Donald Burke (dit Don Burke) naît le 28 février 1939 à Halifax (province anglophone de Nouvelle-Ecosse, Canada), dans une famille nombreuse (14 frères et soeurs). Chanteur, joueur de guitare et de banjo, il fait partie de deux groupes folk, The Townsmen Trio (1963-1964) puis The Don Burke Four, avec lesquels il est régulièrement invité à chanter dans l'émission Singalong Jubilee pour la télévision canadienne (CBC).
En 1965, pour ses études (il travaille parallèlement comme professeur de latin), il quitte le Canada et emménage en banlieue parisienne (à Draveil). Fréquentant le Centre Américain de Paris (boulevard Raspail), il côtoie de nombreux artistes anglophones vivant à Paris et participe à des soirées folk (Hootenannies) et des scènes ouvertes. C'est au cours de l'une de ces soirées, que le jeune harpiste breton Alan Stivell remarque Don et sa technique de "picking" à la guitare, et finit par s'en inspirer en appliquant sa méthode de jeu à la harpe.
En 1966, Don rejoint le groupe folk Les Troubadours en remplaçant définitivement le ténor Bob Smart (choriste américain qui avait enregistré les deux premiers 45T du groupe), aux côtés de Pierre Urban, Jean-Claude Briodin et Franca di Rienzo. Sa passion pour la musique folk et ses talents de guitariste et banjoïste sont un atout majeur pour le groupe.
Franca se souvient de sa première rencontre avec Don: "Il fallait trouver un nouveau ténor pour remplacer Bob Smart. On a parlé à mon mari (l'arrangeur Christian Chevallier) d'un chanteur et guitariste canadien qui jouait à des soirées folk au Centre Américain de Paris. C'était Don. On l'a fait venir pour une audition. Quand ça a sonné, j'ai ouvert la porte et mon regard n'a rencontré personne. J'ai baissé les yeux et je suis tombé sur un petit monsieur aux cheveux blonds en bataille, aux grands yeux bleus, une chemisette de bûcheron, des chaussettes blanches dans les sandales, qui m'a dit "Salut!" avec un grand sourire, comme si on se connaissait déjà. Moi qui avais une idée très esthétique du groupe, j'étais stupéfaite (rires). Christian l'a fait auditionner dans une pièce à part, il le faisait chanter de plus en plus aigu et j'entendais sa voix magnifique. Don devait partir pour accompagner Joe Dassin à L'Ancienne Belgique (Bruxelles), on lui a donné nos dix chansons sur une cassette, et lorsqu'il est revenu, alors qu'il ne parlait pas encore bien français, il les connaissait toutes par coeur."
Les Troubadours chantent "Polly Maggoo"
Le 11 octobre 1966, une dizaine de jours avant la sortie du film Qui êtes-vous, Polly Maggoo? de William Klein, Don enregistre la chanson du générique (musique de Michel Legrand) avec ses amis Troubadours.
Michel Legrand repère ainsi Don et lui propose d'enregistrer la voix chantée de Gene Kelly dans Les Demoiselles de Rochefort. Tous les autres rôles ont déjà été enregistrés (mars-avril 66), le tournage a été fait pendant l'été 66 (Michel Legrand lui-même a servi de "voix témoin" à Gene Kelly/Andy pour le tournage, et quelques uns de ses "scats" ont été conservés dans le mixage final), mais (d'après Don) pour des raisons de complexité musicale (difficultés à faire les intervalles que la musique de Legrand exigeait), Gene Kelly ne peut se post-synchroniser sur les chansons.
Don enregistre donc les chansons en français des Demoiselles de Rochefort (sous une direction assez "difficile" de Michel Legrand), puis une semaine après la version anglaise ("sans être payé" m'a-t-il précisé).
Le choix de faire doubler Gene Kelly sur les chansons (alors qu'il parlait un très bon français) a été critiqué par les puristes, mais est passé inaperçu par le grand public, preuve que cet enregistrement était réussi.
Don Burke (voix chantée de Gene Kelly): "La chanson d'Andy"
Sans être des "stars", Les Troubadours, inspirés à la fois par le mouvement folk américain (Pete Seeger, Peter, Paul & Mary, etc.) et le répertoire folklorique européen, mènent une belle carrière, pendant plus de dix-neuf ans : de nombreux disques dont quelques "tubes" (comme le magnifique "Le vent et la jeunesse" composé par Christian Chevallier sur des paroles de Jean-Michel Rivat et Frank Thomas) arrangés pour la plupart par Christian Chevallier, beaucoup de tournées, de collaborations et premières parties (pour Jean Ferrat, Graeme Allwright, Georges Moustaki, etc.) et d'émissions de télévision (dont une participation régulière aux "Bienvenue" de Guy Béart). Don estimera que ces années "Troubadours" seront les plus belles de sa vie.
Parallèlement aux Troubadours, Don compose des chansons (entre autres "L'auto-stop" pour Maxime Le Forestier), et joue dans les disques des copains : Graeme Allwright (premiers albums Mercury), Hugues Aufray (banjo à cinq cordes dans "Des jonquilles aux derniers lilas"). En 1970 et 1971, pour le film d'animation Lucky Luke : Daisy Town, il enregistre pour Claude Bolling la maquette d'"I'm a poor lonesome cowboy", la chanson "Stamp your feet" (version anglaise de "Voilà le quadrille", inédite dans le film mais présente dans le disque avec en crédit "Dan" Burke) puis les choeurs de la B.O. finale du film (mélange de choristes studio habituels (Anne et Claude Germain, etc.) et de chanteurs et musiciens anglophones vivant à Paris, avec Pat Woods en soliste).
Maquette d'"I'm a poor lonesome cowboy" (musique: Claude Bolling)
Enregistrement le 1/10/1970 avec Don Burke (chanteur soliste + guitare), Jean Stout (basse profonde), Bob Smart (ténor), Anne Germain (soprano) et Alice Herald (alto)
Il y a trois semaines, grâce à Jean-Claude Briodin, j'avais pris contact avec lui par mail et nous avions commencé à échanger (à propos notamment des Demoiselles de Rochefort), le temps ne nous a malheureusement pas permis de faire un entretien complet.
J'ai bien sûr des pensées pour sa famille, mais aussi pour Franca et Jean-Claude.
Remerciements à Philippe Crabbe & Betty Burke, Franca Chevallier et Jean-Claude Briodin.
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