Le site Gens de la Caraïbe vient d'annoncer le décès du comédien Robert Liensol, décédé dimanche 13 février à Paris des suites d'une mauvaise chute, à l'âge de 89 ans. Le comédien et metteur en scène Samuel Légitimus rappelle dans son hommage que Robert Liensol fût le fondateur en 1954 de la Compagnie des Griots, première troupe de comédiens de couleur à être créée en France, à laquelle firent partie notamment Darling Légitimus et Bachir Touré, et qui créa entre autres Les Nègres de Jean Genet. Au cinéma, il avait joué dans plusieurs films du cinéma noir engagé, comme les films de Med Hondo Soleil O (1967) ou Watani, un monde sans mal (1998).
Il était aussi l'un des grands noms du doublage français. On le retrouve ainsi "casté" sur de nombreux grands comédiens de couleur, comme Morgan Freeman (La Puissance de l'Ange), Bill Cosby (Jack), Scatman Crothers (Vol au-dessus d'un nid de coucou), Frank McRae (1941) et même le chanteur Ray Charles dans The Blues Brothers... (Participations répertoriées par les voxophiles du Forum Doublage Francophone).
Ces dernières années, il avait participé à la création de voix de Kirikou et la sorcière (1998) et Kirikou et les bêtes sauvages (2005) pour le réalisateur Michel Ocelot. Toutes mes pensées vont pour la famille de ce grand comédien. Suivez toute l'actualité de "Dans l'ombre des studios" en cliquant sur "j'aime" sur la page Facebook.
Vendredi 18 février sera organisé à l'Université d'Angers un colloque sur le jazz vocal. De 10h30 à 12h30, Eric Fardet, musicologue animera une table ronde sur les grands groupes vocaux des années 50-60, avec la participation d'Yves Chamberland (ingénieur du son, créateur du célèbre Studio Davout), Gaétan Dupenher, et de deux amis de Dans l'Ombre des Studios: Hélène Devos (ex-Double Six, Swingle Singers, choriste, et veuve du compositeur, contrebassiste et directeur musical Guy Pedersen) et José Germain (ex-Swingle Singers, choriste, et voix entre autres de Scat Cat dans Les Aristochats).
D'autres intervenants tous aussi passionnants les uns que les autres (parmi lesquels le grand violoniste Didier Lockwood) seront présents, donc venez nombreux!
Pour le doublage d'un film comprenant des chansons, on fait généralement appel à un directeur musical chargé de choisir les solistes, de constituer une équipe de choristes et de superviser l'enregistrement.*
Il arrive parfois que les directeurs musicaux ne reçoivent pas les partitions et doivent eux-mêmes relever les notes en regardant la version originale. Est-ce ce qui s'est passé pour la chanson "Golden Afternoon" ("Par un beau matin de mai fleuri") du doublage du chef d'oeuvre de Walt Disney Alice au Pays des Merveilles (1951)? Ou s'agit-il d'un problème de mixage?
Il semble que les directeurs musicaux des différents pays aient chacun brodé les choeurs à leur manière, ce qui est d'autant plus surprenant qu'il s'agit pour la plupart de "choeurs neutres" ("lalala" et autres "ouhouh") présents normalement sur la Version Internationale (bande comprenant les bruitages, la musique) donc rarement refaits lors d'un doublage.
Je vous laisse découvrir en vidéos ces petites curiosités.
Sont communs à toutes les versions dès la réplique "Ulysse, donne-nous le La!": les vocalises des fleurs, les "pompom" chantés par une voix de basse, un choeur neutre mixte en fond (qui fait les "ouhouh"), et un choeur chanté dans la langue du pays concerné.
Version originale (à partir de 1'01): version basique, avec en plus par rapport aux autres versions des "pampam" chantés par un choeur féminin (dès 1'13), un "douliloulou" à 1'45 qui rappelle le style des années 50 (Chordettes aux US, Soeurs Etienne en France), une absence de "ouhouh" et de voix aiguës à 1'55 et lors du solo d'Alice (à 3'05)
Version française (2nd doublage de 1974): alors que dans la version originale la basse n'est pas du tout mise en valeur, on l'entend ici mieux, avec le soutien de deux voix masculines supplémentaires (peut-être une différence de mixage?), des bruitages de fleurs qui disparaissent (0'53), des fins de phrases remplacés par des "ouhou" peut-être pour des raisons de synchronisme (0'55)
Version russe: c'est un choeur mixte de "palam pam pam" (mélodie différente des "pampam" féminins anglais) qui a été rajouté dès le début (0'09), une voix d'alto "double" la soliste à 1'16
Il y a de quoi devenir... toc toc!
(*: J'aurai l'occasion de vous faire découvrir ce métier dans les prochains mois avec une belle interview de Michel et Georges Costa et un article sur l'histoire du "doublage chanté" des années 50 à nos jours illustré par de nombreux témoignages de professionnels. En attendant, vous pouvez (re)lire mon portrait de Jean Cussac (directeur musical des Disney des années 80) ici.) Suivez toute l'actualité de "Dans l'ombre des studios" en cliquant sur "j'aime" sur la page Facebook.