semaine après l'enregistrement du français, Michel m'a demandé de revenir en studio pour chanter toutes les chansons d'Andy en anglais, pour lesquelles je n'ai jamais été payé". Anecdote confirmée par Jean-Claude Briodin: "Don Burke a toujours chanté à l'oreille, il ne savait pas lire les partitions. Michel a été odieux avec lui pendant la séance, à tel point que Don est parti sans rien signer et n'a pas été payé."
Que Michel Legrand, les producteurs, etc. aient à l'époque accepté ce "mix" bizarre entre les deux voix (alors que Gene Kelly, même sans avoir une grande amplitude vocale, aurait certainement pu enregistrer 100% de son rôle chanté), c'est une chose.
Qu'Universal Music France, en sortant le disque en 2013, "oublie" de mentionner Gene Kelly (sans parler de Don Burke) sur la pochette du disque, en est une autre. Certes, Gene Kelly n'avait pas signé la feuille de présence qui avait été signée par les choristes à Hollywood (on présume que l'enregistrement des chansons était prévu dans son contrat de comédien), mais sa voix est très reconnaissable.
"Oublier" lors de rééditions de créditer des chanteurs de musiques de film (qui n'avaient jamais été crédités auparavant pour l'oeuvre) afin d'éviter des "complications administratives" (nouveaux contrats avec plus de pouvoir pour les interprètes (notamment celui de refuser une réédition), etc.) fait partie des pratiques maison (cf. chapitre "Droits et reconnaissance"). On lèse avec beaucoup de "courage" des choristes octo-, nonagénaires et centenaires qui n'ont jamais fait de démarches de leur vie pour touchers leurs droits et ne représentent pas une grande menace. Mais ne pas créditer Gene Kelly, c'est assez incroyable.

Dans la chanson « Andy amoureux », la passante qui dit « Well you’re a lucky man » n’a pas un accent américain (d’après mon ami chanteur américain Liam Forde). Il se pourrait qu’elle ait été enregistrée en France à la même période que la voix de Gene Kelly. Il me semble reconnaître Alice Herald (voix chantée française de Josette), même si Alice ne s’en souvient pas. Le petit chœur féminin de cette chanson a semble-t-il aussi été fait en France (et différent de la version originale française) puisque je perçois le timbre de Claudine Meunier.

La répartition Gene Kelly / Don Burke se fait ainsi sur le chant :

Titre 8 « Andy in love »
1'19-1'33 : ANDY (VOIX PRINCIPALE) : Gene Kelly
1'33 : PASSANTE 1 (« Well, you’re a lucky man ») : Alice Herald ?
1'39-1'52 : ANDY (SCAT ISSU DE LA V.O.) : Don Burke
1'54-2'08 : ANDY (VOIX PRINCIPALE) : Gene Kelly
2'09 : ANDY (VOIX SECONDAIRE, « I’m still on a hook ») : Don Burke
2'12-2'21 : ANDY (SCAT ISSU DE LA V.O.) : Don Burke
2'24-2'40 : ANDY (VOIX PRINCIPALE) : Gene Kelly
2'41-2'54 : ANDY (SCAT ISSU DE LA V.O.) : Don Burke
2'59-3'02 : ANDY (VOIX SECONDAIRE) : Don Burke (dans la V.O., ce scat est chanté par Michel Legrand)
3'02 : CHŒUR FÉMININ : ??? et Claudine Meunier ?
3'28-fin : ANDY (SCAT ISSU DE LA V.O.) : Don Burke

Titre 12 « From Hambourg to Rochefort »
3’40 : ANDY (« re si do re la do, etc. ») : Gene Kelly

Titre 14 « The Meetings »
2'05-2'50 : ANDY (VOIX PRINCIPALE) : Gene Kelly
2'54-2'56 : ANDY (VOIX SECONDAIRE, « Sorry mademoiselle ») : Don Burke
2'57-3'11 : ANDY (VOIX PRINCIPALE) : Gene Kelly
3'12-3'22 : ANDY (VOIX SECONDAIRE, « I burnt a turn of gasoline, etc. charm ») : Don Burke
3'24-4'05 : ANDY (VOIX PRINCIPALE) : Gene Kelly

Titre 15 « Andy’s song »
0'20-0'57 : ANDY (VOIX PRINCIPALE) : Gene Kelly
0'58 : ANDY (VOIX SECONDAIRE, mot « man ») : Don Burke
0'59-1'34 : ANDY (VOIX PRINCIPALE) : Gene Kelly
1'36-1'59 : ANDY (VOIX SECONDAIRE, « I know that she exists, etc. wrong ») : Don Burke
2'00-2'08 : ANDY (VOIX PRINCIPALE) : Gene Kelly

Exemple du switch Don Burke - Gene Kelly dans "The Meetings"

Ron Hicklin
Parmi les crédits du disque, on trouve un certain « Ronald Reeve ». Ronald Reeve n’a jamais existé, il s’agit visiblement d’un mix entre Ron Hicklin (non crédité, mais bien présent à la séance et sur la photo de groupe) et peut-être Bill Reeve (choriste dont se souvient Gene Merlino, qui serait peut-être le choriste caché sur la photo de groupe, même si aucun choriste n’a pu me le confirmer). Ron Hicklin m’a confirmé avoir participé au film, se souvenant de ses répliques dans la scène des Rencontres. Lui aussi est une légende des studios, à la fois comme choriste et comme contracteur de chœurs (Flipper le dauphin, Batman, etc.). Sally Stevens : « Jackie Ward et moi avons travaillé presque tous les jours ensemble du milieu des années 60 au milieu des années 70, de 9h à 22h, six jours par semaine, principalement pour les Ron Hicklin Singers, qui travaillaient côte à côte avec la Wrecking Crew (l’équipe des « requins de studio » de Los Angeles, ndlr), on a accompagné énormément de chanteurs et chanté dans The Partridge Family, Happy Days, etc. Ron Hicklin nous avait également contacté pour chanter dans Butch Cassidy et le Kid (1969) le morceau « South American Getaway » composé par Burt Bacharach. Il y avait Jackie Ward, Sue Allen, Ron Hicklin, John Bahler et moi. »


Le doublage des acteurs

Suzanne Avon
Une fois le film tourné, les dialogues en anglais sont doublés à Paris. Il s'agit évidemment d'une "niche" dans le milieu du doublage, mais toute une communauté d'acteurs anglophones (natifs, ou français bilingues) vivant à Paris participe alors aux doublages de versions anglaises de films français ou internationaux (russes à la S.P.S.).
C'est mon ami comédien-chanteur Michel Mella qui m'en a parlé pour la première fois: "Je ne sais pas dans quel studio a été doublé Les Demoiselles de Rochefort, la plupart des studios de doublage parisien faisaient aussi du doublage anglais: Lingua-Synchrone, Jacques Willemetz, S.P.S., etc. Ma mère (la comédienne canadienne Suzanne Avon, ndlr) doublait Danielle Darrieux dans le film, elle avait rencontré Gene Kelly au moment du doublage. Elle lui avait parlé de mes problèmes d'acnée, il devait être content (rires). Je crois me souvenir que Sylviane Mathieu doublait l'une des jumelles. Je ne sais pas qui sont les autres membres de la distribution. Parmi les comédiens qui en faisaient beaucoup dans les années 60: Sylviane Mathieu, Katy Vail, Jacqueline Porel, Jean Fontaine, Yves Brainville, Duncan Elliott, Russ et Ginger Morrow, George Birt (qui dirigeait aussi), le mari de Svetlana Pitoëff, Billy Kearns, et ponctuellement Jess Hahn." 

Si Katy Vail et Billy Kearns ont respectivement doublé Josette et Simon Dame d'après l'identification de mon confrère Jean-Pierre Bouderlique, le reste du casting reste pour l'instant un mystère malgré l'aide qu'a pu m'apporter la communauté d'acteurs anglophones à Paris (Jimmy Shuman, Rosalie Corraface, George Birt, Alexandre Klimenko, Patrizia Pierangeli). Quant à Sylviane Mathieu (devenue Sylviane Mahias après un second mariage), elle nous a malheureusement déclaré ne pas avoir doublé dans Les Demoiselles de Rochefort. En revanche, elle se souvient avoir doublé Catherine Deneuve dans la version anglaise de La vie de château (1966).


L'exploitation

Cette version anglaise est parfois considérée comme "jamais sortie", or elle a bien été diffusée, notamment pour la télévision brésilienne (avec sous-titres portugais). Elle n'est par contre, a priori, jamais sortie en vidéo. Une sortie en DVD/Blu-Ray demanderait une restauration spécifique pour les scènes tournées spécialement en anglais.

Si elles sonnent très agréablement à des oreilles non-anglophones (chant au top, mixage qui nous permet de redécouvrir l'orchestration), les anglophones spécialistes de Michel Legrand sont plus réservés. La musique de Michel Legrand est typiquement française, et l'adaptation fait perdre de la fluidité, et contient des maladresses. George Chakiris garde quant à lui souvenir d'un tournage moins dynamique en anglais. 

Les chansons ont visiblement été publiées en double LP en 1967 (mais certaines rééditions avec le même visuel proposaient la version française), avant de finalement sortir en CD 2012 dans le coffret L'intégrale Jacques Demy / Michel Legrand (Universal).

Trois extraits de la version anglaise sont trouvables: deux vidéos Youtube de très mauvaise qualité (la chanson des jumelles précédée de son intro, et la chanson d'Yvonne) et un très court extrait des "Rencontres" dans le doc Les Demoiselles ont 25 ans
Les autres extraits trouvables sur Youtube sont des montages faits par un Youtubeur avec l'image de la version française, et le son du disque de la version anglaise. 

Les superbes choeurs de la version anglaise de la "Chanson de Maxence"
avec des harmonies "inédites" (écoutez le ténor sur "his one, his only love") 


Bonus : les partitions originales de la deuxième partie de "De Hambourg à Rochefort"

Notons, qu'alors que nous ne sommes qu'à quelques semaines du tournage, Bill est encore prénommé Guy, et Andy prénommé Vincent.

















Récapitulatif par personnages

LES DEMOISELLES DE ROCHEFORT (1967) : VERSION ANGLAISE
Musique et direction des chanteurs : Michel Legrand
Adaptation anglaise : Julian More et Earl Brown
Contracteur des chanteurs : Earl Brown
Enregistrement des chanteurs : ??? (MGM Studios (Los Angeles), fin avril (dont 28/04)-début mai 1966)
Enregistrement des comédiens : ??? (France)
Catherine Deneuve... Delphine Garnier… ??? (Dialogues)
Catherine Deneuve... Delphine Garnier… Sue ALLEN (Chant)
Françoise Dorléac... Solange Garnier… ??? (Dialogues)
Françoise Dorléac... Solange Garnier… Jackie WARD (Chant)
Jacques Perrin... Maxence…  ??? (Dialogues)
Jacques Perrin... Maxence… Earl BROWN (Chant)
Gene Kelly... Andy Miller… Gene KELLY (Dialogues et Chant principal)
Gene Kelly... Andy Miller… Don BURKE (Chant sur une partie des répliques, sur certains mots et sur tous les scats)
Danielle Darrieux... Yvonne Garnier… Suzanne AVON (Dialogues)
Danielle Darrieux... Yvonne Garnier… Judy LAWLER ? (Chant)
Michel Piccoli... Simon Dame… Billy KEARNS (Dialogues)
Michel Piccoli... Simon Dame… Bill LEE (Chant)
Jacques Riberolles... Guillaume Lancien… ??? (Dialogues)
Jacques Riberolles... Guillaume Lancien… Gene MERLINO (Chant)
George Chakiris... Etienne… ??? (Dialogues)
George Chakiris... Etienne… Frank HOWREN ou JOE PRYOR (Chant)
Grover Dale... Bill… ??? (Dialogues)
Grover Dale... Bill… Frank HOWREN ou JOE PRYOR (Chant)
Pamela Hart... Judith… ??? (Dialogues)
Pamela Hart... Judith… Diana LEE (Chant)
Leslie North... Esther… ??? (Dialogues)
Leslie North... Esther… Sally STEVENS ? (Chant)
Geneviève Thénier... Josette… Katy VAIL (Dialogues)
Geneviève Thénier... Josette… Sally STEVENS ? (Chant)
Patrick Jeantet... Boubou Garnier… ??? (Dialogues)
Patrick Jeantet... Boubou Garnier… ??? (Chant)
Henri Crémieux... Subtil Dutrouz... ??? (Dialogues)
Dorothée Blanck… Passante (« Vous avez de la chance »)… Alice HERALD ? (Chant)
Alain Franchet... 1er policier (« Ne restez pas là, circulez soyez chic »)...
Bob TEBOW ? (Chant)
Bernard Fradet ... 2ème policier (« Nous ne voulons pas vous être antipathiques »)… George BECKER
Remy Brozek... 3ème policier (« Ne nous forcez pas à vous cogner dessus à bras raccourcis »)… Ron HICKLIN (Chant)
Pierre Caden... 1er passant (« Y avait du sang jusqu’ici »)… Tom KENNY (Chant)
Véronique Duval... Passante (« C’était une petite vieille aux blancs cheveux »)… Gilda MAIKEN (Chant)
Jacques Henri Barratier... 2ème passant (« C’est proprement immonde »)… Ron HICKLIN (Chant)
Autres chanteurs (rôles incertains) : Gilda MAIKEN, Judy LAWLER, Diana LEE, Sally STEVENS, Sara Jane TALLMAN, Bill BROWN, Bill REEVE.

Sources :
Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios (identification des voix chantées avec l'aide de Sally Stevens, Jackie Ward, Ron Hicklin, Gene Merlino, John Merlino, Patricia Ward Kelly, Scott Emerson et Liam Forde / identification des voix parlées avec l'aide de Michel Mella et Jean-Pierre Bouderlique / dates d'enregistrement grâce aux archives de Lincoln Briney et Sue Allen)




9. LES DEMOISELLES DE ROCHEFORT (1967): 
 DOUBLAGE ESPAGNOL


En 1968, Les Demoiselles de Rochefort est doublé intégralement (dialogues et chansons) en espagnol. Ce doublage, longtemps considéré comme perdu, a été édité pour la première fois en DVD en 2006. Grâce à Iñaki Torre, spécialiste du doublage chanté espagnol, j’ai pu avoir quelques informations.


L’adaptation des dialogues et des chansons

Confiée apparemment à Miguel Cussó, l’adaptation souffre de certaines tournures de phrase curieuses et d’un manque de fluidité, de prosodie, mais le synchronisme est réussi.

Quelques particularités :
-Les rimes lors de la scène du gâteau sont respectées.
-Le personnage joué par Michel Piccoli s’appelle bien Simon Dame en espagnol, et on fait plusieurs fois allusion à Monsieur Dame ou Madame Dame, mais Yvonne se voit obligée d'expliciter le jeu de mots en précisant qu’elle ne voulait pas s’appeler Señora Señora.
-Tout comme dans la version anglaise de « De Hambourg à Rochefort », certains noms de musiciens et de compositeurs sont modifiés alors que les rimes fonctionnaient déjà. Stravinsky et Bogoskovski ont-ils été jugés trop communistes par le régime franquiste pour qu’ils soient remplacés par Kubelik et Moussorgski ? Quant à Paul Desmond, il remplace Lionel Hampton.
-Dans la chanson « Les Rencontres », le jeu de mots « je vais en perm’ à Nantes » est traduit « Y pienso ir à Nantes » (j’ai l’intention d’aller à Nantes) qui peut se prononcer « Y, pienso, irán, antes » (eux iront avant, « eux » étant la famille dont il parle juste avant). Mais plus tard, face à Andy, Maxence ne peut pas ressortir son jeu de mots (il ne reparle pas de sa famille), donc l’auteur a trouvé une autre plaisanterie pour faire rire Andy, qui est bon public.


Le doublage des dialogues et des chansons

Studios Balcazar
« J’ai pu avoir quelques informations sur le doublage des Demoiselles de Rochefort, grâce à l’adaptateur espagnol de La Belle et la Bête, qui nous a quittés en 2012. Ce sont des données difficiles à trouver si on ne connaît pas quelqu’un dans le milieu »
nous révèle Iñaki Torre. Le doublage a été fait en castillan (il faut attendre les années 90 pour voir apparaître des doublages catalans) à Barcelone, comme la plupart des doublages de films musicaux (Madrid doublant principalement des films non-musicaux), mais pas dans le studio habituel où ont été doublés La Mélodie du Bonheur, My Fair Lady, etc.
Le directeur de la société est Jesús Balcázar, il travaillait souvent sur des doublages espagnols de films français. José Espeita n’était pas un habitué de la direction musicale.
Les quelques chœurs avec texte français sont refaits en espagnol. Notons que dans « De Hambourg à Rochefort », le petit chœur masculin français (« Pavoisons à grands coups de soleil, etc. ») devient mixte en espagnol.

Delphine est doublée pour les dialogues par Rosa Guiñón (1931-2022) qui est « la » star du doublage espagnol : Meryl Streep, Julie Andrews, Audrey Hepburn, Barbra Streisand, etc. La voix chantée du personnage n’est pas une voix habituelle dans le doublage espagnol de films musicaux, il s'agit certainement d’une chanteuse d’opérette. Le nom de Lita Torelló a été avancé, mais il n’est pas sûr.
María Luisa Solá n’est pas une chanteuse, mais assure à la fois la voix parlée et la voix chantée de Solange. « Une voix magnifique, qui colle très bien avec le personnage » souligne Iñaki Torre. Tout comme Rosa Guiñón, María Luisa Solá est une « pointure » du doublage espagnol, l’équivalent chez nous d’une Evelyn Selena ou d’une Béatrice Delfe : Glenn Close, Susan Sarandon, Diane Keaton, Sigourney Weaver, etc.

Lorenzo Valverde est un chanteur de doublage (Richard Harris dans Camelot, etc.), il double Etienne pour les chansons, mais aussi pour les dialogues. Son comparse Bill est a priori doublé pour les chansons par Luis Olivares (voix espagnole de Freddie dans My fair Lady et de Rolf dans La Mélodie du Bonheur).

Javier Dotú
est un acteur de Madrid mais il a vécu pendant un moment à Barcelone. Il prête sa voix à Maxence pour les dialogues, tandis que Jose María Planes (chanteur d’origine catalane) chante les chansons. « Guillaume Lancien est doublé par Arsenio Corsellas pour les dialogues et le chant, mais sur certaines phrases chantées j’ai l’impression que Dionisio Macias raccorde. Mais ni l’un ni l’autre ne sont des chanteurs à la base » précise Iñaki Torre.
Simon Dame est doublé pour le chant par le chanteur catalan José Guardiola (à ne pas confondre avec le comédien de doublage José Guardiola, voix d’Humphrey Boggart, etc.). « José Maria Santos avait plutôt l’habitude de doubler des seconds rôles, et là il double pour les dialogues Simon Dame, qui est un rôle important. A titre personnel, j’aurais plutôt distribué José Maria Santos sur Guillaume Lancien et Arsenio Corsellas sur Simon Dame. »

Teresa Maria est la Mathé Altéry espagnole, elle est la voix chantée de Julie Andrews, d’Audrey Hepburn dans My fair Lady, etc. « C’est un premier rôle en doublage chanté, on la retrouvait partout à l’époque. Je suis étonné qu’elle n’ait pas été prise pour doubler Catherine Deneuve, qu’elle finira d’ailleurs par doubler dans Peau d’Âne. Là, curieusement elle fait la voix chantée de deux seconds rôles, Esther et Judith, en changeant un peu sa voix, et de Josette, où là cette fois-ci elle fait les dialogues en plus du chant. »

La voix chantée de Gene Kelly (Andy), Salvador Escamilla, est une pointure du doublage chanté, on lui doit la voix chantée de Dick Van Dyke dans Mary Poppins et Chitty Chitty Bang Bang, celle de Anthony Newley dans L’Extravagant Docteur Dolittle, etc.
Carlos Juliá, le petit garçon doublant Boubou, a commencé en tant qu’enfant dans le doublage, il double notamment le frère aîné dans L’Apprentie Sorcière (1971). « Il est facilement reconnaissable dans tous ses doublages, mais là j’ai eu plus de mal à l’identifier. »

Version espagnole de "De Hambourg à Rochefort"


Récapitulatif par personnages


LES DEMOISELLES DE ROCHEFORT (1967): DOUBLAGE ESPAGNOL
Direction artistique : Jesús Balcázar
Direction musicale : José Espeita
Adaptation des dialogues et des chansons : Miguel Cussó
Société et studio : Balcazar (Barcelone)
Catherine Deneuve... Delphine Garnier… Rosa GUIÑÓN (Dialogues)
Catherine Deneuve... Delphine Garnier… Lita TORELLÓ ? (Chant)
Françoise Dorléac... Solange Garnier… María Luisa SOLÁ (Dialogues)
Françoise Dorléac... Solange Garnier… María Luisa SOLÁ (Chant)
Jacques Perrin... Maxence… Javier DOTÚ (Dialogues)
Jacques Perrin... Maxence… Jose María PLANES (Chant) (et non Luis OLIVARES, indiqué par erreur sur Youtube)
Gene Kelly... Andy Miller… Alfonso SANTIGOSA (Dialogues)
Gene Kelly... Andy Miller… Salvador ESCAMILLA (Chant)
Danielle Darrieux... Yvonne Garnier… Rosario CAVALLÉ (Dialogues)
Danielle Darrieux... Yvonne Garnier… Rosario CAVALLÉ (Chant)
Michel Piccoli... Simon Dame… José María SANTOS (Dialogues)
Michel Piccoli... Simon Dame… José GUARDIOLA (Chant)
Jacques Riberolles... Guillaume Lancien... Arsenio CORSELLAS (Dialogues)
Jacques Riberolles... Guillaume Lancien... Arsenio CORSELLAS ? (Chant)
George Chakiris... Etienne… Lorenzo VALVERDE (Dialogues)
George Chakiris... Etienne… Lorenzo VALVERDE (Chant)
Grover Dale... Bill… Dionisio MACÍAS (Dialogues)
Grover Dale... Bill… Luis OLIVARES ? (Chant)
Pamela Hart... Judith… Asunción VITORIA (Dialogues)
Pamela Hart... Judith… Teresa MARÍA (Chant)
Leslie North... Esther… Consuelo VIVES (Dialogues)
Leslie North... Esther… Teresa MARÍA (Chant)
Geneviève Thénier... Josette… Teresa MARÍA (Dialogues et Chant)
Patrick Jeantet... Boubou Garnier… Carlos JULIÁ (Dialogues et Chant)
Henri Crémieux... Subtil Dutrouz... Luis PRENDES (Dialogues)
René Pascal... Pépé (Abuelo)... Carlos RONDA (Dialogues)
Daniel Moquay... Marin 1... Antonio GÓMEZ DE VICENTE
Daniel Gall... Marin 2... Javier DOTÚ
Nonne... Consuelo VIVES

Sources : Fiche du site Eldoblage.com, relue par Iñaki Torre pour Dans l'ombre des studios



10. LES DEMOISELLES DE ROCHEFORT (1967) :
DOUBLAGE OUEST-ALLEMAND


Le doublage des dialogues et chansons

Les Demoiselles de Rochefort est également doublé dans la langue de Goethe, contrairement aux Parapluies de Cherbourg, qui semble n'avoir bénéficié que de sous-titrage. Le doublage ouest-allemand de Die Mädchen von Rochefort est perdu (le DVD propose uniquement des sous-titres), mais Norbert Aping, grand spécialiste du doublage allemand, m'a fourni la distribution complète, provenant des archives du studio. Il précise :"A en juger cette liste de chanteurs et acteurs allemands, le studio voulait de très bons artistes. La liste contient des noms d'artistes qui étaient très importants à leur époque".

Voix parlée de Delphine (Catherine Deneuve), Uta Hallant est une star de la synchro allemande: Ursula Andress (James Bond contre Dr No), Julie Andrews (Mary Poppins), Michèle Mercier (Angélique), Jamie Lee Curtis (Un poisson nommé Wanda), Glenn Close (Hamlet), le personnage de Perdita dans Les 101 Dalmatiens, etc. Elle double Catherine Deneuve une nouvelle fois dans Tristana (1970). Sa voix chantée est assurée par l'actrice et chanteuse Heidi Brühl, candidate allemande à l'Eurovision 1963, qu'on a pu notamment voir à l'écran dans le Columbo "Match dangereux". Elle double Colette Henry dans le redoublage du Laurel & Hardy Un jour une bergère, mais aussi l'oracle du Sud dans L'histoire sans fin (1984). 

Marianne Lutz, avant de prêter sa voix à Solange dans Die Mädchen von Rochefort, avait déjà doublé Françoise Dorléac dans Genghis Khan (1965). Parmi les actrices qu'elle a régulièrement doublées: Ann-Margret, Geraldine Chaplin, Jane Birkin, Natalie Wood, Genevieve Bujold, etc.
Karin Hübner, sa voix chantée, est également très active en synchro: Joan Evans (Une balle signée X), Marlène Jobert (La poudre d'escampette), etc.

Chose amusante, les "vraies jumelles" Alice et Ellen Kessler (dites "Les Soeurs Kessler") ne doublent pas les chansons de Delphine et Solange, mais les filles à forains Judith et Esther.
A l'instar de leurs homologues français (Romuald Figuier, Géraldine Gogly, etc.), plusieurs des chanteurs du doublage ouest-allemand des Demoiselles de Rochefort ont concouru à l'Eurovision: Horst Winter, Udo Jürgens, etc.

Récapitulatif par personnages

LES DEMOISELLES DE ROCHEFORT (1967): DOUBLAGE OUEST-ALLEMAND
Adaptation: Fritz A. Koeniker et Eberhard Cronshagen
Direction artistique: Eberhard Cronshagen
Société et studio: Berliner Synchron GMBH Wenzel Lüdecke (Berlin Ouest)
Catherine Deneuve... Delphine Garnier… Uta HALLANT (Dialogues)
Catherine Deneuve... Delphine Garnier… Heidi BRÜHL (Chant)
Françoise Dorléac... Solange Garnier… Marianne LUTZ (Dialogues)
Françoise Dorléac... Solange Garnier… Karin HÜBNER (Chant)
Jacques Perrin... Maxence… Christian WOLFF (Dialogues)
Jacques Perrin... Maxence… Reinhard MEY (Chant)
Gene Kelly... Andy Miller… Erik ODE (Dialogues)
Gene Kelly... Andy Miller… Horst WINTER (Chant)
Danielle Darrieux... Yvonne Garnier… Edith SCHNEIDER (Dialogues)
Danielle Darrieux... Yvonne Garnier… Monika DAHLBERG (Chant)
Michel Piccoli... Simon Dame… Wolfgang KIELING (Dialogues)
Michel Piccoli... Simon Dame… Udo JÜRGENS (Chant)
Jacques Riberolles... Guillaume Lancien… Michael CHEVALIER (Dialogues)
Jacques Riberolles... Guillaume Lancien… Rainer BERTRAM (Chant)
George Chakiris... Etienne… Herbert STASS (Dialogues)
George Chakiris... Etienne… Rex GILDO (Chant)
Grover Dale... Bill… Ulrich LOMMEL (Dialogues)
Grover Dale... Bill… Peter KRAUS (Chant)
Pamela Hart... Judith… Ursula HERWIG (Dialogues)
Pamela Hart... Judith… Alice KESSLER (Chant)
Leslie North... Esther… Ilse PAGÉ (Dialogues)
Leslie North... Esther… Ellen KESSLER (Chant)
Geneviève Thénier... Josette… Ingeborg WELLMANN (Dialogues et Chant)
Patrick Jeantet... Boubou Garnier… Stefan SCZODROK (Dialogues et Chant)
Henri Crémieux... Subtil Dutrouz... Klaus W. KRAUSE (Dialogues)

Source : Norbert Aping pour Dans l'ombre des studios





11. LES DEMOISELLES DE ROCHEFORT (1967) :
DOUBLAGE EST-ALLEMAND


Un doublage est-allemand a-t-il existé? Norbert Aping: "Il y a quelques années, on a spéculé sur l'existence d'un doublage est-allemand de ce film, qui aurait été enregistré pour la société DEFA Studio für Synchronisation, car le film serait sorti en Allemagne de l'Est en 1969. Mais nous n'en avons trouvé aucune preuve. Aucune trace dans des programmes, ni dans les calendriers de sorties de film des années 1968 et 1969."
La présence sur Youtube de la Chanson de Maxence doublée en allemand (mais avec choeurs laissés en français) par un certain Joos Harry Johansson (manquant de justesse, et dont la voix n'est pas celle de Reinhard Mey, interprète du doublage ouest-allemand) est un mystère: provient-elle d'un doublage est-allemand?

"La chanson de Maxence" en allemand par Joos Harry Johansson




12. LES DEMOISELLES DE ROCHEFORT (1967): 
DISQUE INSTRUMENTAL


L'enregistrement de l'orchestre et des choeurs


L'année de la sortie du film, Michel Legrand sort un album instrumental des chansons des Demoiselles de Rochefort dans des arrangements inédits. Aucune indication sur l'équipe dans mes archives de bulletins de paie de choristes (la plupart des fiches ne précisaient pas l'artiste accompagné ou le nom du film), ni dans le livret de L'intégrale Jacques Demy - Michel Legrand, mais celui du pressage CD américain de 2005 (merci Iñaki Torre) où quelques titres apparaissent en bonus nous indique que la musique a été enregistrée au Studio Hoche - Barclay par Gerhard Lehner, et qu'Eddy Louiss (orgue) et Maurice Vander (piano) étaient solistes.

Récapitulatif par morceaux

1. Chanson des jumelles – Orchestre (cuivres dont trompettes (trompette 1 : pas Fred Gérard ; possible Georges Gay ou Maurice Thomas), clarinettes (dont certainement Georges Grenu et Pierre Gossez), xylophone, cb/batterie, cordes)
2. Chanson de Maxence – Orchestre (cordes dont solo de violoncelle, cb/batterie, cuivres dont sax soprano (Georges Grenu, Pierre Gossez ou Jacques Noureddine), Chœur mixte
3. Chanson d’un jour d’été – Orchestre (cordes, cb/batterie, vibraphone, flûtes, sax, trompettes (très bons aigus du lead en coda, possible Maurice Thomas), piano)
4. Chanson de Simon – Orchestre (flûtes, vibraphone, sax, cb/batterie, cordes, percus, piano solo (pas Michel Legrand))
5. La femme coupée en morceaux – Orchestre (cordes, cb/batterie (Humair ? Arpino ?), trio bugle (Roger Guérin probable)/flûte/saxophone, vibraphone, orgue (Eddy Louiss), piano)
6. Toujours, jamais – Orchestre (cordes, harpe, cb/batterie (Arpino ?)/piano, orgue (Eddy Louiss), trompettes (possible : Maurice Thomas Fred Gérard, Roger Guérin, Ivan Jullien))
7. Marins, amis, amants ou maris – Orchestre (percus (JP Drouet ? Bernard Lubat ?), guitares, piano, cb/batterie, flûtes, vibraphone, sax, cordes)
8. Les rencontres – Orchestre (cb/batterie/piano, orgue Hammond (Eddy Louiss), trompettes, sax, cordes, flûtes)
9. De Delphine à Lancien – Orchestre (cordes, deux sax soprano (Georges Grenu et Jacques Noureddine ?), vibraphone, cb/batterie, saxophones), Chœur mixte
10. Nous voyageons de ville en ville – Chœur mixte, Orchestre (cb/batterie, sax soprano (le même), sax baryton, cordes, piano, vibraphone, harpe), José Bartel (chant solo)
11. Chanson de Solange – Orchestre (cb/batterie, cuivres dont trombones et deux sax xoprano, clavecin, hautbois solo, cordes)
12. Thème du concerto – Orchestre (piano, cordes, cuivres)

Source: Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios (relevé des instruments et des chanteurs par Rémi Carémel, identification des instrumentistes par Michel Laplace)





13. MODEL SHOP (1969)


Pour ce film, la musique a été composée et en partie interprétée par le groupe de rock Spirit. La BO a visiblement été enregistrée aux États-Unis, pendant la carrière américaine de Jacques Demy.






14. PEAU D’ÂNE (1970) : VERSION ORIGINALE


La composition et l'écriture des chansons

L'oeuvre mélange des sons très inspirés du baroque avec une rythmique plutôt pop. D'après Anne Germain, "La recette pour un cake d'amour" a même quelques accents Burt-Bacharachiens. Parmi les maquettes enregistrées, la musique de la première version d'"Amour, amour" (par Anne Germain et Jacques Revaux) deviendra le thème principal de L'événement le plus important depuis que l'homme a marché sur la lune (1974).

J'ai retrouvé, grâce à Claude Ermelin, un script original de Peau d'âne (un fac-similé est également proposé dans le coffret Blu-Ray). Les paroles finales des Conseils de la Fée des Lilas ont été collées sur une page du script, que j'ai réussi, avec l'aide de mon ami Gilles Hané, à décrypter par transparence. Voici donc les paroles originales :

Quoi qu'il en soit:
Non
On n'épouse pas son père
Ma fille
On n'épouse pas.
C'est traditionnellement
Une question de culture
On ne mêle pas amant
Parent et progéniture
Prenons un exemple:
Oedipe épouse sa mère
Triste égarement du sexe
Après avoir tué son père
On parle encor du complexe

Non
Votre fille et votre mère
D'où un certain désarroi
Non et non
Si vous devenez sa femme
Vous ne lui direz plus papa
Il vous appellera Madame
Pis que cela n'existe pas
Non
On n'épouse pas son père
Ma fille
On n'épouse pas.
Un prince et une bergère 
Peuvent s'accorder parfois
Mais une fille avec son père 
C'est l'envers avec l'endroit
C'est le chaud avec le froid
C'est un plus un égal trois
C'est...
Non
On n'épouse pas son père
Ma fille 
On n'épouse pas.



L'enregistrement des musiciens

Nous avons très peu d’informations sur les musiciens. L’ensemble sonne très classique, il y a peu de parties jazz/pop. Pour ces dernières, c’est notre ami Francis Darizcuren à la basse. Dans les parties plus classiques, on retrouve Sylvio Gualda aux percussions : « Pour Peau d'âne j'étais aux timbales, Michel Legrand avait écrit de belles parties de timbales pour amener des moments dramatiques. On enregistrait sur de vieilles timbales à clé, qui de nos jours sont à pédales. J’étais depuis quelques mois à l’Opéra de Paris, et dans les séances du film je retrouve un violoniste de l’Opéra qu'on appelait Péou, il était de Carcassone. Il dit à Michel Legrand : « Tu sais qu’il est timbalier solo de l’Opéra » (rires). »


L'enregistrement des chanteurs (crédités)


Dans Peau d’âne, Catherine Deneuve (Peau d’âne) et Jacques Perrin (Le Prince) retrouvent leurs voix des Demoiselles de Rochefort, à savoir Anne Germain et Jacques Revaux. Anne Germain se souvient que l'enregistrement a, contrairement aux Demoiselles, été assez difficile, car elle avait une bronchite, et Jacques Revaux venait juste d'être victime d'une agression et de perdre un oeil. Un prince et une princesse assez mal en point.
Pour la Fée des Lilas, Claudine Meunier (dont la voix chantée légèrement voilée raccorde naturellement avec la voix parlée de Delphine Seyrig) ayant refusé d'enregistrer le rôle, c'est Christiane Legrand qui participe une fois de plus à une musique de son frère. Germain, Revaux et Legrand sont les seuls noms de chanteurs crédités au générique. On notera que certaines chansons (comme "Amour, Amour") sont légèrement différentes dans le film et la version disque; les bulletins de salaire d'Anne Germain pour l'année 1970 étant introuvables, je ne sais si l'enregistrement des deux versions a eu lieu en même temps ou s'il a été fait en deux temps.


L'enregistrement des chanteurs (non-crédités)

Il y a deux scènes dans lesquelles fourmillent de nombreux petits rôles chantés :

Dans « Les Insultes », Peau d’âne est moquée et insultée par les garçons et filles de ferme. Les voix masculines sont assez facilement identifiables à l’oreille et j’ai pu les faire confirmer à la plupart des intéressés : on entend successivement Georges Blanès (et se petite pointe d’accent pied noir), voix de Cassard et de Simon Dame dans les précédents films, Jean Cussac (Monsieur Dubourg dans Les Parapluies) et son petit « trémolo » final caractéristique (« renvoi »), Jo Noves (décédé en 2014, ténor des Swingle Singers, au timbre de voix particulier et une petite pointe d’accent toulousain) et Michel Legrand (qui prête ici sa voix à un certain Michel Colucci, futur Coluche !).
Pour le dernier, il s’agirait de Jacques Demy (seul nom avec Michel Legrand crédité pour les garçons de ferme dans le coffret Demy-Legrand).
Pour ce qui est des femmes c’est plus compliqué, d’autant que l’ordre des voix n’a pas été respecté au moment du tournage et qu’une fermière peut ainsi se retrouver avec trois voix différentes. Anne Germain se souvient avoir enregistré la séance avec notamment Hélène Devos et Nicole Darde des Swingle Singers. Claude Chauvet se souvient de la séance, qui était l’une des premières de sa carrière (à l’époque elle faisait partie d’un groupe de jeunes chanteurs, Les Marlee, produit par… Marcelle Legrand). En faisant plusieurs séances d’écoutes avec des choristes, nous avons pu retrouver quelques attributions, mais sans certitudes. Il est parfois difficile pour certaines choristes de reconnaître leur propre voix, d’autant, que, comme me l’explique Alice Herald (qui se souvient avec certitude de ses répliques dans le film), les voix étaient assez « uniformisées » dans la façon de composer et de chanter de Michel Legrand.

Jo Novès : Montage

Dans « Le massage des doigts », le charlatan (Romain Bouteille) vendeur d’élixirs amincissant les doigts a la voix de Michel Cassez, futur « Gaston » des Compagnons de la Chanson, qui était un musicien-chanteur polyvalent, et auteur-compositeur avec Jean-Pierre Calvet de plusieurs chansons, dont le célèbre générique de la série d'animation Tom Sawyer. C’est Anne Germain qui m’a lancé sur cette piste, et « Gaston » me l’a confirmé. Le valet de ferme a lui la voix de Romuald (Etienne dans Les Demoiselles de Rochefort). On peut notamment entendre chez les femmes Christiane Cour et Danielle Licari

Michel Cassez (Gaston) : Montage


Le doublage des personnages

Lita Recio
Pas d'acteurs étrangers, donc pas de doublage, à part pour le perroquet. C'est Lita Recio qui s'y colle. Depuis qu'en doublant Marlene Dietrich dans un film on lui a demandé de doubler également son perroquet, la comédienne, star du doublage, est devenue incontournable dans le doublage de ces volatiles: La Folie des Grandeurs, L'Extravagant Docteur Dolittle, Aladin et la Lampe merveilleuse, etc. On raconte même qu'elle se vexait quand on ne pensait pas à elle pour doubler un perroquet.



L'enregistrement de la bande-annonce


Le ton du narrateur de la bande-annonce m'a fait immédiatement penser à celui du journaliste et comédien Pierre Louis; mon camarade Jean-Pierre Bouderlique a eu la même première impression, mais il s'agit selon lui plus simplement du grand François Périer qui pouvait prendre ce type de voix lors de ses narrations de disques pour enfants.


Une problème dans la restauration du mixage

DVD 2003
Depuis 2003 (restauration du négatif et nouveau mixage par Arkamys), deux passages musicaux sont oubliés dans le mixage du film (DVD / Blu Ray, cinéma, diffusions TV, etc.) alors qu'ils figuraient bien précédemment. Mon confrère et ami Gilles Hané, grand spécialiste à la fois de la musique de film et de l’univers de Jacques Demy témoigne : « Le nouveau mixage sonore, après restauration par Arkamys, a omis d’intégrer des sections de musique de Michel Legrand dans deux scènes : lorsque la princesse montre à sa marraine sa robe couleurs du temps, puis, lorsque la fée et la princesse devisent pour décourager le roi qui vient d’offrir la robe couleur de lune. La musique de Michel Legrand composée pour ces scènes sur le thème de la chanson de la fée des Lilas ajoutait de la féérie. Leur absence souligne la résonnance des voix et créent un côté froid à ces instants magiques, dénaturant l’esprit de légèreté qu’elles insufflaient. Une rencontre avec Agnès Varda lors du Festival du film de femmes de Créteil fut une première opportunité pour lui signaler cet oubli. Je suis revenu à la charge quelques années plus tard lors d’une visite à Ciné Tamaris, rue Daguerre où Agnès Varda travaillait. J’ai alors compris que pour réparer l’erreur, il faudrait réaliser un nouveau mixage. Une solution trop coûteuse. La nouvelle restauration numérique réalisée en 2013 pour une édition annoncée pour 2014 me parut une excellente opportunité pour relancer ma croisade pour une réédition « conforme à l’originale » ; j’écrivis à Rosalie Varda par mail. Sans réponse. Je revins encore à sa rencontre lors d’une dédicace dans une librairie parisienne, mais elle semblait douter de ce que je racontais. Malgré une image restaurée, les nouvelles éditions contiennent toujours le même montage sonore amputé. Philippe Sisbane, cinéaste et grand amateur du film, me confirma qu’il avait lui aussi constaté cette erreur dans la restauration. Les DVD qui proposent aujourd’hui le film dans des versions étrangères (allemande, anglaise, espagnole) confirment encore cet oubli dans la version française puisque les segments de musique oubliés y figurent. Ils sont probablement dans la bande internationale qui a servi pour le mixage. Le 2ème segment manquant pour la robe couleur de lune est dans tous les enregistrements de disque (les trois robes). Tout n’est donc pas perdu. Espérons qu’un jour enfin nous pourrons revoir Peau d’Âne tel que Jacques Demy et Michel Legrand l’avaient voulu pour nous. »

Premier extrait : la robe couleur du temps (comparaison du doublage espagnol original et du mixage DVD français 2003)

Entre Gilles et Peau d’Âne, une longue histoire : « Né en 1965, j’ai eu la chance de découvrir Peau d’Âne en salle à sa sortie en 1970 et en étais ressorti enchanté. Mes parents m’avaient offert, pour revivre le film, les disques de view-master. Je jalousais une amie qui détenait le livre édité par Deux Coqs d’Or dont la couverture reproduisait l’illustration de Jim Leon utilisée pour l’affiche du film, et dont les pages contenaient les dialogues, les paroles des chansons et de nombreux photogrammes. A 11 ans, je découvris l’existence du vinyle de la bande originale du film dans la discothèque du père cinéphile d’une amie. Dès lors, je me repassais sans cesse l’enregistrement que j’avais réalisé sur une cassette. Adolescent, lors d’une diffusion à la télévision, avant l’existence du magnétoscope, j’avais enregistré une copie de l’intégralité de la bande sonore du film, que je connus bien vite par cœur. L’arrivée du magnétoscope me permit quelques années après de disposer d’une copie du film pour le voir et le revoir. Adulte, et toujours passionné le film, j’avais suggéré à Thierry Wolf, dirigeant de FGL de rééditer le 33 tours. Stéphane Lerouge qui travaillait pour lui sur le label PlayTime dédié aux musiques pour l’image, était parvenu à convaincre Michel Legrand de rééditer le disque et avait pu récupérer ainsi plusieurs pistes inédites pour compléter la première édition CD. A cette occasion, j’avais facilement identifié à l’oreille les scènes où étaient utilisées ces sections inédites afin de leur donner un titre. J’avais également proposé la pochette de mon vinyle d’origine pour créer celle du CD, ainsi que deux cartes postales d’époque pour illustrer le livret. Pour la deuxième édition enrichie, j’avais mis à disposition un cover 45 tours de deux chansons du film par Angela et de Jean Pierre Savelli (le Peter de Peter et Sloan). Lors de la rétrospective « Demy Tout entier », en 1997, je me suis précipité en salle pour le revoir sur grand écran. L’enchantement perdurait. »


Deuxième extrait : la robe couleur de lune (comparaison du doublage espagnol original et du mixage DVD 2003)



Récapitulatif par personnages

PEAU D’ANE (1970) de Jacques Demy
Musique et direction : Michel Legrand
Paroles : Jacques Demy
Enregistrement des musiciens et chanteurs : Claude Ermelin (Studio Davout, mai et novembre 1970*) 
Employeur des musiciens et chanteurs : Les Productions Michel Legrand
Catherine Deneuve... Peau d'âne... Anne GERMAIN (Chant)
Jacques Perrin... Le prince charmant... Jacques REVAUX (Chant)
Delphine Seyrig... La fée des Lilas... Christiane LEGRAND (Chant)
Voix du Perroquet... Lita RECIO* (Dialogues)
Scène des "Insultes"
Paysanne 1 (« Quelle calamité »)… Hélène DEVOS* (Chant)
Paysanne 1, 2ème réplique (« elle doit être malade »)… ?
Paysanne 2 (« On m’a dit que sa peau cache une infirmité »)… ?
Paysanne 3 (« Peut-être la pelade »)… ?
Paysanne 4 (« Regardez cette allure, on ne peut distinguer ses mains de sa figure »)… ?
Paysanne 5 (« Avec ses poils partout, ça me fait grand dégoût »)…Claude CHAUVET* (Chant)
Paysanne 1, 3ème réplique (« Elle n’aura guère de chance de rencontrer le prince »)… ?
Paysanne 2, 2ème réplique (« Avant de l’embrasser, il faudra qu’il la rince »)… Hélène DEVOS* (Chant)
Paysanne 3, 2ème réplique (« De la tête au talon, sa peau doit être rance »)… ?Garçon de ferme 1 (« La vieille m’a dit sur l’heure, il faut que tu me ranges, l’écurie, les communs, les étables et la grange », « Et comment le saurais-je ? », « Comme sa majesté, il aime la propreté »)… Georges BLANES* (Chant)
Paysanne 6 (« Sais-tu en quel honneur ? », « Le prince cher seigneur viendra nous voir dimanche », etc. « On dit qu’elle est méchante »)… Alice HERALD* et/ou Nicole DARDE* (Chant)
Garçon de ferme 2 (« Tu devrais te cacher, si le prince te voit, il pourrait se fâcher, exiger ton renvoi », « voir son Prince Culcendron »)… Jean CUSSAC* (Chant)
Rufus… Garçon de ferme 3 (« Tu n’auras pas le droit, d’assister à la fête, car les soldats du roi croyant voir une bête, pourraient bien te tuer », « Tout le monde fuira voyant ce laideron »)… Jo NOVES* (Chant)
Coluche... Garçon de ferme 4 (« Comment t’appelles-tu, très noble courtisane ?)... Michel LEGRAND** (Chant)
Yves Pignot... Garçon de ferme 5 (« Je crois que c’est son corps »)... Jacques DEMY** (Chant)
Scène du "Massage des doigts"
Romain Bouteille... Le charlatan... Michel CASSEZ* (Chant)
Aristocrate 1 (« J’ai la merveille des merveilles, l’onguent qui fait maigrir les doigts »)… ?
Aristocrate 2 (« Débouchons vite cette bouteille… »)… Jackye CASTAN ?* (Chant)
Paysanne 7 (« Serrez donc, fainéant », « Est-il bête ou bien fait-il semblant ? »)… ?
Petit garçon (« C’est que j’ai peur de vous faire mal »)…  ?
Maud Rayer... Fille de cuisine 1 (« La mère dépêchez-vous car le prince attend après nous», « C’est le mien qui passera l’anneau d’or », « Le mien est pelé jusqu’à l’os »)... Danielle LICARI* (Chant)
Fille de cuisine 2 (« Miracle mon doigt maigrit encore », « Aïe aïe ma peau s’en va en lambeaux »)… ?
Andrée Tainsy... La mère (« Cette punition n’est point volée, car vous n’êtes que deux écervelées »)... Janine de WALEYNE* (Chant)
Aristocrate 1, 2ème voix ? (« Ah le faquin, le charlatan, avez-vous mon annulaire ? »)… ?
Aristocrate 2, 2ème voix («Je ne sais de quoi il a l’air le mien regardez a grossi d’autant »)… Christiane COUR* (Chant)
Garçon de ferme 6 (« Ce qu’elles sont bêtes, tout ça pour épouser un Prince » )… ROMUALD* (Chant)
Vanina Michel… Paysanne 8 (« Il est jaloux », « aïe aïe aïe ouï ouï, tu vois bien que tu me pinces »)… ?
Marion Loran… Paysanne 9 (« Vous n’êtes qu’un méchant filou »)… ?
Christine Aurel… Paysanne 10/Esther (1ère réplique : « Je l’ai coupé »)… Christiane COUR ?* (Chant)
Christine Aurel… Paysanne 10/Esther (2ème réplique « Pourrait-il partir ou se taire »)… ?
Chœurs : La plupart des solistes, José GERMAIN*, Claudine PAVAUX*, Michèle CONTI*, etc.
Musiciens : Francis DARIZCUREN* (basse), Sylvio GUALDA* (percussions), etc.

Sources :
Générique et pochettes de disques
* : Compléments Rémi Carémel / Dans l’ombre des studios (archives personnelles: identification des voix avec l'aide d'Anne Germain, Claudie Chauvet, Hélène Devos, Michel Cassez, Georges Blanès, Romuald Figuier et Danielle Licari, entretiens de Rémi Carémel avec Bruno Conti et Sylvio Gualda, bulletins de salaire de Claudine Pavaux et José Germain, récapitulatif de carrière de Francis Darizcuren et Jean Cussac, etc.)
**: Complément Stéphane Lerouge (coffret CD Demy/Legrand)


Récapitulatif par ordre d'apparition des morceaux dans le film


1. Générique (partition M0) – Orchestre (cordes, vents (2 flûtes, 2 hautbois, 2 clarinettes, 2 bassons, 4 cors, 3 trompettes, 3 trombones, tuba), grosse caisse), Chœur mixte (dont Jean Stout)
7. La princesse visite sa marraine (première partie, partition M7) – Orchestre (glockenspiel, crotales, célesta, harpe, cordes, vents (flûte, hautbois, clarinette, clarinette basse, basson, trompettes, cors))
Seules 5 mesures sont utilisées
2. Il était une fois (première partie, partition M1) – Orchestre (cordes, vents (flûtes, hautbois, clarinettes, basson, contrebasson, trompettes, trombones, cors), clavecin, cymbales, tom-tom, orgue)
Une partie seulement (B à la fin) est utilisée dans le film
2. Il était une fois (deuxième partie : l’enterrement de la reine, partition M2) – Orchestre (cordes, harpe, gros gong, vents (flûtes, basson, trombones), Chœur mixte (dont Alice Herald ?)
Une partie seulement (13 mesures et 3 coda) est utilisée dans le film
Inédit en disque : Il était une fois (première partie, partition M1, version film avec overdub orgue) - Orchestre (cordes, vents (flûtes, hautbois, clarinettes, basson, contrebasson, trompettes, trombones, cors), clavecin, cymbales, tom-tom, orgue)
3. Les ministres, le savant (partition M3) – Orchestre (vents (piccolo, hautbois solo, clarinette, basson, cors), deux harpes, cythare, célesta, piano, glockenspiels, cordes)
Une partie seulement (4 mesures) est utilisée dans le film
4. Princesses à marier (partition M4) – Orchestre (clavecin, vents (flûtes, hautbois, clarinettes), cordes, harpe, vibraphone, crotales)
Partition M5A pas utilisée ni dans le film ni dans la BO5.
Inédit en disque : Amour, amour (partition M5, version film avec orchestration alternative) – Orchestre (orgue, basse élec, guitare), Anne Germain (Peau d’âne)
Intro alternative avec orgue, et instru simplifiée pendant le morceau, par rapport à la version disque 
6. Déclaration d’amour (partition M5B) – Orchestre (vents (flûtes, hautbois, clarinettes, bassons, trompettes, trombones, cors), cordes dont violon solo, harpe, piano, timbales, petit triangle, mailloche sur cymbale suspendue, xylophone)
Une partie seulement (20 mesures) est utilisée dans le film
3. Les ministres, le savant 2ème partie (partition M6) – Orchestre (clarinette, basson, hautbois, flûte, cors, célesta, glockenspiel, deux harpes, cors, vibraphone)
Inédit en disque : La princesse quitte le château (partition M7) – Orchestre (harpe, glockenspiel, crotales, célesta, cordes, 4 cors, 2 trombones, 2 trompettes, 2 hautbois, 2 flûtes, clarinette, clarinette basse)
7. La princesse visite sa marraine (première partie, partition M7) – Orchestre (glockenspiel, crotales, célesta, harpe, cordes, vents (flûte, hautbois, clarinette, clarinette basse, basson, trompettes, cors))
7. La princesse visite sa marraine (deuxième partie, partition M7A) – Orchestre (2 flûtes, 2 hautbois, 2 clarinettes, 2 bassons, 2 trompettes, 2 trombones, 4 cors, cordes, harpe, glockenspiel, triangle)
Partition M7B pas utilisée ni dans le film ni dans la BO
8. Conseil de la fée des lilas (partition M8) – Christiane Legrand (La fée des lilas) et Orchestre (2 flûtes, cor anglais, 2 trompettes, clavecins, cordes, harpe, glockenspiel, guitare, basse élec)
Inédit en disque : Le temps arrêté version film (partition M10V2 1ère partie) – Orchestre (2 flûtes, hautbois, cor, clarinette, cordes, harpe, 2 guitares, basse, batterie, vibraphone)
14 mesures de la partition. Le disque propose un enregistrement alternatif (17. Le temps arrêté, partition M10V1)
Inédit en disque et dans le mixage 2003 du film (partition M10V2 2ème partie) – Orchestre
9. Les trois robes (première partie, partition M12) – Chœur mixte à huit voix (dont Jean Stout, Alice Herald, etc.) et Orchestre (2 flûtes, 2 hautbois, 2 clarinettes, 2 bassons, 4 cors, 3 trompettes, 3 trombones, tuba, timbales, tambourin, glockenspiel, guitare, basse, batterie, harpe, cordes)
Oublié dans le mixage 2003 du film
La deuxième partie des « Trois robes » (partition M13) a été enregistrée pour le disque mais ne figure pas dans le film

9. Les trois robes (troisième partie, partition M4) – Chœur mixte à huit voix (dont Jean Stout, Alice Herald, etc.) et Orchestre (2 flûtes, 2 hautbois, 2 clarinettes, 2 bassons, 4 cors, 3 trompettes, 3 trombones, tuba, timbales, tambourin, glockenspiel, guitare, basse, batterie, harpe, cordes)
La deuxième partie des « Trois robes » (partition M15) a été enregistrée pour le disque mais ne figure pas dans le film
12. Loin du château bleu (partition M16) – Orchestre (cordes, vibraphone, timbales, glockenspiel, harpe, orgue, 2 flûtes, 2 cors anglais, 2 clarinettes, 2 bassons, 2 trompettes, 2 trombones, 4 cors)
Une partie seulement est utilisée dans le film
Inédit en disque : Peau d’âne s’enfuit (partition M17v2) – Orchestre (cordes, clarinette basse, 2 flûtes, hautbois, cor, 2 guitare, basse, batterie, marimba 4 baguettes, orgue, harpe)
Le disque propose un enregistrement alternatif (10. Peau d’âne s’enfuit, partition M17V1), avec un arrangement dont la rythmique est plus pop, rythmé par la basse électrique
Inédit en disque : Peau d’âne arrive à la ferme (partition M18v2) – Orchestre (harpe, piano, cordes, 2 flûtes, hautbois, 2 trompettes, cor, clarinette, 2 guitares, basse, batterie, glockenspiel)
Ne comprend qu’une partie de la partition. Le disque propose un enregistrement alternatif (13. Peau d’âne arrive à la ferme, partition M18V1) avec chœur mixte (dont Anne Germain)
Inédit en disque : Transition (partition M20) – Orchestre (harpe, vibraphone, cordes, orgue, piano, flûte, hautbois, clarinette)
Inédit en disque : Peau d’âne aménage sa hutte (partition M21) – Orchestre (2 harpes, glockenspiel à clavier, piano, célesta, cordes, triangle, flûte, hautbois, clarinette, basson, cors) et Anne Germain (Peau d’âne)
Partition M22 (intro insultes) inédite à la fois en disque et en film
7. Les insultes (partition M23) – Orchestre (4 flûtes, hautbois, 4 trompettes, 3 trombones, trombone basse, cordes, harpe, xylophone, gratouillette, guitare, piano, basse, batterie), Hélène Devos (Lavandière 1, violet : « Quelle calamité »), Hélène Devos ? (Lavandière 1, violet 2ème réplique : « elle doit être malade »), ??? (Lavandière 2, blanc gauche : « On m’a dit que sa peau cache une infirmité »), ??? (Lavandière 3, bleu : « Peut-être la pelade »), ??? (Lavandière 4, blanc droite : « Regardez cette allure, on ne peut distinguer ses mains de sa figure »), Claudie Chauvet (Lavandière 5, rose : « Avec ses poils partout, ça me fait grand dégoût »), ??? (Lavandière 1, violet 3ème réplique : « Elle n’aura guère de chance de rencontrer le prince »), Hélène Devos (Lavandière 2, blanc gauche, 2ème réplique : « Avant de l’embrasser, il faudra qu’il la rince »), ??? (Lavandière 3, bleu 2ème réplique : « De la tête au talon, sa peau doit être rance »), Georges Blanès (Garçon de ferme 1 : « La vieille m’a dit sur l’heure, il faut que tu me ranges, l’écurie, les communs, les étables et la grange », « Et comment le saurais-je ? », « Comme sa majesté, il aime la propreté »), Alice Herald (d’après souvenirs précis d’Alice de ses répliques) ? Ou Nicole Darde ? (Paysanne 6 : « Sais-tu en quel honneur ? », « Le prince cher seigneur viendra nous voir dimanche », etc. « On dit qu’elle est méchante »), Jean Cussac (Garçon de ferme 2 : « Tu devrais te cacher, si le prince te voit, il pourrait se fâcher, exiger ton renvoi », « voir son Prince Culcendron »), Jo Noves (Garçon de ferme 3 : « Tu n’auras pas le droit, d’assister à la fête, car les soldats du roi croyant voir une bête, pourraient bien te tuer », « Tout le monde fuira voyant ce laideron »), Anne Germain (Peau d’âne : « Je prendrai peu de place, etc. »), Michel Legrand (Garçon de ferme 4 : « Comment t’appelles-tu, très noble courtisane ?), Jacques Demy (Garçon de ferme 5 : « Je crois que c’est son corps »)
Le solo final de Peau d’âne est différent entre le film et la version disque
Inédit en disque : Peau d’âne voit le Prince (partition ?) – Orchestre (cordes)
16. Rigodon à la ferme (partition M23B) – Orchestre (flûte, violon, tambourin)
Inédit en disque : Le prince découvre son amour (partition M24) – Orchestre (cordes, orgue) et Jacques Revaux (le Prince)
Inédit en disque : Amour, amour (reprise Peau d’âne) – Anne Germain (Peau d’âne) et Orchestre (orgue)
Inédit en disque : Le Prince s’enfuit (partition ?) – Orchestre (harpe, célesta, cordes, orgue, etc.)
La partition M25 n’est pas utilisée dans le film ou dans le disque18. Chanson du Prince (partition M25A) – Orchestre (cor anglais, hautbois, 2 flûtes, 2 trompettes, piano, cordes, harpe, célesta, vibraphone, cymbale, gong, guitare, basse élec, cb, batterie) et Jacques Revaux (le Prince)
L’intro est seulement utilisée dans le disque
30. Retour du Prince au château (partition M26) – Orchestre (2 flûtes, célesta, orgue, crotale, harpe, cordes, 4 guitares, basse et batterie « yéyé léger »)
21. Retour au château rouge (partition M26A) – Orchestre (clavecin, cordes, flûte, clarinette)Inédit en disque : Le bal des chants et des oiseaux version film (partition M31A) – Orchestre (2 flûtes, hautbois, 2 trompettes, clavecin, cordes, harpe, petit tambour, 2 guitares espagnoles, contrebasse, batterie)
Le morceau est publié en disque sous le nom 25. Le bal des chats et des oiseaux en version tronquée
Inédit en disque : Intro du cake d’amour (partition M28) – Orchestre (flûte, hautbois, clarinette, basson, 2 cors, 2 trombones, cordes, harpe, célesta, glockenspiel, piano, guitare jazz, basse, batterie)
23. Recette pour un cake d’amour – Anne Germain (Peau d’âne) et Orchestre (2 flûtes, hautbois, 2 trompettes, piano, cordes, harpe, glockenspiel, crotales, triangle, guitare, basse élec, cb, batterie)
Inédit en disque : Livraison du cake d’amour (partition M29) – Orchestre (flûte, hautbois, clarinette basse, basson, 2 cors, cordes, harpe, célesta, piano, glockenspiel, guitare jazz, basse, batterie)
20. Le Prince se meurt d’amour (partition M30) – Orchestre (cordes, 2 harpes, flûte, hautbois, 4 guitares, basse, batterie, orgue, piano, vibraphone)
Deux parties sont utilisées dans le film
27. Rêves secrets d’un Prince et d’une Princesse (M31B) – Jacques Revaux (le Prince), Anne Germain (Peau d’âne), Orchestre (cordes, harpe, hautbois, 4 flûtes, 4 trompettes, 3 trombones, 1 trombone basse, orgue, guitare, piano, basse, batterie, vibraphone, crotales, triangle, glockenspiel)
Inédit en disque : Le Roi et la Reine (partition M31) – Orchestre (basson, 4 trombones, trombone basse, harpe, 2 pianos, cordes)
Inédit en disque : Appels de trompette (partition ?) – Orchestre (trompette, tambour)31. Le massage des doigts (partition 31C) – Orchestre (4 flûtes, hautbois, 4 trompettes, 3 trombones, 1 trombone basse, cordes, harpe, bongos, tambourin, guitare, basse, batterie), Michel Cassez (Vendeur d’élixirs : « Venez mesdemoiselles… »), ??? (Aristocrate 1 : « J’ai la merveille des merveilles, l’onguent qui fait maigrir les doigts »), Jackye Castan (Aristocrate 2 : « Débouchons vite cette bouteille… »), ??? (Paysanne 7 : « Serrez donc, fainéant », « Est-il bête ou fait-il semblant ? »), ??? (Petit garçon : « C’est que j’ai peur de vous faire mal »), Danielle Licari (Fille de cuisine 1 : « La mère dépêchez-vous car le prince attend après nous », « C’est le mien qui passera l’anneau d’or », « Le mien est pelé jusqu’à l’os »), ??? (Fille de cuisine 2 : « Miracle mon doigt maigrit encore », « Aïe aïe ma peau s’en va en lambeaux »)Janine de Waleyne ? (Servante : « Cette punition n’est point volée, car vous n’êtes que deux écervelées »), ??? (Aristocrate 1, 2ème voix ? : « Ah le faquin, le charlatan, avez-vous mon annulaire ? »), Christiane Cour (Aristocrate 2, 2ème voix : « Je ne sais de quoi il a l’air le mien regardez a grossi d’autant »), Romuald Figuier (Garçon de ferme 6 : « Ce qu’elles sont bêtes »), ??? (Paysanne 8 : « Il est jaloux », « aïe aïe aïe ouille ouille, tu vois bien que tu me pinces »), ??? (Paysanne 9 : « Vous n’êtes qu’un méchant filou »), Christiane Cour (Paysanne 10/Esther, 1ère réplique : « Je l’ai coupé »), ??? (Paysanne 10/Esther, 2ème réplique « Pourrait-il partir ou se taire »)
11. Fugue du prince (partition M32) – Orchestre (cordes)
La partition M33 a été enregistrée pour le disque (28. Idylle fuguée) avec chœur mixte (dont Janine de Waleyne) mais n’a pas été utilisée dans le film.
32. Mariage princier (partition M34) – Orchestre (2 clarinettes, 2 flûtes, 2 hautbois, 2 bassons, 4 cors, 3 trompettes, 3 trombones, tuba, cordes, grosse caisse, cymbale) et Chœur mixte
33. Final (générique de fin, partition M35) – Orchestre (cordes, 2 flûtes, 2 hautbois, 2 clarinettes, 2 bassons, 4 cors, 3 trompettes, 3 trombones, 1 tuba) et Chœur mixte

Source : Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios (identification de voix, relevé des scores)


Récapitulatif par séances d'enregistrement

Séance du 25 mai 1970
Basse : Francis DARIZCUREN
Chanteurs : Claudie CHAUVET, Alice HERALD, Jean CUSSAC, José GERMAIN, etc.
Orchestre, certainement divers choeurs, et peut-être une première version des Insultes

Séance du 26 mai 1970
Chanteurs : Danielle LICARI, Claudine PAVAUX, Alice HERALD, Jackye CASTAN, Hélène DEVOS
Certainement Le Massage des doigts et divers choeurs

Séance du 30 mai 1970
Chanteurs : Claudie CHAUVET, Hélène DEVOS, Jean CUSSAC, etc.
Certainement un deuxième enregistrement des Insultes

Séance du 6 novembre 1970
Chanteurs : Alice HERALD, etc.

Séance du 10 novembre 1970
Chanteurs : Jean-Claude BRIODIN, etc.

Source : Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios (archives personnelles : bulletins de salaire de Danielle Licari, Claudine Pavaux, Jackye Castan, Alice Herald, Hélène Devos, Jean-Claude Briodin et José Germain, récapitulatif de carrière de Claude Chauvet et Jean Cussac, archives de Francis Darizcuren)





15. PEAU D'ÂNE (1970) : PREMIER DOUBLAGE ESPAGNOL


Peau d’âne est doublé intégralement (dialogues et chansons (sauf le premier « Amour, amour »)) au studio Voz de España (Barcelone), où ont été doublés de nombreux de grands films. Nous n’avons pas d’autres informations techniques. « Le texte original était très travaillé, mais là je trouve qu’on force un peu la syntaxe pour faire rentrer des mots. Le directeur musical et adaptateur était peut-être le Maestro Damasco, qui s’est occupé de la plupart des grands doublages espagnols de films musicaux » souligne Iñaki Torre.

La distribution est composée de « pointures » du doublage espagnol. Par exemple, Jean Marais est doublé par Felipe Peña. « C’était l’équivalent espagnol de Raymond Gérôme, un acteur exceptionnel, il doublait notamment Rex Harrison dans My Fair Lady et L’Extravagant Docteur Dolittle. Il était aussi directeur artistique (West Side Story) et était très cultivé, un homme de la Renaissance. Le comédien espagnol qui doublait Warren Beatty dans Reds se souvient que sur ce doublage, Felipe Peña avait du mal à être synchrone en lisant du russe translitéré. Il a demandé à lire le texte directement en cyrillique, et le résultat était parfait. »
La voix chantée de Catherine Deneuve est Teresa Maria (voix chantée de Josette, Judith et Esther dans le doublage espagnol des Demoiselles de Rochefort), la Mathé Altéry espagnole, qui vieillit un peu trop à nos oreilles le personnage.


"Recette pour un cake d'amour" en version espagnole
("Receta para un pastel de amor", chanté par Teresa Maria)


Récapitulatif par personnages

PEAU D'ANE (1970) : 1ER DOUBLAGE ESPAGNOL
Studio et société : Voz de España (Barcelone)
Catherine Deneuve … La princesse … Rosa GUIÑÓN (Dialogues)
Catherine Deneuve … La princesse … Teresa MARÍA (Chant)
Catherine Deneuve … La reine bleue … María Luisa SOLÁ
Jean Marais … Le roi bleu … Felipe PEÑA
Jacques Perrin … Le prince charmant … Antonio GARCÍA MORAL (Dialogues)
Jacques Perrin … Le prince charmant … Luis OLIVARES (Chant) ?
Micheline Presle … La reine rouge … Enriqueta LINARES
Delphine Seyrig … La fée des Lilas … Elsa FÁBREGAS (Dialogues)
Delphine Seyrig … La fée des Lilas … Luisita TENOR (Chant) ?
Fernand Ledoux … Le roi rouge … Rafael Luis CALVO
Henri Crémieux … Le chef des médecins … Luis POSADA MENDOZA
Sacha Pitoëff … Le premier ministre … Pepe MEDIAVILLA
Pierre Repp … Thibaud - l'intendant … Rogelio HERNÁNDEZ
Jean Servais … Le récitant … Arsenio CORSELLAS
Louise Chevalier … La vieille fermière … Paquita BOFILL
Sylvain Corthay … Godefroy … Constantino ROMERO
Michel Delahaye … Le deuxième ministre … Luis POSADA MENDOZA
Patrick Préjean … Allard … Dionisio MACÍAS
Annie Savarin … La princesse Pioche … Carmen CONTRERAS
Guy d'Avout … Le quatrième ministre (as Guy Davout) … Rogelio HERNÁNDEZ
Sophie Maire … La princesse de Monthion … Luisita SOLER
Voix additionnelles … Antonio LARA

Source : Fiche du site Eldoblaje.com, revue par Iñaki Torre pour Dans l'ombre des studios





16. PEAU D'ÂNE (1970) :
DEUXIÈME DOUBLAGE ESPAGNOL


En 2006, Peau d'âne "bénéficie" d'un redoublage espagnol pour la sortie DVD, le matériel du doublage d'origine étant trop détérioré. Les chansons sont laissées en VO. En revanche, le premier doublage est proposé à titre historique dans les pistes audio du DVD.


Récapitulatif par personnages

PEAU D'ANE (1970) : 2E DOUBLAGE ESPAGNOL
Société et studio de doublage : Abac Estudis (Valence)
Catherine Deneuve ... La princesse … Rosa LÓPEZ (Dialogues)
Catherine Deneuve ... La reine bleue … Inma SANCHO
Jean Marais ... Le roi bleu … Rafael ORDÓÑEZ ARIETTA
Jacques Perrin ... Le prince charmant … Benja FIGUERES (Dialogues)
Micheline Presle ... La reine rouge, la seconde reine … Julia SORLĺ
Delphine Seyrig ... La fée des Lilas … Marta APARICIO (Dialogues)
Fernand Ledoux ... Le roi rouge … Sergio CAPELO
Sacha Pitoëff ... Le premier ministre … Hèctor NAVARRO
Pierre Repp ... Thibaud - l'intendant … Gabriel PAREJA
Louise Chevalier ... La vieille fermière … Xesca GUILLÉN
Gabriel Jabbour ... Le chef des tailleurs … Boris SANZ
Bernard Musson ... L'huissier … Ignasi DÍAZ
Annie Savarin ... La princesse Pioche … Cristina SOLER
Jean-Marie Bon ... Le cocher … Enric PUIG
Jean Valière ... Le second cavalier … Carlos CÁRDENAS

Source : Fiche du site Eldoblaje.com




17. PEAU D'ÂNE (1970) : DOUBLAGE ITALIEN


Peau d'âne bénéficie d'un doublage italien, mais les chansons n'ont pas été doublées. Gilles Ermia, spécialiste du doublage de film italien me précise que Sergio Graziani et Pino Locchi sont deux super-stars du doublage italien. Le premier a doublé entre autres Johnny Hallyday dans Le Spécialiste. Le second est la voix de James Bond (Sean Connery et Roger Moore).

Extrait du doublage italien


Récapitulatif par personnages

Catherine Deneuve ... La princesse … Vittoria FEBBI (Dialogues)
Jean Marais ... Le roi bleu … Sergio GRAZIANI
Jacques Perrin ... Le prince charmant … Massimo TURCI (Dialogues)
Micheline Presle ... La reine rouge … Rosetta CALAVETTA
Delphine Seyrig ... La fée des Lilas … Rita SAVAGNONE (Dialogues)
Fernand Ledoux ... Le roi rouge … Arturo DOMINICI
Pierre Repp ... Thibaud - l'intendant … Bruno PERSA
Jean Servais ... Le récitant … Pino LOCCHI
Louise Chevalier ... La vieille fermière … Lydia SIMONESCHI

Source: fiche italienne Wikipedia du film




18. PEAU D'ÂNE (1970) : DOUBLAGE ALLEMAND



Les récentes éditions DVD du film proposent un doublage allemand (de quand date-t-il, mystère ?). Je n'ai pu l'écouter, ni obtenir des informations dessus pour le moment.





19. THE PIED PIPER / LE JOUEUR DE FLÛTE (1972) : VERSION ORIGINALE


La musique de The Pied Piper de Jacques Demy, co-production américano-britannique, est confiée au chanteur Donovan, qui interprète le rôle titre du film. Elle a certainement été enregistrée au Royaume-Uni.





20. THE PIED PIPER / LE JOUEUR DE FLÛTE (1972) : DOUBLAGE FRANCAIS


Le film a été doublé en français (uniquement les dialogues, pas les chansons). Il est sorti en France trois ans après sa sortie britannique, donc l'année du doublage est incertaine. Jacques Demy ne l'a apparemment pas supervisé (d'après mes archives du comédien Philippe Dumat).

??? ... Narrateur ... Marc CASSOT
Keith Buckley ... Mattio ... Serge SAUVION
Patsy Puttnam ... Helga ... ???
Arthur Hewlett ... Otto ... Albert AUGIER**
Paul Hennen ... Karl ... ???
Peter Eyre ... Le Pèlerin ... Marc CASSOT
??? ... Le garde ... Jacques FERRIERE
Donovan ... Piper ... Yves-Marie MAURIN*
John Hurt ... Franz ... Daniel GALL
David Leland ... Officier ... Michel GATINEAU
Michael Hordern ... Melius ... Jean-Henri CHAMBOIS*
Jack Wild ... Gavin ... Pierre GUILLERMO
Michael Goldie ... Bourgeois client de Melius ... Jacques DYNAM
Diana Dors ... Frau Poppendick ... Perrette PRADIER
Cathryn Harrison ... Lisa ... Sylviane MARGOLLÉ
Peter Vaughan ... Evêque ... Jean BERGER
Andre Van Gyseghem ... Frère ... ROLE MUET
John Falconer ... Prêtre ... ???
Clive Elliott ... Prêtre ... Claude JOSEPH
Roy Kinnear ... Bourgmestre ... Philippe DUMAT
Sammie Winmill ... Gretel ... ROLE MUET
Donald Pleasence ... Baron ... Georges AUBERT*
John Welsh ... Chancelier ... ???
David Nettheim ... Kulik ... René BERIARD**
Gertan Klauber ... Crieur de rue ... Albert AUGIER**
Hamilton Dyce ... Nonce apostolique ... René BERIARD
Roger Hammond ... Bourgeois ... ???
Edwin Brown ... Bourgeois ... ???
 George Cormack ... Bourgeois ... René BERIARD
??? ... Bourgeois ... Jean VIOLETTE
??? ... Bourgeois ... Alain NOBIS

Sources:
 : Godspell / Nouveau forum doublage francophone
*: David Gential / Nouveau forum doublage francophone
**: Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios





21. L'ÉVÉNEMENT LE PLUS IMPORTANT DEPUIS QUE L'HOMME A MARCHÉ SUR LA LUNE (1973) : VERSION ORIGINALE


La chanson du film (absente du coffret L'Intégrale Jacques Demy - Michel Legrand pour des raisons de droits) est à l'origine un thème écrit pour "Amour, amour" de Peau d'âne.


Récapitulatif par personnages

L'ÉVÉNEMENT LE PLUS IMPORTANT DEPUIS QUE L'HOMME A MARCHÉ SUR LA LUNE (1973) de Jacques Demy
Musique : Michel Legrand
Paroles : Jacques Demy
Enregistrement des musiciens et chanteurs : ? (Studio Davout)
Mireille Mathieu... Elle-même... ELLE-MEME
Choeurs : Claude CHAUVET, Nicole DARDE, Christiane LEGRAND, etc.


Récapitulatif par ordre d'apparition des morceaux dans le film

Inédit en disque n°1 : Générique - Orchestre (cordes, accordéon, cb/batterie, clavecin, trompettes et cuivres, piano), Choeur féminin et Mireille Mathieu (chant soliste)
10. Paris perdu (version accordéon) - Orchestre (accordéon, cb/batterie, guitare, clarinette basse?)
18. Le café du coin - Orchestre (accordéon, cb/batterie, guitare)
Inédit en disque n°2 : Paris perdu (version Bobino) - Orchestre (cordes, cb/batterie, cuivres, piano) et Mireille Mathieu (chant soliste)
9. Marco enceint (1ère partie, air Paris perdu) - Orchestre (cordes, flûte, glockenspiel, cors, hautbois, clarinette, basson)
Inédit en disque n°3 : En sortant de chez le médecin - Orchestre (cordes, vents, flûte solo, clarinette solo, basson solo, celesta)
Inédit en disque n°4 : Le Larousse - Orchestre (cordes, bois, flûte solo)
9. Marco enceint (2ème partie, air Générique) - Orchestre (cordes, harpe, flûtes, hautbois, cors)
10. Paris perdu (version accordéon) - Orchestre (accordéon, cb/batterie, guitare, clarinette basse?)
19. Irène et Marco (1ère partie) - Orchestre (...)
10. Paris perdu (version accordéon) - Orchestre (accordéon, cb/batterie, guitare, clarinette basse?)
13. La Pizza - Orchestre (mandolines, tambourins, cordes)
Inédit en disque n°5 : La chambre - Orchestre (harpe, violoncelles, hautbois, vents dont flûtes)
17. Sirop prénatif (III) - Orchestre (cordes, guitare, tambourin, harpe)
11. Sirop prénatif (I) - Orchestre (cordes, guitare, tambourin, harpe, piano)
15. Sirop prénatif (II) - Orchestre (cordes, guitare, tambourin, harpe)
19. Irène et Marco (2ème partie) - Orchestre (cordes, vents)
Inédit en disque n°6 : La sortie des journaux (repiquage d'un morceau classique?) - Orchestre (cordes, vents) 
Inédit en disque n°7 : Générique du débat télévisé - Orchestre (clavier, glockenspiel, timbales, cordes)
10. Paris perdu (version accordéon) - Orchestre (accordéon, cb/batterie, guitare, clarinette basse?)
14. Les angoisses de Marco - Orchestre (cordes, cuivres, percus), Choeur ?
Inédit en disque n°8: à table - Orchestre
Inédit en disque n°9: rien! 
Inédit en disque n°10: reprise générique - Mireille Mathieu et orchestre 

Titre pas utilisé dans le film mais présent dans la B.O.:
12. My baby - Orchestre


Récapitulatif par séances d'enregistrement

Séance du 26/06/1973
Choeurs: Claude CHAUVET, Nicole DARDE, Christiane LEGRAND, etc.
A priori choeur du générique

Source : Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios (archives personnelles : récapitulatifs de carrière de Claude Chauvet, Nicole Darde et Christiane Legrand)





22. L'ÉVÉNEMENT LE PLUS IMPORTANT DEPUIS QUE L'HOMME A MARCHÉ SUR LA LUNE (1973) : DOUBLAGE ANGLAIS


Une version anglaise a été réalisée, a priori à l'époque de la sortie du film, et vraisemblablement à Paris. Les chansons de Mireille Mathieu sont laissées en VO (française). Ce doublage est disponible dans le DVD du film.





23. LADY OSCAR (1979)


Lady Oscar (1978) est produit au Japon, mais la musique a été composée par Michel Legrand, et enregistrée en France par Roger Roche au Studio Davout.


Récapitulatif par séances d'enregistrement

Séance du 21 novembre 1978
Basse : Francis DARIZCUREN

Séance du 27 novembre 1978
Basse : Francis DARIZCUREN

Source : Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios (archives de Francis Darizcuren)




24. UNE CHAMBRE EN VILLE (1982)



La composition des chansons

Michel Colombier travaillant sur l'orchestration
d'Une chambre en ville
Une chambre en ville, dont le modèle (un film entièrement chanté) est proche des Parapluies de Cherbourg, marque plusieurs ruptures chez Jacques Demy : rupture dans le ton (social et beaucoup plus noir que les précédents films), rupture dans sa collaboration avec Michel Legrand (le compositeur, peu emballé par le projet, laisse la place à Michel Colombier) et avec Catherine Deneuve (qui devait jouer le rôle d'Edith (aux côtés de Gérard Depardieu) mais a refusé car on lui proposait encore une fois d'avoir une doublure chant).
Pas de rupture dans les jeux de mots approximatifs, puisque le personnage principal féminin est Edith de Nantes.
Une fois le choix des comédiens définitivement établi (Richard Berry, Dominique Sanda), place à l'orchestration (automne 1981, à Los Angeles) et aux auditions. Anne Germain raconte à Stéphane Lerouge dans le livret du CD, qu'elle souhaitait être la voix chantée de Dominique Sanda, mais que Jacques Demy lui avait dit qu'il ne souhaitait pas que le souvenir inconscient de Catherine Deneuve reste dans le film.


L'enregistrement des chanteurs


Enregistrement des chansons d'Une chambre en ville


Guilbaud (Richard Berry) retrouve en Jacques Revaux (voix chantée de Jacques Perrin dans Les Demoiselles de Rochefort et Peau d’âne), un habitué des chanteurs des films de Jacques Demy. Le chanteur, qui depuis les années 60 a connu le succès par ses compositions de chansons et la création de sa maison de disque, Tréma, se propose d’éditer la musique et de produire son enregistrement. « Je connaissais un peu Christine Gouze-Rénal, la productrice du film, car j’avais fait répéter son mari Roger Hanin un an ou deux auparavant chez eux, rue de Courcelles. C’est de là peut-être que lui est venue l’idée de me contacter. Quant à Richard Berry, je le connais très bien, il a enregistré un disque chez Tréma. »

C’est Florence Davis qui prête sa voix à Edith (Dominique Sanda) : « Je connaissais Michel Colombier. Et j’avais enregistré pour Jacques Revaux un 45T disco « There’s no party tonight / No way ». Jacques Revaux avait également produit le disque de la comédie musicale Les Misérables que j’avais jouée au Palais des Sports, c’était le début des micros HF, et on captait les commissariats de police. Quand je faisais Les Misérables, mon chien, Robert, m’accompagnait. Un jour, après seize heures de répétions, assise au milieu de la salle, j’appelle mon chien comme je ne le retrouvais plus et Robert Hossein pensant que je l’appelais lui me dit « Qu’est-ce qu’il y a ? », je lui explique et il s’exclame « Qu’on ferme les portes du Palais des Sports !». Robert Hossein était dur, mais toute l'équipe du spectacle était très soudée, on s’est revus pendant longtemps. Il y avait Fabienne Guyon, mais aussi Guesch Patti, que je n’ai pas quittée depuis notre audition pour le spectacle, on a même créé un trio vocal ensemble avec Lydie Callier, Da Capo, dont le clip avait été récompensé au Midem. »
Pour Une chambre en ville : « Beaucoup de monde était en concurrence lors des premières auditions devant Michel Colombier et Jacques Demy, il y avait le tout Paris. J’ai été prise mais le tarif ne m’intéressait pas, donc ils ont réauditionné tout le monde, et sont finalement revenus vers moi. Les enregistrements ont duré trois semaines, j’ai enregistré seule à part pour les scènes d’amour avec Jacques Revaux. Au début Dominique Sanda assistait, mais elle ne m’a pas donné d’indications, elle m’a laissé faire, puis elle n’est pas allée jusqu’au bout des séances car je pense qu’elle avait trop envie de chanter elle-même. C’est un souvenir magnifique pour moi. Michel Colombier était musicalement et humainement un grand monsieur, et ses arrangements étaient très beaux. Quand on entendait des mots comme « le métallurgiste » certains termes paraissaient curieux en les chantant, mais l’écriture était superbe, notamment la scène de la poupée. Quelques années après, je l’ai retrouvé. On m’avait demandé au milieu d’une tournée que je faisais en France avec Catherine Lara, de faire un aller-retour à Los Angeles pour accompagner Charles Aznavour à un concert. Il y avait à l’after Barychnikov, les sœurs Labèque, etc. J’en ai profité pour passer voir Michel, je lui ai chanté un morceau de White Nights sur lequel il m’avait proposé d’écrire des paroles en français. Mon texte parlait de l’hôtel Danieli de Venise, et il était ravi car il avait justement passé sa lune de miel dans cet hôtel. »
Florence est dans le bain du spectacle et du studio dès son enfance. « Ma mère, Andrée Davis-Boyer, a tourné les premiers clips vidéo qu’on a appelés plus tard scopitones. Elle tournait dans des décors naturels, dans notre villa au Cap d’Antibes ou dans notre maison avenue Frochot à Pigalle. Mes deux grandes sœurs et moi faisions régulièrement les figurantes. Avec Jacques Dutronc, on me voit dans un supermarché avec une poussette. Et Michel Fugain nous a fait danser toutes les trois sur des cubes, ça lui a peut-être donné l’idée du Big Bazar. Mon père, Roby David (dit Davis), était saxophoniste, a travaillé avec Django Reinhardt et fait beaucoup de séances. Ma mère qui était programmatrice de tous les événements jazz de la Côte d’Azur et lui étaient très amis avec Dizzy Gillespie, qui était mon parrain et m’aimait beaucoup, il m’a prodigué des conseils, comme d’apprendre à lire la musique. J’ai attendu sa mort pour m’attaquer au répertoire jazz, que je ne m’autorisais peut-être pas avant. »
Florence débute sa carrière de choriste à 18 ans pour accompagner Vangelis à l’Olympia, et ne s’arrête pas, travaillant en studio ou tournées pour Michel Sardou, Gérard Lenorman, etc.

Florence Davis : Montage

Comparse de Florence Davis dans Les Misérables, Fabienne Guyon joue l’un des rôles principaux (Violette) d’Une chambre en ville, et chante son propre rôle. Sa vie artistique est étroitement liée à l’univers de Jacques Demy et à celui de Michel Legrand. « Je devais avoir une dizaine d’années quand Les Parapluies de Cherbourg est passé vers 1974 à la télévision. Je suis restée scotchée du début à la fin devant ce film d’un genre pas courant, j’étais fascinée. Puis j’ai vu Peau d’âne et enfin Les Demoiselles de Rochefort et alors là c’était l’apothéose, je me suis dit que c’était ça que je voulais faire un jour »
Enfant du Mans, Fabienne prend des cours de théâtre au conservatoire, mais aime également chanter. Elle fait des allers-retours pendant un an à Paris pour suivre le petit conservatoire de la chanson de Mireille (qui n’est plus télévisé depuis longtemps mais continue à exister) avant de s’installer définitivement à Paris à l’âge de 18 ans. « Chez Mireille, c’était un lieu de rencontre, de partage d’idées. Il n’y avait plus l’émission en tant que telle, mais on participait quand même à quelques-unes, j’ai par exemple chanté West Side Story à un Grand Échiquier consacré à Mireille, c’est comme ça que j’ai été repérée par Claude-Michel Schönberg qui m’a fait auditionner Cosette pour Les Misérables. Mireille m’a pris sous son aile, elle était très protectrice et en même temps ne laissait rien passer. J’ai appris l’ABC du music-hall, comment se comporter en public, quoi attendre et quoi donner. Elle demander à chaque fois respectueusement si elle pouvait assister à des répétitions des spectacles dans lesquels je jouais, mais elle n’intervenait pas, c’était juste pour me soutenir. »
Le Petit Conservatoire de Mireille est aussi un carrefour pour la création de projets : « Certains anciens venaient la voir, c’est comme ça que j’ai rencontré Hervé Cristiani et fait des chœurs dans « Il est libre Max ». Et quand il y avait des auditions, on faisait circuler l’information entre nous. C’est Mireille qui a insisté pour que j’aille auditionner pour le rôle de Madeleine dans le spectacle des Parapluies de Cherbourg, mais bien que sereine alors que je venais de ma province, je pensais être trop jeune pour le rôle. Je n’avais passé que trois ou quatre auditions dans ma vie et j’arrive à 18 ans devant Michel Legrand, en chaise roulante après une opération, et Jacques Demy, c’était très impressionnant. Jacques Demy a été adorable, m’a dirigé pendant toute l’audition sur le personnage, l’idée qu’elle était plus âgée, plus mûre. Un jour on me convoque chez Carita pour que j’essaie une perruque, on dit « Débrouillez-vous, il faut la vieillir » et c’est comme ça que j’ai compris que j’avais le rôle, c’était une journée hallucinante. »
Voici Fabienne engagée dans Les Parapluies de Cherbourg. « On était tous embarqués sur le même bateau pour faire un spectacle magnifique, dirigés par Raymond Gérôme qui était un amour, sous l’œil de Jacques Demy, qui était très présent auprès de nous, souvent dans les coulisses : quand je traversais la scène pour dire « Elise est morte », je voyais en diagonale son regard bienveillant. Et la musique de Michel Legrand me parlait énormément, même quand j'ai commencé à la chanter. C’était d’'une évidence totale : les harmonies, les respirations musicales. Je me suis glissée dans sa musique et je n'en suis jamais ressortie. Une période de bonheur absolu, de découverte de la comédie musicale. J’ai compris que je ne pourrais pas me passer de ce genre. C'est pour ça que ça a été déchirant quand on a vu que le spectacle ne cartonnait pas. On a divisé nos cachets en deux et démarché sur les Champs-Elysées sous la pluie avec nos parapluies et des flyers mais ça n’a pas suffi, le spectacle a baissé le rideau assez rapidement »
Le personnage de Violette dans Une chambre en ville ressemble à celui de Madeleine dans Les Parapluies de Cherbourg. C’est certainement par association de ces deux personnages que Jacques Demy pense à Fabienne Guyon pour le rôle de Violette, et l’appelle pour lui proposer le rôle. « J’étais beaucoup plus angoissée, car jouer face caméra est très différent du jeu devant un public, mais Jacques Demy m’a rassuré et fait travailler, il m’a conseillé d’apprendre à marcher comme le personnage donc les semaines précédant le tournage je m’entraîner à marcher avec des escarpins. Danielle Darrieux a également été adorable avec moi. Les jours où je ne tournais pas, j’assistais au tournage : je voyais Michel Piccoli tourner la scène de la menace, il avait énormément travaillé sur le playback, le synchronisme était impeccable. J'ai chanté mon personnage, donc ça m’a beaucoup aidé pour le rôle. »
Et les séances, justement ? « Michel Colombier était adorable. Sa musique m’a surprise au départ, mais j’ai appris à l’apprécier petit à petit, elle est pleine de beauté et de richesse, dans un autre style que celle de Michel Legrand, mais tout aussi belle et performante. Jacques Demy dirigeait avec beaucoup de précision les séances d’enregistrement. La musique avait déjà été enregistrée. J’ai fait quelques séances avec Jacques Revaux (qui avait produit Les Misérables, et pour qui j’ai fait plus tard plusieurs 45T chez Tréma), et d’autres avec Liliane Davis et les autres personnages, ça a duré trois ou quatre jours. J’ai aussi fait des chœurs, on m’entend même en soliste sur une manifestante au début du film. »
Après la sortie d'Une chambre en ville, Fabienne est nominée aux Césars. « Jacques Demy est venu à un ou deux de mes spectacles, mais je regrette de ne pas avoir gardé un lien plus étroit avec lui, c'était quelqu'un de bien. »
Si Fabienne Guyon perd un peu contact avec Jacques Demy, elle travaille en plusieurs occasions avec Michel Legrand. « On a maintenu le lien d’abord grâce à son fils Benjamin, puis par sa sœur Christiane. Il m’a demandé d’enregistrer le générique d’Il était une fois les explorateurs. On a fait les maquettes avec Christiane de son opéra Dreyfus bien avant qu’il ne le monte. Je devais aussi jouer Le Passe-Muraille mais avec Florence Pelly on avait quitté le projet deux mois avant les répétitions afin de remonter Souingue (groupe de jazz vocal avec Fabienne Guyon, Florence Pelly, Gilles Vajou et Jacques Verzier) donc il s’est fâché. On s’est finalement rabiboché grâce à Alain Sachs qui l’avait fait venir à une répétition du Sire de Vergy, et le soir-même j’apprenais le décès de mon père. »
Fabienne chante également dans une série de concerts en trio avec Michel Legrand et Jean Guidoni Ce dernier garde un souvenir mitigé de sa collaboration avec Michel Legrand (cf. Je chante magazine), se souvenant d’un Legrand peu partageur, essayant de prendre le dessus, ce que confirme Fabienne. « Michel pouvait être monstrueux et humiliant envers ses musiciens, je n’ai jamais compris pourquoi il était comme ça. Concernant Guidoni, je pense que Michel a rapidement compris quel talent Jean avait et il a eu peur. Je me demande s’il n’a pas fait exprès de faire Les Demoiselles de Rochefort en trio avec Jean et moi pour ne pas avoir à faire le duo directement avec Jean. De mon côté, Michel m’appréciait donc j’ai eu de la chance. Je chantais pendant les concerts le duo des Parapluies de Cherbourg avec lui, c’était extraordinaire, on a partagé de magnifiques moments, mais malheureusement il n’y a jamais eu de captation. Aujourd’hui, je continue à chanter ses belles mélodies avec beaucoup de bonheur, et des frissons. »
Fabienne joue dans énormément de comédies musicales, participe quelques fois à des doublages chantés (même si elle passe à côté de quelques rôles comme la Petite Sirène, etc. maîtrisant moins le doublage parlé) et très souvent à des publicités (Coca-Cola, Ricoré, Optic 2000 « avant Johnny » précise-t-elle, le clip de campagne de François Mitterrand « Jacques Séguéla m’avait proposé d’apparaître à l‘image, mais j’ai refusé »).

Fabienne Guyon : Montage

Tout comme dans Les Demoiselles de Rochefort, Danielle Darrieux (Margaux Langlois, dite la baronne) chante avec sa propre voix, et Michel Piccoli (Edmond Leroyer) a la voix de Georges Blanès
Georges Blanès joue également à l'image dans le film le rôle d'un chef CRS (qu'il chante), et Marie-France Roussel (Mme Sforza) et Jean-Louis Rolland (Ménager), habitués de la comédie musicale, chantent eux aussi avec leurs propres voix.

Mme Pelletier
, la mère de Violette, jouée par Anne Gaylor, est chantée par Liliane Davis (grande soeur de Florence), grande habituée des génériques (Edgar détective cambrioleur) et des musiques de films (beaucoup de soli pour Francis Lai: Les uns et les autres, Bilitis, etc.). "Voix de l'ombre" dans toute sa splendeur puisqu'elle a prêté sa voix aux quatre Coco Girls dans "Ce mec est too much". Et si vous demandez à Liliane les publicités célèbres qu'elle a enregistrées, nul doute qu'elle se penchera sur vous pour vous chanter dans l'oreille "Hmm, Danone". Je lui consacrerai prochainement un article sur Dans l'ombre des studios.

Liliane Davis : Montage

Quant à Dambiel (joué par Jean-François Stévenin), il prend la voix du pianiste (et ponctuellement chanteur) Aldo Frank.


Récapitulatif par personnages

UNE CHAMBRE EN VILLE (1982) de Jacques Demy
Musique, arrangements et direction : Michel Colombier
Paroles : Jacques Demy
Direction artistique et réalisation : Michel Colombier, Jacques Demy et Jacques Revaux
Enregistrement rythmiques, claviers, choeurs et cordes additionnelles : Bruno Lambert (Studio du Palais des Congrès)
Enregistrement orchestre symphonique : Eric Tomlinson (Palais de la Mutualité)
Enregistrement claviers, synthétiseurs et voix : Jean-Michel Porterie (Tréma)
Employeur des musiciens et chanteurs : Art Music France*
Danielle Darrieux... La baronne... Danielle DARRIEUX
Richard Berry... François Guilbaud... Jacques REVAUX
Dominique Sanda... Edith... Florence DAVIS
Fabienne Guyon... Violette... Fabienne GUYON
Michel Piccoli... Edmond... Georges BLANES
Marie-France Roussel... Mme Sforza... Marie-France ROUSSEL
Jean-Louis Rolland... Ménager... Jean-Louis ROLLAND
Anna Gaylor... Mme Pelletier... Liliane DAVIS
Jean-François Stevenin... Dambiel... Aldo FRANK
Georges Blanès... Le chef des CRS... Georges BLANES
Ouvriers... Michel COLOMBIER, Jacques REVAUX, etc.

Source: CD
* Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios


Récapitulatif par ordre d'apparition des morceaux dans le film


1.1. Générique - Orchestre (piano, cordes, cuivres, etc.)
1.2. La première grève - Orchestre (cordes, vents, etc.), Georges Blanès (Le chef des CRS), Fabienne Guyon (Manifestante), Choeur mixte
1.3. Guilbaud et la baronne - Danielle Darrieux (La baronne), Orchestre (piano, claviers, cb/batterie, quatuor à cordes), Jacques Revaux (Guilbaud)
1.4. Edith et sa mère - Orchestre (claviers, cordes, vents (dont cors, clarinette, etc.)), Danielle Darrieux (La baronne), Florence Davis (Edith)
1.5. Violette amoureuse - Orchestre (claviers, cb/batterie, cordes etc.), Fabienne Guyon (Violette), Jacques Revaux (Guilbaud)
1.6. Le café des chantiers - Orchestre, Choeur mixte (dont Jean Cussac et/ou jean Stout), Jean-Louis Rolland (Ménager), ??? (Ouvrier 1 "Et la bouffe?"), ??? (Ouvrier 2 "Un comité de soutien est déjà formé"), ??? (Ouvrier 3 "Et les cognes?")
1.7. Dambiel et Guilbaud - Orchestre (claviers, cordes, etc.), Aldo Frank (Dambiel), Jacques Revaux (Guilbaud)
1.8. Violette et sa mère - Orchestre (piano, claviers, etc.), Liliane Davis (Mme Pelletier), Fabienne Guyon (Violette)
1.9. La cartomancienne - Orchestre (cordes, vents, etc.), Marie-France Roussel (Mme Sforza), Florence Davis (Edith)
10. Edmond et Edith - Orchestre (piano, vents, etc.), Georges Blanès (Edmond), Florence Davis (Edith)
1.11 La casquette - Choeur mixte, Orchestre, Jacques Revaux (Guilbaud), Aldo Frank (Dambiel)
1.12 La rencontre - Orchestre (cordes, harpe, vents, etc.), Florence Davis (Edith), Jacques Revaux (Guilbaud), ??? (La dame au chat)
1.13 La chambre d'hôtel - Orchestre (piano, claviers, guitare), Jacques Revaux (Guilbaud), Florence Davis (Edith)
1.14 La visite d'Edmond - Orchestre (vents (hautbois, cors, etc.), cordes, claviers), Danielle Darrieux (La baronne), Georges Blanès (Edmond)

2.1. Une chambre en ville - Orchestre (piano, vents (dont cor anglais, hautbois, trompettes, etc.), cordes, timbales), Florence Davis (Edith), Jacques Revaux (Guilbaud)
2.2. Violette et Dambiel - Orchestre (claviers, basse, cordes), Choeur mixte, Fabienne Guyon (Violette), Aldo Frank (Dambiel)
2.3. Chez la baronne - Orchestre (claviers, cordes, etc.), Jean-Louis Rolland (Ménager), ??? (Ouvrier 1), ??? (Ouvrier 2), ??? (Ouvrier 3), ??? (Ouvrier 4 "On a déjà margé, etc."), Daniele Darrieux (La baronne), Aldo Frank (Dambiel), Jacques Revaux (Guilbaud), Florence Davis (Edith)
2.4. L'amour d'Edith - Danielle Darrieux (La baronne), Florence Davis (Edith), Orchestre (claviers, cordes, vents, etc.)
2.5. Le café de l'aube - Jacques Revaux (Guilbaud), Aldo Frank (Dambiel), Orchestre (claviers, batterie)
2.6. Dans la gueule du loup - Orchestre (piano, claviers), Fabienne Guyon (Violette), Danielle Darrieux (La baronne), Florence Davis (Edith)
2.7. La rupture - Orchestre (piano, claviers, cordes), Jacques Revaux (Guilbaud), Liliane Davis (Mme Pelletier), Fabienne Guyon (Violette) 
2.8. Le suicide d'Edmond - Orchestre (piano, claviers, harpe, vents dont hautbois), Florence Davis (Edith), Georges Blanès (Edmond)
2.9. Le récit d'Edith - Orchestre (claviers, cordes, piano), Danielle Darrieux (La baronne), Florence Davis (Edith), Aldo Frank (Dambiel)
2.10. La poupée - Florence Davis (Edith), Orchestre (cordes, vents, etc.), Jacques Revaux (Guilbaud)
2.11. Madame Pelletier et sa fille - Orchestre (vents, cordes, piano, etc.), Liliane Davis (Mme Pelletier), Fabienne Guyon (Violette), Choeur mixte, Georges Blanès (Le chef des CRS), Danielle Darrieux (La baronne), Florence Davis (Edith)
2.12. La deuxième grève - Choeur mixte, Georges Blanès (Le chef des CRS), Orchestre (claviers, vents, piano)
2.13 La mort des amants - Orchestre, Florence Davis (Edith), Aldo Frank (Dambiel), Jacques Revaux (Guilbaud)
2.14. Une chambre en ville - 
 

Récapitulatif par séances d'enregistrement

Séance du 16 février 1982, Palais de la Mutualité
Basse : Francis DARIZCUREN

Séance du 22 février 1982
Choeurs : Anne GERMAIN, Alice HERALD, Claude GERMAIN, José GERMAIN, Jean CUSSAC, etc.

Source: Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios (archives personnelles : bulletins de salaire d'Anne Germain, Alice Herald, Claude Germain, José Germain, récapitulatif de carrière de Jean Cussac, archives de Francis Darizcuren)





25. PARKING (1985)

Nouvelle collaboration Demy-Legrand, sur un film qui sera renié par son réalisateur. Michel Legrand, dont l'ego assez énorme et le caractère de plus en plus sec et méprisant, sont jusqu'à présent tolérés par ses vieux copains, se "frotte" maintenant à une jeune génération de musiciens et choristes un peu moins patients.


La composition et les arrangements

Slim Batteux (1984)
Pour cette transposition du mythe d'Orphée et Eurydice dans notre monde contemporain, Francis Huster joue un chanteur de rock. Le producteur du film, Dominique Vignet, propose ou impose à Michel Legrand (de nouveau partant pour collaborer avec Jacques Demy) de confier l'arrangement des chansons à Slim Batteux, clavier et choriste, membre de la nouvelle génération de musiciens de studio et tournées faisant ses propres arrangements. « Le producteur, Dominique, était un ami, on faisait partie de la même bande avec Agnès et Rosalie Varda, François Wertheimer, etc. C’est lui qui m’a propulsé dans l’aventure pour arranger quatre titres de Michel Legrand. Ce dernier me convoque, et avant de me dire bonjour me demande « Vous avez arrangé combien de tubes ? » (rires). Genre… »
On confie à Slim sur une cassette les maquettes enregistrées par Michel Legrand des quatre titres à arranger. Au générique de fin, il n’est crédité que pour le morceau « Célébration », aucune mention de ses autres arrangements. « En plus je n'ai pas eu de part d’arrangement de la SACEM. Je me suis souvent fait enfler car je ne suis pas un homme d'affaires, j’ai toujours l'impression que tout le monde est honnête. »
Michel Legrand ne lui fait qu'un seul retour sur ses arrangements: « Il m'a dit « Ah, vous avez écrit ça comme ça, vous ? » (rires). Mais à mon avis, il s'en foutait, il savait peut-être à l'avance que le film allait être n'importe quoi. »  


L'enregistrement de l'orchestre et des chanteurs

L'enregistrement des musques et chansons se fait en deux temps: avant le tournage (playbacks des chansons nécessaires au tournage, janvier 1985) et après le tournage (suppléments de choeurs et orchestre de certaines chansons et instrumentaux, fin avril 1985).

Aucun musicien (à part ceux présents à l'image, mais qui pour la plupart n'ont pas participé aux séances) n'est crédité, mais Slim Batteux se souvient que le petit groupe de rock est constitué en studio par Kamil Rustam (guitare), Dominique Bertram (basse), Jean-Yves d'Angelo (piano), et Manu Katché ou Christophe Deschamps à la batterie.
Pour ce qui est des séances d'orchestre, c'est l'incontournable Francis Darizcuren qui est à la basse.

Slim Batteux est chargé de superviser l’enregistrement de ses arrangements : « Parking, ce n’est pas un très bon souvenir, en raison de Francis Huster, et de l’ambiance très pesante qu’apportait Michel Legrand. Quand le projet s’est terminé, j’ai soufflé. Il a quand même fallu que je fasse chanter Francis Huster (rires). » Dans l’interprétation du comédien, on entend qu’il imite Michel Legrand et on devine que le compositeur lui a envoyé des maquettes, que Francis Huster a un peu trop sérieusement « potassées ». « Il chantait de manière très ampoulée, comme Michel Legrand. En studio, je lance les playbacks orchestraux, je lui passe le casque, et il me dit « Ce n'est pas possible, la musique ne fait pas exactement ce que je dois faire ». Alors là, je mesure l'ampleur du désastre. Je lui réponds « Oui, c’est l’orchestre, il ne joue pas la mélodie en même temps », il ne comprenait pas, n’arrivait pas à travailler avec un playback. J'ai été obligé d'aller dans la cabine avec lui. Dans mon casque il n’avait que ma voix, qui lui chantait sa note une seconde avant lui. Comme il chantait dans le vide, sans accompagnement, évidemment au bout d'un moment, ça détonne, ça décale, etc. On a presque fait ça mot par mot, c’était épouvantable. Ensuite, le producteur et Michel Legrand ont eu conscience que c'était injouable avec Huster, donc ils m’ont demandé de trouver des chanteurs. J’aurais pu moi-même passer des essais mais j’étais déjà assez empêtré dans cette histoire, donc j’ai branché des copains dont Daniel Levi qui était un bon ami que je respectais beaucoup, un des meilleurs chanteurs que j’avais entendus en France, et deux amis choristes dont Olivier Constantin, qui ne m’a pas dit quel était son lien avec Michel Legrand, c'est bête car ça a créé une situation difficile. »

Olivier Constantin
En effet, quand il est appelé par Slim, Olivier Constantin, ne lui précise pas qu'il n'est autre que le fils naturel... de Michel Legrand. Né en 1953, d'une histoire d'amour entre le compositeur (déjà père d'une fille à ce moment-là) et la chanteuse Lucie Dolène, Olivier n'est pas reconnu par son père à la naissance (la version de Lucie est racontée dans son livre Hollywood, non merci! co-écrit avec Grégoire Philibert, éd. L'Harmattan). Élevé pendant son enfance principalement par une nourrice et le mari de celle-ci, c'est à l'âge de sept ou huit ans, que Lucie lui présente l'auteur-compositeur-interprète Jean Constantin, et que la famille s'installe ensemble. "On m'a dit en me présentant Jean: "il faut lui dire papa", et Jean m'a élevé comme son propre fils, il a été fantastique. C'était un homme délicieux, avec des défauts, comme tout le monde, mais avec un talent énorme et une grande finesse d'esprit, sous des dehors bourrus. L'ironie du sort, c'est que Michel et Jean étaient de très bons copains, ils ont même vécu en collocation dans une maison à Noisy-le-grand, et ont souvent travaillé ensemble (Michel Legrand a notamment écrit une partie des orchestrations pour la musique du film Les Quatre cents coups, composée par Jean Constantin, ndlr)". C'est vers l'âge de 15 ou 16 ans, lors d'une dispute entre ses parents, qu'Olivier apprend par hasard qui est son véritable père.
Présentant de grandes dispositions pour le chant, Christiane Legrand (soeur de Michel Legrand, et proche du couple Jean Constantin-Lucie Dolène) l'encourage à faire des choeurs. "Christiane m'avait entendu chanter chez mes parents, et elle m'a demandé de remplacer Jean-Claude Briodin, souffrant, pour une séance de choeurs d'Annie Cordy. Je me suis retrouvé avec les frères Costa, c'était ma première séance (vers 1970-1971), et ça s'est bien passé. Quelques temps après, je me rends à une séance pour Georges Moustaki à Davout. Jean Stout se met à côté de moi pour entendre ce que je fais. A la fin, il me dit "Dis donc, petit, tu veux faire partie de mon équipe?". J'ai commencé à travailler beaucoup grâce à Jean Stout, qui était un type formidable et un excellent musicien, avec une voix de basse profonde exceptionnelle".

Olivier se retrouve rapidement à devoir travailler ponctuellement pour Michel Legrand dans ses séances de choeurs. Ses relations avec le compositeur sont très similaires à celles entre Henri Salvador et Jean-Marie Périer. "Michel a toujours fait en sorte que je ne puisse pas l'approcher pendant les séances, et il était suffisamment distant et détestable pour que je n'aie pas envie de lui parler, malgré l'envie que j'avais de lui dire "Je ne sais pas ce qui s'est passé entre ma mère et vous, mais je n'y suis pour rien. Est-ce qu'on peut cohabiter sur cette planète en se disant bonjour?" Je me souviens notamment d'une séance à Davout, on était une douzaine de choristes. C'était l'époque où Raymond Legrand (père de Michel, ndlr) venait de mourir (fin novembre 1974, séances de La Flûte à Six Schtroumpfs), on était tous alignés. Michel a dit à l'assemblée, en s'adressant à tout le monde sauf à moi: "j'organise une messe pour la mort de mon père, est-ce que vous seriez disposés à venir chanter?" Je suis venu quand même car il paraît que Raymond Legrand m'aimait beaucoup quand j'étais bébé. Une autre fois, quelques années après, j'ai été convoqué à Davout à une séance de choeurs pour un petit 45 tours de Benjamin Legrand produit par son père. Quand Michel m'a vu arriver, il est devenu gris, vert, jaune... Toutes les couleurs de l'arc-en-ciel."

Autre anecdote, qui m'avait été racontée par Jean Stout en novembre 2009, et qui confirme les propos d'Olivier: "Olivier, fils naturel de Michel Legrand, est un garçon gentil et très doué. C'est moi qui l'ai mis dans le bain de ce métier, Christiane me l'avait demandé, elle ne pouvait pas le faire elle-même car elle avait peur de se fâcher avec son frère. Un jour, Michel Legrand me fait appeler au pupitre: "Tu sais, le garçon qui est avec toi dans la séance... Tu l'as reconnu?" "Oui, c'est Olivier Constantin" "Ce n'est pas ça que je veux dire... Ce garçon, je sais qui c'est, et je ne le veux plus dans mes séances". Je lui ai répondu devant les cent musiciens "Tu ne me verras plus non plus dans tes séances, tu es un sale con et un fumier" et je suis parti. Un mois après, Michel Legrand m'appelle, tout mielleux, avec sa voix très "affectée", pour que je l'accompagne dans des concerts à Cuba. Je lui ai répondu: "Tu m'excuseras, j'ai du boulot et ça ne m'intéresse pas", et je lui ai raccroché au nez."
Le copiste Maurice Cevrero confirme: « Un jour, Christiane commande des chœurs pour Michel Legrand, et Olivier fait partie de l’équipe. Mon assistant, Claude Romano s’approche de Michel et lui dit " il y a un choriste qui voudrait te parler " et Michel répond " Aujourd'hui, ce n'est pas d'actualité ". »

Olivier est ensuite appelé pour les auditions de Parking (1985): "On m'a proposé de faire un casting pour la voix chantée de Francis Huster. Le rendez-vous était chez Michel Legrand, dans sa villa du XVIème arrondissement. Je poireaute dans le vestibule pendant 30 mn, Michel arrive sans me regarder, regardant un coup le sol, un coup le plafond, et me dit: "On va aller se mettre au piano pour voir les chansons." Il me colle les partitions avec les notes et le texte en dessous. J'ai fait la première lecture en plaçant les notes et le texte, c'étaient de vraies chansons, pas "Au clair de la lune". A la fin, il me dit "ça manque de sensibilité, quand même", remarque plaisante au possible. Je lui dis "C'est la première lecture, si vous m'accordez un peu de temps, je vais réessayer". Au fur et à mesure, ça s'améliore, et c'est à ce moment que Jacques Demy arrive. Je chante le truc et Demy, absolument adorable, dit "Oh, c'est parfait, c'est exactement ce que je veux". Michel faisait une tronche de quatre mètres de long. Il était plus ou moins établi que je devais faire la voix de Francis Huster, donc on est allé à Davout enregistrer des maquettes. Et je peux le jurer sur ce que j'ai de plus cher: Michel faisait des erreurs au piano pour me faire planter."

L'anecdote est confirmée par Slim Batteux: "Je confirme ce qu'Olivier t'a raconté, Michel Legrand était un enfoiré, et comme il ne pouvait pas blairer Olivier, il faisait exprès de jouer des fausses notes alors qu'Olivier chantait vachement bien."  

Daniel Lévi
C'est finalement le chanteur Daniel Lévi (1961-2022) qui est retenu pour faire la voix chantée de Francis Huster. Olivier n'en a pas connaissance à l'époque: "Je n'étais pas au courant. Michel a certainement fini par mettre son veto me concernant, et Daniel a sûrement merveilleusement bien chanté".

Pour conclure avec Olivier Constantin: " J'ai fait mon petit bonhomme de chemin (Olivier est l'un des plus grands choristes français, voix de Jack dans L'Étrange Noël de Monsieur Jack, etc. ndlr), cette histoire ne m'a pas empêché de vivre, il y a des histoires familiales bien plus tristes et sordides que la mienne, mais c'est tout de même un regret. Ce qui me fait de la peine, c'est qu'on n'ait jamais pu avoir une relation amicale avec Michel. Et j'aurais adoré travailler avec lui sur des projets. La seule fois où il a été gentil avec moi, c'était à l'enterrement de Christiane, j'y suis allé avec ma mère et pour la première et dernière fois il m'a appelé par mon prénom "Bonjour Olivier, je suis heureux que tu sois venu" et il a été sympa avec ma mère, lui promettant de la rappeler. Quelques temps après, ma soeur Virginia (Constantine) fait la rencontre de Benjamin Legrand et propose à Benjamin et moi de chanter en guest au Petit Journal Montparnasse. A la pause, je suis au bar et je me présente à Benjamin: "Je suis le frère de Virginia. J'ai quelque chose à te dire d'assez important: il se trouve que toi et moi on est frères" et il me répond "Je savais que j'avais un frère dans le métier mais je ne savais pas qui c'était". A l'enterrement de Michel Legrand, j'ai pu venir avec ma famille grâce à Patrice Peyriéras (pianiste et collaborateur de Michel, qui me dit "A chaque fois que je suis en séance avec toi, j'ai l'impression d'être avec Michel, tu as les mêmes attitudes, la même façon de driver les séances". Ca m'a beaucoup touché) et Vladimir Cosma. Benjamin a fait semblant de ne pas me reconnaître, donc on est tous partis. Mais j'aimerais un jour parler de Michel à Macha Méril, qui je crois est quelqu'un de bien."

Finalement, c'est la voix chantée de Francis Huster que nous entendons dans le film, dans un résultat au mieux scolaire, au pire catastrophique. Anne Germain, dans les choeurs de Parking (notamment dans le générique de début "Bonheur de vivre", façon groupe vocal "à l'ancienne"), se souvient: "Je n’ai jamais compris comment la partie chantée de son rôle lui avait été confiée finalement, alors qu’un vrai chanteur avait déjà fait un enregistrement très concluant car une belle voix et un vrai interprète : Daniel Lévi. Il a chanté plus tard dans Les Dix Commandements avec beaucoup de succès."
La raison est simple: Francis Huster a exigé par contrat de chanter lui-même.

Francis Huster chante (avec sa voix) dans Parking

Le mot de la fin à Slim Batteux: "Après avoir fait chanter Francis Huster, je me disais que je pouvais faire chanter une chèvre. N'importe quoi. D'ailleurs, je l'ai fait (rires)." 
Spécialisé dans le rhythm blues, Slim a fait partie de nombreux groupes (vous pouvez commander son excellent CD Slim & Litehouse ici), et accompagné aux claviers et aux choeurs Percy Sledge, Véronique Sanson, Eddy Mitchell, etc. Il chante en soliste le générique du film d'animation Disney Olivier et Compagnie (1988) pour son doublage français. La même année que Parking, il travaille avec Agnès Varda sur son film Sans toit ni loi (1985).


La post-synchronisation des acteurs

La post-synchronisation des dialogues est quant à elle dirigée par un vétéran, Jacques Lévy, qui garde lui aussi un souvenir assez chaotique du film. L'actrice Keïko Ito (Eurydice) s'exprime en français phonétique.


Récapitulatif par personnages

PARKING (1985)
Musique et direction d'orchestre : Michel Legrand
Paroles des chansons : Jacques Demy
Arrangement des chansons et direction de certaines séances : Slim Batteux (crédité seulement pour "Célébration" alors qu'il a arrangé quatre titres)
Copiste : Maurice Cevrero
Enregistrement de la musique et des chansons : Philippe Omnes et Claude Ermelin (janvier et avril 1985, Studio Davout)
Direction de la post-synchronisation : Jacques Lévy
Employeur des musiciens et chanteurs : Garance
Francis Huster... Orphée... LUI-MEME
Invitée Célébration 1 ("Que la vie te soit douce")... Christiane LEGRAND
Invité Célébration 1 ("Que ta joie demeure")... Michel LEGRAND 
Invité Célébration 2 ("A ta santé")... Jean-Claude CORBEL ?
Invitée Célébration 2 ("A tes succès")... ???
Invité Célébration 3 ("Que tes amis te gardent")... Michel BAROUILLE
Choeurs : Christiane LEGRAND, Claudie CHAUVET, Laurence SALTIEL, Anne GERMAIN, Alice HERALD, Claudine MEUNIER, Hélène DEVOS, Michel BAROUILLE, Jo NOVES, Régis LEROY, Patrice SCHREIDER, José GERMAIN, Jean-Claude BRIODIN, etc.
Musiciens "groupe d'Orphée" : Kamil RUSTAM (guitare), Dominique BERTRAM (basse), Jean-Yves D'ANGELO (piano), et Manu KATCHÉ ou Christophe DESCHAMPS (batterie), etc.
Musiciens : Francis DARIZCUREN (basse), etc. 

Source : Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios (identification de voix, entretiens de Rémi Carémel avec Slim Batteux et Maurice Cevrero, récapitulatifs de carrière, etc.)


Récapitulatif par ordre d'apparition des morceaux dans le film

1. Simplement - Francis Huster (Orphée) et Orchestre (guitare, batterie, synthé, flûtes, cordes, etc.)
Dans la version disque, elle est chantée par Michel Legrand
2. Bonheur de vivre - Choeur mixte (dont Michel Barouille) et Orchestre (cuivres (trompettes, sax, etc.), basse, etc.)
10. Le Styx - Francis Huster (Orphée) et Orchestre 
3. Le Styx - Orchestre (cordes, vents (dont hautbois, flûtes, clarinette, basson, etc.), vibraphone, célesta, etc.)
5. Entre vous deux - Francis Huster (Orphée) et Orchestre
6. Eurydice / Entre vous deux - Orchestre (vents (flûtes, etc.), cordes)

etc.


Récapitulatif par séances d'enregistrement


Séance du 5 janvier 1985
Contracteur des choristes : Christiane LEGRAND
Choristes : Claudie CHAUVET, Anne GERMAIN, Alice HERALD, Hélène DEVOS, Jo NOVES, José GERMAIN, etc.

Séance du 26 avril 1985
Basse : Francis DARIZCUREN

Séance du 27 avril 1985
Basse : Francis DARIZCUREN
Choristes : Laurence SALTIEL, Anne GERMAIN, Claudine MEUNIER, Jo NOVES, Michel BAROUILLE, Patrice SCHREIDER, Régis LEROY, Jean-Claude BRIODIN, José GERMAIN, etc.

Source : Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios (archives personnelles : bulletins de salaire d'Anne Germain, Alice Herald, Hélène Devos, José Germain, Jean-Claude Briodin, agendas de Jo Novès, récapitulatif de carrière de Claudie Chauvet, archives de Francis Darizcuren, récapitulatifs Spedidam (dates incertaines) de Laurence Saltiel, Claudine Meunier, Michel Barouille, Patrice Scheider, Régis Leroy)





26. TROIS PLACES POUR LE 26 (1988)


Avec Trois places pour le 26 (1988), Jacques Demy et Michel Legrand renouent avec la comédie musicale traditionnelle.


La composition et l'écriture des chansons

Maurice Cevrero avec Quincy Jones 
et Michel Legrand
Témoin de la collaboration entre Michel Legrand et Jacques Demy, Maurice Cevrero, copiste et régisseur de Michel Legrand : « J’avais déjà travaillé avec Jacques Demy sur Parking. Pour Trois places pour le 26, je faisais des allers-retours en deux chevaux pour apporter les cassettes des maquettes de Michel à Jacques Demy chez lui, rue Daguerre. Je me souviens qu’une fois il m’a vu très fatigué et a été adorable et prévenant, m’a proposé de rester dîner. Comme je ne pouvais pas rester, il m’a gentiment préparé un sandwich. »
Pour avoir travaillé au plus près de lui de nombreuses années, Maurice Cevrero est l’un des hommes qui a le mieux connu Michel Legrand : « Quand un projet démarrait, ça partait très vite. Il faisait un découpage des séances (tel jour on va faire les cordes, etc.) et me demandait ce que j’en pensais, ou parfois il me confiait directement toute la planification. Je n’étais pas simplement copiste, mais un vrai collaborateur musical, et il y avait une osmose entre nous. »
Maurice est, comme d’autres participants à cet article, un témoin direct du talent du compositeur, mais aussi de ses travers, en particulier un tempérament difficile voire humiliant envers les musiciens : « Lors d’une répétition avec Charles Aznavour, Michel dit aux trombones " Vous pouvez enlever vos sourdines, on ne vous entend pas, c’est étouffé ". Aucun trombone n'avait une sourdine. Michel va aux toilettes, et Aznavour viens nous voir : " Il a fait des arrangements incroyables, mais il est raide avec les musiciens, le Patron. " »
La guerre d’ego tourne parfois à l’absurde, comme lorsque Michel Legrand fait exprès d’accélérer le tempo afin de déstabiliser Quincy Jones et de prouver que « Q » n’est pas un bon chef (anecdote confirmée par plusieurs témoins), digne d’une bataille entre vieilles vedettes du boulevard. Maurice rattrape aussi quelquefois des problèmes liés aux décisions rapides de Michel Legrand : « Michel était sollicité pour faire un concert à l’Église Saint-Sulpice dans le cadre du Festival de Jazz de Saint-Germain-des-Prés. Il ne voulait pas, son agent non plus, ils craignaient que ça résonne. Je lui ai rappelé que Duke Ellington avait fait un concert avec les Swingle Singers à Saint-Sulpice quarante ans plus tôt, lui ai suggéré de jouer "Le Messager", très inspiré de Bach, etc. et d’autres œuvres. Finalement, il l’a fait, et ça a été un concert extraordinaire. »
Parfois, le côté imprévisible de Michel Legrand prend des tournures plus sympathiques : « Une fois, je lui avais demandé de l’aide pour des amis, il fallait combler un conducteur d’une partition que j’éditais et qui devait être jouée au Festival de Jazz de Saint-Germain-des-Prés. Il me dit « Ah non, je n’ai pas le temps », et finalement un mois après il me dit « Tiens je suis tombé là-dessus et je l’ai fait. » C’était tout Michel, il fallait que l’idée vienne de lui et pas de moi (rires). »
Régulièrement, quand un projet n'aboutit pas, Maurice n’est pas payé par Michel Legrand pour son travail. « Comme j’avais monté une petite maison d’édition musicale, Michel m’a proposé plusieurs fois quand il ne pouvait pas me payer, de prendre les partitions dans mon édition. Il signait mais me demandait de ne rien déposer à la SACEM. Ça trainait, alors un jour avec ma secrétaire on l’a « coincé » et il a finalement signé les papiers SACEM. Dans ma maison d’édition, j’ai 25 morceaux de Michel, dont le concerto pour violon qui va être créé en octobre 2022 à la Seine Musicale. »
Parmi les beaux projets « abandonnés » sur lesquels Maurice travaille : « Michel avait composé la musique de Mouche (1991) de Marcel Carné mais le film n’est jamais sorti. Mon assistant, Claude Romano, qui a eu plus tard le même rôle que moi auprès de Michel, a demandé à Michel quand on serait payé, et Michel lui a répondu « Tu t’assois dessus ». J’ai toujours les partitions, qui m’ont été signées par Marcel Carné. Comme je lui avais dit habiter Quai de Jemmapes, il m’avait raconté qu’Hôtel du Nord (1938) a été tourné une journée Quai de Jemmapes et qu’ensuite le canal a été reconstitué en studio à Joinville. »
Trombone basse dans divers orchestres classiques prestigieux et pour des séances d’enregistrement et concerts (notamment Michel Legrand qu’il accompagne en 1972), Maurice Cevrero aime depuis toujours écrire la musique et dépanne ses collègues de l’orchestre des Folies Bergère, ou son copain Janko Nilovic. Au début des années 80, il croise dans son immeuble l’arrangeur Daniel Carlet avec qui il avait travaillé comme musicien du groupe ZOO. « Daniel allait chez son copiste, Richard Legat, qui, je ne le savais pas, habitait dans mon immeuble. Je l’accompagne, et pose des questions à Richard, qui me recommande d’acheter une plume Waterman biseautée et de passer les tests pour avoir le tampon officiel de copiste. C’est ce que j’ai fait. C’était la Préhistoire : comme on faisait les copies à la main sur du 30x23 on ne pouvait pas faire de photocopies, donc quand il y avait 40 violonistes, il fallait 40 copies à la main. Et parfois on allait chez le compositeur ou l’arrangeur d’une musique de film, on travaillait toute la nuit et on le suivait le lendemain en voiture en studio pour continuer le travail en studio. »
Richard Legat ne souhaitant pas travailler le week-end, il demande à Maurice de le remplacer sur les séances de Michel Legrand. « La première fois, j’arrive à Davout à 9h, c’était la première fois que je faisais des copies pour tout un studio. Michel qui était près de ses sous, n’avait pas d’assistant, donc je lui ai proposé de distribuer moi-même les copies aux musiciens, et je suis resté assister. » Il devient copiste officiel de Michel Legrand, jusqu’à ce que Michel Legrand lui propose vers 1990 de devenir en plus son régisseur (en remplacement de Francis Darizcuren) pour convoquer les musiciens. Maurice convainc Michel Legrand de remonter son big band et participe de près à tous ses projets (albums de Stéphane Grappelli, Natalie Cole, Johnny Mathis, etc.), joue le rôle d’un cymbaliste dans le film La Bûche, dirige Raymond Devos dans un album hommage à Erick Satie, etc.


L'enregistrement des musiciens et des chanteurs

Star du film, Yves Montand joue son propre rôle, et chante bien entendu avec sa propre voix. Maurice Cevrero se souvient : « J'étais en studio avec Robert Fienga, qui a travaillé à Disneyland Paris comme arrangeur et chef d’orchestre, mais qui était copiste avec moi. Yves Montand, qui nous entend parler, vient nous voir : « Mais vous êtes tous les deux du midi ! », Fienga dit « Moi je suis de Montpellier », je dis « Moi je suis de Toulon », et Yves Montand enchaîne « Moi je suis de… » et je le coupe « Marseille ! ». Il nous a dit en riant « Ah bon, vous savez tout », et on a discuté, il était accessible et vraiment sympathique. »

Le rôle principal féminin (Marion) est joué par Mathilda May, qui chante son propre rôle. Elle se souvient auprès de Var Matin (31/01/2019) : « J’ai été infiniment touchée par la disparition de Michel Legrand. J’ai eu le bonheur de travailler avec lui en 1988 dans un film de Jacques Demy intitulé Trois places pour le 26 dans lequel j’ai eu le bonheur de partager l’affiche avec Yves Montand. C’était une opportunité et une expérience incroyable pour une jeune actrice, j’en garde un merveilleux souvenir. Je lui avais demandé timidement si je pouvais interpréter moi-même une chanson dans le film. Il avait accepté et j’avais travaillé avec sa sœur Christiane. Nous nous sommes recroisés plusieurs fois et il me fredonnait à chaque fois cette chanson avec un sourire. J’ai été marqué par ses comédies musicales à la française. »
Maurice Cevrero confirme : « A l’enterrement de Michel, Robert et moi étions dans la file, et on voit Mathilda May toute seule. Je lui ai dit qu’on avait travaillé ensemble sur le film, lui ai proposé de nous rejoindre et on est resté groupés, liés par le souvenir de ce film. »

Katy Varda (Alice) et Marie Dô (Nicole), qui jouent les copines de Marion, chantent vraisemblablement avec leurs propres voix. En revanche, plusieurs comédiens-danseurs (non-crédités au générique) chantent avec des voix de choristes, j’ai notamment identifié les voix de Christian Genevois (beau-frère d’Isabelle Aubret, et choriste occasionnel), Michel Barouille et Michel Legrand.


Récapitulatif par personnages

TROIS PLACES POUR LE 26 (1988) de Jacques Demy
Musique et direction : Michel Legrand
Paroles : Jacques Demy
Copistes : Maurice Cevrero et Robert Fienga
Yves Montand... Yves Montand... LUI-MEME
Mathilda May... Marion... ELLE-MEME
Katy Varda... Alice... ELLE-MEME
Marie Dô... Nicole... ELLE-MEME
Homme journaliste n°1, 1ère voix... Christiane GENEVOIS
Homme journaliste n°1, 2ème voix ("Combien d'années Monsieur Montand, etc.")... ???
Femme journaliste n°1 (brune)... ???
Homme journaliste n°2, 1ère voix ("Trois mots pour notre quotidien")... Michel LEGRAND
Homme journaliste n°2, 2ème voix ("Vous avez des souvenirs sans doute")... ??? (idem 2ème voix du journaliste n°1)
Attachée de presse... ???
Femme journaliste n°2 (rousse)... ???
Homme journaliste n°3... Michel BAROUILLE
Chanteuse tableau Marilyn Monroe... ???
Choristes : Christiane LEGRAND, Régis LEROY, etc.
Musiciens : Francis DARIZCUREN (basse), etc.

Source : Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios (identification de voix, récapitulatifs de carrière de Christiane Legrand, Régis Leroy et Francis Darizcuren, etc.) 



Récapitulatif par ordre d'apparition des morceaux dans le film

1. Générique (Qui luxure) - Yves Montand et Orchestre (piano)
2. Interview - Orchestre (basse, synthés, cuivres, etc.), Christian Genevois (Homme journaliste n°1, 1ère voix), ??? (Femme journaliste n°1), Michel Legrand (Homme journaliste n°2, 1ère voix), ??? (attachée de presse), ??? (Femme journaliste n°2), Michel Barouille (Homme journaliste n°3), Yves Montand, ??? (Homme journaliste n°1, 2ème voix et Home journaliste n°2, 2ème voix) et Choeur mixte (dont Michel Barouille)
3. Au concert - Orchestre (synthés) et Mathilda May (Marion)
4. Lorsqu'on revient - Yves Montand et Orchestre (piano, synthé)
5. La parfumerie - Mathilda May (Marion), Orchestre (synthés), Katy Varda (Alice) et Marie Dô (Nicole), Yves Montand
6. La star - Orchestre (accordéon, batterie, piano, contrebasse, guitare)
7. Ciné qui chante - Yves Montand, Orchestre (piano bastringue, batterie, contrebasse, banjo) et ??? (Marylin Monroe)
Inédit en disque 1 : Que reste-t-il de nos amours? / C'est la vie qui va / A Paris - Orchestre (piano, accordéon)
8. Qui luxure - Mathilda May (Marion), Orchestre (synthés) et Yves Montand
9. L'esprit frappeur - Yves Montand et Orchestre (synthés, basse)
Inédit en disque 2 : idem avec choeurs d'hommes
Inédit en disque 3 : accompagnement saxo
10. Au concert (ballet) - Orchestre (synthés)

etc.


Récapitulatif par séances d'enregistrement


Séances du 15 au 26 mars 1988
Basse : Francis DARIZCUREN

Séance du 6 octobre 1988
Choristes : Christiane LEGRAND, Régis LEROY, etc.

Source : Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios (archives personnelles : récapitulatifs de carrière (dates incertaines) de Christiane Legrand et Régis Leroy, archives de Francis Darizcuren)





27. RECONNAISSANCE ET DROITS


Les acteurs des films de Jacques Demy et leurs "voix chantées", une histoire passionnée... avec des hauts et des bas.

En juillet 1963, pendant les séances des Parapluies de Cherbourg, les chanteurs signent à Michel Legrand (employeur) des contrats attestant qu'ils n'auront aucun droit sur les disques vendus. Ils sont considérés comme de simples interprètes secondaires (pouvant toucher quelques minuscules droits voisins via l'Adami (solistes crédités) et la Spedidam (solistes non-crédités et choristes)) et pas comme des interprètes principaux pouvant toucher des royalties. 
Une situation choquant Danielle Licari (voix de Geneviève) et suscitant l'incompréhension de sa compagne Jackye Castan ("Michel a fait signer ce contrat à sa propre soeur" s'était-elle agacée).

Ce type de contrats, de même que l'anonymat des chanteurs, est alors la norme, que soit à Hollywood ou en France, on est encore assez loin du précédent Marni Nixon (où rien n'ayant été prévu pour elle sur West Side Story, Leonard Bernstein a accepté de reverser un pourcentage de sa propre part de compositeur sur le disque à la voix chantée de Maria). La plupart des chanteurs des Parapluies de Cherbourg sont quand même crédités sur la pochette du disque et au générique du film, ce qui est une assez grosse avancée pour l'époque, et preuve d'une reconnaissance de Jacques Demy.
Ceci-dit, le générique les présente sous la forme d'un carton "avec le concours de" sans préciser leur fonction, leur rôle et leur prénom. Et alors qu'ils représentent 50% du rôle (entièrement chanté, rappelons-le), aucun d'entre eux n'est convié au Festival de Cannes ou à un événement lié au film. La participation de Danielle Licari est tue. Il faudra attendre son succès soliste avec le "Concerto pour une voix" de Saint-Preux sept ans plus tard pour qu'elle parle plus librement du film.

Quant à José Bartel (voix de Guy), il souhaite profiter de la sortie du film pour sortir un disque avec des chansons des Parapluies (nouveaux enregistrements qui lui auraient permis de toucher des royalties), mais d'après sa veuve Norma, Michel Legrand le lui a interdit, voulant tout miser sur la sortie d'un disque de reprises par Nana Mouskouri. José Bartel sortira son 45T quelques mois après, dans l'indifférence générale.
Georges Blanès (voix de Cassard) choisit lui de composer et enregistrer (sur des paroles de son épouse Lucette Raillat) une chanson hommage au film. Le recto de la pochette du 45T est "postfacé" par Michel Legrand.

Vient Les Demoiselles de Rochefort en 1966. Même type de contrats. Les chanteurs sont au générique de fin mais nommés comme "chanteurs" avec leurs prénoms (on progresse). Voix de George Chakiris / Etienne, Romuald se souvient: "On a signé des contrats. Ils prenaient leurs précautions, nous n'avions aucun droit, juste une somme forfaitaire et nous n'avions rien à dire à l'époque. Quant au traitement médiatique... Il ne fallait pas qu'on sache que les acteurs ne chantaient pas avec leur vraie voix. Je suis sûr qu'encore beaucoup de gens ne le savent pas. Vous avez vu le générique? Ca passe vite, on ne s'attarde pas sur la chose."

Presque la même discrétion que pour Les Parapluies de Cherbourg. Notons quand même (merci à Natalie Kotka), l'existence d'un article "Deux voix qui comptent" dans Elle du 2 mars 1967, rendant hommage au travail d'Anne Germain et Claude Parent dans Les Demoiselles de Rochefort
Les deux interprètes se retrouveront à chanter plus tard la chanson des Jumelles lors d'une émission télévisée (malheureusement nous n'avons jamais pu la retrouver), d'après les souvenirs d'Anne Germain : « Nous avions été sollicitées Claude Parent et moi pour une émission de télévision dans laquelle nous devions chanter en direct devant un écran la chanson des jumelles. Il y avait là Serge Gainsbourg et d’autres artistes. Un de mes « collègues » batteurs André Arpino éprouve le besoin de me présenter à Serge Gainsbourg qu’il avait accompagné, mon copain lui dit « Je te présente Anne Germain, qui a prêté sa voix à Catherine Deneuve dans Les Demoiselles de Rochefort ». Gainsbourg me regarde et dit « Il ne faut rien prêter dans ce métier » (rires) ! »
En outre, José Bartel et Claude Parent (seuls avec Georges Blanès et Jacques Revaux à suivre une vraie carrière de soliste) enregistrent des 45T avec des chansons du film.

Pour Peau d'âne (1970), même type de contrats, mais contrairement aux Demoiselles de Rochefort, Anne Germain arrivera très tardivement à obtenir des royalties. Seuls les trois chanteurs principaux sont crédités au générique. 

Le 1er novembre 1972, soit neuf ans après l'enregistrement des Parapluies de Cherbourg, Danielle Licari chante pour la première fois en public la chanson des Parapluies, lors d'un Cadet Rouselle de Guy Lux. Il a fallu attendre le succès de son "Concerto pour une voix" de Saint-Preux qui la propulse au rang de soliste internationale pour qu'elle soit enfin "légitimée" à chanter cet air. Et 5 nouvelles années après pour que Michel Legrand l'invite enfin sur scène à chanter avec lui (Ciné Music du 18/09/78).


Danielle Licari chante Les Parapluies de Cherbourg (1972)

En 1993, Agnès Varda réalise Les demoiselles ont eu 25 ans. Dans ce documentaire sur la création des Demoiselles de Rochefort, pas un seul mot n'est dit sur les chanteurs. Leur existence n'est même pas évoquée. Elle le sera très brièvement par Anne Vernon dans L'Univers de Jacques Demy (documentaire sur la carrière de Jacques Demy, réalisé par Agnès Varda, 1995), où l'actrice, filmée à une projection des Parapluies de Cherbourg, évoque le travail de Christiane Legrand. Mais pas un seul autre mot sur les chanteurs ou leur existence, qui est même presque niée par des extraits d'interviews de Françoise Dorléac ou Michel Piccoli, exprimant leur difficulté à prendre leur souffle au moment du tournage des chansons.
Dans cette continuité-là, Catherine Deneuve reste très évasive sur l'existence d'une voix chantée lorsqu'elle est interviewée dans les années 2000/2010. Anne Germain est assez remontée contre cette situation. Lorsque je transmets, avec l'accord de sa famille, à l'AFP, l'annonce du décès d'Anne en 2016, les dépêches AFP titrent "La voix de Catherine Deneuve s'est éteinte". Petite "revanche" posthume d'une femme de l'ombre.

J. Perrin et R. Berry entourent leur "voix"
Jacques Revaux (avec Costa-Gavras)
à l'inauguration de l'expo Demy
En 2013, sortie du coffret CD L'Intégrale Jacques Demy - Michel Legrand, coordonné avec l'exposition Jacques Demy à la Cinémathèque (à l'inauguration de laquelle Jacques Revaux est invité). En dehors de ce qui a déjà été publié par le passé, on n'apprend rien de nouveau sur les chanteurs (pas même le nom de Jean Cussac dans Les Parapluies de Cherbourg, sur lequel j'avais communiqué) à part des participations vocales... de Michel Legrand et Jacques Demy (détenteurs des droits). Rien de surprenant, on est là encore dans une politique de non-divulgation des interprètes afin d'éviter des "complications administratives" (contrats actuels plus contraignants pour les maisons de disque). Scandale, le grand Gene Kelly lui-même n'est pas crédité pour la version anglaise des Demoiselles de Rochefort (cf. le chapitre sur la version anglaise). Un exemple parmi de nombreux autres : L'homme orchestre de François de Roubaix (duo Olivier De Funès/Anne Germain, où seul De Funès est crédité; comment peut-on encore aujourd'hui rééditer des vinyles sans mentionner le nom d'Anne?), Trafic (Tati) de Charles Dumont (Janine de Waleyne, Jean-Claude Briodin et Danielle Licari oubliés, alors que la voix de Danielle est "vendue" (sans être mentionnée) ensuite au groupe Bon Entendeur pour leur remix de la chanson "Maria"), Moi y en a vouloir des sous (Yanne) de Michel Magne (Jean Cussac, Guy Matteoni, exclus de toute mention) et Les Tontons flingueurs (Lautner) du même Michel Magne (Bob Smart, chanteur de deux titres, "oublié").
Sollicitée pour faire la promotion du coffret alors qu'elle ne touche aucune royaltie dessus, Anne Germain répond qu'elle n'a "rien à vendre". 


Votre serviteur (Rémi Carémel) avec Rosalie Varda, Laurent Valière et Michel Legrand

A partir de 2013 justement, je commence une sorte de "lobbying" absolument bénévole et désintéressé pour faire connaître à des journalistes musicaux les chanteurs des films de Jacques Demy. Il porte ses fruits, puisque par mon entremise plusieurs interprètes sont invités pour la première fois à la radio (50 ans après) pour parler de leur collaboration aux films de Jacques Demy: Danielle Licari, Claudine Meunier, Jean-Claude Briodin, Jacques Revaux, etc.  et une émission complète est consacrée à Anne Germain au moment de sa disparition. Remercions notamment Laurent Valière et Benoît Duteurtre (France Musique) pour leur soutien.
Je crée également des ponts intergénérationnels en mettant en contact Danielle Licari et Marie Oppert (jeune interprète de Geneviève dans la production du Châtelet des Parapluies de Cherbourg (2014)).


Soirée anniversaire des Demoiselles de Rochefort au Grand Rex (1/10/2017)
Votre serviteur (Rémi Carémel), avec Gilles Hané (spécialiste du film), Claudine Meunier (voix d'Esther), Jocelyne Germain (épouse de José Germain), Victoria Germain (fille d'Anne Germain (voix de Delphine)), José Germain (choriste) et Jean-Claude Briodin (voix d'un policier et d'un badaud, et choriste)

Les productions des spectacles liés à Jacques Demy (Les Parapluies de Cherbourg au Châtelet, Peau d'âne au Marigny, l'anniversaire des Demoiselles de Rochefort au Grand Rex, etc.) n'invitent pas d'eux-mêmes les chanteurs, mais j'arrive à les faire inviter.

En parallèle, j'entreprends, bénévolement et après des centaines d'heures de saisie sur Excel de bulletins de paie et de recherches, d'aider tous mes amis choristes à toucher des droits sur les enregistrements de chansons et musiques de film auxquelles ils ont participé (car s'ils ne touchent pas de royalties, ils peuvent en revanche bénéficier de droits voisins par la Spedidam). Mais au vu de la lenteur et des obstacles rencontrés dans le traitement de mes demandes par cet organisme, nos magnifiques octogénaires à centenaires n'en verront peut-être jamais la couleur.

En mars 2022, je suis invité par la Cité de la Voix (Vézelay) à présenter (via leurs voix chantées) Les Demoiselles de Rochefort, au cinéma d'Avallon.





28. HOMMAGES ET PARODIES


L'univers de Jacques Demy a depuis toujours inspiré les artistes, que ce soit pour des parodies humoristiques ou des hommages "sérieux". Les lister tous serait fastidieux, en revanche il est intéressant de se pencher sur ceux qui ont fait intervenir au son ou à l'image des chanteurs ayant réellement pris part aux enregistrements originaux.


Les arroseurs de Cherbourg (extrait de L'arroseur arrosé, Pierre Tchernia, 1965)

Géraldine Gogly, Jean-Marc Thibault
et Roger-Pierre dans L'arroseur arrosé
Le 28 décembre 1965, l'ORTF diffuse pour la première fois L'arroseur arrosé, téléfilm de Pierre Tchernia proposant six pastiches rendant hommage au film L'arroseur arrosé (1895). Parmi ces pastiches, un des Parapluies de Cherbourg, intitulé... Les arroseurs de Cherbourg (a priori co-scénarisé par Pierre Tchernia et son vieux complice René Goscinny). Tout est réussi dans ce sketch: la musique et l'orchestration (a priori de Georges Van Parys) très fidèles aux Parapluies (avec quelques "citations" du film, mais aussi de "Barbara" de Prévert et Kosma, etc.), les textes et la manière d'amener des idées, le générique hilarant, etc.
A l'image, les acteurs sont la sublime Marie Dubois (Barbara), Roger-Pierre (Paulot dit "Ludovic"), Jean-Christophe Benoît (le gendarme), Jean-Marc Thibault (Riton)... et Géraldine Gogly (la nouvelle "victime").
On est plus que dans "L'arroseur arrosé", et dans une une véritable facétie à la Pierre Tchernia puisque Géraldine Gogly (à l'époque jeune chanteuse soliste sous le le pseudonyme de Géraldine, mais future grande choriste (parfois en remplacement de Danielle Licari), notamment chez Jacques Demy (Les Demoiselles de Rochefort, Peau 
d'âne)), après avoir chanté le générique, fait la voix chantée de Marie Dubois / Barbara, puis apparaît à l'image à la fin, en chantant avec la voix... de Micheline Dax (sur au moins une réplique "Oui, monsieur" comme s'en souvient Géraldine).

Les arroseurs de Cherbourg (1965)


La publicité Tupperware (Agnès Varda, 1972)

Dans cette publicité qui se voulait féministe à l'époque (on ne rit pas!) réalisée par Agnès Varda, on retrouve l'ambiance (marin, etc.) des films de Jacques Demy... et ses chanteurs. J'ai notamment identifié les voix de José Bartel ("en plein après-midi"), Danielle Licari ("un métier bien payé", etc.) et Claudine Meunier ("sans spéciales études", etc.), trois des chanteurs principaux des Parapluies de Cherbourg
Les bulletins de paie de choristes que j'ai récoltés ces dernières années m'indiquent que Danielle Licari, Jackye Castan et Jean-Claude Briodin ont fait une séance d'enregistrement pour Tupperware le 10/02/1972 pour l'employeur Télévision-Radio-Cinéma (siège social: 34 rue de la Victoire, Paris), il s'agit donc certainement de celle-ci. L'identité du compositeur est inconnue. J'espère que l'air ne vous restera pas dans la tête.

La publicité Tupperware (1972)





29. LIRE, ÉCOUTER ET REGARDER


Quelques conseils de lectures :

J'ai le regret de vous dire oui de Michel Legrand avec la collaboration de Stéphane Lerouge (Fayard, 2018)
(Attention, petite filouterie éditoriale, puisque ce livre est un copier-coller avec quelques pages en plus de Rien n'est grave dans les aigus des mêmes auteurs (Le Cherche-Midi, 2013))

Les arrangeurs de la chanson française de Serge Elhaïk (Textuel, 2018)

I sang that : A Memoir from Hollywood de Sally Stevens (Atmosphere Press, 2022)

Ma vie en chansons de Jacques Revaux avec la collaboration de Laurence Lorenzon (Ramsay, 2014)

Vladimir Cosma : Comme au Cinéma (entretiens avec Vincent Perrot) de Vladimir Cosma et Vincent Perrot (Hors Collection, 2009)

Il était une fois Peau d'âne de Rosalie Varda et Emmanuel Pierrat (La Martinière, 2020)

Le monde enchanté de Jacques Demy (2013)

Hollywood, non merci! de Lucie Dolène et Grégoire Philibert (L'Harmattan, 2021)

"Danielle Licari et Jackye Castan: Rhapsodie pour deux voix" entretien en trois parties avec Rémi Carémel (Dans l'ombre des studios, 2018)
https://danslombredesstudios.blogspot.com/2018/12/danielle-licari-et-jackye-castan.html

"Anne Germain : Chanter la vie, chanter les fleurs, chanter les rires et les pleurs" entretien en six parties avec Rémi Carémel (Dans l'ombre des studios, 2014)
http://danslombredesstudios.blogspot.com/2014/05/anne-germain-chanter-la-vie-chanter-les.html

"Hommage à Anne Germain" par Rémi Carémel (Dans l'ombre des studios, 2016)
http://danslombredesstudios.blogspot.com/2016/09/deces-danne-germain.html

"Mémoires de José Bartel" en plusieurs parties (Dans l'ombre des studios, 2016-) 
http://danslombredesstudios.blogspot.com/2016/07/memoires-de-jose-bartel-partie-1.html

"Hommage à José Bartel" par Rémi Carémel (Dans l'ombre des studios, 2012)
https://danslombredesstudios.blogspot.com/2012/11/hommage-jose-bartel.html

"Joyeux anniversaire Claudine Meunier" par Rémi Carémel (Dans l'ombre des studios, 2014)
https://danslombredesstudios.blogspot.com/2014/04/joyeux-anniversaire-claudine-meunier.html

"Hommage à Georges Blanès (1928-2021)" par Rémi Carémel (Dans l'ombre des studios, 2022)
https://danslombredesstudios.blogspot.com/2022/04/hommage-georges-blanes-1928-2021.html

"Décès de Don Burke" par Rémi Carémel (Dans l'ombre des studios, 2019)
https://danslombredesstudios.blogspot.com/2019/03/deces-de-don-burke-1939-2019.html

"Jean Cussac : Un sourire en chantant" par Rémi Carémel (La Gazette du Doublage, 2006)
https://blancheneigedisney.wixsite.com/blancheneige/jean-cussac

"Raoul Curet : Rencontre au soleil" par Rémi Carémel (Dans l'ombre des studios, 2016)
https://danslombredesstudios.blogspot.com/2016/07/raoul-curet-rencontre-au-soleil.html

"Jean-Claude Briodin: Entretien avec un Troubadour" par Rémi Carémel (Dans l'ombre des studios, 2020)
https://danslombredesstudios.blogspot.com/2020/03/jean-claude-briodin-entretien-avec-un_7.html

"José Germain : Tout le monde veut devenir... Scat Cat" par Rémi Carémel (La Gazette du Doublage, 2007)
(Lien actuellement inaccessible) 

"Décès de Jeanette Baucomont" par Rémi Carémel (Dans l'ombre des studios, 2019)
https://danslombredesstudios.blogspot.com/2019/12/deces-de-jeanette-baucomont-1926-2019.html

"Hommage à Jacques Thébault, voix française de Steve McQueen" par Rémi Carémel (Dans l'ombre des studios, 2015)
http://danslombredesstudios.blogspot.com/2015/07/hommage-jacques-thebault-voix-francaise.html

"Discographie des Blue Stars (1954-1959)" par Rémi Carémel (Dans l'ombre des studios, 2020)
https://danslombredesstudios.blogspot.com/2020/11/discographie-les-blue-stars-blue-stars.html

"Discographie des Double Six (1959-1966)" par Rémi Carémel (Dans l'ombre des studios, 2020)
https://danslombredesstudios.blogspot.com/2020/11/discographie-les-double-six-double-six.html

"Discographie des Swingle Singers (1962-1973)" par Rémi Carémel (Dans l'ombre des studios, 2022)
https://danslombredesstudios.blogspot.com/2022/01/discographie-les-swingle-singers.html

"An interview with Jackie Ward" par Scott Awley (C'mon get happy: The unofficial website of The Partridge Family, 2000)
http://www.cmongethappy.com/interviews/jw/

"Interview with Sally Stevens" par Joe Montague (Riveting Riffs, 2015)
http://www.rivetingriffs.com/Sally%20Stevens%20Interview%20Part%20One.html


Quelques conseils d'écoutes :

Coffret 11 CD L'Intégrale Jacques Demy - Michel Legrand (Universal, 2013)

Coffret 5 CD Les Demoiselles de Rochefort (Universal, 2017)

CD Une chambre en ville (Universal, 2013)

Émission The Legacy of John Williams du 1/04/2022, "L.A. Studio Legends: Sally Stevens" présentée par Maurizio Caschetto avec Sally Stevens
https://thelegacyofjohnwilliams.com/2022/04/01/sally-stevens-podcast/

Émission Étonnez-moi Benoît (France Musique) du 7/03/2020, "Groupes vocaux d'hier et d'aujourd'hui" présentée par Benoît Duteurtre avec Claudine Meunier, Jean-Claude Briodin et Rémi Carémel
https://www.radiofrance.fr/francemusique/podcasts/etonnez-moi-benoit/groupes-vocaux-francais-d-hier-et-d-aujourd-hui-avec-claudine-meunier-jean-claude-briodin-remi-caremel-7155025

Émission 42ème rue (France Musique) du 19/11/2017, "Les Demoiselles de Rochefort ont eu 50 ans" présentée par Laurent Valière avec Michel Legrand, Pierre Boussaguet, Rosalie Varda, Jacques Revaux et Rémi Carémel
https://www.radiofrance.fr/francemusique/podcasts/42e-rue/cabaret-42e-rue-les-demoiselles-de-rochefort-ont-eu-50-ans-1710191

Émission 42ème rue (France Musique) du 25/09/2016, "Anne Germain: une voix fantôme française" présentée par Laurent Valière avec Rémi Carémel
https://www.radiofrance.fr/francemusique/podcasts/42e-rue/anne-germain-une-voix-fantome-francaise-2907886

Émission Les mercredis surprises (France Musique), "Les Parapluies de Cherbourg au Théâtre du Châtelet" du 8/10/2014 présentée par Laurent Valière avec Natalie Dessay, Marie Oppert, Vincent Vittoz et Danielle Licari
https://www.radiofrance.fr/francemusique/podcasts/les-mercredis-surprises/les-parapluies-de-cherbourg-au-theatre-du-chatelet-4529760

Émission 42ème rue (France Musique) du 7/09/2014, "Les Parapluies de Cherbourg : Concert privé au Théâtre du Châtelet" présentée par Laurent Valière avec Michel Legrand, Claudine Meunier, Jean-Luc Choplin, Marie Oppert, Vincent Niclo, Laurent Naouri, Louise Leterme et Jasmine Roy
https://www.radiofrance.fr/francemusique/podcasts/42e-rue/les-parapluies-de-cherbourg-concert-prive-enregistre-le-3-septembre-au-theatre-du-chatelet-6296940

CD Danielle Licari par Danielle Licari (Marianne Mélodie, 2015)

CD Utopia par Slim & Litehouse (IM Slim & Litehouse, 2018)

CD French Songs par Florence Davis & Paris Jazz Big Band (2008)


Quelques conseils de visionnages :  

Coffret 12 DVD Intégrale Jacques Demy (Arte & Ciné-Tamaris, 2008)

Doc en VOD Secret voices of Hollywood (BBC, 2013)
https://westcoastburiedtreasure.com/products/secret-voices-of-hollywood-bbc-film-documentary



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